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par Adeline et Romain Facy.
Philippe Meirieu, lors d’une interview parue dans La Dépêche, le dimanche 17 octobre 2021, stigmatise, sans nuance, l’instruction en famille (IEF) pour faire, à la manière de notre gouvernement actuel, la promotion d’une école républicaine laissée pour compte.
Choqués par sa vision restreinte et peu reluisante de l’IEF, nous lui adressons une lettre ouverte dont nous vous proposons la diffusion.
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Lettre ouverte à Philippe Meirieu à propos de l’instruction en famille
Monsieur Philippe Meirieu, lors d’une interview parue dans La Dépêche, le dimanche 17 octobre 2021, vous stigmatisez sans nuance l’instruction en famille (IEF) pour faire, à la manière de notre gouvernement actuel, la promotion d’une école républicaine laissée pour compte.
Nous souhaitions donc réagir à vos propos dont l’intégralité est disponible ici :
M. Meirieu, nous pratiquons l’IEF avec nos deux enfants, une vie un peu différente mais qui n’a absolument pas empêché notre intégration dans la vie locale de notre village. Nous sommes, en effet, la seule famille à y pratiquer l’IEF.
Pourtant, malgré le handicap, voire le repli, que pourrait entrainer à vos yeux, M. Meirieu, l’IEF, nos enfants ont des amis, ils pratiquent des activités, les retrouvent au parc, chez nous ou encore chez eux. Nous aussi, leurs parents, avons des amis, des amis qui nous soutiennent pour préserver cette liberté de vivre et d’apprendre autrement. L’IEF n’a pour nous rien de comparable à une cage, c’est un mode d’instruction ouvert sur les autres, leurs différences et sur le monde.
Fin septembre, nous marchons avec nos deux enfants dans les rues du centre de Strasbourg. Il est environ 15h, des enfants interpellent les nôtres. Ils sont derrière un immense portail grillagé et leur demandent de leur faire passer des marrons pour jouer pendant la récréation. Les enfants derrière la grille, curieux, se rassemblent, ils parlent avec nos enfants, ils leur demandent pourquoi ils sont, eux, de l’autre côté. Quelques échanges suivent, nos enfants ont l’habitude d’expliquer qu’ils ne vont pas à l’école et de rassurer les autres, non ils ne sont pas sans instruction. Ils apprennent différemment, c’est tout.
Nous continuons à nous promener, nous rejoignons plus tard leurs cousins. Leurs cousins vont à l’école, ça ne les empêche pas de communiquer, ça ne les empêche pas de rire et d’escalader, de nous préparer un spectacle et de se dire des secrets.
Le soir, de nouveau tous les quatre, nous assistons, devant la cathédrale de Strasbourg, à un concert de rue. Un violoncelliste que nous écoutons pendant une heure. Nous sommes tous les quatre captivés, hypnotisés par cette musique qui nous « prend comme une mer vers [notre] pâle étoile » (Charles Baudelaire). Notre fils et notre fille, subjugués, hésitent un peu puis écrivent un mot dans un cahier que le violoncelliste a mis à disposition. Ils lui décrivent leurs découvertes, leurs émotions à l’écoute de sa musique. Ils lisent aussi les autres commentaires. À la fin du concert, le violoncelliste prend un moment pour bavarder avec nous, il nous parle de son amour pour la musique et pour la peinture. Les enfants se joignent à la conversation. Naturellement. Nous rentrons en vélo dans la nuit, heureux de ces moments.
« On a beau disposer de nouvelles technologies, un élève sans pairs devant un ordinateur toute la journée ne fera jamais un enfant épanoui » ~ Philippe Meirieu[1].
Nos enfants n’ont pas regardé d’écran de la journée, ils ont découvert une architecture, une histoire, des monuments, de la musique. Ils ont échangé avec des personnes connues ou inconnues, de leur âge, plus jeunes ou plus âgées, avec lesquelles ils ont interagi avec facilité et curiosité.
Nos enfants ne sont pas timides, ils sont curieux, souvent à l’aise dans des cadres pourtant différents, ils sont eux-mêmes, ils osent poser des questions, ils n’ont pas peur de se tromper ni d’être évalués. Ils ne sont en compétition avec personne.
« Je trouve donc ça paradoxal qu’après la « pandémie », certains parents aient considéré qu’il serait préférable de garder leurs enfants à la maison. Il faut mettre en garde sur ce qui pourrait être une forme de repli sur soi qui serait néfaste pour le développement de l’enfant. Le collectif d’enfants, qu’il soit à l’école, dans des centres sociaux ou des clubs d’activités, est plus que jamais nécessaire après cette période de séparation et d’isolement » ~ Philippe Meirieu
Nos enfants ne sont pas enfermés entre des murs. Ils sont à l’extérieur, leurs terrains d’apprentissages trouvent leurs sources dans la nature, leur environnement, des rencontres, des observations, des discussions, des visites. Ils touchent, ils voient, ils écoutent, ils sentent et ils goûtent la vie. La vraie vie. Pas celle des tablettes qui servent aussi (et pour nuancer, M. Meirieu, pas de façon forcément néfaste) à l’enseignement dans les écoles et les collèges.
Pas celle non plus d’images sur des écrans qui font le buzz à la récréation. Pas celle de cette violence qui sévit et asservit.
Nos enfants pratiquent des activités avec leurs pairs, ils font des sorties. À Strasbourg, ils nous ont parlé de leurs amis, ils leur ont confectionné des cadeaux et écrit des cartes postales.
Non, ils ne sont ni muselés ni enfermés. Ils ne sont pas seuls. Ils sont confrontés à une réalité qu’ils osent questionner. Ils fréquentent d’autres enfants ou adultes qui ont su attirer leur attention par leurs passions, leurs productions, leurs personnalités. Ils ne sont pas surprotégés et subissent ou sont également témoins à l’extérieur de situations de violence psychologiques ou physiques qu’ils n’hésitent pas à interroger.
Car oui, l’IEF est une école hors les murs, c’est une école de l’ouverture, une école de la vie avec ses hauts et ses bas, ses déceptions, ses joies et ses surprises.
« Aller à l’école est l’occasion pour l’enfant de se construire, d’accéder à un autre type de connaissances en dehors des relations familiales. En ça, l’instruction à la maison n’est pas fidèle à la vocation même de l’école : apprendre autre chose que ce qu’on découvre à la maison » ~ Philippe Meirieu
Pourtant ce n’est pas l’IEF, M. Meirieu, qui a des murs mais bien l’école que notre gouvernement et vous-même semblez souhaiter pour demain. Et nous ne disons pas ces mots contre l’école de la République ni contre ceux qui y travaillent car nous les respectons.
L’école est une chance pour de nombreux enfants mais elle n’est pas la seule condition pour se construire comme en témoignent malheureusement les 700 000 enfants qui y sont harcelés.
« Nous disposons maintenant de travaux de recherche [sur les effets que la « pandémie » a eu sur les apprentissages et la pédagogie] qui montrent que la « pandémie » a accentué les inégalités entre les élèves. Selon l’environnement familial, certains enfants ont pu continuer à apprendre et progresser, pour d’autres cela a été plus compliqué » ~ Philippe Meirieu
M. Meirieu, vous ne pouvez pas comparer des parents qui ont choisi un mode d’instruction avec d’autres qui l’ont subi, parfois dans des conditions très difficiles. Choisir l’instruction en famille (IEF) est un investissement personnel fort et notre volonté de continuer à la défendre et à nous battre pour celle-ci, n’a rien à voir avec une quelconque idéologie que nous voudrions imposer à tous. C’est la liberté de choisir que nous défendons. Une liberté qui, le plus souvent, dure une année, quelques années, extrêmement rarement toute une scolarité. L’IEF peut être à la fois un passage, une pause, une expérience dans la vie d’un enfant. Un va et vient qui peut s’avérer salvateur dans certaines situations.
Et vous avez tout à fait raison quand vous dîtes ne pas être « certain que l’argument avancé par le gouvernement qui consiste à dénoncer un potentiel intégrisme religieux dans certaines familles soit très juste. Cela doit représenter une part infime des familles en IEF » ~ Philippe Meirieu. Après de multiples recherches de la part des associations et d’individus en quête de vérité, cette allégation qui s’est vue reprise comme argument principal de la part de notre gouvernement, n’a jamais pu être étayée.
En outre, soyez sans crainte, l’arsenal mis en place pour surveiller les enfants en IEF saurait, si vous faîtes confiance aux professionnels de l’éducation nationale, détecter les enfants sans interaction, enfants qui, d’un point de vue scientifique, seraient bien en peine de se développer seuls…
En revanche, soyez inquiet pour cette école de la République dans laquelle les enseignants se démènent et s’usent. Dans laquelle ils aimeraient faire vivre des valeurs pour lesquelles ils ne reçoivent que très peu de moyens et très peu de soutiens.
De nombreux enseignants nous ont soutenus, leur découragement et leurs revendications nous touchent et nous attristent car, comme nous, ce n’est pas le pouvoir qu’ils recherchent, mais le respect de l’enfant et son droit à la dignité.
« L’enfant a le droit au respect de sa dignité et de son amour-propre,
ne pas piétiner, ne pas humilier, laisser vivre sans décourager,
ni brusquer, ni presser, du respect pour chaque minute qui passe. […]
On peut imposer une discipline aux gestes d’un enfant, pas à ses idées » ~ Janusz Korczak
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Source : Lire l'article complet par Réseau International
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