Comment en sommes nous arrivés là serait la bonne question, et comment en sortir ?
Ce matin, le journaliste soupçonné de harcèlement sexuel qui officie sur la chaîne en continu du multi-millionnaire exploiteur de l’Afrique et par ailleurs condamné, nous prodigue une longue recension des violences contre les policiers images à l’appui. Dans un souci de l’équilibre qui ne caractérise pas cette chaîne devenue la vitrine des idées d’extrême droite et de ses partisans, pas une image de main arrachée, d’œil énucléé, pas de bastonnade dans un fast-food, rien. S’il fallait faire un match, les violences policières l’emporteraient haut la main tant en quantité qu’en qualité. Mais quand on est un journaliste neutre et indépendant, on s’abstient.
Il fut un temps, j’habitais la riante citée dirigée par un futur-ex premier ministre candidat malheureux à la mairie de Barcelone et qui pour l’heure se répand sur tous les médias, tout étonné de passer pour un traître. Un dimanche matin, une malheureuse fut tuée d’une balle tirée par un abruti incapable de manipuler une arme, à une distance où aucun des deux ne pouvait se voir. Ce triste événement ne fit même pas les titres des médias dominants. D’ailleurs on ne sait pas, enfin, je n’ai jamais su qu’elles suites avaient été données. Le tireur fut-il appréhendé, jugé, condamné ? Mystère.
C’est qu’à l’époque point de BFHAINE, de Cnouille ni de LCI. De nos jours si marlène schiapa se fait un lissage on y a droit pendant plusieurs jours. En somme, ces chaînes ne sont pas que les porte-paroles zélés des multinationales et du gouvernement à leur service, elles sont aussi des amplificateurs efficaces. Mais pas dans n’importe quel sens on s’en doute. On a donc pu constater qu’elles ont soigneusement étouffé pendant des mois les violences policières commises contre les gilets jaunes mais font leur miel d’un drame anecdotique entre particuliers, par exemple, meurtres entre bandes rivales ou jeunes, ou nième féminicide, comme si de pareils malheurs n’avaient jamais, au grand jamais, existé. Ces médias privés au service du privé, jettent une lumière crue sur les vilains jeunes irresponsables qui organisent des raves (dont aucune n’a donné lieu à foyer épidémique), mais absolvent en minimisant les risques sanitaires, les agapes de luxe des beaux quartiers, dont ils font fait partie.
Ils sont devenus experts dans le 2 poids 2 mesures et les gueux à leurs yeux ont tous les torts et les privilégiés toutes les qualités.
Ainsi, aujourd’hui, avec le renfort de ces médias soutiens du pouvoir, c’est l’éloge aveugle de la police et chacun est appelé à se montrer solidaire de leur manifestation. Comme l’a, d’ailleurs, expérimenté hier soir David Guiraud de la France Insoumise lequel a subi jusqu’à la dernière minute, les injonctions d’un plateau oscillant entre la droite autoritaire, dont une Laurence Saillet hargneuse comme jamais, un présentateur faisant son coming-out de propagandiste du ministère de l’intérieur, et l’extrême droite catho avec Madame religion de la chaîne.
Pour bien comprendre le phénomène, il faut partir du postulat que les spectateurs de droite trouvent dans ce bourrage de crâne, sans le moindre début de preuve, de quoi justifier leurs propres penchants malsains et qu’ils drainent les indécis dans les mailles de leurs filets. La méthode est relativement simple, bien mélanger tout, amalgamer, prendre la partie pour le tout, omettre des faits essentiels, insister jusqu’à la nausée sur des broutilles anecdotiques, bref, sous couvert d’expertologues multi-carte, tous les travers du raisonnement fallacieux, inconséquent et sans fondement. Car non, les gilets-jaunes n’ont jamais tiré avec des armes à feu sur les policiers, non les manifestants au casier judiciaire vierge ne sont pas à mettre sur le même plan que les multi-récidivistes qui tuent. Non tous les policiers ne sont pas de braves gens qui viennent protéger la veuve et l’orphelin. D’ailleurs, de l’orphelin ils en sont parfois responsables comme à Mérignac, mais attendons les résultats de « l’enquête » et de la protection posons la question à Michel Zecler agressé par une meute de voyous en uniforme qui, faute de vidéo-surveillance l’auraient, à coups de faux en écriture publique, envoyé en prison.
Il y a donc d’un côté laxisme et de l’autre la plus grande sévérité. Depuis les gilets-jaunes, les dominants et le pouvoir à leurs ordres s’est trouvé mieux que les dealers, moins dangereux, moins risqué : le gueux en gilet jaune et s’est donné les moyens de discréditer sa parole et ses revendications à peu de frais. Il est le plus nombreux, le plus menaçant pour les privilèges.
Au phénomène amplificateur-manipulateur médiatique, il convient d’ajouter l’effet des politiques publiques mises en œuvre depuis la fin des trente glorieuses. Ces politiques résolument néolibérales et pro-union européenne, pléonasme ont, avec opiniâtreté, œuvré à la liquidation des services publics et renvoyé chacun à sa responsabilité personnelle (comme la Julie Graciani qui fait un retour remarqué dans les médias). L’argent doit revenir aux élites responsables et les gueux espérer qu’il en ruisselle un peu. Les services publics, ces horreurs qui produisent des services « non marchands », sont une injure à la religion du marché, loué soit-il ! que dis-je, un sacrilège. Grâce aux lumineuses idées du petit énervé à talonnettes, toutes les fonctions publiques ont vu leurs effectifs réduits par la très intelligente mesure du non remplacement d’un fonctionnaire sur 2 partant à la retraite et, tant que nous y sommes, dans les âneries sarkozystes et ses amis de Les Républicains, dont Laurence Saillet, le numerus clausus des médecins en guise de traitement médical, ou le travailler plus pour gagner plus dont chacun a pu vérifier les effets merveilleux. A son arrivée, les zones d’habitat à loyer modéré des périphéries inconnues des grands centres urbains, laissées à l’abandon, connaissaient déjà les trafics en tous genre. L’absence de chaînes en continu ne mettait encore pas le projecteur sur ces zones bien éloignées des « Getthos du ghotta » et d’ailleurs, la montée en puissance spectaculaire du chômage et la précarité prenaient largement le pas dans les esprits. Ces politiques destinées à toujours raser de plus près les moutons au profit de ceux qui ont déjà tout ont été poursuivies par « mon ennemi c’est la finance » et le jupiter en culottes courtes, dont quand il parle on ne sait pas qui prend le plus grand plaisir lui parlant ou lui s’écoutant parler, digne représentant de sa classe sociale le Bloc Bourgeois.
Or, si ce rasage de plus en plus près ne peut se faire impunément, il ne frappe pas toutes les classes sociales de la même manière. Il est à la base, au fondement même du capitalisme, sa raison d’être à savoir l’accumulation, et ce quoi qu’il en coûte à l’humanité et à la planète. Lequel terme d’accumulation a, comme c’est amusant, pour antonyme répartition ou redistribution. Le capitalisme n’a fait que continuer et accroître de façon spectaculaire les inégalités sociales. Et cet effet va être amplifié encore davantage par la crise sanitaire et nous pourrons y revenir en fin d’année. Alors que les dominants ont vu depuis la fin des trente glorieuses leur patrimoine augmenter, et même bondir avec la crise du covid, les classes populaires et moyennes de leur côté subissent toujours davantage précarité, déclassement et paupérisation. La fin du mois survient de plus en plus tôt. Dès lors, les banlieues se donnent des moyens de subsistance à la limite, voire carrément, hors de la légalité et organisent leur survie autour de ces moyens. Servir en stupéfiants, les riches consommateurs, qui au lieu de questionner leur propre responsabilité dans ces trafics en appellent hypocritement à défendre les policiers, ou les malheureux qui tombent dans les addictions légales ou illégales afin d’oublier leur misère sociale et économique, est une activité risquée, violente et fait de toutes les façons des morts directs ou indirects. Mais n’oublions pas les petites fraudes comme le travail non déclaré, de préférence celui qui emploie des travailleurs dits « irréguliers », peu enclins à défendre leurs droits et par conséquent taillables et corvéables à merci.
A l’autre extrémité se tiennent les gardiens de l’ordre capitaliste, marionnettes sous payées, que les politiques publiques ont bien affaiblies, mais à qui il faut donner des gages pour qu’ils continuent d’être le rempart efficace des classes aisées. Et cette masse de fonctionnaires n’a même pas la présence d’esprit de comprendre qu’elle est manipulée et utilisée à des fins proprement politiques.
Mais ce n’est certes pas chez Pascal Praud ou Olivier Marchal qu’on aurait droit à cette analyse pourtant peu élaborée. Alors, bien entendu, pendant qu’à grand renfort de reportages, de sondologie de sourcier, et de plateaux d’experts toutologues, on occupe les esprits sur les effets, les causes sont soigneusement occultées. Comme je ne suis ni énarque, ni membre du gouvernement, je ne vais pas faire la citation du Dieu se rit des hommes qui…. Je me contenterai d’emboîter le pas aux seuls partis politiques qui gardent sauf leur honneur, en refusant d’aller grossir les rangs du RN pour des raisons purement électoralistes, du centre (PS, EELV) jusqu’aux néo-centristes du PCF, dont le combat n’est ni de faire l’éloge des défenseurs aveugles des soutiens du pouvoir, ni de les fustiger, NPA, LO et FI. Ramener le débat sur les causes d’où vient la brutalité de la société et la défiance entre la population, la vraie, pas celle des beaux quartier et des plateaux télé et les autorités, police, justice qui sont par principe au service du peuple et non du pouvoir, tel est l’enjeu.
Au lieu de quoi, depuis des jours, c’est la bouillasse sur toutes les chaînes sur le mal-être des policiers comme s’il tombait du ciel.
En somme, une belle escalade mortifère en perspective, appauvrissement des mêmes continu, renforcement du pouvoir des forces violentes anti-républicaines (on en mange à toutes les sauces de la République, rempart de ceux qui n’ont eu de cesse que d’au fond la combattre) pour mater les gueux et en définitive le plus grand bien des intérêts de ceux qui détiennent tout, argent, pouvoir, voix au chapitre. Et un boulevard pour un second tour Macron /Le Pen, tout est pensé.
Et part ça, le retour de Benzema en équipe de France vous en pensez quoi ? Panem (enfin pour le moment) et circences.
Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir