Des syndicats et associations de journalistes, confédérations syndicales et organisations de défense de droits humains font appel au pouvoir de censure du Conseil constitutionnel. L’Assemblée nationale française a adopté ce jeudi 15 avril en dernière lecture un projet de loi «Sécurité globale» en pleine situation de crise sanitaire où des lois exceptionnelles et liberticides régissent déjà la vie des citoyens avec la crise sanitaire.
La nouvelle loi donne plus de droits à la police nationale ou municipale et aux agents de sécurité et coupe le pied de la liberté fondamentale des journalistes, mais aussi des citoyens, celle de documenter et d’informer, même si la diffusion de photos de forces de l’ordre n’est plus explicitement condamnée.
La loi «Sécurité globale» est arrivée à la fin de son processus parlementaire. Cela veut dire que la majorité des députés ont voté pour. L’article 24 de cette loi interdisait dans sa première forme aux citoyens et même aux journalistes de filmer dans la rue (un lieu public) les interventions de la police ou de couvrir des manifestations dirigées contre le pouvoir politique. Quelque peu modifié, il reste cependant flou. «L’article 24, même réécrit, sera utilisé pour intimider les manifestants. On va pouvoir les placer en garde à vue en les accusant d’avoir tenté d’identifier les forces de l’ordre pour porter atteinte à leur intégrité. Le but, c’est d’éviter que les images des manifestations soient diffusées alors que ce sont ces images qui permettent de rétablir la vérité», explique David Van Der Vlist, avocat au barreau de Paris et membre du SAF (Syndicat des avocats de France), cité par 20 minutes.
Comme l’indique La Quadrature du Net, «le Sénat [avait] voté le 18 mars 2021 à son tour la proposition de loi sur la «Sécurité globale», cinq mois après le vote en première lecture à l’Assemblée nationale». L’association qui «promeut et défend les libertés fondamentales dans l’environnement numérique et qui lutte contre la censure et la surveillance» expliquait déjà en cette date que «nos espoirs reposent maintenant sur le Conseil constitutionnel, qui devra censurer largement les dispositions de ce texte ultra-sécuritaire», signalant de fait que les députés ne pouvaient rien ou ne voulaient rien faire ou encore qu’ils n’ont pas de pouvoir face à l’exécutif devenu tout puissant avec la crise sanitaire.
La nouvelle loi permet l’intensification de la vidéosurveillance fixe, l’extension de la liste des personnes pouvant avoir accès à la surveillance de la voie publique, la transmission en direct des images des caméras-piétons, l’emploi des drones, des hélicoptères et de l’article 24 qui interdit aux citoyens de filmer, documenter des actions de police notamment pendant les manifestations ou des interventions de police.
L’affaire Michel Zecler avait montré l’importance de filmer les interventions de police car ce dernier avait pu se défendre, justement, en justice grâce à sa caméra placée dans son domicile. Le Sénat s’accordant avec le gouvernement a fait adopter une disposition permettant au ministre de l’Intérieur de mettre des caméras dans les chambres d’isolement des centres de rétention administrative et des cellules de garde à vue. «Le ministre de l’intérieur, le Sénat et ses rapporteurs ont créé une surveillance permanente du peu d’intimité qui reste aux personnes retenues», s’insurge La Quadrature du Net.
Après la police nationale et la police municipale, et après les services de sécurité des transports, les gardes-champêtres ont accès à la vidéosurveillance mouvante. Les polices municipales, qui obtiennent des pouvoirs élargis, équivalent à ceux de la police nationale, vont pouvoir contrôler et verbaliser tous azimuts, titre Le Figaro. En outre, la police municipale porte dorénavant des armes de poing chambrées pour le calibre 7,65 mm ou pour le calibre 9 × 19 (9 mm luger) c’est à dire des armes de guerre comme le Glock 17 et les fonctionnaires de la police nationale et les gendarmes sont autorisés à garder leur arme (Glock 17) dans un établissement recevant du public, stipule l’article 25 de la loi.
L’association de la défense des libertés individuelles signale que la loi «Sécurité globale» permet également à la police municipale (et non plus seulement à la gendarmerie ou la police nationale) d’utiliser des drones pour surveiller la voie publique et constater certaines infractions. Elle rapporte aussi que le récent décret du ministre des transports Jean-Baptiste Djebbari autorise les gestionnaires de gares, de métro et de bus à déployer sur leurs caméras de surveillance des logiciels de détection de masque, prétextant un besoin statistique dans la lutte contre la Covid autorisant le comptage de masques dans les transports.
La loi «Sécurité globale» permet la réalisation d’un Etat ayant une Technopolice allant sur la route de la dystopie présentée dans les romans futuristes comme 1984 où les libertés individuelles sont totalement inexistantes. On est en droit de se demander si la France est bien toujours aujourd’hui «la patrie des droits de l’homme».
Pierre Duval
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