«Vous me connaissez, chers soldats […]. Je voudrais vous dire que nous ne pouvons pas, par peur et par poltronnerie, laisser s’installer durablement la dictature clanique de M. Alassane Ouattara et contempler l’empire de la terreur s’étendre sur notre pays et prendre possession de l’âme de notre nation. C’est pourquoi je demande à vous soldats, sous-officiers, officiers, officiers supérieurs et officiers généraux de notre armée, de vous regarder dans le miroir de votre âme et de votre conscience et d’agir pour stopper les tueries», a-t-il déclaré.
Pour Guillaume Soro –qui a été le ministre de la Défense d’Alassane Ouattara entre 2011 et 2012–, il faut que l’armée «agisse pour rétablir la paix et la concorde», pour redonner à la Constitution ivoirienne «ses lettres de noblesse» et «mettre un terme au spectre de la guerre civile qui menace» la Côte d’Ivoire.
«Le déraillement n’est pas loin»
Interrogé par Sputnik, Sylvain Nguessan, directeur de l’Institut de stratégies d’Abidjan, estime que «dans la configuration actuelle, les chances que l’appel de Guillaume Soro ait un écho favorable auprès des forces armées sont faibles».
De son côté, l’expert en géopolitique et spécialiste de l’Afrique subsaharienne Hichem Ben Yaïche pointe du doigt le risque que représente l’appel de l’ancien chef rebelle, qui a été le grand artisan de l’accession au pouvoir d’Alassane Ouattara en 2011 et soutien indéfectible de sa réélection en 2015.
«Je pense que Guillaume Soro va un peu trop loin. Il a tort de lancer cet appel. Le désordre est déjà là en Côte d’Ivoire et il risque de s’amplifier. Le déraillement n’est pas très loin», a-t-il déclaré.
Pour Hichem Ben Yaïche, «le pays est sur le fil du rasoir, tout peut basculer d’un moment à l’autre». Et «la temporalité politique hors-sol» du Président ivoirien n’arrange pas les choses. «Alassane Ouattara gère mal la situation. Il ne mesure pas le danger actuel à sa juste valeur. Toutes les plaies sont en train de se rouvrir», a-t-il expliqué.
L’impasse
Il ressort des résultats provisoires proclamés le 3 novembre par la Commission électorale indépendante (CEI) qu’Alassane Ouattara s’est très largement imposé dès le premier tour de la Présidentielle du 31 octobre, avec 94,27% des voix. Le candidat indépendant Kouadio Konan Bertin a obtenu 1,99%. Quant à l’ancien Président Henri Konan Bédié et l’ex-Premier ministre Pascal Affi Nguessan, qui ont boycotté le scrutin, ils sont respectivement crédités de 1,66% et 0,99% des votes.
Le taux de participation a été le véritable enjeu de cette élection dont l’issue officielle ne faisait aucun doute. Selon la CEI, il s’est élevé à 53,1%, quand l’opposition en évoque à peine 10%. Le boycott du scrutin et les violences qui ont eu lieu avant et pendant sa tenue –et qui ont occasionné plusieurs dizaines de morts depuis août– entachent la légitimité de la réélection du Président sortant.
Les partis et groupements politiques de l’opposition soutiennent que ce troisième mandat d’Alassane Ouattara est «illégal et anticonstitutionnel», et susceptible d’entraîner une guerre civile. Ils ont, à cet effet, créé un Conseil national de transition, dirigé par Henri Konan Bédié, âgé de 86 ans.
Ce Conseil s’est donné pour missions de «préparer le cadre de l’organisation d’une élection présidentielle juste, transparente et inclusive, de mettre en place un gouvernement de transition et de convoquer des assises nationales pour la réconciliation nationale en vue du retour à une paix définitive en Côte d’Ivoire».
Le gouvernement ivoirien, qui considère cette action comme un «acte de sédition», a prestement réagi. Ainsi, depuis le 3 novembre, les domiciles à Abidjan de plusieurs leaders de l’opposition sont encerclés par les forces de l’ordre.
L’ONU, qui a pris note de la réélection de Alassane Ouattara, «condamne les violences qui ont eu lieu avant, pendant et après la présidentielle, et appelle tous les acteurs politiques à respecter l’ordre constitutionnel et à s’engager dans un dialogue constructif et inclusif afin de trouver une issue à la crise».
«La situation est inquiétante. On assiste à une escalade car personne ne veut céder. Chacun se nourrit des actions de l’autre. La Côte d’Ivoire n’a pas appris de son passé, et là réside le danger», prévient Hichem Ben Yaïche.
En 2010, les contestations électorales –nées du fait que le Président sortant Laurent Gbagbo et son challenger du second tour Alassane Ouattara ont chacun revendiqué la victoire– ont occasionné la mort de plusieurs milliers d’Ivoiriens.
Source : Lire l'article complet par Réseau International
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