Une tribune signée du haut fonctionnaire et essayiste franco-belge Éric Verhaeghe publiée par le site Atlantico. L’auteur y dénonce notamment une “expansion accélérée de la surveillance par l’État” et “la certitude qu’on ne reviendra jamais en arrière…” Extraits.
« Pour nous protéger du virus, de la maladie, de la contagion, rien n’est trop beau. Et l’État, avec ses terribles fantasmes de contrôle, propose chaque jour une nouvelle idée pour surveiller les individus. Bien entendu, il ne s’agit pas de surveiller pour surveiller, mais plutôt de surveiller la progression du virus grâce à la surveillance de ceux qui le portent ou pourraient le porter. L’argument est imparable : le citoyen est devenu un truchement, un prétexte officiel pour surveiller une sorte de cinquième colonne qui nous menace. » […]
« Dans un premier temps, cette surveillance est passée par un confinement des peuples (par la fermeture des frontières), et par un confinement des individus. Ensuite, au nom de la détection des clusters, les citoyens ont dû accepter de livrer la liste de tous leurs contacts. Assez rapidement, l’État a proposé de traquer tout le monde grâce à une application numérique, StopCovid, qui fait un four, tant elle est contraire à l’esprit français. » […]
« Mais d’autres tentatives sont mises sur le tapis, comme la consignation méthodique de l’identité des personnes qui fréquentent les bars et les restaurants. Il s’agit pour l’instant d’un « cahier de rappel » fondé sur le volontariat. L’idée est là, posée bien au milieu de la table : le cafetier, le restaurateur, devient collecteur d’informations pour la police sanitaire. Il nous est proposé de consentir à informer l’État de la liste de nos amis, de nos fréquentations, et des lieux et heures où nous les rencontrons. » […]
« Il y a seulement six mois, une telle proposition aurait fait hurler. Elle est aujourd’hui devenue banale. » […]
« La peur du terrorisme a permis de généraliser la surveillance massive de toutes nos communications téléphoniques, de toutes nos transactions bancaires, de tous nos disques durs d’ordinateurs. » […]
« Bien entendu, dans cette affaire, le terrorisme fut un prétexte. Les avocats parisiens qui ont été espionnés massivement par le Parquet en dehors de toute procédure viennent d’en faire les frais. »
« Le coronavirus n’agira pas autrement, car il existe un effet cliquet dans le fonctionnement de la police. Une fois qu’une liberté est violée, on ne revient jamais en arrière, même si les raisons de cette violation ont disparu. »
« Voilà à quoi sert le gouvernement par la peur : à justifier une expansion accélérée de la surveillance par l’État, avec la certitude qu’on ne reviendra jamais en arrière. » […]
« Toute la question est en effet de savoir combien de temps une civilisation qui a bu le sirop des libertés depuis des siècles (et même au-delà) peut tolérer une telle mise sous tutelle. Le cas est intéressant, car il nous interroge sur le risque de voir disparaître un jour une culture, son identité, son esprit et son patrimoine. » […]
« Par ces temps de peur millénariste entretenue par tout ce que nos élites comptent de lâches et de défaitistes prêts à collaborer avec n’importe quel régime, la question prend des allures cruciales. L’âme, l’identité française, disparaîtront-elles avec la planète, la nature, et autres angoisses récurrentes des collapsologues ? Ou bien les Français portent-ils en eux des valeurs insubmersibles qu’un petit paquet de mer appelé coronavirus et ses ridicules 800.000 morts pour 7 milliards d’humains (soit 0,01% de la population) ne risque pas d’inquiéter durablement ? » […]
« Il existe aujourd’hui deux chemins plausibles. Soit la société française abdique durablement ses libertés et se coule consciencieusement dans le lit d’un totalitarisme discret mais réel où bouger la moindre oreille peut coûter très cher (l’expérience de Vichy a montré que ce genre de bascule peut se réaliser en moins d’un mois). Soit la société française retrouve son instinct vital et place à nouveau les libertés au coeur de son modèle de développement (l’expérience de 1789 a montré que ce processus pouvait prendre plusieurs années). » […]
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– Atlantico. fr : Après le terrorisme, le Covid devient le nouvel argument pour imposer toujours plus de surveillance aux Français
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