Recherche menée par Robert Gil
En 1991, Nelson Mandela, qui venait de passer 27 ans en prison au nom d’un combat pour la liberté de son peuple, a pris l’avion et a choisi d’atterrir, non pas dans la « plus grande démocratie du monde (USA), non pas dans « la patrie des Droits de l’Homme » (France), non pas dans « la seule démocratie du Moyen-orient » (Israël, complice jusqu’au bout de l’apartheid), mais à Cuba. Et il y a prononcé, le 26 juillet 1991 le mémorable discours que voici où il explique comment et pourquoi la lutte doit se poursuivre dans son pays et ce qu’il doit au peuple cubain. Voici un extrait de ce discours que bizarrement la plupart des grands médias ont oublié :
Premier secrétaire du Parti communiste, président du Conseil d’Etat et du gouvernement de Cuba, Président de la République socialiste de Cuba, commandant en chef, le camarade Fidel Castro ;
Internationalistes cubains, qui ont tant fait pour libérer notre continent ;
Peuple cubain, camarades et amis :
C’est un grand plaisir et un honneur d’être présent ici aujourd’hui, surtout pour un si grand jour dans l’histoire révolutionnaire du peuple cubain. Aujourd’hui Cuba commémore le trente-huitième anniversaire de la prise de la Moncada. Sans Moncada, l’expédition du Granma, la lutte dans la Sierra Maestra, la victoire extraordinaire du 1er Janvier 1959, n’auraient jamais eu lieu.
Aujourd’hui, voici la Cuba révolutionnaire, la Cuba internationaliste, le pays qui a tant fait pour les peuples d’Afrique. Nous avons longtemps rêvé de visiter votre pays et d’exprimer les nombreux sentiments que nous éprouvons pour la révolution cubaine, sur le rôle de Cuba en Afrique, en Afrique australe et dans le monde.
Le peuple cubain occupent une place particulière dans le cœur des peuples d’Afrique. Les internationalistes cubains ont apporté une contribution à l’indépendance, la liberté et la justice en Afrique sans précédent de par ses principes et son caractère désintéressé.
Dès les premiers jours la Révolution cubaine a elle-même été une source d’inspiration pour tous les peuples épris de liberté. Nous admirons les sacrifices du peuple cubain pour préserver leur indépendance et souveraineté face à une campagne impérialiste féroce orchestrée pour détruire les avancées impressionnantes réalisées par la Révolution cubaine.
Nous aussi nous voulons contrôler notre propre destin. Nous sommes convaincus que le peuple d’Afrique du Sud construira son avenir et qu’il continuera d’exercer ses pleins droits démocratiques après la libération de l’apartheid. Nous ne voulons pas que la participation populaire cesse avec la disparition de l’apartheid. Nous voulons que la libération ouvre la voie à une démocratie toujours plus profonde.
Nous admirons les acquis de la révolution cubaine dans le domaine de la protection sociale. Nous apprécions la transformation d’un pays d’une arriération imposée à l’alphabétisation universelle. Nous reconnaissons vos progrès dans les domaines de la santé, de l’éducation et de la science.
Il y a beaucoup de choses que nous apprenons de votre expérience. En particulier, nous sommes émus par votre affirmation du lien historique avec le continent et les peuples de l’Afrique. Votre engagement constant à l’éradication systématique du racisme est incomparable. Mais la leçon la plus importante que vous avez à nous offrir, c’est que peu importe les défis, peu importe les difficultés rencontrées dans la lutte, il ne peut être question d’abandonner ! Il s’agit de choisir entre la liberté ou la mort !
Je sais que votre pays connaît de nombreuses difficultés aujourd’hui, mais nous avons confiance que le peuple résistant de Cuba les surmontera car il a aidé d’autres pays à surmonter les leurs. Nous savons que l’esprit révolutionnaire d’aujourd’hui est né il y a bien longtemps et que cet esprit fut entretenu par de nombreux combattants de la première heure pour la liberté cubaine, et aussi pour la liberté de tous ceux qui souffrent sous la domination impérialiste.
Nous aussi, nous sommes inspirés par la vie et l’exemple de José Marti, qui est non seulement un héros cubain et latino-américain, mais qui est également honoré à juste titre par tous ceux qui luttent pour leur liberté. Nous honorons également le grand Che Guevara, dont les exploits révolutionnaires, y compris sur notre propre continent, étaient trop puissants pour pouvoir nous être cachés par les censeurs de la prison. La vie du Che est une inspiration pour tous les êtres humains qui chérissent la liberté. Nous allons toujours honorer sa mémoire.
Nous sommes venus ici avec beaucoup d’humilité. Nous sommes venus ici avec beaucoup d’émotion. Nous sommes venus ici avec le sentiment d’une grande dette envers le peuple cubain. Quel autre pays peut se prévaloir de plus d’altruisme que celui dont Cuba a fait preuve dans ses relations avec l’Afrique ?
Combien de pays dans le monde bénéficient des travailleurs de la santé ou des éducateurs cubains ? Combien d’entre eux se trouvent en Afrique ?
Quel est le pays qui a sollicité une aide à Cuba et se l’est vu refuser ?
Combien de pays sous la menace de l’impérialisme ou en lutte pour leur libération nationale ont pu compter sur le soutien de Cuba ?
J’étais en prison lorsque j’ai entendu parler pour la première fois de l’aide massive que les forces internationalistes cubaines fournissaient à la population de l’Angola, une aide d’une telle ampleur qu’elle était difficile à croire, lorsque les Angolais ont été soumis en 1975 à une attaque coordonnée de troupes d’Afrique du Sud, du FNLA financé par la CIA, de mercenaires, de l’UNITA, et de troupes zaïroises.
En Afrique, nous sommes habitués à être victimes de pays qui veulent dépecer notre territoire ou saper notre souveraineté. Il n’y a pas de précédent dans l’histoire de l’Afrique d’un autre peuple qui se lève pour défendre l’un d’entre nous.
Nous savons également qu’il s’agissait d’une action populaire à Cuba. Nous sommes conscients que ceux qui ont combattu et qui sont morts en Angola ne constituaient qu’une faible proportion de tous ceux qui s’étaient portés volontaires. Pour le peuple cubain, l’internationalisme n’est pas un mot creux, mais quelque chose que nous avons vu mettre en pratique en faveur de larges secteurs de l’humanité.
Nous savons que les forces cubaines étaient prêtes à se retirer peu après avoir repoussé l’invasion de 1975, mais l’agression continue de Pretoria a rendue la chose impossible.
Votre présence et le renforcement de vos forces lors de la bataille de Cuito Cuanavale fut d’une importance véritablement historique.
La défaite de l’armée raciste à Cuito Cuanavale fut une victoire pour toute l’Afrique !
L’écrasante défaite de l’armée raciste à Cuito Cuanavale a offert la possibilité pour l’Angola de connaître la paix et de consolider sa souveraineté !
La défaite de l’armée raciste a permis au peuple en lutte de Namibie de finalement gagner son indépendance !
La défaite décisive des agresseurs de l’apartheid brisa le mythe de l’invincibilité des oppresseurs blancs !
La défaite de l’armée de l’apartheid fut une inspiration pour tous ceux qui luttaient à l’intérieur de l’Afrique du Sud !
Sans la défaite de Cuito Cuanavale nos organisations n’auraient jamais été légalisées !
La défaite de l’armée raciste à Cuito Cuanavale a rendu possible ma présence ici aujourd’hui !
Cuito Cuanavale fut un jalon dans l’histoire de la lutte pour la libération de l’Afrique du Sud !
Cuito Cuanavale fut le point tournant dans la lutte pour libérer le continent et notre pays du fléau de l’apartheid !
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Je dois conclure mon intervention sur un événement dont vous avez tous été témoins. Le camarade Fidel Castro m’a honoré de la plus haute distinction que ce pays peut accorder. C’est avec beaucoup d’humilité que je la reçois car je ne pense pas la mériter. C’est une récompense qui devrait être accordée à tous ceux qui ont déjà conquis l’indépendance de leurs peuples. Mais cette reconnaissance que le peuple d’Afrique du Sud est debout et lutte pour sa liberté constitue une source de force et d’espoir. Nous espérons sincèrement que dans les temps à venir nous nous montrerons dignes de la confiance que cette récompense exprime.
Vive la révolution cubaine !
Vive le camarade Fidel Castro !
Nelson Mandela à Cuba, le 26 Juillet 1991
Voir aussi : VIVA CUBA !
Source: Lire l'article complet de Les 7 du Québec