Les deux personnages sont connus et craints pour leur violence et leur caractère dictatorial. Ils sont des diviseurs au sein de leur pays (au plan des relations raciales et sociales, Trump ; au plan ethnique et religieux, Erdogan) et au niveau international (Trump est viscéralement anti-chinois et anti-russe, ainsi que anti-européen et anti tout ce qui n’est pas pro-américain ; Erdogan aussi est contre tout ce qui n’est pas pro-turc, en particulier contre les Grecs, les Kurdes, les Iraniens, les Juifs, les Chrétiens). Ils utilisent le mensonge comme pratique politique de vérité. Ils parlent de paix lorsqu’ils font la guerre. Ils invoquent leur Dieu alors qu’ils sont blasphèmes. Ils exaltent leur « nation » et leur « peuple » alors qu’ils agissent uniquement pour leur puissance personnelle et « mission historique ». Mais, surtout, ils ont commis des crimes contre l’humanité.
Selon l’article 6c du statut du Tribunal militaire international de Nuremberg (1945), un « crime contre l’humanité » est défini par « l’assassinat, l’extermination, la réduction en esclavage, la déportation, et tout autre acte inhumain inspirés par des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux….. ». Le crime contre l’humanité peut être commis en temps de paix ou en temps de guerre. Plus près de nous, le statut de la Cour pénale internationale du 17 juillet 1998 précise les sens à donner à « extermination » par l’art 7, 2b selon lequel par « extermination, on entend notamment le fait d’imposer intentionnellement des conditions de vie, telles que la privation d’accès à la nourriture et aux médicaments, calculées pour entraîner la destruction d’une partie de la population ».
Le 2 juillet, Trump a fait acheter par son gouvernement 92% du stock disponible du médicament remdesivir, le premier médicament reconnu comme utile et efficace dans le traitement contre le Covid-19. Il facilite un rétablissement rapide. Il est produit par une société américaine, Gilead, figurant parmi les entreprises actives dans le développement du vaccin anti-coronavirus. L’argument invoqué a été celui d’assurer aux citoyens USA d’avoir accès au médicament, en sachant expressément qu’en faisant cela il empêchait les autres populations d’en faire recours, du moins pas avant octobre lorsque les doses disponibles du remdesivir seront de nouveaux renouvelées. Au-delà des dispositions juridiques techniques en la matière, l’acte de Trump tombe dans la catégorie des crimes contre l’humanité, car il commis avec l’intention délibérée d’empêcher de facto d’autres populations civiles hors les Etats-Unis d’avoir le droit et la liberté d’utiliser un médicament important, au vu des connaissances disponibles, pour la lutte contre une pandémie particulièrement meurtrière ( plus de 780.000 morts au 20 août 2020).
En ce qui concerne Erdogan, « l’homme fort de la principale puissance régionale » a décidé d’en terminer avec les Kurdes de Syrie en lançant en octobre 2019 l’invasion et l’occupation manu militari (opération baptisée « Source for Peace » !) des territoires de la région nord-est de la Syrie, habités en majorité par les Kurdes. Et cela avec le feu vert (un hasard?), de Donald Trump. Depuis, il a autorisé à plusieurs reprises la coupure de l’eau à une population d’un demi-million de personnes déjà meurtries, dans un pays en guerre depuis des années, par les destructions, les massacres, les crises alimentaires et hydriques. La dernière coupure date de ce début du mois, alors même que l’on assiste à une croissance considérable de la pandémie du Covid-19. Même la gestion des camps de réfugiés par l’ONU ne parvient pas à garantir l’accès minimal à l’eau potable et bonne pour usages humains. Ne dit-on pas que se laver les mains régulièrement est un instrument indispensable de prévention contre l’épidémie ? Eh bien c’est justement pour cela que la Turquie d’Erdogan utilise l’eau comme une arme pour atteindre son objectif de mettre fin à la présence des Kurdes de Syrie et, partant, à la « République de Rojava ». Cette République, que les Kurdes ont réussi à créer et à faire fonctionner depuis 2012, était devenue une expérience politique et socio-économique unique très innovatrice pour l’ensemble de la région. Elle a montré qu’une autre société, plus juste et démocratique, basée sur le communalisme fédératif, le coopératisme et l’abolition des discriminations de genre, pouvait être édifiée. Une raison de plus pour attaquer les Kurdes et essayer de les éliminer agissant sur leur santé en les privant d’eau. Dans le cas d’Erdogan, l’objectif est clair : exterminer, au moins sur le plan politique et socio-économique, les populations kurdes.
Les crimes de Trump et d’Erdogan sont encore plus inacceptables et cruels en raison aussi du grand silence des autres dirigeants mondiaux. Où est-elle, la condamnation des actes de Trump, à la limite ne fut-ce que verbale (!), de la part des dirigeants de l’Union européenne ? Et croient-ils pouvoir s’en sortir vis-à-vis des crimes d’Erdogan en rappelant qu’ils avaient demandé au sein du Conseil de Sécurité de l’ONU l’arrêt de l’invasion ou, maintenant, en se limitant aux opérations humanitaires d’urgence (comme des « bons samaritains) en ouvrant des puits de secours pour les réfugiés ou en fournissant aux populations du Rojava de l’eau en bouteille achetée à Nestlé, Coca-cola ou Danone ??
Laisser les crimes de Trump et d’Erdogan sans réactions fortes et efficaces, c’est contribuer à faire perdre aux peuples de la Terre leur capacité immunologique de résistance et de lutte contre la criminalité des puissants. Si l’on pense aussi à ce qui se passe au Brésil, en Inde, en Russie et ailleurs, je rêve d’un mouvement universel de libération de l’humanité.
Bruxelles 21 août 2020
Transmis par les Artistes pour la Paix
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