Le macronisme, un étrange concept qui s’est invité dans notre paysage politique, a finalement montré son vrai visage, au grand désappointement de ceux qui y ont cru un instant.
Lorsque, un certain 10 octobre 2018, 2 chauffeurs routiers, Éric Drouet et Bruno Lefèvre lançaient un appel « au blocage national contre la hausse du carburant », proposant aux français d’arborer un gilet jaune en guise de reconnaissance et de soutien, ils n’imaginaient sûrement pas qu’ils allaient donner naissance à un mouvement qui allaient prendre tant d’ampleur qu’à la tête de l’état, lequel méprisait d’abord avec une certaine arrogance l’initiative, Macron finirait par céder quelques miettes pour tenter trop tardivement d’éteindre l’incendie.
Pour revenir à Éric Drouet, précisons qu’une presse malveillante avait fait courir le bruit qu’il avait voté Front National, ce que l’intéressé a démenti fermement, d’autant que Jean Luc Mélenchon l’a récemment couvert d’éloges, faisant un intéressant parallèle, avec l’homonymie d’un autre Drouet, celui-là même qui avait signalé, en juin 1791, la fuite de Louis XVI à Varennes, et dont Napoléon avait dit : « sans vous, l’histoire de France aurait été toute différente ». lien
Mais revenons à l’origine du mouvement.
Pour être tout à fait précis, c’est dès le début 2018 que des citoyens, excédés par la mesure de limitation de vitesse à 80 km/h, et dénonçant aussi le coût de la vie, avaient utilisé le gilet jaune en signe de ralliement d’un mouvement appelé « Colère ». lien
Plus tard, le 29 mai 2018, une certaine Priscillia Ludosky avait lancé une pétition en ligne réclamant une baisse des prix du carburant à la pompe, pétition qui atteignit rapidement le million de signatures à la fin novembre. lien
Dans une lettre adressée à Macron, elle avait répondu point par point aux éléments avancés par ce dernier, regrettant avec humour qu’il ait fallu 7 mois à l’intéressé pour réagir. lien
Depuis, le mouvement a pris de l’ampleur, il y a eu des morts, des blessés, dus en grande partie à la violence policière, mais aussi à des accidents.
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Se pose maintenant pour certains la question de la structuration ou pas de ce mouvement : à Perpignan, par exemple, ils se réunissent en congrès le 13 janvier prochain. lien
Mais d’autres n’y adhèrent pas, craignant qu’en se structurant, le mouvement puisse être l’objet de tentatives de manipulations venues du gouvernement. lien
D’autres se posent la question de faire une liste aux européennes, arguant qu’un français sur deux le souhaite…lien
Ajoutons pour la bonne bouche que le mouvement GJ a franchi aujourd’hui les frontières en s’élargissant maintenant à 23 pays dans le monde. lien
Difficile, encore aujourd’hui, de dire « qui » sont les gilets jaunes, et s’il faut en croire Benoît Coquard, un sociologue bourguignon qui, commençant une enquête sur la question, est arrivé à caractériser ce mouvement comme une fronde généralisée contre des conditions de travail et d’existence de la majorité de la population…même si au départ, il y n’avait que la question des taxes sur les carburants.
Il évoque un « mouvement interclassiste », composé autant de jeunes que de retraités, signe d’une cohésion intergénérationnelle.
Il a constaté aussi qu’il s’agit de gens qui interviennent habituellement peu dans le débat politique, qui ne manifestent pas, ne sont pas syndiqués, rarement encartés dans un parti, et souvent abstentionnistes.
Leurs colères sont souvent portées, d’après le sociologue, par les inégalités entre riches et pauvres, entre « ceux qui se gavent » et « ceux qui bossent », la suppression de l’ISF étant souvent évoquée, mais aussi les bas salaires, avec comme accompagnement musical une playlist qui va de Zebda à la Marseillaise, en passant par Vegedream.
Les élections européennes seraient pour certains l’occasion d’officialiser leur existence, alors que d’autres n’y voient qu’une légitimation d’une pseudo démocratie.
Le reste de son analyse est sur ce lien.
Suivant les organismes de presse, le pourcentage des français qui soutiennent le mouvement fluctue, mais globalement, on peut dire qu’ils sont au moins 3 français sur 4…ajoutant qu’être gilet jaune, ce n’est pas forcément faire barrage, ou manifester, mais c’est aussi en affichant son soutien…gilet jaune sur le parebrise, apportant de la nourriture, alimentant une cagnotte, partageant des publications sur les réseaux sociaux, soit autant de façons de montrer son engagement. lien
Ils ont établi une liste des revendications provisoires qui vont de l’établissement d’un salaire maximum fixé à 15000 €, au fait qu’aucune retraite ne soit inférieure à 1200 €, en passant par zéro SDF, le retour de l’ISF et la fin de la politique d’austérité. La liste complète de leurs revendications est ici.
A l’extrême droite, on tente maladroitement de tirer les marrons du feu, tel un certain Philippot, exilé du Front National, qui a franchi une étape supplémentaire, déposant la marque « les gilets jaunes » en vue des européennes. lien
Du coté de la présidence de la république, après avoir tenté à maintes reprises d’ignorer ou de minimiser l’importance de la colère, on a fini par faire quelques concessions, plus pour tenter de regagner un peu de popularité que pour répondre aux exigences du mouvement, et reprenant une vieille idée, décidant de lancer une consultation.
« Si vous voulez enterrer un problème, nommez une commission », avait suggéré à l’époque, un certain Georges Clémenceau. Lien
Depuis, les dirigeants de tout bord n’ont cessé de créer des commissions… et la consultation que Macron a lancé, via les mairies, a probablement vocation à calmer le jeu face à ce « péril jaune ».
Cette consultation, lancée en début d’année, est destinée à récolter les suggestions du « bon peuple », mais en limitant le champ d’investigation à quelques domaines, le président de la république a déjà fixé les cadres de l’exercice.
Il s’agit donc probablement d’une tentative destinée à étouffer la contestation, qui ne fera certainement pas beaucoup de dupes.
Les vœux 2009 du chef de l’état n’ont manifestement rien calmé, car en prétendant être prêt au dialogue, tout en affirmant ne pas dévier de sa ligne, Macron a, une fois de plus, appliqué sa devise « en même temps » maniant ainsi la plus grande incohérence.
Tout en fustigeant les gilets jaunes, sans jamais les nommer, les accusant de véhiculer la haine, et leur contestant le droit de « parler au nom du peuple », il a accumulé les contrevérités, s’abrogeant, au nom de la « vérité, la dignité, et l’espoir », le droit de cadrer le « grand débat national ». lien
Il rappelle sa légitimité, oubliant l’impopularité latente dont il est l’objet depuis de longs mois, et oubliant aussi qu’il n’a été élu que par défaut, car avec ses 18% des électeurs inscrits au 1er tour, s’il a gagné le poste suprême, c’est aussi grâce à un rejet de l’extrême droite. lien
Toujours est-il que, pour lancer ce débat, Macron a décidé d’écrire une lettre à tous les français…il semble que cette lettre n’aura pas une grande destinée, car les GJ proposent de la renvoyer à l’expéditeur, sans la timbrer.
Sans lire dans le marc de café, on voit bien que les choses sont asses mal engagées du côté du gouvernement, car nous avons d’un côté un président dans le déni apparent, mais qui rit jaune, et de l’autre, un mouvement, soutenu par 3 français sur 4, qui pose en préalable le départ du chef de l’état et qui a décidé de ne pas lâcher.
Dernier épisode en date, le 2 janvier, 30 personnes, avaient décidé de poser des bougies place de la concorde, en hommage aux morts et blessés du mouvement, et les forces « de l’ordre » ont arrêté Éric Drouet, sans motif légal, aucune personne du petit groupe ne portant de gilet jaune, sans la moindre pancarte, juste portés par le désir de commémorer leurs morts. vidéo
Bien malin qui pourra prévoir comment cela finira, car comme dit mon vieil ami africain : « le visage inspire du respect, la nuque se fait insulter ».
Source: Lire l'article complet de Les 7 du Québec