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par Karl-Jürgen Müller.
Qu’est-ce qui peut bien pousser un citoyen habitant un pays d’Europe centrale à se prononcer sur la Russie et ses relations avec l’Occident ? Et à émettre une opinion divergente de celles, plus courantes, que l’on peut lire, entendre et voir dans les médias ?
C’est qu’il s’agit d’abord d’une confrontation avec un journalisme politisé, ce qu’on peut également voir à l’œuvre ici. Ensuite intervient également une sorte de sens de la justice, même si ce mot est trop souvent utilisé à tort et à travers. Eh oui, on peut ne pas trouver normale la façon dont la Russie et sa politique sont globalement traitées en Occident. Non pas parce qu’en Russie tout va très bien – la perfection n’existe nulle part dans le monde.
Mais parce qu’en grande partie, ce qui se raconte sur ce pays n’est pas vrai. Parce qu’il est révoltant de constater à quel point, quand il s’agit de la Russie, on pratique le système « deux poids-deux mesures » : alors que l’affaire Navalny fait presque quotidiennement les gros titres, celle de Julian Assange se fait l’objet d’une omerta quasiment mortelle. Manifestement, l’objet de cette campagne n’est pas la vérité, mais le pouvoir ; ou plus précisément, cette campagne est le porte-parole d’aspirations politiques d’une lutte pour le pouvoir.
Selon les derniers chiffres publiés le 26 avril 2021 par l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI), en 2020 les États-Unis ont officiellement consacré 778 milliards de dollars à leurs dépenses militaires (4,4% de plus qu’en 2019) alors que la Russie n’y a affecté que l’équivalent de 61,7 milliards de dollars (2,5% de plus qu’en 2019). À cela, il faut ajouter que les États-Unis disposent d’environ 800 bases militaires à l’étranger, tandis que la Russie en compte moins de 20.
La Russie n’a jamais prétendu diriger le monde, contrairement à l’actuel gouvernement américain ainsi qu’à nombre de ses prédécesseurs, traînant à leur suite divers autres États occidentaux. Sur ce point précis, tous ceux qui n’entendent pas être dominés deviennent gênants.
En politique, et particulièrement en politique internationale, le pouvoir prend de plus en plus le pas sur le droit et c’est là un véritable recul de la civilisation, un danger réel de rechute dans la barbarie.
Eviter une guerre mondiale, une question de survie
Par-dessus tout, il y a une question existentielle qui consisterait à éviter une nouvelle guerre, peut-être même une guerre mondiale, en Europe et dans le monde. « At the end we lucked out » (au fond, on a eu de la veine) tel a été le sobre commentaire de Robert McNamara, le secrétaire américain à la Défense de l’époque. Il voulait dire par là que le monde avait eu beaucoup de chance de ne pas sombrer dans une guerre nucléaire à l’échelle mondiale en 1962 lors de la crise des missiles de Cuba.
« La veine » – qui a en fait été due à l’action de quelques figures politiques de l’époque qui ont évité la guerre – en s’opposant à de nombreux « faucons » – parmi eux le commandant Petkov, un des officiers qui n’a pas appuyé sur le bouton au moment décisif. C’était il y a presque 60 ans. Les enseignements de l’époque sont-ils tombés dans l’oubli ? Après la guerre d’agression menée par l’OTAN contre la République fédérale de Yougoslavie, qui a violé le droit international, Hans Bachofner, commandant de division suisse décédé en 2012, a déclaré : « La guerre est de retour – mais face à elle nous avons perdu le respect ».
Nous le savons fort bien : le bellicisme occidental, qui a été l’une des principales causes des deux guerres mondiales, s’est vu réinterprété en tant que « combat pour la liberté » tandis que la lutte pour la survie de peuples entiers a été, elle, dépeinte comme une « agression » de leur part.
Pour quelle raison l’Allemagne aspire-t-elle à devenir un pays de la ligne de front ?
Dans son dernier livre, « Anmassung – Wie Deutschland sein Ansehen bei den Russen verspielt » (Arrogance – Comment l’Allemagne joue sa réputation auprès des Russes), Alexander Rahr, qui depuis des années a fait de la Russie son sujet de prédilection, détaille les assertions d’un certain du diplomate russe Volodia. Ce dernier ne comprend pas pourquoi l’Allemagne a rejeté les nombreuses et avantageuses offres de coopération proposées par Vladimir Poutine, depuis son entrée en fonctions en 2000. En revanche, de larges secteurs du monde politique et des médias allemands ont fait de l’Allemagne le fer de lance de la campagne antirusse.
Les Verts allemands ont inscrit dans leur programme électoral (cf. Horizons et débats n° 9 du 27 avril 2021) qu’ils souhaitaient, lorsque leur parti serait aux commandes, soutenir le « mouvement démocratique en Russie ». Citons pour mémoire la formulation similaire employée par Victoria Nuland, femme politique américaine, à la suite du coup d’État en Ukraine : 5 milliards de dollars ont par la suite été investis dans ce pays, destinés au « soutien de la démocratie ».
Dans son Discours sur l’état de la nation de cette année, le président russe a formulé les points essentiels de l’orientation de la politique extérieure russe (voir page 5 de cette édition). Son texte est accessible à tous. Les réactions des médias germanophones à ce discours n’ont pas été formulées dans une optique de remise en question :
« Poutine nous débite un conte de fées : l’Occident devrait démythifier la propagande », titrait le Handelsblatt dans son édition du 22 avril ; « Comment Poutine met en scène ses menaces contre l’Occident », le même jour, dans le Augsburger Allgemeine Zeitung ; « Poutine veut éliminer ses opposants, acheter la loyauté et garder la Biélorussie sous contrôle », selon la Deutsche Welle, la chaîne de télévision étrangère allemande, le 22 avril. « Des paroles menaçantes et de belles promesses » selon les Salzburger Nachrichten du 21 avril, « Illégal et inhumain » le commentaire du Neue Zürcher Zeitung du même jour, qui – comme tant d’autres – a focalisé son attention non pas sur le contenu du discours de Poutine, mais totalement sur la Cause de Navalny.
La Russie ne mâche plus ses mots
En lisant les déclarations officielles russes de ces derniers jours et semaines, on ne manque pas d’y retrouver des termes plus explicites que les années précédentes. Dans le discours du président russe aussi, les termes sont directs. La Russie, l’Occident devrait le réaliser, ne capitulera pas et les multiples tentatives entreprises pour provoquer un changement de régime en Russie n’amélioreront pas la situation.
Les populations, à l’Est comme à l’Ouest, peuvent-elles encore espérer que les choses s’améliorent ? Tout cela ne présage rien de bon. Il est donc d’autant plus important de rester (ou de devenir) un élément actif et de faire entendre sa voix en faveur de la paix.
Fin 2014, 60 personnalités allemandes ont publié dans l’hebdomadaire Die Zeitung appel intitulé « Le retour de la guerre en Europe ? Pas en notre nom ! »
Parmi les signataires figuraient l’ancien président allemand Roman Herzog (CDU) ainsi que l’ancien chancelier allemand Gerhard Schröder (SPD). On peut entres autres y lire que : « Nous appelons les médias à remplir leur devoir d’informer sans préjugés de manière plus probante que par le passé. Les éditorialistes et les commentateurs diabolisent des nations entières sans avoir pris suffisamment conscience de leur histoire ». Depuis lors, la situation ne s’est pas améliorée. Bien au contraire. Par contre, ce genre d’initiative est devenu rarissime. Ils sont nombreux, ceux qui peuvent et doivent avoir la volonté de changer tout cela.
Deux informations allant de pair
Face aux 2 billions de dollars de dépenses militaires …
« L’année dernière, les dépenses pour l’armement ont continué à augmenter dans le monde entier. Comme l’a fait savoir SIPRI, l’Institut pour la paix à Stockholm, les dépenses militaires ont augmenté de 2,6% 2 billions de dollars. C’est la plus grande hausse depuis 1988, moment où on a commencé à compter les dépenses. Le Coronavirus n’a donc pas eu d’impact remarquable sur les dépenses mondiales pour l’armement. Mais il faudra voir si les dépenses des pays se maintiendront sur la deuxième année de la pandémie. Avec 780 milliards de dollars de dépenses, les États-Unis se trouvent toujours à la tête et sont donc responsables de 39% des dépenses mondiales. L’Allemagne a augmenté son budget de 5,2%, ce qui équivaut à 53 milliards de dollars. D´après SIPRI, il s’agit de la plus grande augmentation en pourcentage parmi les dix premiers pays.
… il est évident que la peur de « confrontations sérieuses » monte
« Heiko Maas, le ministre des Affaires étrangères met en garde face à une confrontation vis-à-vis de la Russie. Maas, membre de la SPD, a dit à la télévision allemande ARD que de nouvelles sanctions de l’UE et des états occidentaux en ce qui concerne Alexeï Navalny et le conflit entre l’Ukraine et la Russie auraient montré leur détermination. Vladimir Poutine aurait pris conscience du risque d’autres sanctions. Mais M. Maas critique les « experts » qui demandent encore des sanctions plus fortes. Toujours est-il qu’il faut se demander si M. Navalny en profite vraiment. Maas est convaincu qu’ajouter des sanctions ne serait dans l’intérêt de personne et créerait des provocations permanentes et des conflits sérieux – surtout en Europe. Annalena Baerbock, co-présidente des Verts et candidate à la chancellerie, s’est prononcé en faveur d’une attitude plus forte vis-vis de la Russie et ne veut plus soutenir le tuyau Nord Stream 2 qui doit traverser la mer Baltique ».
sources : Deutschlandfunk
traduit par Horizons et débats
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Avec Heinrich Böll, Petra Kelly et Gert Bastian j’ai manifesté à Mutlangen contre Pershing II. La coalition des Verts avec la SPD (Fischer et Schroeder) a en principe existé à cause de moi. M. Schroeder voulait une coalition avec la CDU. Plus tard, j’ai regretté cette décision. Non seulement à cause de l’Agenda 2010, mais aussi à cause de la participation allemande à la guerre en Yougoslavie qui violait le droit international et qu’imposait en principe Joschka Fischer et les Verts. Depuis, les Verts qui au début étaient pacifistes, sont devenus belliqueux. Il serait plus logique que la fondation Heinrich Böll se nomme plutôt Fondation du Général Clausewitz.
Annalena Baerbock, la nouvelle « candidate à la chancellerie », est une représentante de premier plan de ces Verts belliqueux. Elle manifeste son accord avec des guerres qui violent le droit international, veut un armement plus fort, d’autres livraisons d’armes, l’encerclement de la Russie par les États-Unis, et bien sûr, est contre le tuyau de Nord Stream 2. Jens Berger en a rassemblé des citations sur le blog Internet Nachdenkseiten : https://www.nachdenkseiten.de/?p=71720
En pleine crise de la frontière russo-ukranienne, l’idée que la chancelière manipulée par les États-Unis sera une Verte est l’horreur pour moi.
Autre chose : il serait impensable que quelqu’un se trouverait à la tête de VW, Daimler ou BASF qui n’a aucune expérience dans ce domaine et n’a jamais été gérant dans une petite entreprise, cadre ou membre du comité directeur dans une entreprise plus grande. Mme Baerbock, les Verts et beaucoup de leurs adhérents journalistes sont évidemment d’avis qu’il suffit d’avoir été membre de la fractions des Verts et d’avoir deux enfants pour devenir chancelière de la plus grande nation économique de l’Europe.
Voici Wilhelm Busch qui me vient à l´esprit :
« Si quelqu´un
qui sait à peine grimper sur un arbre
pense être un oiseau,
il se trompe beaucoup ».
Oskar Lafontaine, ancien président SPD et co-président Die Linke, sur facebook,
source : https://www.zeit-fragen.ch
traduit par Horizons et débats
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