Vous allez comprendre. Pour cela, il faut retourner un peu en arrière, un voyage dans le temps, mais pas très loin. Nous sommes le 8 septembre 2020 sur LCI, et Adrien Borne, qui est beaucoup plus journaliste que nombre de ses confrères, reçoit le Pr Toussaint, Jean-François Toussaint. Il est question des tests et la question est d’importance car le système médico-médiatico-politique est en train de nous vendre une deuxième vague de Covid-19 à base d’une explosion des cas positifs (5000, puis 10 000, puis 15 000 par jour), alors que la première vague se basait elle sur des cas mortels (500 par jour environ en période de pointe). Entre le cas positif souvent non contagieux et le cas mortel, il y a un gouffre que les obligés du Système franchissent allègrement.
« En amont de tout cela on voit bien que l’effet n’est pas celui d’une ré-augmentation de la mortalité mais seulement celui d’une explosion de cas positifs, mais si on comprend que les tests sont trop sensibles, on a une partie – non pas toute l’explication – mais on a une très grande partie de l’explication. »
Ce n’est pas le cas de Toussaint, qui explique patiemment, clairement, et doctement pourquoi ces tests ne sont pas faux, mais en tout cas manipulables. Et big up à Adrien Borne (dont la carrière vient de s’effondrer à l’instant) pour avoir laissé parler le brillant prof sans démolir l’homme, mais en cherchant au contraire la faille dans le discours de son invité.
C’est ça, le vrai job de journaliste, et c’est aussi parce que LCI se tire la bourre avec CNews sur l’audience et la popularité que des Toussaint, des Toubiana et des Raoult peuvent y développer leurs arguments. Il y a une autre raison, politique celle-là, à cette ouverture à la « dissidence » médicale derrière la concurrence des chaînes d’infos, c’est l’offensive de droite contre l’axe Macron-Castex-Véran, auteurs d’une politique impopulaire, même si les médias soumis et les sondages truqués disent le contraire. Concrètement, ce n’est pas parce que la majorité des Français se soumettent au masque-bâillon qu’ils ne grognent pas contre les directives absurdes du gouvernement, une absurdité que Toussaint démolit sans s’en prendre directement au gouvernement…
Et parce que sur E&R on ne coupe pas les gens, pas la parole ni le contexte, voici l’échange dans sa presque totalité.
Toussaint : Il est très important de comprendre que nous découvrons actuellement la puissance diagnostique de ces tests et cette puissance extraordinaire nous remet au cœur du vivant, c’est-à-dire que nous sommes en permanence dans un bain viral et bactérien qui nous enveloppe, qui nous anime et qui nous pénètre. Nous sommes porteurs de dix fois plus de bactéries et de virus que nous n’avons de cellules propres avec notre ADN. Et que font ces tests ? Ils font, non pas le diagnostic d’une maladie grave comme c’était le cas en mars et en avril et, à ce moment-là ils ont été développés pour justement aller chercher tous ceux qui, gravement malades, devaient être testés, diagnostiqués, tracés avec leurs sujets contacts et isolés. Cette stratégie-là était extrêmement importante et devait reposer sur des tests avec très peu de faux négatif, donc on devait avoir une grande sensibilité.
Qu’a-t-on maintenant ? Une épidémie qui est beaucoup moins létale, cent fois moins de décès qu’au printemps, et nous avons des tests qui sont surpuissants. Nous arrivons donc à 90 % de formes de tests qui vont trouver positifs des gens qui ne sont pas transmetteurs, qui ne sont pas contagieux et qui sont juste porteurs soit d’un virus qu’ils ont rencontré, c’est le cas de Steve Mandanda en équipe de France, soit d’un virus contre lequel ils ont réagi eux-mêmes en défendant leur organisme, soit simplement de traces virales et, pour 10 % d’entre eux, de virus encore actifs sur lesquels là il faut trouver les bons tests pour trouver cette population-là.
Toussaint : Je vais préciser les choses sur les tests. Si vous avez comme au printemps cent millions de virus détectés dans un microlitre, un microlitre ça veut dire un petit cube d’un millimètre de côté hein c’est tout petit, si vous avez cent millions de virus vous êtes dans les formes graves qui sont celles que nous avons connues au printemps. Actuellement nous avons des tests qui permettent de détecter un virus dans la même quantité. Un virus, c’est-à-dire cent millions de fois moins. Et aucun des tests rendus par les personnes qui les testent avec les bonnes méthodes ne disent quel est le seuil avec lequel l’amplification a été faite et qui change tout, parce que au-delà de 24 cycles d’amplification on sait que les personnes sont très peu contagieuses, au-delà de 32 on va arriver dans des zones qui sont infinitésimales et au-delà de 35 on ne peut même plus avoir en culture un virus détecté. Ce qui veut dire, une fois de plus, que l’importance maintenant de la charge virale doit être communiquée pour qu’on puisse comprendre sur le plan épidémiologique à quoi l’on a à faire.
Borne : Quand on est testé positif, il faudrait qu’on sache qu’elle est notre charge virale et est-ce qu’on est, du coup, contagieux.
Toussaint : Absolument, puisque c’est ça qui va donner le risque de contagiosité et le risque de transmettre à ses grands-parents, ce qui serait fort dommageable actuellement alors que l’on voit régresser progressivement la létalité. Or ces mesures-là ne sont pas données. Il faut qu’elles le soient.
Borne : On peut les donner aujourd’hui quand on fait un test PCR ?
Toussaint : Il faut qu’elles le soient puisqu’on sait précisément à combien de cycles d’amplification les techniques, qui dépendent toutes hein… il y a plus de 30 tests qui ont été autorisés… actuellement donc elles ont toutes des seuils différents, il faut que ces seuils soient transmis de façon à ce que l’on sache si l’on est en grand danger de transmission ou au contraire avec des présences tellement faibles qu’on est potentiellement révélé comme quelqu’un qui a su se défendre et, au contraire, on a un signe là de guérison qui est potentiellement celui de Steve Mandanda.
Borne : On voit beaucoup de Français faire la queue pour prendre le temps de faire un test. On nous dit : ces tests ils sont fiables sur le plan technique… mais tout dépend du temps et du moment où on le fait. Ça on voit dans ces files d’attente des Français qui se présentent en ayant plus ou moins respecté, parce qu’on sait pas à quel moment on a été exposés, plus ou moins respecté un temps d’incubation. Alors est-ce que cette stratégie a encore un sens ? On nous parle de 30 % de faux négatifs, ça paraît considérable. Sur un million de tests ça voudrait dire qu’il y en aurait 300 000 potentiellement qui n’auraient pas la valeur qu’on attendrait d’eux ?
Toussaint : Absolument, donc il y a à la fois la difficulté sur la sensibilité de cette erreur. On a surtout le fait de diagnostiquer maintenant non plus sur les personnes cibles et c’est la grande difficulté sur lesquelles il faut recentrer pour les personnes les plus à risques actuellement. Et quand on a ces queues que l’on voit sur les abords de laboratoires de biologie évidemment on a beaucoup moins de places pour les gens malades avec une très haute probabilité après test qui permette à ce moment-là de faire le… Mais ce que l’on a aussi et surtout c’est qu’on a sur ces faux négatifs, on a 3 % de faux positifs qui sont liés à une erreur d’ARN viral, ça veut dire 4500 par jour et vous donniez les chiffres, on a diagnostiqué sur la semaine dernière à peu près 6000 tests positifs par jour dont 4500 sont potentiellement une erreur d’ARN viral.
Borne : Mais comment on peut faire un faux test positif ?
Toussaint : Et bien c’est simplement parce que les séquences qui sont prises ne correspondent pas précisément à celles du SARS-CoV-2, donc ça c’est le premier point sur les faux positifs d’ARN. Mais plus encore, une fois qu’on est positif, c’est ce que l’on trouve sur l’intensité et donc ça revient au débat sur la charge virale, la quantité de virus présente, si on a 40 cycles d’amplification comme c’est le cas pour un certain nombre de tests, eh bien à ce moment-là ça veut dire que la présence virale est tellement faible que on n’est plus contagieux et ça change tout sur le plan de la stratégie de santé publique. Parce que au printemps on avait besoin d’avoir ces tests-là dans la forme létale de la maladie ; maintenant qu’on est dans une phase dans laquelle il faut qu’on comprenne et qu’on limite la transmission, il faut avoir des tests qui soient beaucoup moins sensibles. Et c’est ce que l’étude d’Harvard qui a été publiée la semaine dernière nous rappelle : s’ils sont trop sensibles, alors on court à la catastrophe.
Borne : Alors en fait on est parti d’un questionnement en se disant : est-ce que c’est fiable en termes de stratégie hein encore une fois. Au fond, est-ce que c’est trop fiable, c’est peut-être ça qu’on devrait se dire ? C’est-à-dire qu’on a des tests qui sont inadaptés, qui sont trop pointus quelque part.
Toussaint : Et bien c’est ce que l’on voit, c’est-à-dire que la présence maintenant d’une immense capacité de diagnostic, la puissance de la technologie finalement aboutit à une situation de surdiagnostic. On l’avait déjà connu par exemple pour les dépistages dans un certain nombre de situations de cancers par exemple. On le voit aussi sur les embolies pulmonaires avec un certain nombre de tests d’imageries. Eh bien là on est dans la même situation dans laquelle le surdiagnostic entraîne des conséquences et vous l’avez vu pour la mise à l’écart de la vie publique, mais ça concerne tous les Français de la même façon. Si 90 % des Français testés positifs actuellement ne nécessitent pas d’isolement comme le dit l’étude d’Harvard, alors à ce moment-là ça remet en question tout ce que l’on a décidé actuellement sur cette stratégie-là.
Borne : À la lumière de ça, vous nous dites qu’aujourd’hui on pourrait être positif et ne pas s’isoler.
Toussaint : Eh bien c’est ce que les Suisses ont proposé en mettant un masque, en mettant un masque seulement pour limiter cette contamination. C’est ce qu’a fait le Premier ministre d’ailleurs au cours de cette étape du Tour de France. Et puis l’autre question c’est de savoir pourquoi est-ce qu’on réduit de quatorze à sept jours la quatorzaine qui va devenir une septaine… alors que dans le même temps on nous dit mais il y a une augmentation considérable de la pandémie qui n’est qu’une épidémie de cas positifs. Le nombre de morts est toujours en dessous de vingt, en moyenne, par jour depuis mi-juillet. Donc ça va faire bientôt huit semaines qu’on a une phase qui ne ré-augmente pas en terme de létalité et qui ne voit augmenter que ces sas positifs.
Toussaint : Mais en amont de tout cela on voit bien que l’effet n’est pas celui d’une ré-augmentation de la mortalité mais seulement celui d’une explosion de cas positifs, mais si on comprend que les tests sont trop sensibles, on a une partie – non pas toute l’explication – mais on a une très grande partie de l’explication.
Borne : Allons au bout du raisonnement professeur Toussaint, si je vous écoute, je me dis que finalement les tentes qu’on a vues installées à Paris ou ailleurs où chacun peut se présenter pour se faire dépister, on devrait les fermer ?
Nous terminerons sur une question du journaliste, qui ouvre quand même son parapluie à la fin :
« Oui mais ça vous conviendrez, alors vous n’êtes pas politique et moi non plus, vous n’avez pas à prendre des décisions qui engagent la vie de chacun mais c’est très difficile parce que ça peut paraître très théorique, en pratique c’est plus difficile à décliner concrètement sur le terrain, non ? »
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