Discours intégral du Secrétaire Général du Hezbollah, Sayed Hassan Nasrallah, le 7 août 2020, consacré à l’explosion au port de Beyrouth.
Source : https://video.moqawama.org/details.php?cid=1&linkid=2148
Traduction : lecridespeuples.fr
Points essentiels :
- L’heure est à l’union sacrée le temps de surmonter la crise humanitaire, et non aux règlements de comptes politiques ; le Hezbollah a mobilisé toutes ses ressources pour venir en aide aux sinistrés
- Toutes les accusations contre le Hezbollah sont ignobles et gratuites, car le Hezbollah n’a jamais eu aucune activité, aucun entrepôt et aucun rôle ou contrôle sur ce qui se passe dans le port ; ces calomnies constituent une incitation à la guerre civile
- A ce stade de l’enquête, aucune hypothèse ne peut être écartée quant au caractère intentionnel ou accidentel de l’explosion, même si la négligence criminelle voire la corruption semblent avérées dans tous les cas
- Une enquête rigoureuse et un procès impartial doivent identifier et châtier sévèrement tous les coupables, et rompre avec le sectarisme traditionnel de la justice qui juge les gens en fonction de leur appartenance politique et religieuse ; sans ça, le Liban ne sera jamais un État authentique
- L’armée libanaise est l’instance la plus à même de mener cette enquête, et tous les appels à une commission d’enquête internationale ne sont que des manœuvres dilatoires visant à perpétuer le système et l’impunité
- Le Liban doit exploiter la solidarité internationale exceptionnelle et les opportunités qui se présentent pour surmonter l’embargo américain et relancer son économie
- Tous ceux qui espèrent affaiblir le Hezbollah via cette crise démontrent leur faillite morale et leur manque de lucidité ; comme toujours, ils courent après des mirages et seront déçus et vaincus
Transcription :
Avant cet événement terrible, j’avais annoncé un discours pour mercredi (5 août), et j’avais l’intention de parler de plusieurs questions qui constituaient alors l’actualité brûlante, à savoir :
– la situation à la frontière entre le Liban et la Palestine occupée, et l’affrontement en cours entre le Hezbollah et l’ennemi israélien ;
– le Tribunal Spécial pour le Liban (et le verdict attendu) le 7 août (concernant l’assassinat de Rafik Hariri en 2005) ;
– le coronavirus, son développement et l’augmentation récente des cas au Liban ;
– les pénuries de pétrole et la crise de l’essence que traverse le pays ;
– d’autres questions touchant à la situation régionale.
Mais lorsque l’événement catastrophique s’est produit mardi (4 août), j’ai décidé de reporter mon discours, et aujourd’hui, je ne vais évoquer aucun de ces sujets, mais seulement parler d’un seul point, à savoir l’événement cataclysmique qui s’est produit (dans le port de Beyrouth) et la crise humanitaire qui a frappé le Liban et le peuple libanais ces derniers jours.
[Un cataclysme majeur et sans précédent]
Concernant l’événement lui-même, premièrement, nous sommes face à un incident colossal, une grande tragédie, que ce soit du point de vue humanitaire, national ou selon tous les critères. Il y a plus de 150 martyrs, la grande majorité étant des Libanais. Point notable, il y a un grand nombre de martyrs syriens, et des martyrs de diverses nationalités. Il y a des milliers de blessés. Les derniers chiffres parlent de près de 80 disparus. Par précaution, évoquons des dizaines de disparus. Il y a des dizaines de milliers de familles qui ont dû quitter leur domicile et leur maison endommagées (et rendues inhabitables) par l’explosion. Des milliers voire des dizaines de milliers de personnes ont perdu leurs biens, leur source de subsistance, leur commerce. L’état de peur et même de terreur qui a frappé le cœur de millions de personnes en vérité, et non des centaines de milliers de personnes, car les habitants de Beyrouth et de ses banlieues représentent presque la moitié de la population du Liban, si ce n’est plus [le Liban a un peu moins de 7 millions d’habitants]. Les immeubles ont été ébranlés, au point que les gens ont cru qu’il y avait un énorme tremblement de terre, et chaque quartier a eu l’impression que l’explosion se produisait dans son propre quartier. Ce que les gens ont vécu en fait de peur et d’inquiétude, que ce soit les hommes, les femmes ou les enfants (est indescriptible).
Bien sûr, les conséquences de tout cela sont énormes et très dangereuses, de même que les scènes (d’apocalypse) que nous avons tous vues. Nous sommes face à un événement qui a des conséquences considérables sur les plans humanitaire, économique, sanitaire et social. Concrètement, le port de Beyrouth a été presque complètement détruit, ce qui implique une nécessaire reconstruction du port, avec des répercussions économiques qui s’ajoutent à la crise financière et sociale grave que traversait déjà le pays. En somme, à tous les niveaux, nous sommes face à un cataclysme majeur.
J’adresse mes sincères condoléances à toutes les familles de martyrs… Il faut bien remarquer une chose : vous savez que le Liban, en général, est divisé sur des lignes sectaires et régionales, et qu’une région peut être touchée (par un mal) sans qu’une autre en soit affectée. Mais cette explosion a dépassé les lignes sectaires et régionales : il y a des martyrs et blessés de toutes les sectes, et tous les quartiers & régions (de la capitale) ont été touchées. Beyrouth est la ville de tous les Libanais, et embrasse tous les Libanais. Les habitants de Beyrouth sont un microcosme de tous les Libanais, dans leurs différentes appartenances régionales, religieuses et sectaires. Cette tragédie n’a fait aucune distinction.
J’adresse donc mes sincères condoléances à toutes les familles de martyrs, et je demande à Dieu le Très-Haut et l’Exalté de leur inspirer la patience et l’endurance face à la perte de leurs bien-aimés, et je Lui demande également d’accorder un prompt rétablissement à tous les blessés et à tous ceux qui ont été touchés (d’une manière ou d’une autre). Je demande à Dieu le Très-Haut et l’Exalté d’inspirer à tous la patience et la capacité de supporter et d’endurer (cette tragédie), et d’accorder la détermination (requise) pour surmonter cette épreuve à tous ceux qui ont été touchés, que ce soit au niveau de leurs proches, de leurs maisons, de leurs moyens de subsistance ou de leurs biens, ou qui ont été déplacés hors de leur domicile. Je Lui demande de leur conférer la patience, l’endurance et l’entraide (requises) pour surmonter cette épreuve. Bien sûr, cela nécessite la Grâce de Dieu le Très-Haut et l’Exalté, et la coopération, les efforts et les sacrifices de tous.
Par cette brève description, j’ai voulu indiquer que nous sommes face à un événement exceptionnel, au moins dans l’histoire moderne du Liban, qui exige un comportement exceptionnel à tous les niveaux, que ce soit au niveau psychologique, au niveau de l’action sur le terrain, aux niveaux médiatique, politique et judiciaire : toutes les mesures doivent être fortes et exceptionnelles du fait du caractère majeur et sans précédent de cet événement.
Bien sûr, l’homme est incapable d’exprimer (comme il se doit) les sentiments (que nous ressentons) face à notre peuple, nos bien-aimés à Beyrouth et dans ses banlieues, dans tous les quartiers de Beyrouth et de ses banlieues, et de mettre des mots sur la souffrance, la tristesse, l’affliction (que nous ressentons), de même que notre solidarité et notre présence à leurs côtés, et notre (sens de la) responsabilité commune.
De même, face à cet événement et ses conséquences, et j’aborde maintenant les autres points, nous avons pu voir plusieurs choses au Liban. Je tiens à parler de chaque scène, la commenter et prendre position.
[L’union sacrée du peuple libanais et de ses institutions]
Premièrement, la scène populaire aux côtés de l’Etat. Depuis les premières heures, très naturellement, les directions concernées, les instances sécuritaires, militaires et sanitaires, la défense civile, les secours, les pompiers, tous sont descendus sur le terrain, mais ce qui est remarquable, c’est l’atmosphère populaire, l’ardeur du peuple dans toutes les régions, cette présence rapide de beaucoup de groupes et d’associations civiles et populaires, qu’il s’agisse de pompiers, d’ambulanciers, d’organismes de secours, afin de venir en aide aux instances de l’Etat, car cette situation dépassait les capacités de l’Etat, qu’il s’agisse des hôpitaux, des médecins, des infirmiers et infirmières, des dons de sang… C’est peut-être la première fois que le Hezbollah a officiellement lancé un appel aux dons du sang, et Dieu merci, tout le sang requis a été obtenu, même si le nombre des blessés était colossal dès les premiers instants.
Cette atmosphère de compassion & de réactivité populaire a également perduré dans le déblayage des débris, le nettoyage des rues, des maisons et des places, et nous voyons encore une présence massive des bénévoles sur ces places. Un (grand) nombre de municipalités et de collectivités, d’associations religieuses et de forces politiques, de familles et de maisons ont annoncé leur disposition à garantir des logements à ceux qui avaient perdu leur domicile, qu’il s’agisse de dégâts temporaires ou d’une destruction totale. Malgré toutes les crises financières et sociales que traverse le pays, nous avons pu voir un tel niveau de compassion et de solidarité. Bien sûr, nous devons également considérer le côté psychologique et émotionnel qui a atteint un haut niveau d’excellence, à savoir cette ardeur, cette tristesse, cette compassion (massives). Au niveau populaire, on ne voit pas d’abus ou d’indifférence, tout le monde se sent concerné, tout le monde est touché. Tels sont les émotions des habitants. Nous devons donner une très bonne note à cette scène (de solidarité populaire), au niveau de la civilisation, de l’humanité, de l’éthique, de la nation, des émotions. C’est une preuve de la conscience, de la vie, de l’âme, de la culture, de l’éthique et du sentiment humanitaire et national de notre peuple dans toutes les régions, chez toutes les sectes et sur toutes les places.
[Une mobilisation totale du Hezbollah pour secourir et reloger les sinistrés]
Bien sûr, en ce qui concerne le Hezbollah à cet égard, depuis les premiers instants, la présence de nos instances, de nos associations, de nos membres et de notre base populaire, les municipalités et collectivités dans lesquelles nous sommes représentés ou présents, je considère qu’ils n’ont épargné aucun effort, et qu’ils étaient présents (massivement). Et aujourd’hui, je confirme à nouveau que le Hezbollah, au niveau de toutes ses instances, associations et personnels, et de toutes nos capacités humaines et matérielles, nous sommes entièrement au service de l’Etat libanais et du gouvernement libanais, et des ministères concernés, et nous sommes à la disposition de tout notre peuple et de tous nos concitoyens qui ont été touchés par cette tragédie.
Bien sûr, je veux insister sur notre projet de relogement des sinistrés, car nous avons une grande expérience à cet égard depuis la guerre de 2006, et j’espère que les gens le considéreront avec le sérieux requis. Et je confirme à nouveau ce qu’a annoncé le président de la collectivité des municipalités de la banlieue sud de Beyrouth et diverses municipalités au Liban : toute famille qui a perdu son domicile, et qui a besoin de temps pour déblayer ou réparer ce domicile, et a besoin d’un logement temporaire en attendant, nous sommes ouverts, heureux et prêts à aider ces familles via ce projet, avec la Grâce de Dieu. Il n’est pas acceptable qu’une seule famille reste à la rue, ni qu’elle se sente comme un fardeau pour ses proches ou amis qui l’hébergeraient car elle les aura sollicités. Il est possible de leur fournir des logements temporaires jusqu’à nouvel ordre, afin de leur donner le temps de retourner chez eux dès que possible, quand leurs domicile aura été réparé et déblayé.
[Une solidarité internationale exceptionnelle malgré les sanctions américaines]
La deuxième scène était extérieure, à savoir les positions de beaucoup d’Etats et de gouvernements dans le monde, des grandes autorités religieuses dans le monde, musulmanes et chrétiennes, sunnites et chiites, des forces politiques, des mouvements de Résistance, des dirigeants, des savants, des élites, des médias, des partis, etc. Le Liban et le peuple libanais ont été l’objet d’une grande compassion au niveau international, et beaucoup de pays ont annoncé leur disposition à fournir de l’assistance, alors que nous sommes assiégés : les Etats-Unis ont clairement annoncé qu’ils n’allaient pas assiéger un groupe ou un parti, comme certains essaient de le prétendre, mais bien tout le Liban. Si seulement ils se contentaient d’assiéger seulement un parti ou un groupe ! C’est ce que nous demandons depuis le début ! Vous avez un problème avec nous (le Hezbollah), alors assiégez-nous, et seulement nous, sans châtier et faire payer le prix à tout un pays et tout un peuple !
Quoi qu’il en soit, nous remercions tous les pays qui nous ont envoyé de l’aide, tous les pays amis et frères, arabes, islamiques et autres, toute la communauté internationale. Certains ont annoncé qu’ils allaient nous aider, et nous espérons qu’ils tiendront parole (sans crainte des sanctions américaines). De même, des délégations & ministres de divers pays sont venus, et la plus visible était la visite du Président français au Liban. Nous considérons de manière positive toute aide et toute compassion avec le Liban, et toute visite au Liban en ces jours, surtout si elle s’inscrit dans le cadre de l’aide au Liban, ou un appel à la coopération et au dialogue entre les Libanais. Nous regardons ce genre de visite (de manière positive). Nous voulons nous concentrer sur l’aspect positif. Peut-être que certains appellent à la vigilance et à l’inquiétude (sur les arrière-pensées de ces visites), et expriment des craintes (d’ingérence qui peuvent être légitimes), mais à l’étape actuelle, nous préférons considérer ce genre de visite dans ses aspects positifs et nous concentrer sur les aspects positifs, (du moins) pour le moment. [Note du Cri des Peuples : la section du discours concernant la France a été lue mot pour mot par Nasrallah sur une déclaration préparée à l’avance, alors que pour le reste de son discours, il s’exprimait spontanément et n’avait préparé que des notes ; cela traduit bien la méfiance et la lucidité du Hezbollah face à l’initiative de Macron et à ses déclarations d’ingérence outrageantes, qu’il préfère ne pas commenter pour le moment pour rester dans une perspective d’union sacrée ; il faut noter que les principaux responsables politiques de l’explosion semblent être les plus proches amis de la France, à savoir la clique de Hariri.]
Par conséquent, cette scène extérieure et internationale était dans l’ensemble positive, et était pleine de compassion, et je considère que cela ouvre une opportunité au Liban, en tant qu’Etat et en tant que peuple – j’y reviendrai en conclusion – pour obtenir de l’aide, et ouvrir une porte de sortie face à l’état de siège et aux difficultés que traversait le Liban dernièrement.
[La faillite morale des adversaires du Hezbollah]
La première et la deuxième scènes sont donc positives, mais la troisième scène (que je veux évoquer) est la scène politique libanaise interne, et certains éléments extérieurs. En général, on dit que les peuples dignes, qui ont un certain niveau de culture et d’éthique, un certain sens de la responsabilité et de l’humanité, un sens de la nation, même lorsqu’il y a des luttes et des disputes entre elles, lorsqu’une grande tragédie nationale se produit, ou qu’un événement terrible se produit, tout le monde gèle temporairement ses luttes et ses disputes, ainsi que ses calculs personnels, pour s’élèver au-dessus de toutes ces considérations (partisanes), et se comporter sur une base éthique et humaine plus noble, et tout le monde s’entraide afin de surmonter cette tragédie ou cette catastrophe. Une fois la crise surmontée et dépassée, les choses peuvent reprendre leur cours habituel. Les choses se passent comme ça (en général) partout dans le monde. Parfois, on a même pu voir qu’en pleine guerre, lorsqu’un événement tragique comme un massacre se produit, les ennemis concluent une trêve, un cessez-le-feu, même en pleine guerre ! Cela arrive et c’est bien connu (même face à Israël), mais je ne vais pas perdre de temps à mentionner des exemples. Mais en dehors de la guerre, au sein d’un même pays, où il y a un gouvernement, une opposition, des forces politiques rivales, lorsqu’une catastrophe touche tout le monde, toutes les régions, toutes les familles… Ce n’était pas une tragédie ciblée sur certaines catégories de population, non. En général, dans de telles situations, les différends sont provisoirement mis de côté, et tout le monde s’entraide et coopère (même avec ses adversaires politiques), et adopte un langage plus digne, avec des sentiments différents, et des communiqués et discours politiques différents. De même, les médias se comportent différemment, avec humanité et éthique, chacun accordant un répit (à ses adversaires), ne serait-ce que pour quelques jours, au moins quelques jours (de trêve) ! Je ne parle pas de plusieurs mois ou de plusieurs années, non, quelques jours, (une ou) deux semaines ! Pour laisser aux gens le temps de récupérer les dépouilles de leurs martyrs, de panser leurs blessures, de rendre visite à leurs blessés, d’être fixé sur le sort des disparus, d’éteindre les incendies, de déblayer les débris, de déterminer comment reloger les déplacés, etc. Après cela, on peut rouvrir les comptes (et ranimer les rivalités), pas de problème.
[Une cabale de calomnies]
Mais malheureusement, ce qui s’est passé au Liban avec cet incident, c’est que dès les premières heures de cette tragédie et de ce cataclysme, et même depuis la première heure, pas les premières heures, alors que personne ne savait encore ce qui s’était passé… Dans les premiers instants, les gens ont parlé de tremblement de terre, de secousse, et ce n’est qu’ensuite qu’il a été établi qu’il s’agissait d’une explosion. (Il fallait encore déterminer) de quel type d’explosion il s’agissait, à quel endroit du port elle avait eu lieu, qu’est-ce qui avait explosé, qu’est-ce qui se trouvait dans le hangar qui a explosé, comment s’est produite l’explosion, est-ce un accident ou un acte intentionnel, etc. Avant même que quiconque connaisse la réponse à ces questions, des médias libanais et arabes, et certaines forces politiques ont exprimé via leurs réseaux sociaux officiels, et même via certaines déclarations publiques de responsables – il ne s’agit pas de personnes obscures qui gèrent les comptes Twitter ou Facebook, mais de déclarations à la télévision et aux médias, faites dès que l’explosion a été révélée au public, et alors que les incendies au port n’avaient pas encore été éteints, et que la destruction et l’hébétude étaient le lot de tous les Libanais et du monde entier. Mais ces gens-là se sont exprimés dans les médias et ont annoncé leur position avant de savoir quoi que ce soit. Leur position a été arrêtée à l’avance : la cause de l’explosion dans le hangar numéro tant du port de Beyrouth est un entrepôt de missiles du Hezbollah qui a explosé, et qui a causé cette terreur et ce cataclysme sans précédent. Ou alors, ils ont dit qu’il s’agissait de stocks de munitions, d’explosifs ou d’armes du Hezbollah. L’essentiel est qu’il fallait que cela appartienne au Hezbollah, qu’il s’agisse de missiles, de munitions, d’explosifs… Et ensuite, même lorsque les instances officielles ont annoncé qu’il ne s’agissait ni de missiles, ni d’armes, ni de munitions, ni d’explosifs ni de quoi que ce soit de tel, mais de nitrate (d’ammonium) utilisés comme fertilisant ou comme explosifs, ces gens-là ont déclaré que ce nitrate appartenait au Hezbollah, que c’était le Hezbollah qui l’avait apporté, que c’était le Hezbollah qui l’avait stocké pendant 6 ans, et encore Hezbollah, le Hezbollah, le Hezbollah.
Sans même savoir si cette explosion était criminelle ou accidentelle, s’il s’agissait d’un accident dû à un incendie ou autre, ou s’il s’agissait d’un attentat, ou, comme l’ont prétendu certains, d’une attaque aérienne, d’un missile ou autre, tout cela n’intéressait nullement ces gens-là. Accident ou crime, missile, drone, incendie, etc., peu leur importait. Ce qui comptait, c’était d’affirmer que ce hangar appartient au Hezbollah. Pourquoi ? Pour qu’ils puissent dire au peuple libanais, aux habitants de Beyrouth, aux habitants des banlieues de Beyrouth, à tous les Libanais, que celui qui avait détruit leurs maisons, tué leurs enfants et leurs bien-aimés, détruit leur port, leurs moyens de subsistance et leurs biens, avait blessé des milliers d’entre vous et vous avait terrorisés, c’était le Hezbollah, c’était lui le responsable de tout ça.
Bien sûr, c’est une injustice énorme qui nous est faite, un crime, et je ne sais pas si on peut considérer cela comme relevant de la liberté d’expression, de la liberté de la presse (ou de la diffamation et de l’incitation à la haine et à la violence). Ces questions doivent être débattues. Au moment où… Permettez-moi de parler un peu de nos sentiments. Nous faisons partie des tués et des blessés. Parmi les martyrs et les blessés, il y a nos proches, nos partisans, des membres du Hezbollah. Tous ces gens-là ont un travail, ce sont des ouvriers, ils ont des voitures, ils ont donné les premiers secours (beaucoup de pompiers et secouristes sont morts), etc. De même, nos sentiments s’étendent à tout notre peuple, pas seulement à ceux qui soutiennent le Hezbollah. Nous sommes emplis d’amitié sincère pour tous les Libanais, et notre émotion est grande face à ce qui s’est passé. Au moment où nous étions livrés aux affres de la tragédie, nous avons subi la souffrance de l’oppression (que constituent ces accusations calomnieuses). Certains m’ont dit qu’il ne valait pas la peine d’en parler. Non. Je dois en parler, c’est une certitude. Car le degré d’oppression (constitué par ces attaques gratuites) est exceptionnel : de même que l’événement est exceptionnel, l’oppression qui nous est infligée est sans précédent. Avant même qu’une enquête soit lancée, avant que quiconque sache ce qui s’est passé, certains médias, certaines chaines de télévision libanaises et arabes, depuis l’incident et jusqu’à présent – elles n’ont pas changé de disque – ont affirmé que le hangar est au Hezbollah, que ce sont des missiles du Hezbollah, des explosifs du Hezbollah, du nitrate du Hezbollah, (matraquant sans cesse) « Hezbollah, Hezbollah, Hezbollah, Hezbollah »… On n’entend rien d’autre, car il n’y a pas d’autre (hypothèse) pour eux. C’est un grand crime commis à notre encontre. Et leur méthode a consisté à mentir, mentir, mentir et encore mentir, jusqu’à ce que les gens finissent par y croire. Et il semble que certaines personnes, du fait des affres de la tragédie et de la catastrophe, et du matraquage médiatique (nous imputant la responsabilité), il est possible que cela ait eu une influence sur certains, même si en général nous comptons sur l’éveil et la lucidité des gens, et leur conscience du fait que ces sources n’ont pas de crédibilité, et ont tout un passif de mensonges, de tromperie, d’inventions, de falsifications et d’inversion de la réalité.
[Le Hezbollah n’a jamais eu d’activités ou de stockage dans le port]
Malgré le fait que, comme l’ont dit certains d’entre nous, ces accusations (sont si grotesques qu’elles) ne méritent pas de réponse, s’il y a la moindre audience qui peut être touchée par ces allégations, peut-être que certains diront que le Hezbollah n’a pas fait de déclaration ni de démenti ou commenté, et par égard pour les esprits doués de raison et pour l’opinion publique, je tiens à souligner et confirmer aujourd’hui : je démens de manière ferme, catégorique, absolue, définitive, totale et sans appel que le Hezbollah ne possède absolument rien dans le port. Il n’y a ni entrepôt d’armes, ni stock de missiles, ni une seule roquette, un seul fusil, une seule grenade, une seule balle, (une seule goutte) de nitrate, il n’y a rien de rien de tout cela, ni dans un hangar ni hors d’un hangar, ni actuellement ni par le passé, il n’y a rien et il n’y a jamais rien eu. Rien de rien. Il n’y a absolument rien de tout ça. Quoi qu’il en soit, les résultats de l’enquête seront bientôt connus, et tout sera prouvé et démontré, car on ne peut pas cacher de telles choses. Si l’explosion dans le port était due à des missiles, des munitions, des armes ou quoi que ce soit de militaire, l’enquête le révèlera (infailliblement). Quant au nitrate, on sait déjà d’où il est venu, qui l’a fait entrer au pays, combien d’années il a été stocké là-bas, etc. Tout cela sera établi et confirmé par l’enquête. Je n’ai pas besoin de davantage que ce bref démenti, car tout ce qui m’importe, c’est que personne ne puisse donner foi dans ces mensonges et ces fabrications (du fait du silence du Hezbollah), et de dénoncer cette énorme oppression infligée au Hezbollah et à la Résistance au Liban.
Bien sûr, certains ont opté pour une autre vague (d’accusations calomnieuses) lorsqu’ils ont vu que la majorité des médias locaux, des commentaires et des données (privilégiaient une autre direction)… Même Trump, par exemple, à la Maison Blanche, a d’abord marché dans ce sens, parlant d’une bombe éventuelle, ou que sais-je encore, mais les Etats-Unis sont revenus sur ce propos. J’ai vu hier et aujourd’hui que la majorité des médias et journalistes internationaux ont abandonné l’hypothèse (d’un stock d’armes du Hezbollah), sauf quelques voix au Liban et dans le monde arabe. Ainsi, ceux qui ont lancé (cette calomnie) sont maintenant tous seuls (à la soutenir), car tous les médias et toutes les voix dans le monde sont soucieux de garder un minimum de crédibilité, même s’ils sont nos ennemis engagés dans une guerre politique contre nous ; mais lorsqu’il s’avère que l’accusation est clairement un mensonge aussi éclatant que le soleil à son zénith, ils (ont le bon sens de) faire marche arrière et évoquent d’autres pistes.
[Le Hezbollah n’a aucun contrôle sur le port et ne s’est jamais ingéré dans ses affaires]
Certaines personnes ont tenu un autre propos, à savoir que le Hezbollah contrôlerait le port de Beyrouth, le dirigerait et le superviserait, et que rien ne se passerait dans le port sans qu’il le sache, le voie et donne son accord, etc. Ce sont également des mensonges, de la tromperie, de la falsification et une grande injustice (contre nous). Nous ne dirigeons pas le port, nous ne le contrôlons pas, nous ne le supervisons pas, nous ne nous ingérons pas dans sa gestion ou ses affaires, et nous ne savions nullement ce qui se passait dans le port et ce qu’il y avait (de stocké) dans le port. Certains ont objecté : « Est-il possible que vous soyez plus informé de ce qui se trouve dans le port de Haïfa (référence aux stocks d’ammoniaque que Nasrallah a menacé de cibler en cas de frappes israéliennes contre l’infrastructure libanaise) que de ce qui se trouve dans le port de Beyrouth ? » Mais bien sûr que oui ! La responsabilité essentielle du Hezbollah est la résistance (face à Israël), et il est normal que le Hezbollah soit plus informé du port de Haïfa que du port de Beyrouth, qui n’est pas sa responsabilité, alors que le port de Haïfa est de sa responsabilité, car cela fait partie de l’équation de dissuasion et de la stratégie de défense du Liban. Mais le Hezbollah ne dirige pas, ne contrôle pas, ne s’ingère pas et ne sait rien de ce qui se passe dans le port de Beyrouth, de ce qui s’y trouve ou pas, de la manière dont sont gérées les choses, c’est un sujet que nous ignorons et duquel nous ne nous mêlons pas du tout. Mais quoi qu’il en soit, on va continuer à entendre cette (deuxième) vague (d’accusations), ces allégations (mensongères), car si le hangar n’appartient pas au Hezbollah, il faut trouver autre chose pour faire porter le chapeau au Hezbollah. Car en ce qui concerne ces oppresseurs, l’important est de faire porter une responsabilité ou une autre au Hezbollah, et de rechercher un prétexte, une allégation, un mensonge, une falsification (qui le permettent). Je vais m’arrêter là à ce sujet.
[La diffamation et l’appel à la guerre civile doivent être sanctionnés sévèrement]
Quoi qu’il en soit, les enquêtes sont en cours, et les vérités apparaîtront rapidement, car ce n’est pas une question qui prendra du temps. J’estime que l’enquête criminelle, sécuritaire, militaire et technique pourra rapidement établir (avec certitude) ce qui se trouvait dans le hangar, quelle était la nature des explosifs et comment celle-ci a été déclenchée, car au niveau technique, cela ne nécessite pas beaucoup de temps, et on peut s’attendre à ce que les vérités apparaissent rapidement au grand jour.
Lorsque les vérités apparaîtront au grand jour, j’espère que l’opinion publique libanaise, dans toutes les régions du Liban, parce que dans notre pays, il y a un problème au niveau des châtiments et des responsabilités, et qu’au nom de la liberté d’opinion et d’expression, certains (médias et hommes politiques) accusent, insultent, injurient, oppressent et mènent le pays au bord de la guerre civile, et (malgré tout ça), en fin de compte, le Tribunal correctionnel leur inflige une (simple) amende de 10 à 50 millions de livres libanaises (5 000 à 30 000 euros), et ça s’arrête là. Ce que je veux demander au peuple libanais, c’est qu’il juge lui-même ces médias (et hommes politiques) et les condamne. De quelle manière ? En cessant de leur accorder le moindre crédit, la moindre importance, et en cessant de les consulter ou de les regarder. Car lorsqu’on sait que tel média n’a aucune crédibilité, et qu’il est basé sur le mensonge, la manipulation et la falsification, et qu’il participe à la bataille qui cible notre pays (pour le détruire), alors il faut les condamner et leur tourner le dos définitivement. Et c’est à mon sens le plus important châtiment (qui puisse frapper) ces chaînes de télévision mensongères et falsificatrices qui poussent à la guerre civile. Il ne faut pas prendre cela à la légère ! Il ne s’agit pas d’une (simple) accusation politique. Lorsque quelqu’un vient dire à des centaines de milliers de personnes que le responsable de ce carnage, de tous ces morts et de tous ces blessés, de toutes ces destructions et de tous ces déplacements, est le Hezbollah, à quoi mène-t-on le pays (si ce n’est à la guerre civile) ?
[Une instrumentalisation politique de la crise]
D’un autre côté, toujours concernant la scène politique, d’un autre côté, nous avons vu l’instrumentalisation politique de l’incident, et tous ceux qui avaient un problème avec untel ont rouvert ce problème (dans ce contexte tragique), qu’il s’agisse du Pacte national libanais, du gouvernement ou d’autres forces politiques, et bien sûr ceux qui ont un problème avec nous. Aujourd’hui, je ne veux ouvrir de dispute avec personne, et nous remettons (les comptes) à plus tard car nous restons attachés à ce que par sentiment éthique, humanitaire et national, l’heure ne soit pas au règlement de comptes politiques et partisans. C’est le moment de la solidarité, de la compassion, de l’entraide, de panser les plaies, de déblayer les débris, de déterminer le sort des disparus, de soigner les blessés, d’aider les gens à rentrer chez eux, ce qui est une priorité vitale. Le pays a besoin de ce genre d’attitude et de calme pour plusieurs jours, afin de surmonter la crise. Ensuite, on pourra parler politique et régler les comptes. Notre position sera ferme. Et quant à certaines analyses qui comparent la situation actuelle à des expériences précédentes (assassinat de Hariri en 2005, etc.) ou y bâtissent des espoirs comme tant de leurs illusions passées, (rappelons que) depuis longtemps des gens (les adversaires du Hezbollah) ont couru après des mirages, pour se rendre compte finalement que ce n’étaient que des mirages, mais j’en parlerai plus tard. A cet instant, je ne veux pas entrer dans ces considérations, et je ne veux m’en prendre à personne. Je remets ça à plus tard. La priorité est à la compassion, à la coopération et à l’entraide, pour surmonter ces jours en fait de douleur, de souffrances et de crise humanitaire. Laissons-tous les différends de côté et nous reviendrons plus tard (aux règlements de comptes) politiques.
[Une enquête impartiale et un châtiment exemplaire pour tous les responsables sont indispensables pour sauver le Liban]
Mon dernier point, qui est le plus important, c’est l’enquête et le châtiment. Un événement énorme, terrible et dangereux s’est produit. Premièrement, il doit y avoir une enquête. Son Excellence le Président de la République et Monsieur le Premier ministre ont déclaré dès le début qu’il y aura une enquête impartiale, résolue, ferme, définitive et forte, et que quiconque sera identifié comme ayant une responsabilité dans cet incident, par ses actions ou par sa négligence, par corruption ou par insuffisance, rendra des comptes, qui qu’il soit, grand ou petit. Très bien. C’est un bon début. Les Libanais demandent maintenant de l’action et des efforts (en ce sens). Je considère que face au choc de l’événement, il y a une unanimité nationale, populaire et gouvernementale, de tous les partis politiques et de tous les députés, etc., demandant qu’une enquête exhaustive, franche, transparente, précise, juste et impartiale soit menée sur cet événement, et que quiconque porte une part de responsabilité soit jugé et condamné de la manière la plus sévère et la plus exemplaire – un châtiment juste, bien entendu (et non un lynchage). Nous faisons également partie des voix qui exigent cela haut et fort. Il ne faut pas permettre que quiconque soit couvert ou protégé durant l’enquête, et que des vérités soient dissimulées au sujet de quiconque. Il n’est pas tolérable que l’enquête puis le procès se fassent « à la libanaise », c’est-à-dire de cette manière bien connue où on prend en compte les calculs et les équilibres religieux et sectaires. Quiconque a fait preuve d’insuffisance ou de négligence, a été l’instigateur (de cet événement) ou s’est engagé dans la corruption, n’a ni religion ni secte, comme pour les collaborateurs (de l’ennemi israélien). Il faut qu’ils soient jugés sur la base de ce qu’ils ont fait, et non sur la base de leur appartenance sectaire, religieuse ou politique. Ni l’enquête ni le procès ne doivent être menés sur la base sectaire (exigeant un ratio précis de sunnites, chiites ou chrétiens). Qui que soient les responsables, qu’ils appartiennent à plusieurs sectes ou soient tous de la même secte, quelles que soient leurs appartenances politiques et l’alliance à laquelle ils adhèrent, quel que soit leur clan familial, c’est la vérité et la justice qui doivent primer et déterminer la prise de position, l’enquête et le châtiment.
[L’enquête doit être menée par l’armée libanaise, seule institution qui fait l’unanimité]
De même, en ce qui concerne l’enquête, on entend des appels, des opinions et des pensées. Je veux m’adresser à certaines forces politiques qui parlent de la question de l’enquête (et demandent qu’elle soit faite par des instances internationales, à l’instar de Macron). Les instances sécuritaires officielles sont tout à capables de mener cette investigation : elles en ont la capacité technique et l’expertise requise, c’est une certitude. Mais vous émettez des doutes sur leur fiabilité (et leur impartialité). Je vous pose une question : car parfois, les règlements de comptes politiques (sont flagrants), et le fil du mensonge est court. Toutes les forces politiques au Liban affirment leur confiance en l’armée libanaise, l’institution nationale (par excellence), garante de la stabilité et de la sécurité dans le pays, garante de la souveraineté. Nous avons entendu maintes louanges poétiques à la gloire de l’armée nationale libanaise. Très bien. Laissons donc l’armée libanaise se charger de l’enquête. Je crois que des services de l’armée libanaise ont déjà été sollicités, la police militaire il me semble. Si l’armée libanaise est une institution qui recueille la confiance de tous les Libanais, de toutes les forces politiques libanaises et de tous les leaders libanais, confions-lui la tâche de mener l’enquête, puisque vous dites que vous lui faites confiance ! Laissons-la au moins mener l’enquête, puisque vous lui faites confiance ! Laissons-les mener l’enquête et en révéler les conclusions, et tout le monde pourra les voir.
Il y a encore un autre choix. Peut-être que certains Libanais ont confiance en telle instance, mais pas en telle autre. C’est possible. Formons donc un comité d’enquête pluriel, où chaque instance sécuritaire en laquelle vous avez confiance sera présente, même si à mon avis en charger l’armée est suffisant, indépendamment des autres instances qui peuvent recueillir les suffrages des uns mais pas ceux des autres. Tout le monde affirme que l’armée fait l’unanimité, alors confions l’enquête à l’armée ! Laissons l’armée mener l’enquête, et qu’elle annonce ses conclusions à tout le peuple, et pas seulement aux instances judiciaires, sous sa propre responsabilité. Qu’ils déclarent qu’eux, l’armée libanaise, avec leur expertise, leurs capacités et leurs moyens, ont mené une enquête impartiale et transparente, et voici leurs conclusions, ô peuple libanais, concernant l’explosion qui a eu lieu dans le port de Beyrouth. Cela suffira à manifester la vérité aux yeux de tous.
[La survie du Liban en tant qu’État authentique est en jeu]
A cet égard, je tiens également à ajouter quelque chose de très important. De même que l’événement est exceptionnel, aujourd’hui, l’attitude de l’Etat libanais face à cet événement sera à nos yeux décisif et crucial. Cela déterminera l’avenir du Liban. De quelle manière ? Il ne s’agit pas aujourd’hui du Président de la République, du Pacte national ou du gouvernement (qui peuvent aller et venir au gré des élections et des crises). Il s’agit de (la sauvegarde de) l’Etat libanais, (qui va dépendre) de la manière dont les autorités vont se comporter à cet égard, que ce soit la justice, l’armée, les services de sécurité, et même la Chambre des députés. Il s’agit (de la pérennité) de l’Etat et de ses institutions. Tout le monde à une part de responsabilité à l’égard du procès et du châtiment. La manière d’agir face à une telle catastrophe, qui a touché et dépasse toutes les sectes, tous les quartiers et toutes les régions, et ne doit aucunement être teintée de sectarisme, de religion ou politisée, une tragédie nationale et humanitaire par excellence, la manière dont les institutions de l’Etat se comporteront face à elle, de même que les responsables politiques et les différentes forces politiques du pays, auront une conséquence cruciale pour l’ensemble du pays. Quelle sera cette conséquence cruciale ? La manière dont cette tragédie sera traitée déterminera aux yeux du peuple libanais –et à mes yeux le verdict sera irrévocable – s’il y a un Etat (authentique) au Liban ou pas. La deuxième question (qui trouvera une réponse irrévocable) est celle de l’espoir ou non d’ériger un Etat (au Liban). Car je vous le dis en toute franchise : si l’Etat libanais et les forces politiques libanaises – qu’elles soient au pouvoir ou dans l’opposition –, dans un tel dossier et une telle cause, ne parviennent pas à un résultat dans l’enquête, et ne parviennent pas à châtier (tous les responsables), cela signifie que le peuple libanais, les forces politiques, les institutions de l’Etat (sont en faillite), et qu’il n’y a aucun espoir d’ériger un Etat (authentique et souverain). Je ne veux désespérer personne, mais je décris fidèlement la réalité.
Mais nous devons (tous) œuvrer afin que ce désespoir n’ait pas lieu d’être, afin de confirmer, de créer et de semer l’espoir (de voir un véritable Etat) auprès des Libanais. Aujourd’hui, tous les appels à lutter contre la corruption qui dénonçaient tel juge partial, tel juge lâche, telle force qui enterrait les dossiers judiciaires pour telle ou telle considération, (sont éclipsés devant l’ampleur de cette affaire). Il y a forcément de lourdes responsabilités, car même si l’enquête révèle que c’est un acte intentionnel ou un bombardement aérien, le fait que ce nitrate ait été stocké ainsi pendant 6 ou 7 ans implique clairement qu’il y a eu une négligence (criminelle), de l’insuffisance et de la corruption de la part de juges. C’est là qu’il faut mener (en priorité) la guerre contre la corruption ! Si dans cette affaire, tous ceux qui appellent à la guerre contre la corruption, et nous en faisons partie, si nous sommes incapables de faire quoi que ce soit (pour identifier et châtier tous les coupables), cela signifie que nous sommes incapables de faire quoi que ce soit (pour toujours). Terminé. Nous déclarerons franchement au peuple libanais qu’il est impossible de lutter contre la corruption, de faire face à la négligence et à l’insuffisance, et nous dirons « ô peuple libanais, tu n’as pas d’Etat et il n’y aucun espoir de bâtir un Etat (authentique), donc à toi de voir ce que tu peux faire de toi ». A mes yeux, telle est l’ampleur de la question. Afin que les gens ne disent pas ensuite que c’était une tragédie (sans responsables) et oublient l’affaire, nous disons clairement qu’en ce qui nous concerne, il est impossible d’oublier cette catastrophe, de passer outre et de permettre qu’elle soit négligée. Il faut que toute la vérité soit révélée quant à cette tragédie, et que les responsables en soient jugés sans la moindre protection, qu’elle soit politique, sectaire ou partisane. Sans cela, oui, je considèrerai qu’il y a une crise du régime, une crise de l’Etat, peut-être même une crise de l’entité (libanaise), certains pourront aller aussi loin. Et certaines personnes essaient d’ignorer cela, d’une manière ou d’une autre.
Par conséquent, j’appelle les responsables de l’Etat, à tous les niveaux et dans toutes les autorités, à faire preuve du plus grand sérieux et de la plus grande détermination, que ce soit pour mener l’enquête à son terme ou plus tard pour juger et faire porter les responsabilités, et châtier tous ceux qui sont responsables de cette tragédie. Ce afin que les responsables et les forces politiques puissent donner l’espoir au peuple libanais qu’il y ait des autorités, un Etat et des instances (authentiques au pouvoir), ou du moins qu’il y ait l’espoir qu’un Etat soit érigé sur la base de la vérité, de la justice, de la transparence et de la protection des Libanais, car parfois, les conséquences de la corruption, de la négligence et de l’incompétence s’accumulent et transparaissent au bout de plusieurs années, et peuvent être destructrices, comme ce qui s’est passé dans cet événement terrible où en quelques secondes, en quelques secondes seulement, des dizaines de personnes ont été tuées ou portées disparues, des milliers ont été blessées, des centaines de milliers de familles ont été touchées et ont dû quitter leur domicile… Et certaines personnes disent que Dieu a empêché une tragédie plus grande encore, et que si ce hangar n’avait pas été si proche de la mer, et sans telle et telle particularités du site, si cette même quantité de nitrate avait explosé dans une configuration géographique différente, peut-être que toute la ville (de Beyrouth) aurait été détruite. Tout cela en un instant, en quelques secondes, à cause de la corruption, de la négligence et de l’incompétence, et que personne ne dise que c’est simplement à cause des méandres de la bureaucratie. En aucun cas. On parle de stocks qui pouvaient complètement détruire la capitale et certaines banlieues (en un instant). On ne peut pas en imputer la responsabilité aux méandres de la bureaucratie.
[Le Liban doit saisir les opportunités de la crise]
En conclusion – car je ne vais pas être long aujourd’hui – je voudrais finir sur deux points.
Premier point, en ces jours de tragédie, de catastrophe humanitaire et de sacrifices – car aujourd’hui encore, il y a eu des sacrifices, des martyrs, des blessés, des déplacés, des moyens de subsistance anéantis, un poids énorme ajouté sur l’économie libanaise et sur l’Etat libanais –, (il ne faut pas oublier) que du gouffre des crises, de la matrice des crises, naissent des opportunités, qu’il s’agisse d’opportunités internes, régionales ou internationales. L’attitude internationale face à cet événement est une opportunité que les Libanais doivent saisir et mettre à profit, tant l’Etat que le peuple, et ils ne doivent pas laisser passer ces occasions à cause de leurs différends. Il faut rechercher les opportunités qui ont été suscitées par ces crises et en tirer profit de manière solidaire et par la coopération.
[Les ennemis du Hezbollah doivent cesser de courir après des mirages]
Et le deuxième et dernier point pour conclure, c’est que je déclare à tous ceux qui, dès le premier instant, ont lancé une campagne contre nous, contre la Résistance et contre l’Axe de la Résistance, en s’appuyant sur cette tragédie, vous ne parviendrez à rien, et je vous le dis en toute franchise et en toute sincérité. Je déclare également aux masses (qui soutiennent) la Résistance, et dont certains sont peut-être inquiets, apeurés, se demandent quelle est l’atmosphère (sous-jacente), s’il s’agit d’un grand complot régional ou international, (je les rassure en leur rappelant) que la situation régionale est bien différente (de ce qu’elle était auparavant), de même que la situation internationale (nous est plus favorable que jamais). Nous sommes bien différents de ce que nous étions, de même que (l’Axe de) la Résistance (nous sommes plus forts que jamais), et il n’y a donc vraiment pas matière à s’inquiéter (pour nous) de la part de qui que ce soit. Ces gens-là (nos adversaires) courent après des mirages, comme ils ont toujours couru après des mirages. Tous leurs choix se sont toujours révélés voués à l’échec et à la défaite.
Et je dis ceci à nos adversaires : de même que vous avez été déçus et vaincus (dans toutes vos entreprises passées : Tribunal Spécial pour le Liban, guerre de 2006, guerre en Syrie, etc.), vous serez une nouvelle fois déçus et vaincus. Vous ne parviendrez à rien. Cette Résistance, par sa crédibilité, sa sincérité, par la confiance du peuple libanais envers elle, par ses batailles (victorieuses), par ses prises de position, par son attitude et son comportement, et par sa force, sa place dans le pays et dans la région, est trop grande, trop forte et trop noble pour que puissent l’atteindre (les calomnies) de certains oppresseurs, menteurs et falsificateurs de la vérité, qui incitent (en permanence) à la rivalité sectaire, et qui poussent à la guerre civile. Ils ont toujours œuvré à cela et ont toujours échoué, et ils échoueront encore.
[Conclusion]
Que Dieu fasse miséricorde aux martyrs, et guérisse (promptement) les blessés, et espérons que par Sa Grâce, les disparus seront retrouvés vivants ; même s’ils sont blessés Dieu les soignera et les guérira. Que Dieu accorde la patience et l’endurance aux familles des victimes, ainsi que la patience, le secours et la détermination à toutes les familles qui ont été touchées et ont souffert de cette tragédie, qu’il s’agisse de nos familles à Beyrouth ou dans les banlieues de Beyrouth. Avec la Grâce de Dieu, par l’entraide et la solidarité de tous, et l’endurance de l’Etat dans ses différentes institutions, de même que l’investissement des forces politiques et du peuple libanais dans ses diverses catégories, nous parviendrons à surmonter cette épreuve et à construire des lendemains meilleurs, et à en sortir plus forts et plus résolus dans notre détermination à persévérer, à endurer et à être victorieux.
Que la paix soit sur vous, ainsi que la miséricorde de Dieu et Ses bénédictions.
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