« Tout ce qui empêcherait JL Mélenchon – et donc la gauche de gauche – d’être présent au deuxième tour est un faute politique historique. »
Selon l’institut Harris Interactive, qui publie un nouveau sondage lundi 25 janvier, Marine Le Pen devancerait d’une courte tête le président sortant Emmanuel Macron au premier tour du scrutin de 2022. La présidente du Rassemblement national obtiendrait 26 à 27 % des votes, contre 23 à 24 % des suffrages pour le président de la République.
À droite, une candidature de Xavier Bertrand recueillerait 16 % des intentions de votes exprimées, Valérie Pécresse 11 %, quelle que soit la personnalité soutenue par le Parti socialiste qui leur serait opposée.
À gauche, une candidature d’Anne Hidalgo recueillerait 6 ou 7 % des voix, selon qu’elle serait opposée respectivement à Xavier Bertrand ou à Valérie Pécresse. Tandis qu’Arnaud Montebourg est crédité de 5 % des suffrages dans toutes les configurations.
Ces scores attribués aux candidats socialistes les placent derrière la candidature de Jean-Luc Mélenchon, qui recueille 10 % ou 11 % des intentions de vote. Mais aussi derrière celle de l’écologiste Yannick Jadot, l’écart étant plus réduit face à Anne Hidalgo (1 point d’écart, soit 7 à 8 %) et plus marqué face à Arnaud Montebourg (4 à 5 points d’écart, soit 9 à 10 %).
La marge d’erreur de ce sondage est de 1,4 à 3,1 points.
Nous sommes à quinze mois avant les présidentielles et bien des choses peuvent intervenir. Il reste que cet éventuel face à face, Le Pen/Macron reste très préoccupant. La moitié des électeurs de gauche s’abstiendraient devant un tel choix. On peut les comprendre voire les approuver. Reste que le choix entre peste brune et peste bleue serait désolant.
Deux attitudes seraient erronées. La première serait la politique du pire. Croire que Le Pen à l’Elysée serait sans conséquences négatives dans la vie des travailleurs et du peuple. Sur la plan des libertés mais aussi sur le plan social. Tous les pays qui ont testé l’extrême-droite ont vu la situation de les classes populaires s’aggraver. La démagogie (y compris sociale) qui accompagne de néofascisme peut tromper un temps. Mais il ne faut jamais oublier que ces gens ne peuvent pas gagner sans le soutien du grand capital (au moins une fraction de celui-ci) qui exige un retour sur investissement. Ni sans des alliances à droite.
La deuxième serait de penser que Macron est un barrage à l’extrême-droite : ces sondages prouvent qu’au contraire la politique de Macron ouvre, objectivement, le chemin du pouvoir aux néo-fascistes. La bourgeoisie ( la classe des capitalistes qui possèdent les moyens de la production sociale, l’Etat et les médias) par sa politique antipopulaire provoque une mécontentement qui s’exprime soit avec la gauche de gauche, soit avec le néofascisme. Depuis la liquéfaction du communisme organisé et de la social-démocratie, les extrêmes-droites ont le vent en poupe. Elles cristallisent la colère et le désespoir populaire. Le néofascisme utilisent la xénophobie, le racisme et le nationalisme comme cheval de Troie pour briser les murailles de la méfiance ouvrière et populaire à son égard. Il parvient à capter le ressentiment à l’égard des dirigeants bourgeois traditionnels (Droite et PS chez nous). On le voit dans le rejet des partis bourgeois, l’abstention populaire et des jeunes, la perte de confiance dans les médias bourgeois et même la mise en cause de la démocratie parlementaire dont le leurre est démasqué chez beaucoup.
Le problème c’est que tout cela est récupéré par le néofascisme, un autre leurre du capital, et non par la gauche qui s’en montre globalement incapable.
Quelle peut donc être l’attitude de la gauche ou des gauches face à une perspective politiquement catastrophique ?
Certes on dira, cela fait un moment qu’on le dit, brisons l’étau Macron/Le Pen. Oui mais comment ? Avec quel outil ? Et mille hypothèses fleurissent. Pourtant une seule concilie le souhait de la gauche avec la politique réellement existante. La seule qui, péniblement, s’impose. Elle s’identifie à un nom, que cela fasse plaisir ou non aux ex-adeptes du « culte de la personnalité » : Jean-Luc Mélenchon.
En tête des gauches, il est fort de sa légitimité démocratique de 2017, de sa personnalité brillante, de ses positions décentes et son courage politique (il en faut pour rendre hommage à Castro). Son jauressisme de gauche, son « réformisme révolutionnaire » et surtout la dynamique dont son élection pourrait (conditionnel) être porteuse en fait le seul, oui le seul barrage au néofascisme.
Toute autre candidature de gauche est, disons-le clairement, une candidature de division. Tout ce qui empêcherait JL Mélenchon – et donc la gauche de gauche – d’être présent au deuxième tour est un faute politique historique.
La possibilité d’une alternative progressiste n’est pas clairement, universellement visible et crédible. La IIIe Internationale est morte depuis 1943. Et le MCI depuis 1990 (au moins…). Au Chili, au Liban, en Italie, en Espagne comme au Portugal, au Japon comme en Egypte ou au Mali, comme ici en France, l’alternative au capitalisme, qu’on l’appelle socialisme ou éco-socialisme, n’est pas portée par les masses, même quand celles-ci luttent avec une farouche détermination contre les effets du capitalisme. Nous pouvons donc en conclure qu’un processus peut se mettre en place à partir du « contre » pour aller progressivement vers le « pour ». Aussi faut-il créer les conditions les plus favorables à un tel processus. Ensuite aux masses de faire avancer par leurs luttes les revendications qui amèneront le processus à sa radicalisation, son approfondissement avec le soutien le plus ample, largement majoritaire du peuple.
Que les puristes, les révolutionnaires en parole, les sectaires et les anachroniques poussiéreux se le disent : ici et maintenant le chemin pour avoir une chance de créer les conditions du déploiement d’un vaste mouvement populaire est le vote Mélenchon.
Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir