par Jean Goychman.
Dans une démocratie, l’adoption d’une constitution peut s’apparenter à une naissance « aux forceps ». La base est pourtant toujours la même : c’est la souveraineté populaire. Il s’agit donc de l’exprimer le plus fort possible dès le début. Ensuite, vient la description du fonctionnement de cette constitution dans les différents domaines. Ce fonctionnement ne peut qu’être confiscatoire de la souveraineté populaire puisqu’il s’agit de l’exercer via des intermédiaires qui agiront par délégation.
Pascal Lamy, longtemps responsable de l’OMC, avait inventé une forme nouvelle de la souveraineté populaire en parlant de la « démocratie transitive », dans laquelle le pouvoir était confié à des experts par des gens élus.
Mais le problème se complique encore lorsque s’entrechoquent deux souverainetés distinctes et que les rédacteurs ont pour consigne de ne renoncer à aucune des deux. C’est le cas des fédérations d’États. Lorsqu’elles veulent respecter les principes démocratique et notamment celui de la souveraineté populaire, elle doivent également inclure celui de la souveraineté des États fédérés, pris en tant que personnes morales. Si tel n’était pas le cas, les États les moins puissants ou moins peuplés seraient défavorisés, ce qui serait inacceptable.
Le problème des élections américaines
C’est justement le fait de savoir si une loi fédérale peut l’emporter, en cas de conflit, sur une décision de l’assemblée des représentants d’un État. Cela impliquerait la perte de la souveraineté de cet État, dont les propres lois seraient surpassées par la loi fédérale.
L’article de Jim Waurishuk, publié sur le Réseau International, donne un éclairage très précis sur ce sujet. Au delà du litige qui semble opposer certains états à d’autres, auxquels ils reprochent d’avoir modifié leur loi électorale de façon à faciliter le vote par correspondance, ce qui aurait également facilité la fraude électorale au détriment du candidat pour lequel ils ont voté, oblige la Cour Suprême à se positionner, de fait sur ce délicat problème. En n’acceptant pas la plainte des États demandeurs, elle confirme la suprématie de la Constitution qui défend la souveraineté des États.
C’est au nom de cette souveraineté qu’il se peut que le 6 janvier, le Congrès ne soit pas en mesure de donner un résultat définitif en constatant que Joe Biden n’a pas franchi la barre des 270 grands électeurs, si les votes des législatures locales des États défendeurs n’avaient pas confirmés les votes certifiés au niveau des gouverneurs et des tribunaux de ces États.
Dans ce cas, ce serait à la Chambre des Représentants de déterminer par un scrutin interne, dans lequel chaque État dispose d’une voix et d’une seule, de voter pour le candidat de son choix.
Donald Trump, disposant de 30 états, resterait ainsi à la Maison Blanche.
Tout le problème du fédéralisme
Il doit en toute circonstance concilier des intérêts parfois contradictoires. Lorsque des États choisissent de se fédérer, c’est qu’il cherchent à mettre en commun un certain nombre de choses, généralement pour éviter de multiplier à l’infini les mêmes institutions en les regroupant à un niveau fédéral tout en conservant la haute-main pour d’autres sur lesquelles ils tiennent à conserver leur indépendance de choix.
Se pose alors immanquablement le problème de la hiérarchie des juridictions. L’intégrité de l’Union étant un critère insurpassable (ils ont connu l’expérience de la Guerre de Sécession) il y a fort à parier que la Cour Suprême, garante de cette union aux termes de la Constitution, n’ira jamais fissurer cet édifice. Ce seront donc toujours les législatures locales qui l’emporteront sur les lois fédérales.
La démarche du Texas
Les avocats du Texas n’ignoraient certainement pas cet aspect particulier des choses. En introduisant cette plainte contre les quatre États sur ce motif particulier – opposition apparente des lois des États avec la loi fédérale, qui est celle de l’élection du président – ne visaient-ils pas justement à obtenir des juges du SCOTUS qu’ils réaffirment clairement cette prééminence qui risque de conduire au maintien de Donald Trump à la Maison Blanche ?
Ses adversaires hurleront probablement à la forfaiture, mais il n’empêcheront pas ce résultat, parfaitement conforme à la Constitution des États-Unis et donc, au respect de la souveraineté des États.
Les adversaires de Trump invoqueront probablement également la démocratie bafouée mais il n’empêche que dans un système fédéral, la souveraineté des États, qui donne à chacun d’eux une égalité de voix, est également une composante essentielle et nécessaire au maintien de l’Union.
Source : Lire l'article complet par Réseau International
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