De “Juste Cause” à “just because”
• Description des frappes aériennes ordonnées directement par Joe Biden, contre des groupes des milices PMF (Popular Mobilization Force), soutenues par la logistique de l’Iran et organisées de l’Irak vers la Syrie contre ISIS. • Pour Scott Ritter, cette opération est complètement absurde et contre-productive. • Ritter emploie le terme “just because” (“parce que nous pouvons le faire”) pour expliquer l’opération, nous renvoyant involontairement à l’opération “Just Cause” (surnommée “just because”) de 1989. • Zénith et effondrement de la puissance US.
A la fin décembre 1989 (l’opération débuta le 31 décembre 1989 et se termina le 30 janvier 1990), les habitués et les initiés du Pentagone avaient pris l’habitude de désigner l’opération “Just Cause” que l’on préparait pour l’invasion du Panama sous le très-ironique label de “Just Because” (on le fait… “Juste parce qu’on peut le faire”). Ce n’était pas seulement une marque d’autodérision, comme on va le voir plus loin.
Pour l’heure, il se trouve que Scott Ritter, dans son texte sur l’attaque américaniste réalisée le 27 juin en Syrie contre les milices irakiennes (soutenues par l’Iran) luttant contre ISIS/Daech, trouve exactement les mêmes mots :
« Les États-Unis ont à nouveau bombardé la Syrie et l'Irak, apparemment juste parce qu’ils le peuvent, sans se soucier des conséquences. [“The US has bombed Syria and Iraq again, apparently just because it can, giving little or no thought to the consequences.”] […]
» Cela nous ramène à la question initiale : à quoi pensait le Pentagone en planifiant ces frappes, le cas échéant ? D’un point de vue militaire, elles ont fait pire que rien. En s’attaquant à des ressources qui peuvent être facilement remplacées, les États-Unis n'ont fait que fournir un motif et une justification supplémentaires pour des frappes de représailles contre des cibles américaines en Irak, perpétuant le cycle de violence que les attaques étaient ostensiblement destinées à arrêter. C’est ce qui s’est produit aujourd'hui après que des milices chiites soutenues par l'Iran ont lancé une attaque contre le champ pétrolifère d’Al-Omar, que les États-Unis utilisent comme base. D’un point de vue politique, ils se sont mis à dos les responsables du gouvernement irakien dont le soutien continu est nécessaire pour justifier leur présence en Irak – et, par extension, en Syrie.
» Mais c’est le manque absolu de conscience géopolitique qui rend l'action des États-Unis si perplexe. Il semble que les États-Unis bombardent simplement parce qu’ils le peuvent [“…It appears the US bombs simply because it can”], sans se soucier des conséquences. Nous agissons comme une bande d’adolescents irascibles qui, ayant installé un nid de frelons dans une pièce fermée, pleurent lorsque, après avoir donné quelques coups de pied, ils se font piquer par les frelons brusquement agacés. »
Ritter détaille les divers éléments et facteurs de cette attaque, dénonçant l’absence de stratégie, la tactique maladroite et contre-productive, le vide politique qui caractérisent cette opération. Par ailleurs, on peut lire les réactions virulentes des dirigeants irakiens qui, le jour précédant l’attaque, avaient délégué le Premier ministre pour assister aux cérémonies du septième anniversaire de la création de la PMF (Popular Mobilization Force), le groupe dont des éléments ont été attaqués par l’US Air Force. Sur l’air du “On se demande parfois”, Ritter ne cache pas son sentiment d’une complète stupéfaction devant un tel comportement :
« On peut parfois se demander si ceux qui planifient les frappes militaires au Pentagone ont une quelconque connaissance des réalités géopolitiques des régions qu'ils attaquent, ou si leurs actions sont guidées par un hybris démesuré teinté d’une ignorance qui les protège soigneusement de toute connexion avec le monde réel. »
De toutes les façons, l’hybris et l’ignorance sont toujours au rendez-vous lorsqu’il s’agit des militaires américanistes. Mais il nous semble qu’il y a autre chose, que n’a pas noté Ritter. Le Pentagone n’a cessé de désigner cette opération comme ayant été lancée sur ordre du président Biden, à partir d’un communiqué signé du porte-parole John Kirby et commençant effectivement, – ce sont les premiers mots du communiqué, – par cette précision « At President Biden’s direction… ». Cela donne ceci :
« Les États-Unis ont exécuté un certain nombre de frappes sur des installations ciblées “utilisées par des milices soutenues par l'Iran” qui auraient servi à lancer des attaques de drones contre le personnel américain, a annoncé dimanche le ministère de la Défense.
» “Sur ordre du président Biden, les forces militaires américaines ont mené plus tôt dans la soirée des frappes aériennes défensives de précision contre des installations utilisées par des milices soutenues par l'Iran dans la région frontalière entre l'Irak et la Syrie”, a déclaré le porte-parole du Pentagone, John Kirby, dans un communiqué. »
Nous pensons que cette précision, cette insistance extrêmement inhabituelle sont absolument volontaires et comportent une préoccupation centrale. Nous conjecturons que le Pentagone entend dégager complètement sa responsabilité en précisant que cet ordre venait directement de Biden-en-personne ; et qu’ainsi l’on a un exemple de ce que nous signalions hier, à savoir que l’état de Biden est déplorable, qu’il est de plus en plus souvent représenté par d’autres personnes (Jill Biden, Harris), mais que cela ne l’empêche pas de prendre des initiatives dont nombre d’entre elles sont largement marquées par son état de santé, sur les plans mental et cognitif.
Au fond, ce n’est peut-être pas pure coïncidence mais chronologie instructive voulue par on ne sait quelle dynamique extérieure, si nous citions dans le même texte référencé une intervention de Biden où il précise qu’il faut des F-15, sinon des armes nucléaires, « pour renverser le gouvernement », – alors qu’effectivement (!) des F-15 participaient à l’attaque contre les groupes du PMF. Un médecin observerait que la référence à l’avion de combat F-15 est un facteur essentiel… C’est de cette façon que fonctionnent les capacités cérébrales des personnes touchées, soit par la démence sénile, soit par une avancée d’Alzheimer. On a donc ce qu’on choisit, hybris pour hybris après tout, jusqu’à se rendre fou ou se confier à un homme pmroche de la démence sénile :
« Le cas Biden est complètement différent, essentiellement parce qu’une narrative a été montée, pour présenter Biden comme un président très actif (?) et triomphant, plein d'énergie conquérante et de vertus morales assurant l'énergie du pouvoir, maniant aisément la direction d’une transformation fondamentale sinon révolutionnaire du pays après le passage du monstre-Trump. Même si l’on n’ignore rien de la source des décisions prises dans le chef des diverses bureaucraties et groupes de pression, sans oublier l'inévitable DeepState, il n’empêche que Biden doit être montré autant que son état de sénilité le permet ; par conséquent, il est laissé à certaines initiatives de son propre chef puisqu’il doit paraître actif dans sa fonction.
Au niveau de la communication, cela peut faire quelques dégâts, sans doute minimes pour ses apologistes nombreux dans la presseSystème (quand il les mentionne), mais qui finissent par peser par l’accumulation et les effets en cascade… »
On aurait donc une scène caractéristique des jeux d’un pouvoir complètement sénile à Washington D.C., plus que jamais “D.C.-la-folle” à l’image du président qu’ils se sont choisis. Le « just because » de Ritter des frappes aériennes de dimanche offre alors une correspondance antinomique remarquable avec le “Just Cause” dont nous parlons au début, caractérisant la première “intervention extérieure” du Pentagone post-guerre froide. En décembre 1989, il s’agissait de se saisir d’un homme (le colonel Noriega), qui se trouvait être également président du Panama et justiciable du grand appareil judiciaire US qui ne connaît pas les frontières ; Noriega, impliqué jusqu’au cou dans le trafic de drogue, comme la CIA elle-même, grande participante-organisatrice de ce trafic mondial et dont Noriega était un agent ; par conséquent, tout cela pouvant effleurer d’un geste élégant le président d’alors George H.W. Bush (Bush-père), directeur en 1977-1978 de la CIA (eh certes, comme Poutine et le KGB-SVR, et se rencontrent les grands esprits).
Mais il s’avère bien que le “Just Cause”-“just because” n’était en aucun cas gratuit, même sans Noriega comme couverture de communication et crime organisé pour se justifier. On remontera alors à notre rubrique Bloc-Notes du 28 septembre 2007, où nous utilisions une “table ronde” de quelques experts militaires US au parler assez franc, dont le contenu était publié le même jour en Ouverture Libre, avec comme titre et comme thème : « un coup d’État américain : des experts militaires discutent de l’impensable ». Nous en reprenions un extrait éclairant d’une lumière indiscrète “un moment essentiel de l’histoire du complexe militaro-industriel :
« Il s’agit de ce moment où, alors que le communisme s’effondrait, les militaires US bloquèrent un éventuel processus de démobilisation, ou plutôt de déstructuration de la puissante structure militaires mise en place pendant la Guerre froide… »
Voici l’extrait de la table ronde, montrant dans le chef des experts qui parlent-vrai que le général Colin Powell, alors président du Comité des Chefs d’état-major, – en 1989-1990, avec “Just Cause” puis la première guerre du Golfe, – avait retenu la leçon des épisodes catastrophiques pour la puissance militaire US (démobilisation/déstructuration) de la période post-Vietnam, et surtout de ce que nous avons désigné comme « Le “Trou Noir” du XXe siècle », en 1945-1948 :
KOHN : « Considérez cet exemple flagrant de manipulation politique par l'armée : après toutes les autres guerres américaines avant la guerre froide, le pays a démobilisé son establishment militaire du temps de guerre. Même pendant la guerre froide, lorsque nous avons conservé une grande armée permanente, nous l’avons renforcée puis réduite pour les guerres régionales [Corée, Vietnam]. Mais en 1990 et 1991, les militaires, – par l'intermédiaire du général Colin Powell, qui était à la tête des chefs d'état-major interarmées à l'époque, – sont intervenus et ont effectivement empêché une démobilisation. »
BACEVICH : « Plus exactement, je dirais qu'il a empêché toute discussion sur une démobilisation. »
KOHN : « C’est exact. »
DUNLAP : « Nous avons eu une réduction de la taille de l’armée. Il y a eu des réductions d’environ 9%, en dollars et en effectifs. »
KOHN : « Mais ce n’était rien comparé à la fin des grandes guerres américaines qui ont précédé. »
BACEVICH : « Powell est explicite à ce sujet dans ses mémoires. “J’étais déterminé à ce que les chefs d’état-major conduisent le processus de l’adaptation de la stratégie militaire”, écrit-il. Il n’y aurait pas “des schémas de réorganisation militaire qui nous auraient été imposés [par le pouvoir civil]”.
» Ce n’était pas un coup d'État, mais c’était clairement un contournement de l'autorité politique civile. »
Il y a ainsi une curieuse coïncidence de langage entre le “Just Cause” de 1989, qui évite la démobilisation et affirme les structures de l’hyperpuissance militaire du post-guerre froide ; et le “just because” sardonique de Scott Ritter, caractérisant une opération militaire qui démontre tous les travers catastrophiques des engagements extérieurs US et de l’effondrement du pouvoir civil, confié par intermittences aux caprices incontrôlable d’un cerveau atteint par la démence sénile… Tout est toujours, ou plus que jamais, en place pour le Grand Final.
Mis en ligne le 29 juin 2021 à 10H45
Source: Lire l'article complet de Dedefensa.org