4e de couverture :
Seule ouvre théâtrale écrite et publiée par Céline, L’Église constitue en quelque sorte une répétition générale du Voyage au bout de la nuit. L’Église, bien que publiée en 1933, un an après le Voyage, avait été écrite en 1926. Et déjà le protagoniste s’appelle le docteur Bardamu.
Dans L’Église, le ton, bien que nouveau, n’a pas encore la force torrentielle que l’on connaît. La langue classique se heurte encore au parler populaire qui s’épanouit en quelques monologues très céliniens. L’action se déroule en Afrique, dans une petite résidence française, puis aux Etats-Unis dans les coulisses d’un music-hall new-yorkais, ensuite à Genève au siège de la Société des Nations et enfin dans la banlieue parisienne, dans un bistrot transformé en clinique au dernier acte. Les thèmes céliniens apparaissent au hasard des situations : le mépris des coloniaux ambitieux et médiocres, l’impuissance de l’homme devant la souffrance et la mort, le besoin de beauté et d’harmonie, l’amour des gens simples et des enfants.
Ferdinand Bardamu apparaît comme un être vaincu d’avance par la fatalité et le cynisme général, essayant de survivre dans l’ombre. Comme le dit un des personnages : “Bardamu est un garçon sans importance collective. C’est tout juste un individu.” Sartre mettra cette phrase en épigraphe à La Nausée. Le grand intérêt que suscite L’Église est d’être une des toutes premières oeuvres de Céline et de contenir en germe les éléments qui permettront de situer son auteur à côté de Faulkner et de Joyce.
« Il n’y a aucune discontinuité dans l’œuvre de Céline et je le démontre d’ailleurs maintenant de façon pratique. La première œuvre de Céline, c’est une pièce de théâtre qui s’appelle L’Eglise. Il y a exactement dedans, en brouillon, Le voyage au bout de la nuit plus Bagatelles pour un massacre. Et en réalité, Le voyage au bout de la nuit, c’est L’Eglise dont il a enlevé le deuxième ou le troisième acte qui se passe à la Société Des Nations et sur une certaine communauté qui payerait tout le monde pour hâter la guerre. Il a enlevé ça du Voyage au bout de la nuit pour en faire un roman “goncourisable”. Après en 1937, il remet ce qu’il avait enlevé et ça s’appelle Bagatelles pour un massacre. Bagatelles + le Voyage = L’Eglise. » Alain Soral
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