La Presse >
(Ottawa) Le Canada a sa première gouverneure générale autochtone. « Une étape historique », s’est réjoui Justin Trudeau, mardi, en annonçant la nomination de Mary Simon, qui l’a en retour remercié d’avoir eu le « courage » de la choisir.
« Aujourd’hui, après 154 ans [d’existence], notre pays franchit une étape historique. Je ne peux penser à une meilleure personne pour être à la hauteur de ce moment », a déclaré mardi le premier ministre en conférence de presse au Musée canadien de l’Histoire, à Gatineau.
« Tout au long de sa carrière, que ce soit dans la protection de l’Arctique, comme défenseure des droits et de la culture des Inuits ou comme animatrice de radio avec CBC, Mme Simon a fait preuve de service dévoué », a-t-il enchaîné.
« Je sais que Mme Simon donnera vie à sa vision d’un Canada plus fort pour tous lorsqu’elle occupera cette haute fonction. De ses années d’expérience aux nombreux honneurs qu’elle a reçus, Mme Simon lutte depuis longtemps pour un pays juste et équitable pour tous », a ajouté Justin Trudeau.
« Mon bilinguisme est inuktitut et anglais »
Les premiers mots de la 30e gouverneure générale du Canada ont été prononcés en inuktitut.
« Je veux être claire sur une chose : mon bilinguisme est inuktitut et anglais », a affirmé Mary Simon, qui ne maîtrise donc pas la langue française, parce qu’on l’a « privée de l’opportunité d’apprendre le français » au cours de son éducation dans les écoles fédérales du Nord québécois.
Invité à se prononcer sur cette absence de maîtrise de l’une des deux langues officielles du Canada, Justin Trudeau a fait valoir que celle sur qui il a jeté son dévolu « compren[ait] tout à fait l’importance de pouvoir bien représenter tous les Canadiens ».
La principale intéressée a opiné et assuré avoir « la ferme intention » de suivre des cours de français.
En anglais, elle s’est dite « honorée », « touchée » et « prête » à être la première autochtone à s’installer à Rideau Hall pour représenter la Couronne exprimant son désir de bâtir des « ponts » lors de son discours d’ouverture.
« Je ne vois pas de conflit »
Elle emménage aussi dans la foulée de la découverte de plusieurs centaines de sépultures anonymes sur les sites d’anciens pensionnats autochtones, institutions qui ont été mises sur pied et gérées par l’État canadien, dont elle devient une figure de proue.
(…)
Elle succède à Julie Payette, qui a démissionné le 21 janvier dernier avant la fin de son mandat, dans la foulée de la publication d’un rapport détaillant le milieu de travail « toxique » qu’elle avait instauré à Rideau Hall durant son règne de trois ans.
Depuis le départ inopiné de l’ancienne astronaute, c’était le juge en chef de la Cour suprême du Canada, Richard Wagner, qui assumait certaines de ses fonctions sur une base intérimaire, à titre d’« administrateur du gouvernement ».
Justin Trudeau crée « un précédent »
La présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada, Liane Roy, a poliment exprimé un malaise par rapport au fait que Mary Simon ne soit pas apte à communiquer dans la langue de Molière.
« Le premier ministre vient de créer un précédent qui remet en cause la convention voulant que le poste de gouverneur général soit occupé par une personne pouvant s’exprimer dès sa nomination dans les deux langues officielles du pays », a-t-elle déclaré par voie de communiqué.
L’ancien conseiller de l’ex-premier ministre conservateur Stephen Harper, Carl Vallée, a été beaucoup plus incisif, manifestant son incompréhension face à la nomination d’une personne qui ne parle pas le français. « Imaginez une seule seconde la nomination d’un GG ne parlant pas l’anglais. Impensable », a-t-il écrit.
« Désolant de voir ce pays traiter sa langue fondatrice ainsi », a-t-il conclu.
La ministre fédérale des langues officielles, Mélanie Joly, qui vient de déposer un projet de loi imposant le bilinguisme (anglais et français) pour les juges de la Cour suprême du Canada, n’a pas commenté. À son cabinet, on nous a référé aux propos formulés par Justin Trudeau et Mary Simon en conférence de presse.
(…)
La désignation a par ailleurs été approuvée, comme il se doit, par la reine Élisabeth II à la recommandation de Justin Trudeau. Celui-ci aura donc nommé successivement deux femmes natives du Québec à ce poste protocolaire.
Un comité présidé par le ministre Dominic LeBlanc était chargé de dénicher les candidats pour le poste. Y siégeaient entre autres Janice Charette, la greffière par intérim du Conseil privé, Daniel Jutras, le recteur de l’Université de Montréal, et Natan Obed, le président d’Inuit Tapiriit Kanatami.
>>> Lire l’article complet de Mélanie Marquis
Source: Lire l'article complet de Horizon Québec Actuel