Le Regroupement national des conseils régionaux de l’environnement du Québec (RNCREQ) recommande au gouvernement de ne pas aller de l’avant avec le projet d’usine de liquéfaction de gaz naturel à Saguenay et de plutôt miser sur une transition verte. C’est la conclusion de son mémoire présenté au Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) cette semaine.
Un projet incompatible avec les objectifs de réduction des GES
Dans les dernières années, le gouvernement a réitéré sa volonté de mettre en place des mesures pour atteindre les cibles de réduction des gaz à effet de serre et de favoriser une transition vers une économie à faible empreinte carbone en adoptant plusieurs politiques publiques. Or, de par son envergure, ce projet est incompatible avec les objectifs du gouvernement en matière de lutte contre les changements climatiques et porterait préjudice à l’atteinte des cibles de diminution des GES.
Aucun acheteur pour cette énergie dite de substitution
Le RNCREQ rappelle que le scénario de substitution du charbon par du gaz fossile liquéfié n’a pas été démontré. Bien que le promoteur prétende que le GNL exporté servira à la substitution d’énergies fossiles plus polluantes, cette affirmation ne peut être corroborée puisqu’il ne peut confirmer la signature de contrats à long terme avec des acheteurs étatiques ou industriels. « En considérant l’impact de la fracturation hydraulique et des émissions fugitives de méthane, de même que de l’absence d’acheteurs et la menace pour la biodiversité, le projet est en complète contradiction avec les objectifs environnementaux dont le gouvernement s’est dotés, souligne Marie-Philippe Chouinard, analyste du RNCREQ. En tant qu’organisme œuvrant pour la protection de l’environnement, nous ne pouvons soutenir ce projet. Le développement économique du Québec réside dans une transition verte et ce projet n’en fait simplement pas partie. »
Les risques inhérents à la fracturation hydraulique
Le RNCREQ fait valoir que la fracturation hydraulique est une source importante d’émissions fugitives de méthane dans l’atmosphère, et que celles-ci pourraient annuler les bénéfices d’un scénario de substitution énergétique du charbon vers le gaz naturel liquéfié. Il soutient par ailleurs que la fracturation hydraulique comporte son lot d’impacts environnementaux, tels que les risques de contamination des eaux de surface et des nappes phréatiques, des risques liés à la qualité de l’eau par l’émission de contaminants atmosphériques ainsi que des risques liés au sol et de sismicité induite.
L’augmentation du trafic maritime et son impact néfaste sur la faune aquatique
De nombreux projets d’envergure sont en cours de planification dans le secteur du Saguenay, et on estime que le trafic maritime dans le Saguenay pourrait tripler d’ici dix ans. Plus de 30 % de la circulation maritime serait attribuable au projet. Le promoteur admet « qu’en raison de l’augmentation de la navigation qu’il occasionne, [le projet] est susceptible de comporter un risque pour le rétablissement de la population de bélugas du Saint Laurent ainsi que pour les autres mammifères marins s’y retrouvant ». Le RNCREQ est inquiet à l’égard de l’accroissement du nombre de navires-citernes qui présente un risque notable pour l’avenir de cette espèce. Face à ce constat préoccupant, le RNCREQ mentionne que ce projet va également à l’encontre du Programme de rétablissement du béluga élaboré par le gouvernement du Canada en vertu de la Loi sur les espèces en péril.
Un bémol au sujet du processus de consultation peu propice aux échanges
Le RNCREQ déplore les nombreuses réponses approximatives du promoteur aux différentes questions soumises et l’absence d’experts pour y répondre lors de la première partie des audiences publiques. De plus, le RNCREQ souligne le déséquilibre entre le temps imparti aux citoyen.ne.s pour contextualiser leur questions par rapport au temps accordé au promoteur pour y répondre. « La qualité du processus décisionnel est un élément clé de l’acceptabilité sociale des projets. Nous croyons que le déroulement de la première partie des audiences n’a pas favorisé un climat propice à la participation pleine et entière des citoyen.ne.s, et que l’équité de la décision pourrait en être affectée. Le BAPE a su, par le passé, démontrer sa capacité à bien cerner les enjeux et les préoccupations des citoyens, nous pensons qu’il est en mesure de faire mieux. », conclut Martin Vaillancourt, directeur général du RNCREQ.
Les principales préoccupations du RNCREQ :
- L’approvisionnement en gaz naturel est essentiellement issu de gisements non conventionnels impliquant l’utilisation de la fracturation pour son extraction ;
- Le projet est incompatible avec les objectifs gouvernementaux de réduction des GES, tant québécois que canadien ;
- L’absence de contrats fermes démontrant que le gaz naturel liquéfié sera uniquement vendu à des fins de substitution d’énergie plus polluante ;
- La portion de GNL qui sera vendu sur le marché “spot” invalide le scénario de substitution proposé par le promoteur, faute de connaître l’acheteur avant la vente ;
- Les émissions fugitives du projet entier annuleraient les efforts d’un scénario de substitution ;
- Seules les émissions de GES directes du complexe de liquéfaction seront évaluées ;
- L’étude d’analyse de cycle de vie réalisée par le CIRAIG ne peut conclure que le GNL contribuera à la transition énergétique ;
- D’ici 2030 le triple des navires circuleraient dans la voie maritime du Saguenay, ce qui engendrera de nombreux impacts environnementaux sur les mammifères marins et leur écosystème.
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