Fête du renouveau de la nature pour les uns, de la résurrection de Jésus pour les autres, Pâques est originellement une fête juive commémorant la sortie d’Égypte. La cérémonie chrétienne correspond à l’origine à la cérémonie juive, puisque Jésus serait ressuscité le jour de Pâques, de la pâque juive par conséquent, en hébreu Pessah.
La tradition biblique raconte que les Hébreux étaient esclaves en Égypte et que, sous la conduite de Moïse, ils trouvèrent le chemin de la liberté et finirent par atteindre la terre promise.
La fête de Pessah consiste à raconter et célébrer cette libération. Pour faire céder Pharaon qui refusait de laisser partir son peuple (qui ne connaît le très beau « Let my people go » chanté par Louis Armstrong), Dieu lui imposa une série d’épreuves connues sous le nom des Dix Plaies d’Égypte : l’eau du Nil se transforma en sang, des nuées de sauterelles, de moustiques, de grenouilles infestèrent le pays, la vermine, des bêtes sauvages, la grêle, des ulcères, la nuit en plein jour, tous les malheurs du monde fondirent sur l’Égypte sans réussir à briser la résistance obstinée du roi. Jusqu’à ce que, épreuve ultime et atroce, un ange exterminateur vienne une nuit tuer tous les premiers nés du pays, hommes et bêtes, épargnant seulement les foyers des hébreux.
Vaincu, Pharaon les laissa partir et ils prirent, à pied, le chemin de la terre promise. Mais Pharaon se ravisa et les rejoignit avec son armée comme ils stationnaient devant la mer Rouge. Une nouvelle intervention divine vint à leur secours : les eaux s’ouvrirent devant le peuple de Dieu, puis se refermèrent sur l’armée des méchants qu’elles engloutirent.
Tout le rituel de Pessah consiste en un repas liant, selon un ordre minutieux [1], prières, chants, nourriture et boissons qui évoquent les épreuves de l’esclavage et toutes les péripéties de l’Exode.
Pendant longtemps, l’archéologie dite « biblique » s’est efforcée de chercher – et trouver – des traces de cette histoire rien moins qu’historique. Or il importe aujourd’hui de savoir que, à la lumière de recherches récentes [2] il semble à peu près certain que jamais les Hébreux ne furent esclaves en Égypte et que tout ceci fut inventé pour des raisons politiques à l’époque du roi Josias, c’est-à-dire au VIIe siècle av. J.-C.
Ces travaux marquent la fin de la période au cours de laquelle les archéologues organisaient leurs fouilles à partir de passages des Écritures. Les nouveaux archéologues se contentèrent de creuser et de constater ce qu’ils trouvaient : rien, absolument rien qui corresponde aux contes et légendes de peuple de Dieu.
Peu importe l’historicité de l’Exode ou de la mort de Jésus finalement, la religion est là pour relier les hommes : les juifs autour de la libération de l’esclavage, les chrétiens autour de Jésus sauvant les hommes par sa résurrection.
« Les dix plaies, la traversée de la mer Rouge, le gîte et le couvert dans le désert, le don de la Torah, chacune de ces faveurs divines aurait suffi, “dayenou”, à assurer la vie des Hébreux et à susciter leur reconnaissance », explique le rabbin Josy Eisenberg.
Dayenou, דיינו, « Cela nous aurait suffi » : tous les ans pour Pessah, le peuple élu chante sa reconnaissance envers l’Éternel pour tous ses bienfaits, dont un seul pourtant aurait suffi. Les nuées de sauterelles, de moustiques, de vermines et d’ulcères ? Cela nous aurait suffi. La mort donnée à tous les premiers-nés du pays sauf les nôtres ? Cela nous aurait suffi. L’engloutissement dans les eaux d’une armée entière ? Cela nous aurait suffi !
Tous les ans pour Pessah, les juifs remercient un Dieu vengeur et impitoyable qui, pour faire plaisir à sa tribu, a semé le malheur et l’épouvante sur un pays entier coupable de ne pas croire en lui.
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