Recherche menée par Robert Gil
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Le retour de la grande illusion
Les complots ont toujours existé, ils existeront toujours, vouloir nier cela c’est nier l’histoire, mais LE grand Complot, non, les complots, oui, et effectivement ils ne se cachent même plus, ou à peine. Il a toujours existé des lobbies et des organisations, qui cherchent à peser sur les prises de décisions politiques et économiques. Les groupes de pression existent et sont connus, ils se sont autoproclamés, sans concertation, ils ne sont pas élus : G8, G20, OMC, FMI, OTAN, ONU, Commission Européenne, …. et les médias participent à leur propagande en utilisant cette novlangue qui est l’arme de la communication politique depuis longtemps, novlangue qui s’est considérablement renforcée depuis 20 ans grâce notamment aux nouvelles technologies et à l’abrutissement généralisé des masses.
Balzac disait: « Tout pouvoir est une conspiration permanente », et effectivement l’histoire elle-même s’est écrite avec des accords secrets, parfois tenus et souvent reniés. Des trahisons d’un groupe de personnes ou d’Etats en faveur d’intérêts financiers, économiques ou stratégiques sont légion dans l’histoire de l’humanité, mais arrêtons de penser que, comme dans les films et les mauvaises séries, un groupe de personnes se réunit clandestinement et dirige le monde. Un peu de bon sens ne nuit pas, les petits groupes d’individus qui œuvrent pour leurs seuls intérêts sont nombreux sur notre planète. Ceux qui bougent le moins et se laissent tondre la laine sur le dos, ce sont ceux qui s’extasient devant des gourous qui leur expliquent que le monde extérieur est dangereux et contrôlé par les conspirateurs du nouvel ordre mondial ; cette paranoïa peut devenir un véritable délire de persécution impossible à raisonner. Le conspirateur est un dealer qui par petites doses réconforte les simples d’esprits pour maintenir le système en place.
Derrière les supposés complots, il y a surtout la bonne vieille lutte des classes, qui consiste, pour une minorité, à s’approprier les meilleurs fruits du travail de la majorité, tout en lui enlevant toute idée de lutter, afin qu’elle n’envisage même plus la possibilité de son émancipation. C’est contre la rationalité folle de l’économie politique moderne que Marx écrit le Capital. Je conçois plutôt le système capitaliste comme une machine technicienne, à la fois très rationalisée (technologies de pointe, recours permanent aux experts) mais en même temps très fragile et complètement aveugle sur son avenir. Un peu comme un TGV lancé à fond sans les freins : à l’intérieur, les passagers se sentent assez en sécurité, mais ils ne savent pas du tout vers quoi ils vont, et le paysage défile tellement vite qu’ils ne font que l’appréhender.
Les conspirologues, complotistes, conspirationnistes, et autres théoriciens du Nouvel Ordre Mondial nous assurent que tout est piloté par un conducteur diabolique. Je pense plutôt qu’il n’y a tout simplement personne aux commandes. Il y a bien des gens qui magouillent pour faire avancer leurs idées et leurs intérêts, mais pas un complot global qui serait capable de régir la marche du monde, et pendant ce temps le train file à toute vitesse et va droit dans le vide dans l’insouciance générale !
Cette illusion du grand complot mondial embrigade et détourne des gens en manque de repères de la véritable lutte qui oppose depuis toujours le capital au travail, les exploités aux exploiteurs, les possédants aux démunis, les riches aux pauvres, c’est-à-dire la lutte des classes… tout simplement ! Donnez-leur le nom que vous voulez, mais au final ce sont simplement des capitalistes, qui luttent pour leurs intérêts et contre vous ! Libre à vous de l’accepter en vous réfugiant derrière des théories délirantes, mais libre aussi à vous de vous battre pour changer les choses.
Rien n’est jamais joué d’avance. L’avenir n’est jamais fermé. C’est pourtant ce que croient les « conspirologues » qui, au bout du compte, nous expliquent que les maîtres du monde sont tout puissants et qu’ils tirent toutes les ficelles. Vision désespérante qui fait de notre existence quelque chose d’assez misérable… « Yes, that’s the conspiracy: to persuade us all that the whole world is crazy, formless, meaningless, absurd. That’s the dirty game. » (Orson Welles, The Trial)
Dieudo PADONEY suite à des commentaires parus sur Agoravox
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Source: Lire l'article complet de Les 7 du Québec