Déclaration du Premier ministre libanais Hassan Diab annonçant la démission de son gouvernement, le 10 août 2020.
Ce gouvernement politico-technocratique formé en janvier 2020 était le premier auquel les adversaires irréductibles du Hezbollah ne participaient pas.
Source : http://www.pcm.gov.lb/arabic/subpg.aspx?pageid=18047
Traduction : lecridespeuples.fr
Transcription :
Nous sommes toujours dans les affres de la tragédie qui a frappé le Liban. Cette catastrophe qui a frappé les Libanais en plein cœur s’est produite du fait de la corruption chronique dans la politique, l’administration et l’État.
J’ai dit précédemment que le système de corruption est enraciné dans toutes les articulations de l’État, mais j’ai découvert que le système de corruption est plus grand que l’État, et que l’État est garroté par ce système et ne peut pas l’affronter ou s’en débarrasser.
L’un des exemples de cette corruption endémique a explosé dans le port de Beyrouth, et cette calamité a frappé le Liban, mais de tels exemples de corruption sont répandus dans la géographie politique et administrative du pays, et le danger est très grand que d’autres malheurs cachés (menacent le peuple), bien présents dans de nombreux esprits et stockés dans d’autres entrepôts, avec la protection de la classe qui contrôle le sort du pays et menace la vie des gens, falsifie les faits et vit de la sédition, faisant négoce du sang des Libanais dès que l’occasion se présente, en fonction des intérêts, des caprices, des calculs et des allégeances fluctuantes.
Aujourd’hui, nous sommes confrontés à une grande tragédie, et toutes les forces soucieuses de préserver le pays et les intérêts du peuple étaient censées coopérer pour surmonter cette épreuve, en s’imposant le silence pour plusieurs jours, dans le deuil des âmes des martyrs, le respect de la douleur des personnes endeuillées, des parents, des frères et sœurs et des orphelins, s’efforçant d’aider les gens, de panser leurs blessures, et de leur assurer un logement, et d’aider ceux qui ont perdu leurs moyens de subsistance.
L’ampleur de la tragédie est trop grande pour être décrite, mais certains vivent à une autre époque. Ils ne sont pas intéressés par tout ce qui s’est passé, si ce n’est dans la mesure où cela peut leur permettre de marquer des points politiques, de lancer des discours électoraux populistes et de démolir ce qui reste des manifestations de l’État.
Ils auraient dû avoir honte d’eux-mêmes, car leur corruption a produit cette calamité cachée pendant sept ans, et Dieu sait combien de calamités ils cachent sous le manteau de leur corruption.
Mais ces gens ont l’habitude de changer de position selon les circonstances pour falsifier les faits, alors que ce qu’il faudrait, c’est les changer eux-mêmes (s’en débarrasser définitivement), car ils sont la vraie tragédie du peuple libanais. Oui, ils sont la vraie tragédie du peuple libanais.
Ils ont beaucoup changé et évolué dans le passé, (pour neutraliser) chaque opportunité de se débarrasser de leur corruption.
Ils n’ont pas bien interprété la révolution des Libanais du 17 octobre 2019. Cette révolution était contre eux, mais ils ne l’ont pas bien comprise. Ils ont poursuivi leurs pratiques et leurs calculs, pensant pouvoir diluer les demandes de changement des Libanais, d’un État juste et fort, d’un pouvoir judiciaire indépendant, de mettre fin à la corruption, au gaspillage et aux vols, et aux politiques financières qui ont vidé le trésor de l’État, dilapidé l’épargne de la population et placé le pays sous le fardeau énorme de la dette, ce qui a causé cet effondrement financier, économique et social.
Mais le plus grand paradoxe, c’est que quelques semaines (seulement) après la formation de ce gouvernement, ils ont tenté de lui faire porter la responsabilité de leurs infamies, et de le tenir responsable de l’effondrement, du gaspillage et de la dette publique.
Vraiment, ils devraient mourir de honte.
Ce gouvernement s’est donné beaucoup de mal pour tracer une feuille de route pour sauver le pays.
Chaque ministre de ce gouvernement a donné son maximum, parce que nous sommes préoccupés par le pays, et nous tenons à son avenir et à celui de nos enfants.
Nous n’avons aucun intérêt personnel, et tout ce qui compte pour nous est de sauver le pays. Parce que nous nous sommes chargés de cette mission, nous avons subi de nombreuses attaques en règle et des accusations mensongères. Mais nous avons refusé de nous laisser entraîner dans des polémiques futiles, parce que nous voulions travailler. Néanmoins, les trompettes enragées n’ont pas arrêté leurs tentatives de falsifier les faits, pour se protéger et dissimuler leurs crimes.
Nous avons porté la demande de changement des Libanais. Mais entre nous et le changement se trouve un mur très épais et très épineux, protégé par une classe qui résiste par toutes les méthodes sales, afin de préserver ses acquis, ses positions et sa capacité à contrôler l’État.
Nous nous sommes battus férocement et avec honneur, mais cette bataille ne pouvait être remportée. Nous étions seuls et ils étaient unis contre nous. Ils ont utilisé toutes leurs armes, déformé les vérités, falsifié les faits, colporté des rumeurs, menti aux gens, commis tous les péchés mortels et véniels. Ils savaient que nous étions une menace pour eux, et que le succès de ce gouvernement signifierait un réel changement dans cette classe qui a toujours régné jusqu’à ce que le pays soit étouffé par les odeurs de sa corruption.
Aujourd’hui, nous en sommes arrivés là, à ce tremblement de terre qui a frappé le pays, avec toutes ses répercussions humanitaires, sociales, économiques et nationales. Notre première préoccupation est de faire face à ces répercussions, parallèlement à une enquête rapide qui définit les responsabilités et ne laisse pas la catastrophe être oubliée avec le temps.
Aujourd’hui, nous lançons un appel au peuple, à sa demande que les responsables de cette catastrophe cachée depuis sept ans rendent des comptes, à son désir authentique de passer d’un État de corruption, de gaspillage, de pots-de-vin et de vols à un État de droit, de justice et de transparence. À un État qui respecte ses enfants.
Face à cette réalité, nous faisons un pas en arrière, pour nous tenir aux côtés du peuple, pour mener la bataille du changement avec eux. Nous voulons ouvrir la porte à un salut national que les Libanais contribueront à façonner.
Par conséquent, j’annonce aujourd’hui la démission de ce gouvernement.
Que Dieu protège le Liban. Que Dieu protège le Liban. Que Dieu protège le Liban.
Vivent les Libanais. Vive le Liban.
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Hassan Nasrallah : nos adversaires ont démontré leur faillite morale et leur manque de lucidité
Extraits du discours du Secrétaire Général du Hezbollah le 7 août 2020
[…] En général, on dit que les peuples dignes, qui ont un certain niveau de culture et d’éthique, un certain sens de la responsabilité et de l’humanité, un sens de la nation, même lorsqu’il y a des luttes et des disputes entre elles, lorsqu’une grande tragédie nationale se produit, ou qu’un événement terrible se produit, tout le monde gèle temporairement ses luttes et ses disputes, ainsi que ses calculs personnels, pour s’élever au-dessus de toutes ces considérations (partisanes), et se comporter sur une base éthique et humaine plus noble, et tout le monde s’entraide afin de surmonter cette tragédie ou cette catastrophe. Une fois la crise surmontée et dépassée, les choses peuvent reprendre leur cours habituel. Les choses se passent comme ça (en général) partout dans le monde. Parfois, on a même pu voir qu’en pleine guerre, lorsqu’un événement tragique comme un massacre se produit, les ennemis concluent une trêve, un cessez-le-feu, même en pleine guerre ! Cela arrive et c’est bien connu (même face à Israël), mais je ne vais pas perdre de temps à mentionner des exemples. Mais en dehors de la guerre, au sein d’un même pays, où il y a un gouvernement, une opposition, des forces politiques rivales, lorsqu’une catastrophe touche tout le monde, toutes les régions, toutes les familles… Ce n’était pas une tragédie ciblée sur certaines catégories de population, non. En général, dans de telles situations, les différends sont provisoirement mis de côté, et tout le monde s’entraide et coopère (même avec ses adversaires politiques), et adopte un langage plus digne, avec des sentiments différents, et des communiqués et discours politiques différents. De même, les médias se comportent différemment, avec humanité et éthique, chacun accordant un répit (à ses adversaires), ne serait-ce que pour quelques jours, au moins quelques jours (de trêve) ! Je ne parle pas de plusieurs mois ou de plusieurs années, non, quelques jours, (une ou) deux semaines ! Pour laisser aux gens le temps de récupérer les dépouilles de leurs martyrs, de panser leurs blessures, de rendre visite à leurs blessés, d’être fixé sur le sort des disparus, d’éteindre les incendies, de déblayer les débris, de déterminer comment reloger les déplacés, etc. Après cela, on peut rouvrir les comptes (et ranimer les rivalités), pas de problème. Mais malheureusement, ce qui s’est passé au Liban avec cet incident, c’est que dès les premières heures de cette tragédie et de ce cataclysme, et même depuis la première heure, pas les premières heures, alors que personne ne savait encore ce qui s’était passé, [nos adversaires ont inondé les médias de mensonges accusant le Hezbollah de l’explosion]. […]
Avant même que quiconque connaisse la réponse à ces questions, des médias libanais et arabes, et certaines forces politiques ont exprimé via leurs réseaux sociaux officiels, et même via certaines déclarations publiques de responsables – il ne s’agit pas de personnes obscures qui gèrent les comptes Twitter ou Facebook, mais de déclarations à la télévision et aux médias, faites dès que l’explosion a été révélée au public, et alors que les incendies au port n’avaient pas encore été éteints, et que la destruction et l’hébétude étaient le lot de tous les Libanais et du monde entier. Mais ces gens-là se sont exprimés dans les médias et ont annoncé leur position avant de savoir quoi que ce soit. Leur position a été arrêtée à l’avance : la cause de l’explosion dans le hangar numéro tant du port de Beyrouth est un entrepôt de missiles du Hezbollah qui a explosé, et qui a causé cette terreur et ce cataclysme sans précédent. […] Avant même qu’une enquête soit lancée, avant que quiconque sache ce qui s’est passé, certains médias, certaines chaines de télévision libanaises et arabes, depuis l’incident et jusqu’à présent – elles n’ont pas changé de disque – ont affirmé que le hangar est au Hezbollah, que ce sont des missiles du Hezbollah, des explosifs du Hezbollah, du nitrate du Hezbollah, (matraquant sans cesse) « Hezbollah, Hezbollah, Hezbollah, Hezbollah »… On n’entend rien d’autre, car il n’y a pas d’autre (hypothèse) pour eux. C’est un grand crime commis à notre encontre. Et leur méthode a consisté à mentir, mentir, mentir et encore mentir, jusqu’à ce que les gens finissent par y croire. […]
J’ai vu hier et aujourd’hui que la majorité des médias et journalistes internationaux ont abandonné l’hypothèse (d’un stock d’armes du Hezbollah), sauf quelques voix au Liban et dans le monde arabe. Ainsi, ceux qui ont lancé (cette calomnie) sont maintenant tous seuls (à la soutenir), car tous les médias et toutes les voix dans le monde sont soucieux de garder un minimum de crédibilité, même s’ils sont nos ennemis engagés dans une guerre politique contre nous ; mais lorsqu’il s’avère que l’accusation est clairement un mensonge aussi éclatant que le soleil à son zénith, ils (ont le bon sens de) faire marche arrière et évoquent d’autres pistes. […]
Quoi qu’il en soit, les enquêtes sont en cours, et les vérités apparaîtront rapidement, car ce n’est pas une question qui prendra du temps. J’estime que l’enquête criminelle, sécuritaire, militaire et technique pourra rapidement établir (avec certitude) ce qui se trouvait dans le hangar, quelle était la nature des explosifs et comment celle-ci a été déclenchée, car au niveau technique, cela ne nécessite pas beaucoup de temps, et on peut s’attendre à ce que les vérités apparaissent rapidement au grand jour.
Lorsque les vérités apparaîtront au grand jour, j’espère que l’opinion publique libanaise, dans toutes les régions du Liban, parce que dans notre pays, il y a un problème au niveau des châtiments et des responsabilités, et qu’au nom de la liberté d’opinion et d’expression, certains (médias et hommes politiques) accusent, insultent, injurient, oppressent et mènent le pays au bord de la guerre civile, et (malgré tout ça), en fin de compte, le Tribunal correctionnel leur inflige une (simple) amende de 10 à 50 millions de livres libanaises (5 000 à 30 000 euros), et ça s’arrête là. Ce que je veux demander au peuple libanais, c’est qu’il juge lui-même ces médias (et hommes politiques) et les condamne. De quelle manière ? En cessant de leur accorder le moindre crédit, la moindre importance, et en cessant de les consulter ou de les regarder. Car lorsqu’on sait que tel média n’a aucune crédibilité, et qu’il est basé sur le mensonge, la manipulation et la falsification, et qu’il participe à la bataille qui cible notre pays (pour le détruire), alors il faut les condamner et leur tourner le dos définitivement. Et c’est à mon sens le plus important châtiment (qui puisse frapper) ces chaînes de télévision mensongères et falsificatrices qui poussent à la guerre civile. Il ne faut pas prendre cela à la légère ! Il ne s’agit pas d’une (simple) accusation politique. Lorsque quelqu’un vient dire à des centaines de milliers de personnes que le responsable de ce carnage, de tous ces morts et de tous ces blessés, de toutes ces destructions et de tous ces déplacements, est le Hezbollah, à quoi mène-t-on le pays (si ce n’est à la guerre civile) ?
D’un autre côté, toujours concernant la scène politique, d’un autre côté, nous avons vu l’instrumentalisation politique de l’incident, et tous ceux qui avaient un problème avec untel ont rouvert ce problème (dans ce contexte tragique), qu’il s’agisse du Pacte national libanais, du gouvernement ou d’autres forces politiques, et bien sûr ceux qui ont un problème avec nous. Aujourd’hui, je ne veux ouvrir de dispute avec personne, et nous remettons (les comptes) à plus tard car nous restons attachés à ce que par sentiment éthique, humanitaire et national, l’heure ne soit pas au règlement de comptes politiques et partisans. C’est le moment de la solidarité, de la compassion, de l’entraide, de panser les plaies, de déblayer les débris, de déterminer le sort des disparus, de soigner les blessés, d’aider les gens à rentrer chez eux, ce qui est une priorité vitale. Le pays a besoin de ce genre d’attitude et de calme pour plusieurs jours, afin de surmonter la crise. Ensuite, on pourra parler politique et régler les comptes. Notre position sera ferme. Et quant à certaines analyses qui comparent la situation actuelle à des expériences précédentes (assassinat de Hariri en 2005, etc.) ou y bâtissent des espoirs comme tant de leurs illusions passées, (rappelons que) depuis longtemps des gens (les adversaires du Hezbollah) ont couru après des mirages, pour se rendre compte finalement que ce n’étaient que des mirages, mais j’en parlerai plus tard. A cet instant, je ne veux pas entrer dans ces considérations, et je ne veux m’en prendre à personne. Je remets ça à plus tard. La priorité est à la compassion, à la coopération et à l’entraide, pour surmonter ces jours en fait de douleur, de souffrances et de crise humanitaire. Laissons-tous les différends de côté et nous reviendrons plus tard (aux règlements de comptes) politiques.
Mon dernier point, qui est le plus important, c’est l’enquête et le châtiment. Un événement énorme, terrible et dangereux s’est produit. Premièrement, il doit y avoir une enquête. Son Excellence le Président de la République et Monsieur le Premier ministre ont déclaré dès le début qu’il y aura une enquête impartiale, résolue, ferme, définitive et forte, et que quiconque sera identifié comme ayant une responsabilité dans cet incident, par ses actions ou par sa négligence, par corruption ou par insuffisance, rendra des comptes, qui qu’il soit, grand ou petit. Très bien. C’est un bon début. Les Libanais demandent maintenant de l’action et des efforts (en ce sens). Je considère que face au choc de l’événement, il y a une unanimité nationale, populaire et gouvernementale, de tous les partis politiques et de tous les députés, etc., demandant qu’une enquête exhaustive, franche, transparente, précise, juste et impartiale soit menée sur cet événement, et que quiconque porte une part de responsabilité soit jugé et condamné de la manière la plus sévère et la plus exemplaire – un châtiment juste, bien entendu (et non un lynchage). Nous faisons également partie des voix qui exigent cela haut et fort. Il ne faut pas permettre que quiconque soit couvert ou protégé durant l’enquête, et que des vérités soient dissimulées au sujet de quiconque. Il n’est pas tolérable que l’enquête puis le procès se fassent « à la libanaise », c’est-à-dire de cette manière bien connue où on prend en compte les calculs et les équilibres religieux et sectaires. Quiconque a fait preuve d’insuffisance ou de négligence, a été l’instigateur (de cet événement) ou s’est engagé dans la corruption, n’a ni religion ni secte, comme pour les collaborateurs (de l’ennemi israélien). Il faut qu’ils soient jugés sur la base de ce qu’ils ont fait, et non sur la base de leur appartenance sectaire, religieuse ou politique. Ni l’enquête ni le procès ne doivent être menés sur la base sectaire (exigeant un ratio précis de sunnites, chiites ou chrétiens). Qui que soient les responsables, qu’ils appartiennent à plusieurs sectes ou soient tous de la même secte, quelles que soient leurs appartenances politiques et l’alliance à laquelle ils adhèrent, quel que soit leur clan familial, c’est la vérité et la justice qui doivent primer et déterminer la prise de position, l’enquête et le châtiment. […]
A cet égard, je tiens également à ajouter quelque chose de très important. De même que l’événement est exceptionnel, aujourd’hui, l’attitude de l’État libanais face à cet événement sera à nos yeux décisif et crucial. Cela déterminera l’avenir du Liban. De quelle manière ? Il ne s’agit pas aujourd’hui du Président de la République, du Pacte national ou du gouvernement (qui peuvent aller et venir au gré des élections et des crises). Il s’agit de (la sauvegarde de) l’Etat libanais, (qui va dépendre) de la manière dont les autorités vont se comporter à cet égard, que ce soit la justice, l’armée, les services de sécurité, et même la Chambre des députés. Il s’agit (de la pérennité) de l’Etat et de ses institutions. Tout le monde à une part de responsabilité à l’égard du procès et du châtiment. La manière d’agir face à une telle catastrophe, qui a touché et dépasse toutes les sectes, tous les quartiers et toutes les régions, et ne doit aucunement être teintée de sectarisme, de religion ou politisée, une tragédie nationale et humanitaire par excellence, la manière dont les institutions de l’Etat se comporteront face à elle, de même que les responsables politiques et les différentes forces politiques du pays, auront une conséquence cruciale pour l’ensemble du pays. Quelle sera cette conséquence cruciale ? La manière dont cette tragédie sera traitée déterminera aux yeux du peuple libanais –et à mes yeux le verdict sera irrévocable – s’il y a un Etat (authentique) au Liban ou pas. La deuxième question (qui trouvera une réponse irrévocable) est celle de l’espoir ou non d’ériger un Etat (au Liban). Car je vous le dis en toute franchise : si l’Etat libanais et les forces politiques libanaises – qu’elles soient au pouvoir ou dans l’opposition –, dans un tel dossier et une telle cause, ne parviennent pas à un résultat dans l’enquête, et ne parviennent pas à châtier (tous les responsables), cela signifie que le peuple libanais, les forces politiques, les institutions de l’Etat (sont en faillite), et qu’il n’y a aucun espoir d’ériger un Etat (authentique et souverain). Je ne veux désespérer personne, mais je décris fidèlement la réalité.
Mais nous devons (tous) œuvrer afin que ce désespoir n’ait pas lieu d’être, afin de confirmer, de créer et de semer l’espoir (de voir un véritable État) auprès des Libanais. Aujourd’hui, tous les appels à lutter contre la corruption qui dénonçaient tel juge partial, tel juge lâche, telle force qui enterrait les dossiers judiciaires pour telle ou telle considération, (sont éclipsés devant l’ampleur de cette affaire). Il y a forcément de lourdes responsabilités, car même si l’enquête révèle que c’est un acte intentionnel ou un bombardement aérien, le fait que ce nitrate ait été stocké ainsi pendant 6 ou 7 ans implique clairement qu’il y a eu une négligence (criminelle), de l’insuffisance et de la corruption de la part de juges. C’est là qu’il faut mener (en priorité) la guerre contre la corruption ! Si dans cette affaire, tous ceux qui appellent à la guerre contre la corruption, et nous en faisons partie, si nous sommes incapables de faire quoi que ce soit (pour identifier et châtier tous les coupables), cela signifie que nous sommes incapables de faire quoi que ce soit (pour toujours). Terminé. Nous déclarerons franchement au peuple libanais qu’il est impossible de lutter contre la corruption, de faire face à la négligence et à l’insuffisance, et nous dirons « ô peuple libanais, tu n’as pas d’Etat et il n’y aucun espoir de bâtir un Etat (authentique), donc à toi de voir ce que tu peux faire de toi ». A mes yeux, telle est l’ampleur de la question. Afin que les gens ne disent pas ensuite que c’était une tragédie (sans responsables) et oublient l’affaire, nous disons clairement qu’en ce qui nous concerne, il est impossible d’oublier cette catastrophe, de passer outre et de permettre qu’elle soit négligée. Il faut que toute la vérité soit révélée quant à cette tragédie, et que les responsables en soient jugés sans la moindre protection, qu’elle soit politique, sectaire ou partisane. Sans cela, oui, je considèrerai qu’il y a une crise du régime, une crise de l’Etat, peut-être même une crise de l’entité (libanaise), certains pourront aller aussi loin. Et certaines personnes essaient d’ignorer cela, d’une manière ou d’une autre.
Par conséquent, j’appelle les responsables de l’État, à tous les niveaux et dans toutes les autorités, à faire preuve du plus grand sérieux et de la plus grande détermination, que ce soit pour mener l’enquête à son terme ou plus tard pour juger et faire porter les responsabilités, et châtier tous ceux qui sont responsables de cette tragédie. Ce afin que les responsables et les forces politiques puissent donner l’espoir au peuple libanais qu’il y ait des autorités, un État et des instances (authentiques au pouvoir), ou du moins qu’il y ait l’espoir qu’un État soit érigé sur la base de la vérité, de la justice, de la transparence et de la protection des Libanais, car parfois, les conséquences de la corruption, de la négligence et de l’incompétence s’accumulent et transparaissent au bout de plusieurs années, et peuvent être destructrices, comme ce qui s’est passé dans cet événement terrible où en quelques secondes, en quelques secondes seulement, des dizaines de personnes ont été tuées ou portées disparues, des milliers ont été blessées, des centaines de milliers de familles ont été touchées et ont dû quitter leur domicile… Et certaines personnes disent que Dieu a empêché une tragédie plus grande encore, et que si ce hangar n’avait pas été si proche de la mer, et sans telle et telle particularités du site, si cette même quantité de nitrate avait explosé dans une configuration géographique différente, peut-être que toute la ville (de Beyrouth) aurait été détruite. Tout cela en un instant, en quelques secondes, à cause de la corruption, de la négligence et de l’incompétence, et que personne ne dise que c’est simplement à cause des méandres de la bureaucratie. En aucun cas. On parle de stocks qui pouvaient complètement détruire la capitale et certaines banlieues (en un instant). On ne peut pas en imputer la responsabilité aux méandres de la bureaucratie. […]
Je déclare à tous ceux qui, dès le premier instant, ont lancé une campagne contre nous, contre la Résistance et contre l’Axe de la Résistance, en s’appuyant sur cette tragédie, vous ne parviendrez à rien, et je vous le dis en toute franchise et en toute sincérité. Je déclare également aux masses (qui soutiennent) la Résistance, et dont certains sont peut-être inquiets, apeurés, se demandent quelle est l’atmosphère (sous-jacente), s’il s’agit d’un grand complot régional ou international, (je les rassure en leur rappelant) que la situation régionale est bien différente (de ce qu’elle était auparavant), de même que la situation internationale (nous est plus favorable que jamais). Nous sommes bien différents de ce que nous étions, de même que (l’Axe de) la Résistance (nous sommes plus forts que jamais), et il n’y a donc vraiment pas matière à s’inquiéter (pour nous) de la part de qui que ce soit. Ces gens-là (nos adversaires) courent après des mirages, comme ils ont toujours couru après des mirages. Tous leurs choix se sont toujours révélés voués à l’échec et à la défaite.
Et je dis ceci à nos adversaires : de même que vous avez été déçus et vaincus (dans toutes vos entreprises passées : Tribunal Spécial pour le Liban, guerre de 2006, guerre en Syrie, etc.), vous serez une nouvelle fois déçus et vaincus. Vous ne parviendrez à rien. Cette Résistance, par sa crédibilité, sa sincérité, par la confiance du peuple libanais envers elle, par ses batailles (victorieuses), par ses prises de position, par son attitude et son comportement, et par sa force, sa place dans le pays et dans la région, est trop grande, trop forte et trop noble pour que puissent l’atteindre (les calomnies) de certains oppresseurs, menteurs et falsificateurs de la vérité, qui incitent (en permanence) à la rivalité sectaire, et qui poussent à la guerre civile. Ils ont toujours œuvré à cela et ont toujours échoué, et ils échoueront encore.
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