Trop confortablement installé dans la certitude d’un affrontement LaREM-RN, le président Macron a tout d’un coup perdu la vista. Telle aura été son erreur lors de ces dernières élections municipales et régionales : surfer trop longtemps sur la géniale trouvaille mitterrandienne consistant à diaboliser l’extrême droite afin de diviser toutes les forces n’étant pas de gauche.
Il faut dire que LaREM cumule les boulets. A force de se faire passer pour le centre-droit, tout en étant totalement soluble dans les aspirations de la gauche écolo tiers-mondiste progressiste anti-libérale et à la laïcité bien comprise, le grand écart devenait intenable. Surtout, le mauvais bilan gouvernemental a créé un traumatisme au sein de l’électorat, tandis que la personnalité jadis idolâtrée du président, personnalité qui constituait le seul ciment de LaREM, a perdu de son éclat. Au final, les rapports de force n’ont pas fonctionné comme souhaité, et la claque électorale s’avère magistrale.
Une claque, quelle claque ?
Fidèle à sa stratégie provocatrice et décalée, comme s’il se considérait capable de renverser les faits à lui tout seul, Macron n’a pas fait cas de cette dérouillée. Mais ne nous y trompons pas, il continue de faire campagne de façon très active, et toujours avec cette touche personnelle dont les livres d’Histoire un jour se rappelleront : jamais sur l’essentiel des priorités du pays, toujours sur des artifices de communicant.
Ne rions pas, au lendemain de sa raclée électorale, le président a « planifié la réouverture des discothèques, reçu le chanteur canadien Justin Bieber afin d’évoquer la jeunesse, inauguré la réouverture de La Samaritaine, le mythique grand magasin de la rue de Rivoli, mais aussi organisé une soirée à l’Elysée dans le cadre de la Fête de la musique, en présence de Jean-Michel Jarre et de Marc Cerrone » (BFMTV 22/06/21).
Un président-personnage en quête d’auteur ?
De fait, ce positionnement paillettes, entertainement et culture soap est une insulte de plus à l’adresse des électeurs qui, en l’espace de quatre ans de sa gouvernance, ont encaissé une crise sociale majeure, plusieurs confinements radicaux, une gestion pandémique très controversée, une insécurité record et, pour corser le tout, la plus forte récession européenne.
Il n’est pourtant pas impossible que derrière cette apparente désinvolture se cache une totale vacuité politique. Comment en effet un président a-t-il pu décider d’envoyer au casse-pipe électoral des ministres aussi décriés que Eric Dupont-Moretti et Gérald Darmanin ?
Comment trouver plus pirandellien d’ailleurs que cet aveu d’une source gouvernementale qui ne trouve rien de mieux pour expliquer la déculottée de LaREM (BFMTV 22/06/21) : « C’est très embêtant pour nous : la droite a regagné un espace. Le problème de Macron, ce n’est pas la gauche, c’est que quelqu’un de droite arrive à se faire un chemin » ?
Ce manque de vision politique ne fait-il pas froid dans le dos ? Le pays continue de s’enfoncer dans l’étatisation ruineuse et contreproductive, les mesures contre la pandémie nous ont imposé une double peine sanitaire et économique, l’insécurité atteint des sommets et la laïcité recule au fur et à mesure des actes criminels à la symbolique religieuse évidente. Or, face à cela, les caciques de LaREM et du gouvernement déplorent rien d’autre que la résilience d’une droite républicaine, résilience qu’ils n’avaient visiblement pas anticipée. Tout simplement parce qu’ils misaient à fond sur la bipolarisation du débat politique et la diabolisation du RN.
Une tour d’ivoire présidentielle
Les enjeux de ces élections locales ne manquaient pourtant pas. Or, telle une idolâtrie rendant aveugle tous ceux qui se sont rapprochés du président, cette panne de vision semble largement contagieuse. Parmi les nombreuses victimes touchées, on retrouve d’ailleurs des « prises » à l’ennemi tout à fait remarquables : Thierry Solère, actuel conseiller politique du président, et Renaud Muselier, le seul candidat LR à avoir reculé dans sa région, pour avoir tout d’un coup décidé de pactiser avec celui-ci.
Cette puissante cécité qui affecte les proches du chef de l’Etat est tout de même de bon augure pour les présidentielles de 2022. Un séisme d’importante magnitude s’annonce déjà, au sein des réseaux sociaux, des quelques médias réellement libres et dans le discours des personnalités politiques les plus courageuses. De nombreuses voix s’élèvent contre ce qui n’était même pas autorisé il y a encore quelques mois.
Et un espoir se fait jour : celui que Macron et ses acolytes, incapables de ressentir quoi que ce soit du sentiment populaire, ne changent pas d’un iota leur stratégie, continuant bille en tête dans la même direction, agitant le spectre de l’extrême droite d’un côté, flattant la gauche et l’extrême gauche écolo progressiste laïque anti-libérale de l’autre…
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