« En s’élevant au-dessus du séjour des Hommes, on y laisse tous les sentiments bas et terrestres ». Rousseau ne pouvait pas mieux décrire le sentiment de votre serviteur, à peine revenu de ses cimes et déjà plongé dans les scories des sociétés humaines, passant littéralement du sublime au ridicule. Mais puisqu’il faut s’y coller…
Ainsi, les petits kéké en jeans-baskets de la Silicon Valley, dont le pouvoir est à la fois gigantesque et minuscule (car dépendant totalement du bon vouloir de chacun), ont franchi le Rubicon en censurant purement et simplement le Donald. Est-ce vraiment une surprise ? Nous en annoncions les prémices début novembre :
Nous avons en effet assisté à un événement jamais vu, qui dérange même des officines pourtant férocement anti-Trump. Alors qu’il donnait une conférence de presse lors de laquelle il évoquait les fraudes, les trois plus grandes chaînes de télévision ont purement et simplement décidé de couper la retransmission, empêchant le président en exercice de s’adresser à ses concitoyens ! Ce comportement inouï, digne d’une république bananière, a trouvé son écho chez les GAFAM, où de petits geeks encore boutonneux ont censuré les messages twitter et facebook du chef de la plus grande puissance mondiale. Orwell, sors de ce corps…
Et nous poursuivions :
Fraudes massives ou menues, révolution colorée ou pas, ces élections confirment en tout cas que Trump fait face à une cabale extrêmement puissante, multiforme. Le fidèle lecteur sait que la politique étrangère US est dictée par le(s) Deep State, mais dépassons pour une fois le seul champ géopolitique et demandons-nous plus globalement qui dirige les Etats-Unis eux-mêmes.
Le harcèlement constant dont a été l’objet le Donald durant ses quatre ans de présidence et le vrai-faux putschinho en préparation montrent qui l’on peut d’ors et déjà éliminer : le lobby israélien et le lobby pétrolier. Pas de chance pour une grande partie de la presse alternative dont ces thèmes sont le fond de commerce…
Pas un président n’a été aussi favorable à Tel Aviv : reconnaissance de Jérusalem comme capitale, persécution de l’Iran, efforts diplomatiques intenses pour la normalisation des relations avec certains pays arabo-musulmans (EAU, Soudan, Bahrain). Hier encore, alors qu’elle a pourtant bien d’autres choses à penser, son administration n’a pas trouvé mieux que de sanctionner un dirigeant libanais chrétien pour, ne rigolez pas, ses liens avec le Hezbollah.
Si le lobby pro-israélien de Washington était si puissant que cela, comment expliquer la haine féroce de tout l’establishment à l’égard de Trump pendant toutes ces années ? Ca ne tient évidemment pas une seconde. Tout comme ne tient pas l’idée de la toute-puissance du lobby pétrolier (…)
Au vu des derniers événements, il devrait maintenant paraître évident à tous que le lobby israélien a une importance toute relative à Washington. S’il pèse indéniablement sur la politique impériale au Moyen-Orient, son influence s’arrête là et il semble totalement absent de la caste médiatico-GAFAMesque américaine. Un mythe d’une certaine presse alternative s’effondre…
Le rôle des trois suspects que nous citions dans le billet reste plus que jamais d’actualité :
- Le Deep State anti-russe
Evidemment. C’est le Grand jeu que nous contons en long, en large et en travers depuis des années, il n’est guère besoin d’y revenir...
- L’oligarchie globaliste
Pour les « élites » mondialisées, le protectionnisme est une hérésie à envoyer au bûcher, une atteinte intolérable au dogme libre-échangiste. Le modèle trumpien – libéral à l’intérieur, protectionniste à l’extérieur – a plutôt très bien fonctionné avant la crise pandémique, les chiffres étant là pour le prouver. Pire, il a mis à mal le récit mythifié de Davos selon lequel libéralisme et libre-échangisme allaient forcément de pair, montrant au contraire que la libération des énergies productives et, au final, la réussite économique étaient possibles avec des frontières, crime impardonnable aux yeux des 1%.
- La gôôche politiquement correcte
L‘ouverture des frontières et la libre-circulation des biens et des personnes entraînent mécaniquement l’appauvrissement des classes populaires et moyennes (concurrence de la main-d’œuvre étrangère qui pèse à la baisse sur les salaires et importations de biens à bas coûts qui ruinent les producteurs locaux). A cet égard, la fin de la République romaine est un véritable cas d’école. Ce n’est évidemment pas un hasard si le but de toujours de l’oligarchie est la disparition des frontières/nations et l’encouragement à l’immigration, alors que la gauche (la vraie, celle qui va des Gracques à Georges Marchais) s’y est toujours opposée.
C’est au tournant des années 80 que la gauche, en trahissant tous ses idéaux et en se convertissant à l’économie de marché libre-échangiste, est devenue la gôôche :
Wall Street avait même réussi l’exploit de s’attacher les gauches occidentales en leur jetant l’os de l’anti-racisme : immigration, le monde est mon village et tout le toutim. Désormais, la gôôôche allait travailler pour le grand capital sans même s’en rendre compte ! Que les No Borders et autres joyeux drilles « anti-capitalistes » soient financés par Soros et soutenus par l’oligarchie eurocratique n’est évidemment pas pour nous surprendre.
L’alliance LI-LI dans toute sa splendeur qui, en France, était en gestation après Mai 68 et a atteint sa vitesse de croisière en 1983-1984 : exclusion des ministres communistes du gouvernement, remplacement du très social Mauroy par l’oligarque Fabius, conversion du PS à l’européisme et création de SOS Racisme. Une coïncidence sans doute…
Désormais, les valeurs de gauche sont défendues par les Trump, Orban, Le Pen & Co tandis que la gôôche défend celles de l’oligarchie, dont le politiquement correct est le corollaire. Elle s’engage d’autant plus fanatiquement dans les questions sociétales associées (« anti-racisme », LGBT, dictature des minorités) qu’elle veut faire oublier sa trahison historique, son grand abandon de la question sociale.
Les GAFAM, qui ne sont qu’un outil, rappelons-le, représentent assurément les intérêts de ces trois pôles. Leur décision assez incroyable a cependant provoqué des remous jusque dans les milieux les plus inattendus ou les moins trumpophiles : gauchistes américains y compris tendance indigéniste, bobos macroniens ou encore président mexicain. En passant, relevons à l’inverse la mesquinerie de certains, une mixture parfois improbable où se côtoient l’hilarante, Bellingcat (émanation du MI6) et Elijah Magnier (qui a dégringolé depuis un certain temps déjà, ses analyses devenant de simples copié-collés de la position de Téhéran).
Le coup de force techno a donc transcendé les clivages et créé un malaise certain à tous les niveaux de l’échelle. S’il n’a pas encore réagi aux derniers événements, on sait que l’inévitable Soros est parti en croisade depuis un certain nombre d’années déjà contre les géants du numérique, accusés de vouloir créer un « monde totalitaire ». Et l’on constate que si, par facilité, d’aucuns mettent allègrement tout ce joli monde dans le même panier, la situation est en réalité bien plus complexe et illustre les fortes divisions qui agitent les hautes sphères.
Ce titre de 2018 résume beaucoup de choses :
Soros vs Trump mais Soros vs GAFAM alors que GAFAM vs Trump.
Cette complexité ne devrait cependant pas surprendre le fidèle lecteur de nos Chroniques qui, dans un billet sur le N.O.M. (ou plutôt son absence), montraient l’inextricable imbroglio qui a cours dans ce que l’on nomme, peut-être un peu facilement, « ceux qui nous gouvernent« …
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