La question de l’origine du monothèisme est du plus grand intérêt historique, quoique de peu de portée en pratique. Shahak rappelait (Histoire juive, religion juive) que ce n’est que tardivement qu’il devint évident ; et il rappelait aussi que le judaïsme rabbinique actuel n’est pas celui de la Bible :
Ce qui nous occupe ici, cependant, ce n’est pas le judaïsme biblique, mais le “classique” ; or, il est clair, même si cela est bien moins compris, que lui aussi, durant ses quelques dernières centaines d’années, s’est dans l’ensemble éloigné du pur monothéisme. On peut en dire de même du corps de doctrine effectivement dominant dans le judaïsme orthodoxe d’aujourd’hui, qui est la continuation directe du judaïsme classique. La désagrégation du monothéisme commence aux XIIe et XIIIe siècles avec le développement de la mystique juive (la cabale [ou Kabbale]) ; à la fin du XVIe siècle, celle-ci aura conquis, à peu près, tous les centres du judaïsme. C’est contre ce mysticisme et son influence, plus que contre toute autre chose, que la Haskalah (le mouvement des Lumières juif), née de la crise du judaïsme classique, eut à engager le combat ; et pourtant, dans l’orthodoxie juive actuelle, surtout chez les rabbins, la cabale a conservé sa prédominance. Le mouvement Gouch Émounim, par exemple, s’inspire dans une grande mesure d’idées cabalistiques.
La majorité des Juifs aujourd’hui sont athées, agnostiques ou indifférents, et la majorité de ceux qui se réclament d’une religion sont cabalistes, donc polythéistes.
Donc pour la fort intéressante question historique, on remarque que l’inexistence des dieux autres que le créateur de toute chose n’apparaît dans la Bible qu’avec certains des derniers prophètes. Toutefois on peut aussi considérer qu’elle était antérieurement implicite. Le recours à l’archéologie peut amener à nuancer cette dernière assertion, mais, en cherchant ainsi à savoir ce qu’il en était avant les premiers documents, on autorise la réplique selon laquelle tel ou tel état constituait déjà une altération ou une particularité d’une situation plus ancienne.
Un fort intéressant débat, dont le dernier mot n’est pas pour demain. Et c’est normal puisque l’histoire, science humaine, comme toute science est un débat sans fin.
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