Dans la nuit du 8 aout 1985, François Mitterrand, président de la République, écrit en urgence à son premier ministre Laurent Fabius. Et lui demande des « explications » sur le sabotage du navire de Greenpeace. En effet, dans l’hebdomadaire « VSD » encore à l’imprimerie, le journaliste Jacques-Marie Bourget révèle que l’opération a été conduite par les services français.
Et que « Sophie Turenge », prisonnière de la police néo-zélandaise est en réalité capitaine à la DGSE. C’est le début d’une affaire d’Etat, où l’on voit Mitterrand qui a donné le feu vert de cette opération, tenter de se défausser sur Fabius. Alors qu’il n’a même pas été informé du projet de sabotage.
Aujourd’hui, l’auteur de ce scoop qui a ébranlé une République gouvernée par « Dieu », nous livre la fin de l’histoire : pourquoi les militaires ont-ils exigé du Président que le navire des écolos soit passé par le fond ? Ce n’était pas pour protéger les secrets atomiques tricolores. Mais tout autre chose.
Il y a eu 35 ans le 10 juillet dernier éclatait à la fois une bombe à Auckland, en Nouvelle Zélande, et un énorme scandale d’Etat à Paris : le Rainbow Warrior, navire « amiral » de l’association écologiste Greenpeace coulait dans le port de la ville, saboté (on finira par l’apprendre un peu plus tard), par la DGSE, le service secret français. Deux mines collées à la coque ont été programmées à 5 minutes d’intervalle. La première doit convaincre les douze occupants du navire de quitter le bord en urgence. La seconde est prévue pour envoyer le bateau par le fond. Hélas pour lui, Fernando Pereira, un photographe qui accompagne l’équipe de Greenpeace en Polynésie pour y entraver les essais nucléaires français, va mourir. Après l’explosion de la première mine il est retourné dans sa cabine pour y chercher ses appareils photo. Pourquoi ces mines ? Pourquoi ce mort ? En dépit des années passées, personne n’est venu exposer la véritable raison de cet attentat d’Etat.
Deux jours après l’attentat, le 12 juillet, la police locale interpelle à l’aéroport un couple présentant des passeports suisses au nom de Turenge. Ils sont arrêtés à l’aéroport où ils se sont rendus afin de récupérer la caution de leur véhicule de location. Une rapide enquête auprès du personnel des hôtels fréquentés par les touristes Turenge montre que ce jeune couple a l’étrange habitude de ne jamais dormir dans le même lit. Assignés à résidence les « Turenge » commettent une erreur de couards débutants : téléphoner à un numéro « réservé » à Paris pour demander de l’aide. Très vite les « néo Z » découvrent que ce téléphone est une ligne « d’appel au secours » de la DGSE.
Le 23 juillet Auckland inculpe quatre membres d’un voilier français, repartis depuis, venus faire, eux aussi, une étonnante escapade touristique en plein hiver austral. Inculpe aussi le « couple Turenge » et Christine Cabon, une « taupe » des services français introduite dans le groupe des militants de Greenpeace. Dès l’explosion du navire la jeune femme a pris la fuite…
Dans la nuit du 8 au 9 août Jacques-Marie Bourget, grand reporter à l’hebdomadaire « VSD » révèle que le sabotage est signé de la DGSE et que « l’épouse Turenge » est en réalité un capitaine des services secrets. Aussitôt, mobilisé en pleine nuit, François Mitterrand fait alors l’innocent, lui qui a donné l’ordre de saboter le bateau et interroge nuitamment le premier ministre Laurent Fabius sur cette affaire dont il ignore pourtant tout. Le scandale est en marche.
Pour tenter de répondre aux questions du président de la République, Fabius confie une enquête à Bernard Tricot, ancien Secrétaire général de l’Elysée sous De Gaulle. Tricot écoute les balivernes contées par l’équipage du voilier, « l’Ouvéa », celui qui a fait du tourisme en Nouvelle Zélande… Il se proclame innocent. Mais Tricot ouvre une porte de secours en spécifiant qu’il ne serait pas étonnant « qu’on lui ait menti ».
Laurent Fabius et Charles Hernu le ministre de la Défense refusant de jouer les fusibles, Mitterrand est en danger. Afin de tordre le bras de ces deux habiles politiciens, un ami historique du Président, confie un tuyau bien opportun à Edwy Plenel et Bertrand Legendre, journalistes au Monde. L’information qu’il contient est mortelle pour Hernu et Fabius puisque les deux confrères révèlent qu’une « troisième équipe » était présente à Auckland. En fait la mobilisation des agents secrets est bien plus large puisque, par exemple, « Pierrot le marin », frère de Ségoléne Royal et nageur de combat, fait lui aussi partie du plan « Satanique » qui a mobilisé une cinquantaine d’agents. Publiée dans les colonnes du Monde, l’existence de cette « troisième équipe », démontre qu’Hernu a menti en niant la responsabilité de la France. Et que Fabius est le dindon de la farce, lui qui ne savait rien mais devait tout dire. Hernu doit démissionner et Fabius quittera son poste 5 mois plus tard. Mitterrand, qui a pourtant donné son quitus au plan « Satanique », peut enfin se retrancher derrière l’épais paravent des mensonges d’Etat : je n’ai rien vu à Auckland.
En mai 1985 l’actualité mondiale, je veux dire les drames dont on ne parle qu’en ce qu’ils touchent les intérêts de l’Occident, ne vagabonde plus. Après le Vietnam, le Cambodge, depuis dix ans les nouvelles qui ouvrent les journaux naissent toutes au Liban.
Journaliste pour l’hebdomadaire « VSD », j’ai passé des mois pour tenter de décrire la folie humaine concentrée sur ce petit territoire. Comme celle exprimée en septembre 1982, lors du massacre de Sabra et Chatila, où des milliers de Palestiniens sont assassinés sous le contrôle de d’Ariel Sharon, de la CIA et de l’armée israélienne. Une barbarie déclarée en décembre 1982 comme un « acte de génocide » par l’Assemblée générale de l’ONU. Puisque les nouvelles du monde campent ici, la tête dans les montagnes et les pieds dans l’eau, je bivouaque avec elles. A chaque semaine des crimes nouveaux. Des enlèvements, des attentats dits « aveugles » mais qui visent clair. En juillet pourtant, l’actualité semble partir à la plage et le Liban à la sieste : veiller, le stylo et le Canon sous l’oreiller semble un peu moins nécessaire, je peux rentrer à Paris.
Rue Paul Baudry, à la rédaction, je retrouve Siegel le fondateur de « VSD ». Il donne le sentiment de vivre et dormir dans un bureau ouvert à chacun. « Maurice » est un des derniers êtres noble d’une presse qui l’est encore un peu. Ancien résistant, lié au courant socialiste et ami de la liberté, c’est après avoir été viré de la direction d’Europe 1 (à la demande de Chirac pour « persiflage »), qu’il tente l’aventure de « VSD ». Un étrange magazine « populaire » -mon dieu quelle horreur- qui, pour le week-end, mélange l’actualité et la détente, le sérieux et l’amusement.
De sa voix profonde et traînante, connue de toute la France grâce aux micros d’« Europe 1 », il me parle du Liban que je viens de vivre. Après un long compte-rendu sur l’accumulation des horreurs, je m’apprête à quitter sa tanière, et m’imagine déjà en vacances. Quand Maurice me relance sur la piste de l’actualité comme un dé dans le hasard du 4×21 :
« Dites-donc Jacques-Marie, vous ne trouvez pas que ce sabotage du bateau de Greenpeace est une histoire extraordinaire ? Qui est vraiment ce couple suisse, les Turenge, accusés d’avoir fait sombrer un navire écolo ? Ce serait bien de creuser. »
En dépit de toute l’estime que j’ai pour Siegel, j’écoute sa demande d’un tympan distrait, les yeux plus bloqués en direction de Beyrouth que vers un chalutier coulé à Auckland.
Alors que je quitte la rédaction mon combiné gris PTT, poste 76, grelotte :
« Allo c’est moi. Ça va mal. »
Je reconnais la voix d’un homme, dont j’ignore l’occupation véritable, mais qui, cinq ans après l’avoir connu dans les couloirs de l’Express, est devenu un véritable ami. Un baroudeur, je l’ai compris, mais exemplaire. Totalement muet sur son activité, sur ses voyages longs et étranges, parfois ses blessures par balle. Jamais mythomane, j’allais dire fonctionnaire d’Etat.
« Que ça aille mal c’est ton ordinaire. Tu as une nouvelle peine de cœur ? »
« Arrête ! On veut me liquider. Dans un quart d’heure je serai au Rond- Point des Champs. Il faut que tu passes. »
La rue Baudry est juste à côté. Je vois arriver mon discret condamné à mort. Lui qui a les cheveux blancs comme si c’était de naissance, est là avec un pelage d’un noir de suie. L’étrangeté de la situation court-circuite avec la requête de Siégel. Sans réfléchir je lance à l’homme qui n’est pas sans teint :
« Alors il faisait beau à Auckland ».
Cette fois c’est cheveux noirs et peau verte :
« Ta gueule. Ne raconte pas n’importe quoi. On veut me faire disparaître, c’est tout. »
Je parle seul, ou à un mur humain qui a toute la charge du port de l’angoisse. Une angoisse mais plus de langue.
« Si tu veux on se retrouve à 15 heures, à la brasserie qui fait l’angle de l’avenue Denfert et de Raspail… ».
« Je connais. En mai 68 j’ai vu un flic tirer dans la vitrine… ».
Voir ce menhir dans un tel état de fébrilité ! Et de peur ! Cela me surprend chez un homme dont j’apprendrai bien plus tard, par la bande, qu’il a toute sa vie été le héros anonyme caché dans l’ombre du secret absolu, celui des « services ».
Au moment du rendez-vous de Denfert mon énigmatique ami semble un peu moins tendu. Sans doute est-il en train de déminer les pièges tendus ? Toutes les dix minutes il se lève pour aller au téléphone, au fond de la grande salle. Il laisse sa sacoche sous la table de bistrot. Et je l’ouvre. On y trouve les banalités usuelles et un passeport : la photo est bien celle de mon compagnon, mais son nom n’est pas le sien. Il est faux. Un visa Auckland figure sur une page du document de voyage. Ayant fini par comprendre que mon ami ne pouvait avoir d’autre employeur que la DGSE, même s’il n’en dira jamais une syllabe, j’en déduis en un éclair que c’est la France qui a fait couler le « Rainbow Warrior ».
Je ne pars plus en vacances. Et fais bouillir les lignes téléphoniques de mes amis, contacts, informateurs ; jusqu’à l’Elysée et au ministère de la Défense. Je collectionne les pas causants, pas informés. Aux archives du journal je retrouve un article récent signé dans le JDD par Roger Faligot, un excellent journaliste qui est formel : « Un sabotage comme celui d’Auckland ne peut avoir été commis que par un service officiel… ». Plus tard les langues qui parlent sans savoir affirmeront que le « tuyau », celui du sabotage par la DGSE, m’a été confié par Paul Barril, gendarme atypique et ébouriffant, qui a été naguère chargé de la protection de Mitterrand à l’Elysée. C’est faux. Mon information est née du hasard, sans l’intrusion d’une indélicate « balance ».
Finalement, pendant le week-end du 3 et 4 août, en cherchant très loin et en remontant, je finis par obtenir une confirmation non-officielle, c’est bien un coup de la DGSE. Mieux Mitterrand est parfaitement informé du sabotage et a donné son feu vert. Celui-ci devait avoir lieu aux Pays Bas, quand le Rainbow Warrior était en préparation pour son voyage vers la Polynésie et le Centre français d’expériences nucléaires. Le président avait refusé ne voulant pas faire une mauvaise manière à un pays ami. Un autre scénario est soumis à l’Elysée : couler le navire au large, avec un sous-marin. C’est un refus, le risque de mort est trop grand. C’est donc à Auckland, lors d’une étape annoncée du bateau de Greenpeace que le sabotage aura lieu. Choix d’une prudence nécessaire puisque dans la troupe de militants de Greenpeace on trouve Christine Cabon, alias Françoise Bonlieu, un agent de la DGSE. Sans le savoir, tout en le supposant sans doute, « Bonlieu » côtoie à bord du Rainbow des agents britanniques, eux aussi engagés sous couverture « verte » comme militants de Greenpeace. Dans l’article que je vais rédiger et qui sera bientôt à l’imprimerie, je ne fais aucune allusion à toute cette série de stratégies avortées. Le « oui » donné par Mitterrand au sabotage, l’action de la DGSE, et la révélation du véritable métier de l’épouse Turenge, celui de capitaine de la DGSE, me semblent essentiels et, pour l’instant, suffisants. Le « papier » et son scandale d’Etat est bouclé.
Dans la nuit du 7 août au 8 août les policiers des Renseignements Généraux, c’est leur routine, collectent « VSD » avant parution à l’imprimerie. L’Elysée est informé d’autant plus fortement que, dans la même nuit, sur les rotatives d’une autre imprimerie, sort un article de Pascal Krop dans « l’Evènement du Jeudi ». Sans plus de détails, lui aussi met en cause la DGSE. Le pouvoir doit trouver une stratégie afin de sauver l’honneur du président. La vieille rouerie politicienne de « Tonton » est prompte à démarrer : on va mettre en cause le Premier ministre, Laurent Fabius. Alors que ce dernier ne connait rien du plan « Satanique » avalisé par Mitterrand :
« Monsieur le Premier ministre, j’apprends par la presse que la DGSE serait impliquée dans le sabotage du Rainbow Warrior…. J’attends vos explications ». Ici le cher Laurent ne peut brandir aucun parapluie. Son rôle assigné est celui de fusible.
Au cours de la journée du 7, informés je ne sais comment de mon enquête, des « amis » me font savoir qu’il serait opportun « pour ma santé » que « je change d’air ». Et je le fais puisque de 8 août je m’envole pour le Darfour afin de couvrir une action humanitaire. Ironie : le C130 qui m’accueille à bord est celui d’une compagnie aérienne dont le client favori est la DGSE. C’est par le téléphone international de cockpit, qui transite par la Suisse, que j’apprends que l’Elysée « porte plainte contre « VSD » et contre moi »…
Dans cette situation désespérée, pour Mitterrand, des journalistes amis du père de Mazarine tentent d’allumer de ridicules contre-feux. « Bourget et Krop, intoxiqués par Paul Barril ont écrit n’importe quoi… ». Dans le Canard Enchaîné Claude Angeli rend les « services anglais » responsables du sabotage d’Auckland. Napoléon perçant sous Bonaparte, Edwy Plenel est en pole position pour défendre le régime des pâles héritiers de Jaurès. En dépit d’un énorme ratage, commis un an plus tôt, qui a vu le journaliste du Monde accuser le militant révolutionnaire libanais Georges Ibrahim Abdallah d’être le responsable des « Attentats de Paris » (alors qu’ils ont été commis par l’Iran), Plenel entame là son irrésistible ascension. Il devient l’un de ces Canadair chargés d’éteindre l’incendie qui gagne le palais de la Présidence.
A la question la France a-t-elle fait sauter le navire écolo ? Edwy Plenel répond dans « Le Monde » du 10 août 1985 :
« Deux de nos confrères – l’Événement du jeudi et VSD – dans leur livraison de ce 8 août y répondent catégoriquement par l’affirmative.
Pour VSD, Sophie-Claire Turenge est en fait un capitaine de la DGSE, et l’équipage de l’Ouvéa a été recruté, par l’intermédiaire d’un marchand d’armes qui tient à disposition une troupe de mercenaires, par un colonel de la DGSE, le colonel Codet, alias Mandion. L’Événement mentionne de son côté un colonel C, » ancien chef des opérations de la DGSE « , qui aurait recruté la petite troupe de mercenaires, la sous-traitance étant une tactique habituelle dans les services secrets.
Pourquoi la DGSE se serait-elle livrée à cette opération ? Selon l’Evénement, » par cet attentat, Paris aurait voulu protéger des regards indiscrets les travaux d’aménagement de la piste d’atterrissage de l’île de Hao, la base arrière du centre d’expérimentation nucléaire de Tahiti « . VSD tient une autre explication : » Un appareillage permettant d’analyser les effets et paramètres d’une bombe à neutrons a été installé sur le chalutier Rainbow-Warrior « , or » une nouvelle machine infernale du type » à neutrons » doit être essayée au début de l’automne à Mururoa »… « Séduisant, mais peu crédible. De plus, dans l’entourage du contre-espionnage français, on » ouvre de grands yeux » à l’annonce que Sophie Turenge serait de la maison, avec le grade de capitaine, tandis que Greenpeace nie la présence d’appareils sophistiqués sur le Rainbow-Warrior »… « Dans les milieux militaires, on confirme l’impression policière : l’équipe de l’attentat naviguerait dans les eaux de l’extrême droite ou aurait même des liens avec la droite musclée de Nouvelle-Calédonie. Un nom circule, celui de M. Jean-François Charrier, frère de l’acteur Jacques. Colonel à la DGSE jusqu’à sa retraite en 1983, il est arrivé en Nouvelle-Calédonie le 18 janvier (le Monde daté 30 juin-1er juillet). Sa tâche : organiser le service de sécurité du gouvernement territorial de M. Dick Ukeiwé. Or le » colonel » fut, dans sa carrière d’ » espion « , directeur du bureau d’études (service de renseignement) du Haut-Commissariat de la République en Polynésie française en 1981, deux ans avant de prendre sa retraite.
Aussi comprend-on qu’en l’état actuel les milieux, gouvernementaux français envisagent deux hypothèses. Soit une provocation montée par d’anciens agents de renseignement alliés à des activistes-mercenaires d’extrême droite pour nuire à l’image de la France dans le Pacifique, au moment où des États océaniens prennent position pour l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie ; soit une bavure interne à la DGSE, montée à un niveau intermédiaire avec un zèle intempestif. »
Vous avez bien lu. Et 35 ans plus tard le papier de Plenel ne perd rien de son comique de fake news : « C’est le colonel Charrier (ex-beau-frère de Brigitte Bardot) qui, au nom du RPR néo calédonien, a fait sauter le Rainbow Warrior ». Plenel se retrouve en légionnaire de Cameron, et écrit n’importe quoi afin de sauver l’image de ses amis qui gouvernent. Plus tard, lui et « Le Monde » seront condamnés à la demande du colonel Charrier. Pas grave. L’important était, par tous moyens, de retarder l’explosion. Dans cette nuit agitée, celle du 8 août, Fabius ne se laisse pas faire, il déclare même que « la France n’est pas impliquée dans le sabotage du bateau de Greenpeace », ce qui est gonflé aux yeux de tout lecteur qui se penche aujourd’hui sur ce scandale XXL.
Trente-cinq ans après l’homme aux cheveux teints, celui que j’avais rencontré au Rond-Point des Champs Elysées, est cabossé mais toujours vivant, et reste un ami. Totalement muet sur ses activités en général et l’affaire Greenpeace en particulier. J’ai compris, bien plus tard, que sa terrible angoisse, celle exprimée sur « les Champs » quand il m’a seulement dit, à demi-mot « on veut me liquider ». En fait à la DGSE, quelques-uns peu avares de la vie de l’un de ses serviteurs, et pleins de ressources avec des plans couvrant l’alphabet de A à Z, ont envisagé d’assassiner cet ami. Leur but ? Lui coller sur le dos la responsabilité de l’attentat d’Auckland. Alors le sabotage de la France ne serait plus qu’une bavure, un acte mercenaire commis par des marginaux en barbouzerie…C’est le thème mis au point lors un accord Elysée-DGSE, story telling que l’on retrouve transcrit dans l’article de Plenel.
Au début de ce texte-mémoire j’ai évoqué la possibilité aujourd’hui de faire d’ultimes révélations sur le véritable objet du sabotage du Rainbow. Les voilà donc : ce n’est pas pour protéger les essais nucléaires de Mururoa que le navire de Greenpeace a été « neutralisé ». Ce que les français ignorent encore, c’est qu’après que les bombes atomiques ont été tirées, explosées, testées, le centre de Mururoa trouvait un autre usage. L’armée profitait de l’immense et désert « pas de tir » pour tester d’autres armes nouvelles, comme des missiles aussi sophistiqués qu’ultra secrets. Sachant que les Britanniques, les Américains, ou les Russes, avaient peut-être, eux aussi, infiltré Greenpeace de militants-agents, avec dans leurs sacs des appareils de mesure très discrets, il fallait que le Rainbow Warrior coule. Aucun espion étranger ne devait capter le moindre paramètre de ces nouvelles merveilles. Celles de la guerre de demain.
Note.
A la suite de ses révélations sur l’affaire du Rainbow Warrior, Jacques-Marie Bourget a reçu le Prix « Scoop » décerné par un jury réunit par l’éditeur Nathan. On y trouvait notamment Lucien Bodard, l’archétype du grand reporter, principalement au Vietnam et Yves Courrière, journaliste et pionnier du travail historique sur la Guerre d’Algérie … Aujourd’hui, de façon étrange, les rôles joués dans cette partie sombre de notre temps, par Roger Faligot, Pascal Krop et Jacques-Marie Bourget ont été totalement gommés de presque tous les récits, à commencer par celui de « l’encyclopédie » en ligne Wikipedia. Les amateurs de vérité doivent donc se retourner vers le décisif mémoire de Master publié par le journaliste Thibault Seurin et soutenu à « Sciences Po » Paris le 18 juin 2012.
L’auteur conte les péripéties et nous livre la fin de l’histoire
Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir