Les documents de la FOIA révèlent qu’en 2011, les autorités suédoises ont eu des contacts confidentiels avec les autorités britanniques pour discuter de la manière d’extrader Julian Assange vers la Suède avant qu’il ne puisse demander des mesures de protection à la Cour européenne des droits de l’homme. Les États-Unis emploieront-ils des tactiques similaires pour l’extrader ?
Julian Assange pourra-t-il sortir après dix ans ? La décision de lui accorder ou non une libération sous caution est attendue aujourd’hui, après que la juge britannique Vanessa Baraitser se soit prononcée lundi dernier contre son extradition vers les États-Unis. Cependant, même si Baraitser lui accorde une libération sous caution de la prison de Belmarsh, Julian Assange devrait être confronté à un long combat contre son extradition vers les États-Unis, étant donné que les autorités américaines ont déjà annoncé leur appel.
Le fondateur de WikiLeaks pourrait se retrouver à se battre jusqu’à la Cour suprême britannique et même jusqu’à la Cour européenne des droits de l’homme. Cependant, il ne faut pas tenir pour acquis que Julian Assange pourra faire appel devant la Cour européenne avant d’être extradé vers les États-Unis. Un document exclusif obtenu par cet auteur après une longue procédure judiciaire au Royaume-Uni en vertu de la loi sur la liberté d’information permet de révéler que les autorités suédoises ont envisagé des tactiques pour l’extrader vers la Suède avant qu’il ne puisse faire appel devant la Cour européenne des droits de l’homme. Les États-Unis essaieront-ils d’utiliser des tactiques similaires ?
Le dossier remonte à décembre 2011, lorsque Julian Assange faisait l’objet d’une enquête en Suède pour des allégations de viol, une enquête maintenant abandonnée une fois pour toutes. Aujourd’hui, les seules accusations portées contre Julian Assange le sont par les États-Unis pour avoir publié des dossiers américains secrets qui ont permis de révéler des crimes de guerre et des actes de torture. C’est précisément et exclusivement pour ces accusations que les autorités américaines veulent l’extrader vers les États-Unis, où il risque 175 ans de prison.
Au lieu de cela, en décembre 2011, c’est la Suède qui a tenté d’extrader Assange afin de l’interroger sur des allégations de viol datant d’août 2010, même pas un mois après que WikiLeaks ait commencé à publier les dossiers secrets américains. Assange n’a jamais refusé d’être interrogé par les procureurs suédois : en fait, il avait déjà été interrogé en août 2010 à la demande d’Eva Finné, le premier procureur affecté à l’affaire suédoise, qui a mis fin à l’enquête préliminaire sur le viol tout en préservant l’enquête sur les agressions sexuelles. Ce que Julian Assange a refusé c’est l’extradition vers la Suède pour être interrogé, convaincu que son extradition vers la Suède aurait ouvert la voie à son extradition vers les États-Unis.
En décembre 2011, le fondateur de WikiLeaks venait d’obtenir l’autorisation de faire appel devant la Cour suprême britannique contre son extradition vers la Suède. Le document FOIA révèle que le 8 décembre 2011, le membre suédois d’Eurojust – l’agence de l’Union européenne pour la coopération en matière de justice pénale – a contacté son homologue britannique en exprimant son optimisme quant à un verdict de la Cour suprême britannique de Londres en faveur de la Suède. « D’après mon expérience dans des situations similaires au sein d’Eurojust, il est important de choisir le plus près possible de la décision afin d’éviter tout conflit avec un recours attendu devant la Cour européenne des droits de l’homme. Après le délai de 10 jours, il n’est plus possible de prendre des mesures coercitives à l’encontre de M. A ».
En d’autres termes, selon ce que le membre suédois d’Eurojust de l’époque a écrit dans ses e-mails au membre britannique, la Suède visait à extrader Julian Assange avant qu’il ne puisse faire appel à la Cour européenne pour des mesures de protection. Les Etats-Unis vont-ils essayer d’utiliser des tactiques similaires pour l’extrader ?
6 janvier 2021
Traduction : Romane Kohlev
Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir