Sous le pseudonyme de Laurène Beaumond, une journaliste française qui a vécu 7 ans au Xinjiang, et s’est mariée là-bas, a publié une tribune sur le site de CGTN, la télévision chinoise. Sacrilège puisque le témoin contredit tous les propagandistes, ceux qui ignorent même où se trouve Ürümqi. La contre offensive de l’armada, affirmant que la journaliste n’ n’existe pas, va sombrer. Ce qui nous donne une histoire drôle et une belle leçon de presse.
Le 28 mars, sous la signature de Laurène Beaumond, le site de la télévision chinoise CGTN publie une tribune intitulée « Mon Xinjiang : halte à la tyrannie des fake news ». Et le media précise que l’auteur est « une journaliste indépendante basée en France ». En voilà assez pour crier « au feu les pompiers », et alerter tous les propagateurs de certitudes sur le Xinjiang et la Chine. Le Monde, le quotidien qui n’écrit que la vérité, va tout de suite tenter de nous convaincre que cette journaliste n’existe pas, qu’elle est une invention de la propagande chinoise. Mais le fantasme du Monde va crever comme un chien au fil de l’eau, comme une vulgaire « fake news ». Un fausse nouvelle dans Le Monde ? Impossible.
Aucun des sicaires, mobilisés pour attaquer la Chine a tout prix, n’a jamais mis le pied dans cette vaste contrée peuplée de multiples ethnies. Mais cela ne compte pas : s’informer peut vous déformer. Tout propos sur les Ouïghours n’ayant pas reçu le chrême de Glucksmann, BHL ou Clémentine Autain (grande Chineuse aux Puces de Saint Ouen) est forcément un « fake ». Parallèlement, pour avoir écrit « Ouïghours, pour en finir avec les fakes news », un livre publié aux éditions « La route de la soie », le malheureux Maxime Vivas, pourtant fils d’un Républicain espagnol, lui-même combattant de toutes les luttes de libération de la planète depuis quarante ans, et (lui) visiteur du Xinjiang, a pris des coups de batte sur le crâne. Horions venus de tous les axes de la bien-pensance, comme des inénarrables, et si peu diplômés et qualifiés, Tristan Mendès France et la clique de « Conspiracy Watch ». Les chiens de garde de l’Otan, ont grogné. Par exemple lors d’une émission sur des ondes, celles de la voix des maîtres : France Inter… Ils même reçu le soutien d’un ex-fiancé de Carla Bruni, c’est dire si nous volons là où manque l’oxygène.
Le Monde, l’immense journal que personne ne nous envie, se devait donc de monter au front. C’est pourquoi le grenadage a été confiée à Nathalie Guibert, puisqu’au quotidien elle s’occupe de la chose militaire. Descendre la Chine est une mission classée « à vos rangs fixe ». De mon côté, ce qui m’intéresse dans le journalisme depuis un demi-siècle, c’est tenter d’approcher au plus près de la vérité, d’éviter les bobards. Ayant vécu la fausse attaque du Tonkin, qui a provoqué la guerre du Vietnam, et tous les mensonges à suivre, ceux qui ont permis à Washington de défendre « le monde libre » à coups de massacres, mais avec bonne conscience. Et de mettre dans la bouche de Madeleine Albright, après la mort de 500 000 enfants tués par l’embargo contre la peau de Saddam Hussein : « ça en valait la peine ». J’ai eu droit à d’autres sottises sur Saddam « arrachant les bébés des couveuses de Koweït City », à ses Armes de Destruction Massives, qui n’existaient que dans un tube secoué à l’ONU par Colin Powell (ancien du Vietnam impliqué dans le massacre de My Lai). Au passage faut-il citer le grand moment de vérité de Timisoara ? En 1999 au Kosovo, installé du mauvais côté de l’histoire et des bombes, j’ai pu lire sur Internet et dans Le Monde, que le directeur Edwy Plenel, supporter indéfectible de l’Otan, nous annonçait 700 000 morts (en fait 2 500 des deux bords).
Je ne connais rien à la Chine, rien aux Ouïghours, mais beaucoup aux mensonges d’Etat et à leur histoire. Et à l’utilisation des minorités comme moyen d’attaquer les états déplaisants. Ainsi jadis, les nazis ont-ils instrumentalisés les musulmans du sud de la Russie pour piquer les fesses de l’URSS. La CIA ayant récupéré ce dispositif, il va trouver son apogée avec la promotion de Ben Laden.
La mode est donc aux Ouïghours. Comme ce le fut des Tchétchènes, si courtois tant que l’un d’eux ne s’en vient décapiter un prof en France. Connaissant sur le pouce cette forme d’« art » de la guerre, l’activation de l’émotion, je me doute que ce n’est pas par amour des musulmans Ouïghours (par ailleurs engagés avec Al-Qaïda en Syrie), qui mobilise Biden ou Macron. C’est par mépris du non-« occidental » et peur de la Chine. L’indignation est devenue un métier, souvenons-nous que papa Glucksmann, et ses amis, nous décrivaient, pendant l’explosion programmée de la Yougoslavie, les Serbes « jouant au foot avec des têtes humaines »)… L’enjeu c’est le pouvoir, l’argent, la suprématie. Le prélude à une guerre qui peut finir mondiale.
Mais revenons à Laurène Beaumond -dont Le Monde entend nous démontrer qu’elle n’existe pas- et qui écrit pourtant : « je suis française et j’ai vécu presque sept ans en Chine ». Mieux : « Les hasards de la vie ont fait que j’ai de la famille vivant à Urumqi, la capitale du Xinjiang. J’ai eu l’occasion de visiter la région à maintes reprises entre 2014 et 2019, et je ne reconnais pas le Xinjiang que l’on me décrit dans celui que je connais. »
La dame Nathalie Guibert, du Monde-qui-ne-supporte-que-la-vérité, vous cisaille une telle menteuse d’une seule rafale : « Le problème est que Laurène Beaumond n’existe pas. Inconnue, officiellement, au bataillon ( NDLR, notez qu’elle utilise un terme militaire). Le Monde a pu vérifier qu’aucune personne de ce nom ne figure dans le fichier de la « Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels » français. »
Voilà. Nous y sommes : tout « Le Monde » est dans cette certitude. Je ne veux pas mettre en cause la compétence de la dame Guibert, quand elle se limite à écrire sur le rythme des pas de la Légion un jour de 14 juillet, mais en ce qui concerne l’état de journaliste, elle ignore tout. Le plus simple aurait été de recopier le texte de loi qui définit qui peut se réclamer du bien triste métier de journaliste :
Les articles L7111-3 à L7111-5 du Code du travail « précisent qu’est journaliste professionnel toute personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée, l’exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques ou agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources ». Ces publications peuvent être électroniques. Tout journaliste professionnel est couvert par la Convention collective nationale de travail des journalistes.
L’exercice du journalisme est libre en France et n’est pas réservé aux journalistes professionnels. Il peut être exercé, par exemple, dans le cadre d’un média associatif ou autre, à but non lucratif et donc non enregistré à la Commission paritaire des publications et des agences de presse. Toutefois, ces journalistes-là ne bénéficient pas de la protection du statut de journaliste professionnel.
Xavier Niel a-t-il oublié de payer son abonnement Internet (forcément Free) ? Et la dame Guibert est-elle privée de Wikipédia ? C’est dommage : tout cela est accessible en un clic. Cela lui aurait évité, à elle, à sa cause et à sa publication vespérale, de prendre une claque. Baffe venue du Figaro, adversaire en quotidien. Le journal qui entend nous convaincre que « sans la liberté de blâmer, il n’est pas d’éloge flatteur » a interrogé Laurène Beaumont qui existe bien, même si elle use d’un pseudonyme, ce qui est un procédé légal et utilisé par certains collaborateurs du Monde.
Dans la foulée il serait déontologique que les chasseurs de « fake news », les lanceurs d’injures pacsés avec Washington et l’Otan, tels Tristan Mendès France et « Conspiracy Watch », que le comique Pierre Haski, et l’inepte radio d’Etat France-Infos, publient un mot d’excuses. Au moins un rectificatif.
Jacques-Marie BOURGET
Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir