De notre correspondant à Kaboul-Traduction
En dépit du manque de cash et de pénuries de médicaments et d’autres produits manufacturés, la vie à Kaboul a repris son rythme habituel. Signe du changement, des portraits du Mollah Omar et Jalaludin Haqqani sont visibles à partir du périphérique. Les drapeaux de l’Emirat Islamique d’Afghanistan sont parfois distribués par de jeunes motocyclistes et des enfants. Détail qui retient l’attention: les Taliban retirent religieusement le drapeau Afghan des bâtiments publics, le plient d’une façon similaire à celle d’une cérémonie militaire et tiennent à ce qu’ils ne touche jamais le sol.
En ce 11 septembre 2021, il a plu dru à Kaboul et une femme intégralement voilée à la TV explique dans un Anglais à l’accent britannique que les pays occidentaux ont un problème de perception lié à la représentation cinematographique biaisée et irréelle des Taliban. Netflix, Amazon et Hollywood sont mis en cause avec la prolifération de séries bidon glorifiant la CIA et montrant une image dégradée de pays comme l’Afghanistan.
Mais où sont passés tous ces héros de séries US? Ils n’ont jamais existé murmure un vendeur de fruits et légumes qui avoue suivre la série 24 Heures Chrono et le personnage fictif dénommé Jack Bauer juste pour rire et tuer l’ennui. Au passage, le jeune Afghan avoue disposer chez lui d’armes et d’un équipement plus sophistiqués que ceux montrés dans la série. Les États-Unis ont laissé une immense quantité d’armes et de matériel dans le pays. Certains de ses équipements se sont retrouvés dans les les bazars du Pakistan voisin. Le matériel le plus sophistiqué a été acquis à la tonne par des négociants chinois à la recherche d’épaves de drones, de composants radar, d’hélicoptères Blackhawk, de disques durs, de systèmes embarqués, etc. Ils parcourent le pays et ont la réputation de payer cash et sur place.
L’électricité est disponible grâce à des ingénieurs turcs mais nombre de localités connaissent des blackouts assez importants. Là encore, les kits solaires chinois font fureur même si les riches Afghans préfèrent les générateurs électriques que les militaires US utilisaient dans les postes avancés. Le 11 septembre 2001 n’intéresse pas grand monde. “C’est du cinéma aussi!”, ” une affaire américaine “, “C’est les israéliens”, ” l’Afghanistan n’avait rien à voir avec ça “. Pour les jeunes, ça n’évoque rien. Certains veulent partir rejoindre des amis installés en Europe, aux USA, au Canada et en Australie et dont les photos sur Instagram font rêver une jeunesse ne connaissant presque rien en dehors de la guerre. D’autres veulent devenir Taliban et contribuer à la reconstruction. La nuit, Kaboul ressemble à toutes les autres capitales. La paix est revenue et les forces étrangères ont fui dans le désordre. Personne n’est dupe, beaucoup reste à faire dans un pays en guerre permanente depuis quatre décennies.
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