Lʼusure cʼest le vol !

Lʼusure cʼest le vol !

Indéfectiblement, le nom de la grande figure de lʼanarchisme Pierre-Joseph Proudhon est associé à lʼhistoire de lʼAction Française, mais seulement pour ceux qui ont pris le temps – et la peine – de se cultiver avant de sʼengager dans le militantisme politique.

Ce qui exclue donc ces ténébreux nervis du Système que sont les membres de la mouvance antifasciste, qui en ce moment mettent les États-Unis à sac, et sans doute demain à glas.

 

Pour Charles Maurras, Proudhon était un maître. Le socialiste Albert Gabriel, qui avait connu le Maître de Martigues à La Cocarde, la revue dirigée par Maurice Barrès, lʼaffirmait : dans sa jeunesse, avant lʼaffaire Dreyfus, Maurras se disait socialiste.

Cet Albert Gabriel écrivit ceci : « Jʼaimais Charles Maurras et Frédéric Amouretti, si éloignés de moi politiquement, et je crois quʼils mʼaimaient aussi. Nous avions dʼailleurs un lien : cʼétait notre commune amitié pour Barrès ; cʼétait aussi notre aspiration commune vers la liberté et vers la solidarité […] Il y a des mots aujourdʼhui honnis et calomniés que nous chérissons tous à la Cocarde. Charles Maurras était socialiste, Amouretti était socialiste. Certes, ils étaient religieux et je ne lʼétais guère. Quʼimporte ? Nous avons le même amour de lʼhumanité et de la patrie. […] À la Cocarde, nous étions socialistes en même temps que patriotes, décentralisateurs, fédéralistes, provincialistes, nationalistes. »

 

Puis, fait-il remarquer, lʼirruption de lʼaffaire Dreyfus a entraîné un changement considérable de la nature du socialisme, qui devint un mouvement « antipatriote, antimilitariste, dreyfusard, collectiviste dʼÉtat ». Dʼoù le divorce entre Jean Jaurès et Georges Sorel, les deux frères ennemis du socialisme. Ce qui explique pourquoi le rapprochement des syndicalistes-révolutionnaires de ce dernier et des néoroyalistes de la jeunes Action Française se fit, à lʼorée du XXèmesiècle, sous le patronage de Proudhon.

En 1840 ce dernier publiait lʼouvrage Quʼest-ce que la propriété ?, qui contient la fameuse formule « La propriété, cʼest vol. » Puisque nous considérons que ce slogan est une ineptie, nous lui proposons une alternative, à la lumière de lʼactualité économique et financière.

 

Le 18 juin 2020 Guillaume Benoît a signé un article dans Les Échos où il relate la chose suivante : « Chronique d’un succès annoncé. 742 banques ont demandé plus de 1.300 milliards d’euros de TLTRO (Targeted Long Term Refinancing Operation), a annoncé, ce jeudi, la Banque centrale européenne. Du jamais vu pour ces prêts ciblés de long terme, qui offrent des conditions de financement avantageuses aux établissements bancaires qui prêtent aux entreprises et aux ménages. ʽʽCʼest la plus grosse opération de refinancement de l’histoire de la BCE, deux fois et demie plus importante que le précédent record de mars 2012 ʼʼ, confirme Frederik Ducrozet chez Pictet Wealth Management. »

 

Chronique dʼun fiasco annoncé, plutôt. En prêtant massivement à 274 banques de second rang (B.S.R.) – de lʼordre de 1 300 milliards dʼeuros quand même ! – à un taux de – 1 %, la B.C.E. est à lʼinitiative dʼune giganteque opération de cavalerie.

Car, pour renflouer ces banques, qui au fond ne survivent que grâce au fait que les salaires leurs sont versés par les employeurs, la B.C.E. sʼauto-mutile en détruisant une partie du capital quʼelle détient. Ce T.L.T.R.O. (ou opération de refinancement ciblé de long terme) équivaut à un cadeau du contribuable de la zone euro au système bancaire de 13 milliards dʼeuros. Rien que ça !

 

En France, la banque centrale a été nationalisée en 1946 ; auparavant la Banque de France était une entreprise privée, seuls les 200 principaux actionnaires pouvaient participer son assemblée générale, ce qui a donné naissance aux « 200 familles », vilipendées par le Parti communiste français.

On assiste ainsi à la destruction en bonne et due forme de notre capital commun. La richesse collective des Français, obtenue par un effort soutenu et maintenu depuis des générations, est annihilée afin de sauver les banques privées, qui, pour le coup, méritent le qualification de « parasites », de sangsues pompant lʼénergie des forces vives du peuple.

 

Outre lʼhyperinflation, auquel ce méga-prêt va inéluctablement contribuer, le bien commun des Français est littéralement volé. Et Macron de sʼenorgueillir dʼêtre le chef dʼorchestre de ce qui relève de la rapine dʼÉtat. Ponce Pilate sʼen lavait les mains, lui sʼen poudre le nez, son grand nez quʼil aime chatouiller si souvent.

Nous sommes les témoins dʼune époque similaire à la mise en place des assignats. Si la Terreur, la persécution de lʼÉglise et le populicide des Chouans furent les horreurs politiques de la Révolution, les assignats en furent les horreurs économiques.

 

En octobre 1790 Mirabeau ralliait Talleyrand dans son projet de nationalisation des biens du clergé. Le 2 novembre il fut approuvé par lʼAssemblée. Ces biens furent progressivement aliénés, les paiements étant échangés contre lʼémission de papier-monnaie.

La Caisse de lʼExtraordinaire fut créée, émettant, « pour la somme de 400 millions, des assignats divisés en coupures de mille francs et produisant un intérêt de 5 %. Ces assignats seraient, pour une part, remis à la Caisse dʼEscompte en remboursement de ses avances et, pour le reste, reçus de préférence dans le paiement de biens nationaux », indique Pierre Gaxotte.

 

Initialement conçu comme un produit financier assimilable à une obligation hypothécaire, lʼassignat devient rapidement du véritable papier-monnaie, une monnaie fiduciaire. Dès lors, lʼinflation devient le politique financière de la Révolution : « Tous les acheteurs de biens ecclésiastiques seront personnellement intéressés à lʼabaissement définitif du clergé », note Gaxotte.

Les assouplissements quantitatifs – pour reprendre le langage de la B.C.E. – sʼenchaînent. Le 18 mai 1791, des billets dʼune valeur nominale de 600 millions sont imprimés. Le 17 décembre, 300 millions. Le 30 avril 1792, 300 millions également. Le 31 juillet, la même chose. Le 24 octobre, 400 millions. Le 1erfévrier 1793, 300 millions. Le 7 mai, 1 milliard 200 millions. Et le 28 septembre, 2 milliards.

 

Gaxotte explique : « Moins les billets ont de la valeur, plus il en faut. Plus on en imprime, plus ils baissent. Chaque dépréciation nécessite une nouvelle émission. Chaque émission en entraîne une dépréciation. »

Cette politique de gribouille ne profita pas quʼà la « bande noire des spéculateurs et des intermédiaires » dénoncée par lʼévêque de Boisgelin et lʼabbé Maury. Elle fut une aubaine pour les fermiers, les laboureurs, tonneliers, marchands de vin et aubergistes qui purent acheter à vil prix des terrains et des demeures.

 

« Comme lʼÉtat reprenait son papier au pair, il suffisait dʼattendre la baisse, pour profiter de la différence entre la valeur nominale et la valeur réelle. En septembre 1793, lʼassignat perdait 71 % de sa valeur. En 1796, un assignat de 100 livres, qui valait six sous, était accepté aux guichets officiels en paiement de 1 000 livres de bonne terre. Les paysans qui, en échange de leur blé ou de leur beurre, recevaient des quantités croissantes de vignettes, pouvaient avoir une ferme au prix dʼun pigeonnier. »

Nous nous dirigeons donc, à moyen terme, vers une situation économique et financière analogue, de laquelle sortira une infime minorité de gagnants et une vaste majorité de perdants.

 

Nous seulement lʼusure est moralement condamnable mais elle est maintenant aussi devenue une aberration économique.

 

 

Hugues Petit, LʼÉglise, le Sillon et lʼAction Française, Paris, Nouvelles Éditions Latines, 1988, p. 119.

Cité par Olivier Dard, Charles Maurras. Le maître et lʼaction, Paris, Armand Colin, 2013, p. 62.

Idem.

Pierre Gaxotte, La Révolution française, Paris, Tallandier, 2014, p. 176.

Ibid., p. 180.

Idem.

Ibid., p. 175.

Ibid., p. 182.

Comme le soulignait Aristote dans le livre I des Politiques, thèse reprise par lʼÉglise.

Source: Lire l'article complet de Vigile.Québec

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