Montréal n’a jamais été un territoire mohawk
: le titre de l’article d’opinion de Joseph Facal est sans ambiguïté. Selon lui, il n’y a pas un seul historien sérieux qui soutient cette idée d’une présence mohawk sur l’île de Montréal lors de la fondation de la ville
.
Affirmer le contraire n’est qu’une ritournelle
. Celle de militants
.
Dans son texte, le sociologue énumère plusieurs faits historiques en ce sens, sans citer toutefois de sources. Vers la fin du texte, il tempère : Cela ne veut pas dire, évidemment, qu’il faille balayer du revers de la main toutes leurs revendications ou les torts subis
.
Affirmation dénoncée par les Mohawks
La réponse du Conseil Mohawk de Kahnawake ne s’est pas fait attendre. Dans un communiqué de presse, il explique que cet article ne réussit qu’à donner aux lecteurs du journal un faux sens de l’histoire qui vise, tout simplement, à discréditer une fois de plus notre peuple et notre histoire
.
Encore une fois, le MCKla région de Montréal a longtemps été le territoire des Kanien’kehá:ka et le restera, que certains écrivains veuillent l’accepter ou non
.
En entrevue, le chef Ross Montour de Kahnawake a détaillé la position mohawk qui se base selon lui sur des faits et non pas des opinions
. Il rappelle d’entrée de jeu que son peuple était sur le territoire bien avant l’arrivée des Européens.
En effet, les Mohawks expliquent que leurs ancêtres, qui ont un moment vécu à Montréal, l’ont ensuite quittée, avant d’y revenir. Leur arrivée dans les missions catholiques était finalement un retour au bercail, ce que documente leur tradition orale.
Les propos de M. Facal sont l’une des premières manifestations de racisme systémique.
Et la fameuse théorie iroquoise
sur laquelle s’appuie M. Facal est fondée sur de minces preuves archéologiques, d’après le chef Montour.
Par ailleurs, il estime que les Européens ont écrit l’histoire en se basant sur leur propre ethnocentrisme
et qu’elle a été utilisée pour justifier leur présence sur ces terres.
Même si le grand chef Simon de Kanesatake se dit un peu déçu que le MCK
n’ait pas consulté sa communauté avant de publier son communiqué de presse, il abonde dans son sens.Il justifie sa position en évoquant la semi-sédentarité des Mohawks. Les Mohawks de l’État de New York ont conquis les Iroquois du Saint-Laurent et les ont absorbés. Si c’est le cas, nous sommes des descendants des Iroquois, donc nous avons le droit de revendiquer les terres qu’ils occupaient
, soutient-il.
C’est une révision de l’histoire de la part du Journal de Montréal. Je dirais à M. Facal qu’il essaye de trouver des preuves que je ne descends pas des Iroquois
, ajoute-t-il.
Les historiens interrogés
La question territoriale au Canada est complexe, concèdent l’anthropologue Serge Bouchard et l’historien Alain Beaulieu.
Les deux hommes soutiennent que leur avis n’est pas politique lorsqu’on leur demande si Montréal est un territoire mohawk. Leur expertise historique est claire.
Pour ce qui est des occupations ancestrales, la revendication mohawk sur l’île de Montréal est fausse. On ne peut pas faire le lien entre les Mohawks de Kahnawake et les Iroquois d’Hochelaga.
Il rappelle qu’à l’arrivée de Jacques Cartier sur le continent, deux nations iroquoïennes occupaient le territoire. Malheureusement, Jacques Cartier n’a pas noté l’ethnonyme de ces peuples.
M. Bouchard explique que deux appellations pour les populations autochtones ont été retenues à l’arrivée des Européens : les Canadiens iroquoïens et, à Montréal, les habitants du pays d’Hochelaga.
Cette théorie est partagée par l’historien de l’UQAM Alain Beaulieu qui souligne que, même si l’article de M. Facal peut sembler polémique, il n’en reste pas moins qu’il n’y a pas de preuve d’une présence mohawk à proprement parler à Montréal avant l’arrivée de Jacques Cartier.
La création de villages mohawks dans la vallée du Saint-Laurent date d’après 1667, soit environ un demi-siècle après l’installation des Français. Avant, personne n’occupait Montréal de manière permanente
, dit-il.
L’historien évoque l’émotivité qui est liée aux questions du territoire. Souvent, il y a un amalgame entre la réalité historique et la réalité juridique
. Il confie même anticiper la réception de plusieurs lettres de mécontentement à la suite de la publication du présent article.
Sources subjectives?
Quelles sont les sources des historiens pour soutenir ces affirmations? Elles sont écrites, mais aussi archéologiques.
Nous lisons les sources de manière critique, on les recoupe, on les remet en question.
Mais ses contradicteurs estiment, eux, que l’histoire écrite par les Blancs est forcément subjective et écrite de manière à servir et à justifier leurs politiques.
Selon le MCKmilieux universitaires non autochtones
.
Ils en veulent pour preuve que même la Ville de Montréal a installé l’Arbre de la paix sur son drapeau officiel, commémorant et reconnaissant les Kanien’kehá:ka comme l’un des peuples fondateurs de la ville.
Pour le MCK
, soutenir la thèse de M. Facal remet en cause le travail de réconciliation entamé entre Autochtones et allochtones, et nie la responsabilité de la population québécoise quant à la dépossession du territoire mohawk.On ne peut pas dire que les sources européennes sont biaisées d’un côté et que les sources orales ne le sont pas de l’autre
, rétorque M. Beaulieu, tout en disant qu’il reste toutefois important de considérer les revendications territoriales des Autochtones.
Il insiste : Je ne prends pas position contre les revendications autochtones. Je laisse les tribunaux trancher. À ce sujet, je pense qu’il faudrait d’ailleurs travailler sur les critères de la jurisprudence en ce qui a trait aux revendications territoriales
.
Source: Lire l'article complet de Vigile.Québec