L’Accord JCPOA « Plus + Plus » de Joe Biden avec l’Iran n’est pas une Option réaliste
Par Moon of Alabama − Le 7 décembre 2020
Alastair Crooke a rédigé un autre résumé concis du problème de la politique étrangère américaine concernant l’Iran intitulé « L’accord de Biden avec l’Iran fait face à la pilule amère de l’Iran » :
Biden dit qu'il veut - par la diplomatie - conclure un accord nucléaire avec l'Iran - c'est-à-dire un JCPOA «Plus + Plus». Les Européens partagent désespérément cette aspiration. Mais les «protocoles d’accord» dont son «A-Team» hérite de l’ère Obama ont toujours contenu les graines de l’échec.
La question iranienne ne concerne pas les missiles nucléaires. Ce sont des armes impraticables et l’Iran n’a aucun intérêt à les acquérir. La question nucléaire est simplement utilisée comme un levier pour faire pression sur l’Iran.
Le vrai problème est le rôle de l’Iran dans la région. Les chiites sont majoritaires dans le golfe Persique et les diverses dictatures arabes sunnites les considèrent comme un danger pour leur pouvoir. Israël exagère la question de l’Iran pour faire pression sur les États-Unis afin d’obtenir des armes gratuites et des subventions supplémentaires.
Ce que veut l’administration Biden, et ses caniches européens, c’est que l’Iran ait moins d’influence dans sa région et moins de missiles pour défendre son pays des attaques.
L’Iran n’acceptera évidemment aucune restriction sur l’un ou l’autre. Et pourquoi le devrait-il ?
Après quatre ans de sanctions sévères de l’administration Trump, largement soutenues par les Européens, l’Iran a changé sa structure et son orientation économiques. Les revenus pétroliers jouent désormais un rôle beaucoup moins important dans le budget du gouvernement qu’avant les sanctions. L’économie s’est adaptée en se concentrant sur les affaires avec les pays non occidentaux. L’Iran regarde vers l’est.
De nouvelles sanctions ne modifieront donc pas la position ou le comportement de l’Iran. À un moment donné, l’administration Biden devra admettre ce fait.
Cela laisse alors la guerre comme seule option pour atteindre le désir exprimé par «l’Occident». Mais la «pilule amère» de la posture militaire de l’Iran empêche cela.
En septembre 2019, des missiles et des drones de fabrication iranienne ont anéanti la moitié de la production pétrolière de l’Arabie saoudite.
En janvier 2020, l’Iran s’est vengé du meurtre américain du général de division Qassem Soleimani avec une attaque de missiles précise sur une base américaine en Irak.
Les missiles précis de l’Iran d’une portée de 2 000 kilomètres peuvent être tirés en masse depuis des silos souterrains. N’importe quel attaquant aurait beaucoup de mal à les détruire.
L’Iran peut non seulement défendre sa mer, ses airs et son sol, mais il peut riposter contre une agression avec des attaques de précision sur toutes les bases américaines au Moyen-Orient et détruire toutes les installations d’exportation de pétrole arabes. Ses frères d’armes libanais, le Hezbollah, ont leurs propres capacités de missiles qui sont suffisantes pour détruire la plupart des industries israéliennes. Si l’Iran est attaqué, ils feront, comme ils l’ont promis, «leur devoir».
Un responsable de la marine américaine a admis hier que les États-Unis sont tenus en échec par l’Iran :
Le haut responsable de la marine américaine au Proche-Orient a déclaré dimanche que l'Amérique était parvenue à une «dissuasion difficile» avec l'Iran après des mois d'attaques régionales et de saisies en mer, alors même que les tensions restent vives entre Washington et Téhéran au sujet du programme nucléaire de la République islamique. Le vice-amiral Sam Paparo, qui supervise la 5e flotte de la marine basée à Bahreïn, a pris un ton académique dans ses commentaires au dialogue annuel de Manama organisé par l’Institut international d’études stratégiques. Il a déclaré avoir «un respect sain» tant pour la marine régulière iranienne que pour les forces navales de ses gardiens de la révolution paramilitaires. «Nous avons atteint une dissuasion difficile. Cette dissuasion difficile est exacerbée par les événements mondiaux et par les événements en cours de route», a déclaré le vice-amiral.
Les sanctions ne donneront pas à «l’Occident» les résultats qu’il souhaite. La seule alternative pour arriver à ces résultats est une guerre à grande échelle contre l’Iran dans le but de renverser son gouvernement. Mais une telle guerre ne peut être menée car elle détruirait le Moyen-Orient et entraînerait l’économie mondiale dans une profonde récession. En bref, ce n’est pas une alternative.
Comme l’écrit Crooke :
La question «sous le tapis» est la réelle prouesse militaire conventionnelle de l’Iran, et non ses armes nucléaires imaginaires. Et c'est pourquoi Israël insistera sur une pression maximale - c'est-à-dire plus (et pas moins) de sanctions extrêmes des États-Unis - sur l'Iran, pour imposer des contraintes sur son arsenal conventionnel, ainsi que sur son programme nucléaire. Et cela n’arrivera tout simplement pas - l’Iran ne le fera pas. «Cela va être très, très difficile à négocier», dit Friedman, «c'est compliqué». En effet. Poursuivre les négociations selon les anciens protocoles d'Obama amènera inévitablement Biden directement à la menace explicite de «l'option militaire» - qui semble exactement correspondre à l'intention de Netanyahu. Paradoxalement, c’est précisément cette nouvelle capacité conventionnelle «intelligente» iranienne qui pourrait en fin de compte dissuader Biden de suivre la voie de l’option militaire - la crainte de déclencher une guerre à l’échelle de la région qui pourrait détruire les États du Golfe. Et c’est cette transformation iranienne qui indique pourquoi «l’option militaire» n’est pas une véritable option: une opération militaire approuvée par les États-Unis est une option «pilule amère» pour la région.
Un accord JCPOA «Plus + Plus» n’aura pas lieu. Il n’y a aucun moyen réaliste d’y parvenir.
Comme cela est évident, on se demande vraiment pourquoi les caniches européens font pression. Qu’espèrent-ils y gagner ?
Heureusement, l’Iran a donné à Biden une autre option. Il peut annuler toutes les sanctions introduites par Trump et revenir à l’accord JCPOA. L’Iran a promis de restreindre à nouveau son programme nucléaire et de rester dans les limites du JCPOA dès que Biden lèvera les sanctions. Le parlement iranien a mis une limite de temps à cette option en enjoignant à son gouvernement de cesser d’adhérer au JCPOA d’ici février.
Joe Biden peut accepter cette offre ou perdre quatre ans à se prendre la tête inutilement avec les problèmes iraniens. Le temps n’est pas de son côté. L’Iran ne fera que se renforcer. Il continuera à œuvrer pour ses intérêts légitimes dans sa région, à jouer un rôle qui corresponde à sa taille naturelle.
Il est temps que les États-Unis reconnaissent et acceptent cela.
Moon of Alabama
Traduit par jj, relu par Wayan pour le Saker Francophone
Source : Lire l'article complet par Le Saker Francophone
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