Le Prince : faire souffrir le Québec

Le Prince : faire souffrir le Québec

La longue guerre… débutée en décembre 1969

Qu’en est-il du droit à l’autodétermination ?

Chronique de Jean-Claude Pomerleau

De tous les livres publiés sur Pierre Elliott Trudeau, il y en a un dont le titre résume bien le personnage : Le Prince.

Voici quelques citations de Machiavel qui auraient pu être celles du Prince Trudeau :

  • « La force est juste quand elle est nécessaire » *
  • « Le triomphe du plus fort est le fait essentiel de l’histoire humaine ». *
  • « Que le prince songe donc uniquement à conserver sa vie et son État ; s’il réussit, tous les moyens qu’il aura pris seront jugés honorables et loués par tout le monde…» *

Les Grandes œuvres politiques De Machiavel à nos jours Jean Jacques Chevalier, Librairie Armand Colin 

Beaucoup de bruit médiatique autour du complot pour « faire souffrir le Québec ». Comme le disait Sénèque, il faut distinguer les choses du bruit qu’elles font. C’est ce qu’a fait Pierre Dubuc dans un texte publié dans l’Aut’Journal dans lequel il relate l’historique de cette alliance entre le Prince Trudeau et le grand capital pour contrer la volonté d’émancipation politique du Québec.

Le récit d’une longue guerre clandestine contre la démocratie québécoise mais sans nous donner la date précise de cette déclaration de guerre. Cette déclaration de guerre du Prince Trudeau contre la démocratie québécoise date d’avant le Just watch me des Mesures de guerre lors de la Crise d’Octobre. Plus précisément le 17 décembre 1969, au moment où le premier ministre Trudeau présentait au Comité du cabinet sur la sécurité et le renseignement un mémorandum intitulé Current threats to National Order and Unity : Quebec separatism. Un feu vert donné aux services de renseignement et de sécurité pour utiliser tous les moyens illégaux pour mener une guerre clandestine contre un mouvement démocratique et légitime.

Il s’en ait suivi une série de crimes qui ont mené à 2 commissions d’enquêtes déclenchées en 1977 (Keable et Mcdonald). Dans ce contexte, un des mis en cause, John Starnes, qui occupait à l’époque un haut poste aux services de sécurité et du renseignement, a publié un livre (1) dans lequel il revient sur le fameux mémorandum.

La question qui se pose à la suite de la déclaration de guerre du Prince Trudeau : que valait le droit à l’autodétermination du Québec ? Toutes ces graves violations des droits démocratiques du Québec étaient donc connues avant le référendum de 1980. Ces violations offraient au gouvernement Lévesque l’occasion de commettre le fédéral sur un engagement d’en respecter le processus et le résultat. Bref, commettre le fédéral à la reconnaissance statutaire du droit à l’autodétermination du Québec. Question d’autant plus pertinente que le fédéral avait déjà refusé de reconnaître ce droit au début des années soixante-dix. (2) La réponse négative aurait permis à Lévesque de sortir du piège référendaire, d’autant plus qu’il le savait perdant. C’est à ce moment critique qu’eut été utile au chef souveraniste ce conseil de Machiavel : « …en former le dessein sans pouvoir l’exécuter c’est encourir le blâme et commettre une erreur. »

Piège référendaire tendu par …le Prince Trudeau et ses mandarins !

Dans son livre Mes premiers ministres, Claude Morin nous rappelle que la voie référendaire lui fut suggérée par des grands mandarins fédéraux en 1969. Une suggestion qu’il savait venir de la part du Prince Trudeau. Le conseiller de Lévesque, dans sa grande naïveté, s’était fié aux garanties des conseillers du Prince Trudeau à l’effet que le choix démocratique du Québec serait respecté :

« L’idée du référendum, écrit-il, me fut involontairement suggérée en 1969 par trois personnalités renommées de l’establishment politico-technocratique anglophone fédéral. […] ils étaient convaincus qu’une telle consultation prouverait le rejet par les Québécois du « séparatisme », mais ils n’hésitèrent pas à reconnaître (aveu peu compromettant en 1969) que, mis devant un référendum favorable à l’indépendance, eh bien, Ottawa et les autres provinces devraient s’incliner. » (3)

Le mémorandum de décembre 1969 démontre à l’évidence que le fédéral n’avait aucune intention de respecter le choix démocratique du Québec. Une position qui est demeurée constante puisque, à la suite du référendum de 1980, le fédéral a refusé à 2 reprises de reconnaître de manière statutaire le droit du Québec à l’autodétermination. En septembre 1980 tel que rapporté par le biographe de René Lévesque (4) ainsi qu’en 2013, au moment où le fédéral s’est joint à la contestation de la Loi 99 qui établit de jure le droit du Québec à l’autodétermination. (5)

Dans le contexte de la dernière révélation sur le Prince Trudeau qui voulait faire souffrir le Québec, les élus souverainistes devraient saisir l’occasion pour commettre le petit prince Justin et le fédéral sur la reconnaissance statutaire du droit à l’autodétermination du Québec. Dans le cas d’une non-réponse, ils devraient saisir l’occasion de sortir enfin du piège référendaire tendu par le Prince Trudeau en 1969.

 

Références

(1) Closely Guarded: A Life in Canadian Security and Intelligence, (p. 143-144 et appendice ).

(2)  Début 1970 : Comité spécial mixte du Sénat et de la Chambre des communes sur la Constitution : « deux membres du Comité mixte, le député (libéral) Pierre de Bané et le sénateur (conservateur) Martial Asselin qui insistèrent, dans un rapport dissident, pour que la Constitution contienne la reconnaissance expresse du droit fondamental du Québec à l’autodétermination. Ce rapport dissident ne fut pas consigné au rapport du Comité qui en refusa le dépôt officiel au Parlement. Quoi qu’il en soit, pour la première fois de l’histoire politique canadienne, le droit du Québec à l’autodétermination avait été discuté librement et longuement dans l’enceinte du Parlement canadien. ( L’État du Québec en devenir p.465-466) – http://classiques.uqac.ca/contemporains/bergeron_gerard/Etat_Qc_en_devenir/Etat_Qc_en_devenir.html

(3) Mes premiers ministres, pages 482-485

(4) « (Trudeau) Il est prêt à inscrire dans la déclaration de principe de la future Constitution le caractère distinct du Québec, mais à une condition : René Lévesque doit biffer de son texte l’expression « peuple québécois » pour y substituer « société québécoise ». Pourquoi pas ? Le chef indépendantiste accepte même de rayer le mot « autodétermination ». La déclaration de principes évoquera donc la volonté d’une province de faire partie « librement » de la fédération. » (René Lévesque L’homme brisé Pierre Godin, Boréal, p.55)

(5) 2013, le fédéral se joint à la contestation de la Loi 99 (2000). La loi par laquelle le Québec se reconnaît comme un État de jure et affirme de manière statutaire son droit à l’autodétermination. 2020 : M. Joseph Facal, l’ex ministre responsable de la Loi 99 (2000), commentait dernièrement sur la portée de cette contestation : « La loi 99 fut adoptée parce qu’Ottawa avait dit que jamais il n’aurait reconnu un OUI du peuple québécois à sa souveraineté. C’est l’existence ou non d’un peuple québécois qui est en cause.  (Nous reste-t-il assez de dignité?, JdeM, 24 novembre 2020) – https://www.journaldemontreal.com/2020/11/24/nous-reste-t-il-assez-de-dignite

Source: Lire l'article complet de Vigile.Québec

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