ALLAN ERWAN BERGER — L’impression à la demande semble devoir être un modèle bien dans le ton de l’époque puisque le procédé met directement en relation l’imprimeur avec l’acheteur, ce qui supprime deux intermédiaires – le distributeur et le libraire – et réduit les coûts de stockage à néant. Pas d’invendus à craindre, et donc pas de pilon. En conséquence, les prix se réduisent et les marges des acteurs encore présents dans le processus s’en retrouvent renforcées. Pour un éditeur et un imprimeur voulant offrir tous deux de la qualité, c’est pain béni : ils offrent à l’achat des livres beaux et solides à des prix sensiblement inférieurs à ce qu’ils auraient été à l’issue d’un circuit de production traditionnel. Pour peu que les frais postaux ne soient pas épouvantables, ça devient carrément le bonheur.
Personne ne regrettera le transporteur, qui souvent fait la loi en imposant ses marges léonines, mais l’on sera en droit de regretter la disparition du libraire, un professionnel qui s’active, dans cette affaire, d’abord par amour du livre plutôt que dans le but de se payer une troisième Lamborghini – à celles et ceux qui, réagissant à la mention de cette marque de véhicules, suggéreraient que j’exagère un poil, je répondrai que je sais, et que je n’oublierai jamais, ce que j’ai vu garés dans le parking privé d’un éditeur de renom : plusieurs vies d’ouvrier imprimeur n’y auraient pas suffi… et ne disons rien du char médiocrement pourri qui sert de moyen de transport au libraire commun, comme cela nous n’aurons pas à détailler dans quel genre d’épave se traîne un auteur.
Un second avantage de l’impression à la demande – et celui-là ne sacrifie personne – est la liberté entière de l’éditeur : enfin il peut se permettre de promouvoir et de lancer des titres qui, bien qu’étant de haute qualité, ne trouveront pas un public gigantesque. Car cela ne coûte presque rien de produire une curiosité qui générera seulement dix achats par an. Ce n’est plus une aventure financière ! Voici enfin que la contrainte de ne pas se planter dans le choix éditorial disparaît sous terre. On ne regrettera pas ce vilain monstre, dont les actions s’apparentaient furieusement à de la censure, le résultat étant, ici comme en journalisme, que l’éditeur n’édite que ce que les autres éditent. Adieu et bon débarras, et vive la liberté.
Amazon ne s’y est pas trompé, qui offre sa surface et sa domination planétaire à tout auteur désireux de se croire lisible : son service CreateSpace est des plus séduisants, et ELP éditeur y proposera très bientôt quelques titres bien teigneux, bien nerveux, tout à fait dignes de trouver la gloire.
Pour ma part, comme je suis un rebelle qui n’aime pas spécialement les géants du village global et que je me penche toujours avec bienveillance sur les productions locales, j’ai été tout à fait ravi d’essayer l’impression à la demande avec un imprimeur basé en Belgique, capable, pour des coûts de production fort raisonnables, de délivrer des ouvrages de belle facture. Je sais ici que mon argent et celui de mes lecteurs n’ira pas faire la bamboula dans un paradis fiscal aux eaux turquoises et à la végétation tropicale : il restera bien sagement en Belgique, ce qui n’est déjà pas si mal.
Voici donc, de ma production, trois titres que je vous propose d’acheter ensemble pour économiser sur les frais de port. Ces trois titres, j’en suis fier ; je sais qu’ils présentent de l’intérêt, les gens qui les ont lus en numérique en sont contents au point que l’on m’a même parfois envoyé des messages, ce qui m’encourage à écrire encore. Que demander de plus ? Une Lamborghini ? Quelques bonnes pizzas suffiront.
Trois grandes figures de l’ouest
Je me suis lancé dans ce recueil un soir d’écœurement, après que j’eus avalé de travers l’indigeste nouvelle de trop. Il s’agissait d’une de ces innombrables injustices dont sont victimes les migrants. Je me suis dit : « À quoi bon râler encore ? On n’est approuvé que par les convaincus ! Écrivons plutôt une histoire qui touchera plus de gens. Je suis certain que ces putois qui nous gouvernent seraient capables de foutre en tôle jusqu’au pape s’il se présentait incognito. Alors pourquoi pas Merlin ? » Et ce fut Merlin au Diable.
Quelque temps plus tard, remonté à bloc contre un président de la cinquième république encore plus menteur et immoral que le précédent (mais moins que le suivant), accablé par les discours tenus sur le grand projet du Lyon-Turin, et épouvanté par ce que j’entendais à propos de cimenteries qui auraient été autorisées dans un grand parc naturel italien, j’eus le désir de mettre en scène les combats pour la protection de ce que, depuis, des gens indignés ont appelé avec bonheur une Zone À Défendre. L’aéroport de Notre-Dame-des-Landes n’était pas encore sous les feux médiatiques, et le concept semblait ne pas devoir nous toucher de sitôt. Je me suis donc dit : « Il s’agit là de politique-fiction, allons-y à fond dans l’énorme, on ne risquera pas d’être rattrapé. » Erreur magistrale : la réalité galope toujours plus vite que n’importe quelle fiction ! Mais comme j’ai convoqué les Morgan, qui sont des êtres mythiques de la mer bretonne, afin de nous aider dans un combat contre des bétonneurs, et que les Morgan ne sont pour l’instant pas encore sortis de l’eau, cette histoire des Océanides est encore en avance sur son temps, même si les modalités des opérations de résistance entreprises dans ce récit ressemblent comme deux gouttes d’eau à ce qui se passe dans le bocage nantais.
Enfin, ayant sous les yeux ces deux récits un tantinet pugnaces, je me suis dit que je tenais là quelque chose comme un recueil, et qu’il fallait que je l’achève en illustrant la geste d’une troisième des grandes figures de l’Ouest français : l’Ankoù. Je mis en scène ce personnage dans un hôpital public en cours de dépeçage pour satisfaire les appétits du privé. Il n’était pas encore prévu de supprimer, comme l’a annoncé Manuel Valls récemment, 22.000 postes dans la fonction publique hospitalière d’ici 2017 ; aussi pensais-je naïvement que j’écrivais là de belles outrances. Las, la politique politicienne est encore plus pressée de nuire que la plus avide des réalités néolibérales. Mais bon, l’Ankoù me soutient, et il soutiendra longtemps cette belle histoire où l’on pleurniche car je l’ai installé au cœur profond de l’être humain, là où palpite l’amour et où nulle avidité ne prévaut face à la compassion. Yvon, l’Ankoù et Marinette vous en mettra plein le museau et radoucira votre âme de militant-e rebelle, zadiste et porté-e sur la morale.
Pour lire des extraits de ce recueil et le commander, soit en numérique, soit en papier, c’est par ici.
Histoires de ténèbres et de lumière
Il est toujours agréable de voir les protagonistes d’une affaire quelque peu ténébreuse s’en sortir par le haut. Raison pour laquelle, si les Ténèbres sont légion, il n’existe qu’une Lumière, universelle et peinarde. Ceci énoncé à l’écart de toute intention prosélyte ; je ne suis pas un bondieusard.
Le recueil aligne des tableaux de quelques-unes des principales situations que l’on peut traverser lorsqu’on progresse dans des souterrains. Comme il est question d’espoir, d’histoire et d’émotions et pas de tourisme scientifique, je me suis cantonné à mettre en scène des lieux creusés ou aménagés par l’être humain, et j’ai laissé de côté les gouffres.
Dieu et le Diable, Pan, Lucifer et Dionysos savent, Apollon m’en soit témoin, que j’en connais un sacré rayon là-dessus. Je me suis terriblement contenu pour ne pas élucubrer plus que nécessaire, ce qui fait de ces récits des évocations légèrement en-dessous de ce que peut produire la réalité lorsqu’on ne la filtre pas. Car sous terre, mes amis-amies, l’esprit se lâche parfois en grand ! Il suffit d’une fois, d’une seule fois où quelque chose dérape du côté de l’inconscient et des chimères, mais cette fois-là vous grave et fait de vous un arpenteur de tunnels un tantinet plus aux aguets que ses camarades. On vous regarde en coin, vous regardez tout le monde en coin aussi. C’est amusant et instructif. Bon, la plupart du temps, il ne se passe rien que de très convenu mais parfois c’est carnaval. Et qui s’en plaindrait ?
Voici donc des squelettes et des chambres secrètes. Voici des souterrains oubliés depuis des générations, et où peina la classe ouvrière. Voici une bête jetée par son maître dans ces oubliettes si commodes. Voici une terreur qui fit hésiter jusqu’aux nazis, et que les villageois du cru ont domestiquée par un rituel de charité. Voici une fête délirante et pseudo scientiste si délicatement rétro que l’on pourrait croire qu’un studio Ghibli l’aura dessinée, avec ses statues et ses toits pointus, ses carillons et ses fontaines. Voici enfin la puissante réalité qui s’impose comme un léger voile peinard et lumineux sur toutes les imaginations ésotériques accablées d’ombres.
Et pour lire tous ces moments si magiques, il suffit de cliquer sur ce lien et de se laisser porter, soit vers le numérique, soit vers du papier.
Deux petits romans étranges
Rien ne vaut une bonne petite victoire éclatante des humains sur les monstres. Raison pour laquelle mes histoires finissent bien. Mieux vaut être prévenu-e : avec Berger, souvent tout finit par un baiser.
Ces deux petits romans sont nés, l’un d’un rêve, l’autre d’une vision. Le rêve : je navigue dans un quartier peuplé de fantômes, et les fantômes ont terriblement peur de moi. On m’assaille, on me repousse, et les pigeons terrorisés me giflent dans leurs envols assourdissants tandis que crament les crématoires. La vision : au pied d’un clocher destiné à sauver des vies aux nuits de tempête, un adolescent demeuré pousse des rugissements tandis que sa mère se masse les reins en regardant les falaises. Le rêve : un parchemin écarte deux maisons, et ouvre un passage sous le nez même d’un ange. L’Éternel sauve, les innocents sont justifiés, et le témoin se barre pour ne pas se faire écraser par le portier en colère. La vision : des chiens vont et viennent, la nuit, gémissant dans la ruelle d’un hameau perdu au milieu d’une forêt immense, tandis qu’au loin une horreur triste rôde et hurle. Le rêve ? J’en ai marre de me plier aux usages desséchés d’un monde en proie à l’avidité, et je le dis à l’être que j’aime. Tous deux nous commettons un manifeste, et le public est bien content que nous nous tenions si mal. La vision ? Des jeunes gens se rejoignent au cœur d’une tourmente, et replient sur eux la couverture des vérités ; ils s’en enveloppent, et tout est sauvé.
Pour sourire et vous mettre à chanter à tue-tête l’Internationale au grand désespoir des voisins, suivez ce lien et aussi celui-ci, et vautrez-vous dans mes Deux petits romans étranges qui n’attendent qu’une chose : qu’un public bienveillant les approuve, parce que merde à la fin, ici ce n’est pas toujours le Purgatoire.
L’ensemble fait 30 euros en papier, et 10 euros en epub. Vous ne risquez pas grand’chose à commander le trio, et vous économiserez sur les frais de port. Allez, lâchez-vous, faites vivre le petit commerce !
Source: Lire l'article complet de Les 7 du Québec