Dans un contexte de tensions avec les Etats-Unis et Israël, l’Iran a annoncé débuter l’enrichissement d’uranium à 20%, niveau supérieur au taux autorisé par l’accord de 2015 mais nettement inférieur aux 90% nécessaires à un usage militaire.
L’Iran a enclenché le 4 janvier le processus destiné à produire de l’uranium enrichi à 20% à l’usine souterraine de Fordo, sa principale mesure de désengagement de l’accord nucléaire international annoncée dans un contexte tensions accrues avec les Etats-Unis.
Le même jour les Gardiens de la Révolution ont indiqué avoir saisi un pétrolier battant pavillon sud-coréen dans les eaux du Golfe, où sont déployés des navires américains. Séoul a réclamé la libération du tanker.
En mai 2019, un an après le retrait unilatéral des Etats-Unis de l’accord de 2015 sur le nucléaire iranien suivi du retour de lourdes sanctions américaines contre l’Iran, ce dernier a commencé à s’affranchir de ses principaux engagements.
Accusée par les Etats-unis et Israël, ses ennemis jurés, la République islamique d’Iran a toujours nié vouloir se doter de l’arme atomique.
L’administration du président américain Donald Trump a mené une brutale campagne de «pression maximale contre l’Iran», et les tensions entre les deux parties ont fortement augmenté depuis avec notamment des sabotages, attaques et saisies de navires et un drone abattu dans le Golfe.
«Le processus pour produire de l’uranium enrichi à 20% a commencé au complexe d’enrichissement Shahid Alimohammadi [Fordo]», à 180 km au sud de Téhéran, a déclaré le porte-parole du gouvernement iranien Ali Rabii, cité par la télévision d’Etat.
Selon lui, le président Hassan Rohani a donné l’ordre «ces derniers jours» et «le processus d’injection de gaz a commencé il y a quelques heures».
L’assassinat de Mohsen Fakhrizadeh comme détonateur
L’Iran avait fait part fin décembre à l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) de sa volonté d’enrichir de l’uranium à 20%, niveau pratiqué avant l’accord, loin des 90% nécessaires pour une utilisation militaire.
D’après le dernier rapport publié en novembre par l’agence onusienne, Téhéran enrichissait de l’uranium à un degré supérieur à la limite prévue par l’accord (3,67%) mais ne dépassait pas le seuil de 4,5%, et se pliait toujours à ses inspections.
Mais le dossier a connu des soubresauts après l’assassinat fin novembre près de Téhéran d’un physicien nucléaire iranien, Mohsen Fakhrizadeh.
Dans la foulée de cette attaque attribuée par l’Iran à Israël, le Parlement iranien, à majorité conservatrice, a adopté une loi préconisant de produire et stocker au «moins 120 kg par an d’uranium enrichi à 20%» et de «mettre fin» aux inspections de l’AIEA.
Le gouvernement de Hassan Rohani s’y était opposé. Mais en décembre, le Conseil des Gardiens de la Constitution, arbitre entre le gouvernement et le Parlement, a approuvé la loi.
Et le 4 janvier, Ali Rabii a expliqué que la position du gouvernement restait la même «mais qu’il se considérait obligé de mettre [cette loi] en oeuvre».
L’accord nucléaire a été conclu à Vienne en 2015 après des années d’âpres négociations entre l’Iran et les cinq membres permanents du Conseil de sécurité – Royaume-Uni, Chine, France, Russie, Etats-Unis – plus l’Allemagne.
Condamnation de l’UE et d’Israël
Alors qu’un briefing du directeur de l’AIEA était prévu plus tard dans la journée, l’Union européenne a averti que l’enrichissement à 20% «constituerait une entorse considérable» aux engagements iraniens «avec de graves conséquences en matière de non-prolifération».
«Il ne faut pas dramatiser. Le programme nucléaire reste totalement transparent et vérifiable. Nous devons nous concentrer sur les moyens de rétablir la mise en œuvre globale de l’accord», a affirmé de son côté l’ambassadeur russe auprès de l’AIEA, Mikhaïl Oulianov.
Pour le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, l’annonce sur l’enrichissement reflète «les intentions [de l’Iran] de développer son programme nucléaire militaire».
L’annonce iranienne intervient dans un contexte de tensions accrues surtout après le 1er anniversaire de l’assassinat du général iranien Qassem Soleimani dans une attaque américaine il y a un an à Bagdad et que Téhéran a promis de «venger».
Tensions avec la Corée du Sud
Dans les eaux du Golfe, les Gardiens de la révolution ont annoncé la saisie du pétrolier Hankuk Chemi, accusé d’avoir violé «les lois sur l’environnement marin» et l’arrestation des membres d’équipage.
Le ministère sud-coréen des Affaires étrangères a indiqué «qu’il exigeait que le navire soit relâché rapidement» et ajouté qu’il avait eu confirmation que l’équipage du navire était sain et sauf.
Face à ce qu’il a présenté comme des «menaces» iraniennes, le Pentagone a indiqué avoir décidé de finalement laisser le porte-avions USS Nimitz dans le Golfe.
Ces développements surviennent à environ deux semaines de la fin du mandat de Donald Trump et alors que la prise de fonction de Joe Biden fait espérer un apaisement.
Source: Lire l'article complet de Vigile.Québec