« Tribune des militaires : un mois après la polémique, le processus disciplinaire a débuté »
C’est sous ce titre qu’une journaliste du journal Le Monde a publié le 13/06/2020 un article plus que discutable après être allé chercher sa pitance au ministère des Armées. Que celui-ci fasse sa communication, dont acte, mais lorsque deux parties sont concernées il convient en bon professionnel de l’information de les consulter toutes les deux.
On peut d’ailleurs se demander si l’auteur a vraiment lu ce qui en fait était une lettre ouverte rédigée par un ancien capitaine de gendarmerie et signée par 27000 militaires en retraite dont 61 généraux.
Tout d’abord, elle cite des textes, « signés parfois de manière anonyme… », faisant par-là l’amalgame entre d’une part la lettre ouverte initiale qui ne concernait que des militaires en retraite et d’autre part une tribune ultérieure émanant de militaires en activité. Car c’est la lettre ouverte qui a entraîné diverses réactions qui méritent à être précisées.
Tout d’abord, des chefs de partis politiques usant de leur droit d’expression et n’engageant qu’eux-mêmes ont, soit tenté de récupérer les signataires, soit tenu des propos mensongers qui ont donné lieu à une plainte déposée à l’encontre de M. Mélanchon pour diffamation.
Ensuite, plusieurs membres du gouvernement au premier rang desquels le Premier Ministre, sont intervenus de manière précipitée, contradictoire, mensongère voire inacceptable ce qui a entrainé une plainte déposée auprès de la Cour de Justice de la République à l’encontre de Mme Agnès Pannier-Runacher pour diffamation.
Par ailleurs, des militaires d’active outragés par toutes ces réactions contre leurs anciens ont eux-mêmes produit une tribune pour s’en montrer solidaires. De même, pour des centaines de milliers de civils ayant réagi favorablement à la lettre ouverte, une plate-forme spécifique aux civils a été lancée : « Les Amis de Place d’Armes ». On peut également signaler que deux pétitions favorables à la lettre ouverte et ayant déjà recueilli plusieurs milliers de signatures ont été « débranchées ».
Quant à l’assertion selon laquelle la lettre ouverte « appelait notamment à l’intervention de l’armée », on peut se demander encore une fois si l’auteur a pris connaissance de la lettre ouverte puisque c’est justement pour éviter une telle intervention ni souhaitée mais au contraire redoutée et pourtant possible conformément à la Constitution que ce SOS a été lancé à nos gouvernants.
Pour n’évoquer que l’essentiel de cet article, n’occultons pas le présumé « linge sale à laver en famille » alors qu’au contraire, la lettre ouverte est adressée à nos gouvernants. Et puis, la « politisation » dénoncée qui est le fait des politiques eux-mêmes dont les gouvernants, puisque les militaires selon le rédacteur, n’ont fait que « sonner le tocsin ».
Pour ce qui concerne le devoir de réserve, invoqué pour tenter de faire taire les militaires, ce fût l’occasion de montrer clairement qu’il n’est pas clairement défini ! Ce qui est sans doute mieux ainsi.
Enfin, « le devenir de la cohésion et de la sécurité nationales » ainsi que « l’image des armées » mise à mal, sont invoqués par les politiques qui se cachent derrière le pianiste pour tenter de dissimuler leur incapacité à traiter des maux dénoncés par la lettre ouverte et qu’une grande majorité de Français reconnaissent. D’ailleurs, cerise amère sur le gâteau, lors d’une interview donnée à Valeurs Actuelles le 27 mai dernier par le porte- parole du gouvernement Gabriel Attal, « Le constat d’un délitement de la société est très largement partagé ». Si ce n’était dramatique, cela serait cocasse.
Après que 61 généraux aient signé cette lettre ouverte il leur a été demandé s’ils maintenaient leur signature, on croit rêver! Mais un si grand nombre à sanctionner aurait sans doute fait désordre d’où une « sélection » de 6 d’entre eux, au motif qu’ils s’étaient exprimés dans les médias.
Pour ce qui est de la suite, puisque des menaces de sanctions sont brandies, ce jour a été adressé au Premier Ministre, un « Recours administratif préalable en vue de l’abrogation ou de la rétractation de plusieurs articles du code de la défense ».
Car, ceux à qui est déléguée la souveraineté et donc l’autorité en vertu de l’article 6 de notre constitution, ne sont pas fondés à en abuser.
L’avenir nous dira où est le droit, mais il conviendrait quand même en 2021, que tous ceux qui s’expriment sur les militaires, cessent de les traiter comme des paillassons au motif d’un devoir de réserve suranné qui tenterait de les empêcher de s’exprimer. Enfin, l’évocation du grade si souvent reprochée s’impose au contraire par loyauté vis-à-vis d’anciens subordonnés préparés en leur temps pour faire la guerre, c’est-à-dire être prêts à donner leur vie en cas de circonstances exceptionnelles pour la France. Se débiner alors que la France est en danger de mort justifierait au contraire d’être blâmés par ceux qui avaient accordé leur entière confiance à leurs anciens chefs.
Les militaires n’ont pas à avoir honte de leur grade quel qu’il soit, ni à regretter ce SOS lancé « à nos gouvernants » dont certains qui n’ont jamais pris le moindre risque pour leur propre personne auraient de ce fait mérité à se monter plus discrets.
Général (2S) André COUSTOU.
Source : Place d’Armes
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