par Serge H. Moïse.
Tout bon entrepreneur en construction sait que pour ériger un édifice qui soit solide et fonctionnel, il doit élaborer un plan d’ensemble, prévoir un chronogramme d’activités ainsi que des échéanciers en commençant évidemment par la base.
L’inverse sera toujours voué à l’échec et c’est chose connue depuis l’érection de la tour de Babel. Notre célèbre roi Henri 1er n’a pas construit la citadelle Laferrière, la plus grande forteresse des Caraïbes et qui lui tient lieu de sépulture d’ailleurs, en commençant par la façade supérieure mais à partir de solides fondations bien enracinées dans le roc de Milot à une quinzaine de kilomètres de la fière cité capoise.
Aussi, prétendre que la reconstruction de notre pays passe par l’éducation, c’est l’évidence même puisque celle-ci commence au berceau et dès la première tétée. Sauf que nos théoriciens confondent hélas, éducation et scolarisation. Il s’agit de deux processus qui se complètent mais qu’il ne faut pas confondre. François Rabelais nous l’a bien rappelé : « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme » !
La scolarisation ou formation demeure un passage obligé à condition que les préalables soient réunis. En d’autres termes, le jeune pour être à même de consommer le pain de l’instruction, doit être logé, habillé et nourri par ses parents.
À moins qu’un État providence puisse se substituer aux parents, ces derniers doivent être mis au travail afin de subvenir à ces besoins primaires, auquel cas, la création d’emplois demeure la priorité des priorités pour la reconstruction de notre très chère nation.
Personne ne saurait contester l’importance de la formation des jeunes et des moins jeunes, mais si en bout de ligne ces derniers, faute d’emplois au pays, sont obligés de lorgner ailleurs, en quête d’un visa afin de gagner leur vie, rendez-nous fol ou sage, en quoi cela contribue t-il au développement du pays ?
Et pour avoir le mâle courage de dire ces simples vérités, les faux-jetons nous trouvent arrogant et s’en plaignent en cachette, au lieu de participer ouvertement à un débat d’idées dont ils seraient les premiers bénéficiaires. « On ne naît pas homme, on le devient » disait Érasme. Encore faut-il être en mesure de faire les bons choix. Nous nous estimons heureux de ne pas être apprécié par la racaille et tout au cours de notre vie d’adulte responsable, nous avons tenu à garder une distance raisonnable vis-à-vis de ces crabes dans le panier.
Reconstruire cet édifice en peaufinant uniquement son sommet, sa toiture, ne nous semble pas le point de départ idéal.
Le lecteur nous voit très bien venir, notre questionnement est le suivant :
Avant, pendant et après la guerre héroïque de l’indépendance et de celle-ci à nos jours, avons-nous jamais eu un quelconque projet de société faisant l’objet d’un certain consensus national ? Si oui, nos historiens feraient œuvre utile en éclairant nos lecteurs, les dignes filles et fils de la patrie, en prenant soin d’expliquer ce qui a foiré, quand, pourquoi et comment ?
Et si la réponse se révèle négative, il appartiendra sans doute et, autant que faire se peut, à nos psycho-sociologues, nos experts en sciences-po et éventuellement nos psychanalystes, d’agiter toute la lumière autour de ces lacunes et/ou déficiences collectives, si tant est qu’il faille savoir d’où l’on vient pour évaluer jusqu’où l’on peut aller.
Lorsqu’on n’est ni fou ni sage, ni beau ni laid, peut-on prétendre qu’on existe, « qu’on est vraiment là » ? Et en guise de réponse, offrir la répartie apparemment savante : Poser la question c’est y répondre, ne fait nullement avancer les débats !
Accumuler des milliers d’heures de lecture, dévorer des tonnes de livres et collectionner des diplômes, semblent très loin de nous apporter réponses à nos problèmes complexes et multidimensionnels. Les faits ont l’air de prouver que nous sommes plus efficaces, plus utiles aux amis qu’à notre propre famille et nous en faisons étalage avec un fracas aux résonances quelque peu funestes.
Cet appétit gargantuesque pour les connaissances simplement livresques, fait l’objet des spectacles pittoresques que nous offrent allègrement nos « P-H-D ». Perroquets-Hâbleurs-Délirants. Emmagasiner des montagnes de savoir et si peu de savoir-faire ne sert qu’à exciter les gueux pour mieux les maintenir dans leur médiocrité.
Pour progresser, nous avons certes un grand besoin de compétences avérées, mais pas de ces enregistreuses ambulantes. Il nous faut dans les plus brefs délais, des magiciens de la pensée profonde.
La pensée, la réflexion, l’analyse, les voilà, les maîtres-mots qui pourraient nous guider dans notre légitime quête de mieux-être collectif.
Et afin d’y parvenir, ces néfastes tares ou haïtiâneries plus dévastatrices que le choléra et le sida tels : l’individualisme, l’indifférence, la mesquinerie sous toutes ses formes et cette acculturation qui nous caractérise, doit être éradiquée avec la dernière rigueur.
Quand nous nous déciderons à conjuguer le verbe « transcender » dans sa forme pronominale et à le cultiver dans notre quotidien, nous parviendrons à découvrir la beauté de l’harmonie. Cette harmonie qui nous permettra d’être d’accord pour être en désaccord sans entretenir la discorde. Il ne sera plus question de nous entre-tuer mais de rechercher plutôt la concertation dans un esprit de franche solidarité. Alors nous établirons cette feuille de route qui nous conduira à bon port et nous n’aurons pas démérité de la patrie.
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