par Germán Gorraiz López.
L’arrivée de Joe Biden à la présidence américaine pourrait provoquer sur la scène géopolitique de l’Amérique latine l’irruption d’une nouvelle vague involutionnaire qui consistera en la mise en œuvre de « coups d’État doux » avec l’objectif sans équivoque de remplacer les régimes insensibles par les diktats de Washington (Nicaragua et Venezuela) par des pseudo-démocraties protégées par les États-Unis.
Pour ce faire, les États-Unis utilisent la tactique de la « carotte et du bâton » exposée par Sherman Kent dans son livre « Strategic Intelligence for North American World Policy » (1949). Les buts de ces types de guerre ont été décrits par cet auteur comme suit : « Dans ces guerres non conventionnelles, il s’agit de faire deux choses ; affaiblir la volonté et la résistance de l’ennemi et renforcer sa propre volonté et sa capacité à gagner ». Plus tard, il ajoute que les instruments de la guerre économique « consistent en la carotte et le bâton » par « le blocus, le gel des fonds, le boycott, l’embargo avec une liste noire d’une part et d’autre part, les subventions, prêts, traités bilatéraux, troc et accords ».
Une révolution de couleur se prépare-t-elle au Nicaragua ? Petrocaribe a été créée en 2005 à l’initiative du Venezuela dans le but de fournir du carburant aux pays membres à des conditions de paiement avantageuses, comme des prêts à des taux d’intérêts bas. Elle serait composée de 18 pays (dont le Honduras, le Guatemala, Cuba, le Nicaragua , République dominicaine, Haïti, Belize et une dizaine d’îles des Caraïbes). Selon les autorités vénézuéliennes, le pays exporte 100 000 barils par jour vers les pays du bloc qui ont généré une facture de 4 000 millions de dollars, dont une partie a été payée en « cash » et le reste serait subventionné.
La nouvelle stratégie américaine serait de renforcer les liens commerciaux et militaires avec les pays du Petrocaribe face au danger de contagion mimétique des idéaux révolutionnaires chavistes en dépendant exclusivement du Petrocaribe vénézuélien pour son approvisionnement énergétique, à commencer par le président dominicain Danilo Medina.
La Chine aurait relevé le défi de construire un nouveau canal au Nicaragua (Grand Canal Interocéanique) similaire au canal de l’isthme de Kra qu’elle a prévu entre la Thaïlande et la Birmanie pour contourner le détroit de Malacca, devenu « de facto » une voie maritime saturée et affectée en raison d’attaques de pirates et, inauguré en 2010 le gazoduc qui relie la Chine au Turkménistan et qui entoure la Russie pour éviter sa dépendance énergétique totale de la Russie tout en diversifiant ses achats. Les États-Unis vont donc procéder à la déstabilisation du gouvernement de Daniel Ortega dans le cadre de sa stratégie géopolitique mondiale d’assèchement des sources d’énergie chinoises.
En revanche, l’installation d’une station satellite russe à Managua (lac de Nejapa) pour « contrôler le trafic de drogue et étudier les phénomènes naturels » aurait provoqué la nervosité du Pentagone qui accuse la Russie « d’utiliser le Nicaragua pour créer une sphère d’espionnage » militaire « via le Global Navigation Satellite System (Glonass), l’équivalent du GPS américain ». Ainsi, nous avons assisté à l’approbation par le Congrès et le Sénat américains du projet de loi connu sous le nom de Nica Act (Nicaraguan Investment Conditionality Act of 2017), qui, suivant la stratégie kentienne, vise à geler les prêts internationaux des institutions satellites américaines (Banque mondiale et Banque interaméricaine de développement), au Nicaragua avec l’objectif avoué de provoquer sa famine financière et l’asphyxie économique qui en découle.
Enfin, il ne serait pas exclu que le chaos économique conduise à une « révolution patriotique ou de couleur » qui, sous le contrôle à distance de la CIA, oblige les élites dirigeantes à organiser de nouvelles élections générales dans le but de mettre fin à l’héritage Danieliste et à ramener le Nicaragua sur la voie des démocraties protégées par les États-Unis.
Les États-Unis cherchent-ils un gouvernement de transition au Venezuela ? La décision de Nicolás Maduro de confisquer l’usine de General Motors a été considérée par l’administration Trump comme une attaque contre les intérêts des multinationales américaines, un scénario qui sera exploité par le secrétaire d’État américain, Rex Tillerson (ancien président et PDG d’Exxon Mobil) quand il l’a été, nationalisé en 2007 par Hugo Chávez, pour tenter un coup d’État contre Nicolás Maduro. Exxon Mobil ferait partie de la quatrième branche du gouvernement américain, véritable puissance de l’ombre qui prend des décisions en matière de politique étrangère. La révolution chaviste a déjà été déclarée par Rex Tillerson « ennemi dangereux des États-Unis ».
En outre, l’accord sino-vénézuélien, par lequel la société pétrochimique d’État chinoise Sinopec investira 14 milliards de dollars pour atteindre une production quotidienne de pétrole de 200 000 barils par jour de brut dans la ceinture pétrolière de l’Orénoque (considérée comme le champ pétrolier le plus abondant au monde), serait un missile sur la ligne de flottaison de la géopolitique mondiale américaine (dont l’objectif sans équivoque serait d’assécher les sources d’énergie de la Chine). Rex Tillerson a affirmé que « nous évaluons nos options politiques, examinons ce que nous pouvons faire pour créer un changement faisant partir Nicolás Maduro ».
Après une campagne de déstabilisation systématique et intense basée sur les pénuries sélectives de produits de première nécessité, la spéculation obscène, l’amplification dans les média de l’insécurité croissante des citoyens, la prise de la rue par l’opposition et l’application de sanctions au brut vénézuélien pour provoquer le défaut ou cessation des paiements et après le fiasco de Juan Guaidó, nous assisterions à la phase finale du complot pour obtenir le départ de Nicolás Maduro. Les États-Unis espèrent qu’après l’exil des dirigeants chavistes à Cuba, le Venezuela procédera à la formation d’un gouvernement de transition composé de personnalités consensuelles de l’opposition et du chavisme qui devra préparer une nouvelle élection présidentielle pour 2022, une tâche pour laquelle la participation de Cuba paraît indispensable.
source : http://www.observateurcontinental.fr/
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