par Andrew Korybko.
La récente signature par Trump du Rodchenkov Act permettant aux États-Unis de poursuivre les athlètes étrangers accusés de dopage équivaut à l’internationalisation de la conspiration du Russiagate qui consiste à attribuer à la grande puissance eurasiatique la responsabilité de tout ce qui va mal dans le monde.
Cette signature a suscité une forte réaction de la porte-parole du Ministère russe des Affaires Étrangères, Zakharova. Voici ce qu’elle a déclaré à propos de cette évolution, cité par la TASS :
« Comment peuvent-ils expliquer qu’en tant que leaders, comme ils le claironnent dans le monde entier, ils n’ont pas de victoires dans leurs disciplines sportives traditionnelles ? Ce fait devrait être expliqué d’une manière ou d’une autre. Et il peut être assez facilement expliqué : ils s’attardent sur l’horrible Russie, sur la conspiration mondiale, sur les réseaux de dopage qui embrigadent tout le monde. Cette loi, en fait, a exposé leurs véritables intérêts », a-t-elle déclaré dans une interview au programme Fetison sur la chaîne de télévision Zvezda…
« Pourquoi ce problème est-il apparu ? Je pense que c’est parce que les États-Unis se sont habitués, au cours des dernières décennies, à dominer dans de nombreux domaines. Le sport est une image d’un pays. Le sport est la quintessence des réalisations dans de nombreux domaines. Et ils ne peuvent pas admettre qu’ils ne peuvent plus rivaliser dans le cadre de règles communes. Cela va à l’encontre de leur idéologie interne », a-t-elle déclaré, ajoutant que les États-Unis détestent évidemment « reconnaître leur défaite ou leur échec »…
« C’est ainsi que tout fonctionne avec eux. Ainsi, ils se contentent soit de se soustraire aux règles et normes existantes, soit de les réécrire à leur guise, soit d’inventer une autre réalité virtuelle et de contraindre les autres à l’accepter comme une réalité », a noté Zakharova ».
En d’autres termes, la théorie de la conspiration du Russiagate a maintenant pris une dimension mondiale et est entrée dans le domaine du sport international. Le but est ainsi de blâmer la grande puissance eurasiatique pour tout ce qui va mal dans le monde. C’est aussi un bouc émissaire idéologique commode sur lequel les États-Unis peuvent compter chaque fois qu’ils perdent dans le domaine du sport.
Zakharova a mis le doigt sur le problème en insinuant la puissante influence que l’idéologie de l’exceptionnalisme américain exerce sur tout. Les États-Unis ne peuvent tout simplement pas accepter que nous ne sommes plus dans le monde d’une superpuissance unipolaire, même si on peut dire qu’ils restent la « première parmi ses pairs » dans l’ordre mondial multipolaire émergeant.
Le plus ironique dans tout cela est que Trump est entré à la présidence en se défendant contre la théorie de conspiration du Russiagate des Démocrates, mais qu’il pourrait maintenant en sortir en promouvant exactement la même réalité virtuelle, bien qu’au niveau mondial en la diffusant dans le domaine du sport.
Le sport est en effet un élément important du prestige national et de la puissance douce, on comprend donc pourquoi cette question est sensible pour tous. Il ne fait également aucun doute que certains problèmes de dopage existent réellement, mais le recours à des moyens judiciaires extraterritoriaux autoproclamés pour les résoudre est la mauvaise approche à adopter en raison de la probabilité d’abus.
Les États-Unis ont un long passé qui prouve leur prédisposition à la « guerre juridique » dans la poursuite de ce qu’ils considèrent comme leurs intérêts nationaux, il n’y a donc aucune raison de croire qu’ils n’appliqueront pas les mêmes tactiques dans le domaine du sport. Accuser certains de ses meilleurs concurrents de dopage puis menacer de les poursuivre n’est pas très sportif.
Mais les États-Unis ont toujours été de mauvais perdants, ce qui explique pourquoi ils ont recours à de tels moyens, car ils détestent « reconnaître leur défaite ou leur échec », comme l’a fait remarquer Zakharova. La réalité contredit leur idéologie de l’exceptionnalisme américain, ce qui explique pourquoi les États-Unis déforment ensuite la réalité pour préserver cette idéologie.
Comme les Américains se disputent de plus en plus sur les questions raciales, politiques et autres, l’une des rares choses qui peut les rapprocher temporairement est le nationalisme sportif. Il est donc important que les États-Unis veillent à ce que leurs meilleurs concurrents sportifs soient disqualifiés avant les futures compétitions.
Le Rodchenkov Act n’est donc rien d’autre qu’une couverture pour manipuler les événements sportifs internationaux, tout comme les sanctions anti-chinoises jouent un rôle similaire dans l’économie internationale. Dans les deux cas, les États-Unis recourent à des moyens judiciaires extraterritoriaux dans une tentative désespérée de truquer les règles afin de préserver leur domination en déclin.
L’esprit du Russiagate a réussi à prendre le contrôle de l’establishment politique américain et est aujourd’hui considéré à tort comme une caractéristique de la politique internationale. Il explique commodément toutes les défaillances des États-Unis en présentant la Russie comme le bouc émissaire, bien que la Chine soit également de plus en plus souvent blâmée.
Quoi qu’il en soit, les États-Unis ne peuvent tout simplement pas accepter d’être tenus pour responsables lorsqu’ils ne sont pas en tête, que ce soit dans les événements sportifs internationaux ou dans l’économie internationale. Il faut toujours blâmer quelqu’un d’autre, sinon l’idéologie de l’exceptionnalisme américain perdrait de son lustre et serait exposée comme instrument de contrôle.
source : http://oneworld.press
traduit par Réseau International
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