par Jean Goychman.
Réponse bête, mais qui fait l’objet d’un vaste consensus, pour gagner notre vie !
Or, les évènements de ces derniers mois remettent en question cette évidence. Notre civilisation (encore judéo-chrétienne, même si ce point de vue est contesté) est basée sur le concept que chacun doit « gagner son pain à la sueur de son front »
Le confinement, tel qu’il a été fait, a-t-il rendu caduque ce principe ?
Le fait de payer les gens au chômage « partiel » en leur garantissant leur subsistance fait penser à ce qu’avait fait les États-Unis en payant des populations d’origine indienne pour le seul fait d’être indien a peut-être donné bonne conscience à certains, mais a provoqué des catastrophes sociales et familiales.
Lorsqu’il y avait encore des cours de morale (remplacés par l’instruction civique, ce qui n’est pas la même chose), on enseignait aux enfants des écoles de la République que « l’oisiveté est la mère de tous les vices » et que « bien mal acquis ne profite jamais » et il ne serait venu à personne l’idée de remettre en question ce qui apparaissait d’une sagesse évidente aux yeux de tous.
Le bouleversement de notre société, qui semble ébranler tous ses fondements, sonnera-t-il le glas de ce tabou ?
Or, depuis le début de l’épisode du Covid 19, nous vivons dans un autre monde. L’argent, pourtant si difficile à gagner pour la quasi-totalité des gens, coule à profusion. Une échelle nouvelle est née, dont l’unité est le milliard de dollars ou d’euros. Il suffit d’emprunter pour payer. Tout ce qui avant participait de la « nécessaire et inflexible rigueur budgétaire » s’est évanoui, faisant place à l’ère de profusion.
En 1992, le droit à la monnaie unique était conditionné par cette rigueur budgétaire, indispensable pour prétendre être pays-candidat à utiliser l’euro. Il s’assortissait également d’un faible endettement, témoignage du caractère non dispendieux des dépenses publiques. En un mot, personne ne devait « vivre au dessus de ses moyens » Début 2020, il ne restait plus que quelques rares bons élèves, dont l’Allemagne, à avoir tenu ce cap. Beaucoup d’autres pays, dont le nôtre, s’étaient affranchis de cette rigueur budgétaire, ce qui contrariait les rigoristes, inquiets de voir les « cigales du Sud » prendre de telles libertés, malgré les traités.
Le Covid 19 a entrainé la rupture de tous les barrages.
La dette des pays de la zone euro a fait un bon spectaculaire, mais personne ne semble réellement s’en soucier. On joue « open bar » depuis plusieurs mois. Alors se pose la question : puisqu’il est possible d’avoir autant d’argent qu’on peut en vouloir, pourquoi ne pas l’avoir fait avant ?
Pourquoi nous bassine-t-on depuis des décennies, en augmentant nos impôts alors qu’il apparaît si facile d’emprunter sans limite. Personne ne pose la question de savoir d’où peut venir cet argent et combien de temps cela peut-il continuer ?
Certains ont pourtant commencé à s’inquiéter. Comme l’institution chargé du contrôle de la monnaie de la zone euro est la BCE, (Banque Centrale Européenne) la Cour Constitutionnelle de Karlsruhe, agissant au nom du peuple allemand, lui a demandé de fournir certaines explications. En réalité, cet argent vient de nulle part. Il n’existe pas avant, et est donc créé pour la circonstance. Bien que le terme soit galvaudé aujourd’hui, c’est de la « fausse monnaie ». Simplement, elle est créée légalement. Elle ne correspond pas à une création de valeur économique, ce qui est, ou du moins devrait être, le fondement même de toute création monétaire. Nous entrons dès lors dans la zone de tous les dangers. Cette monnaie, qui n’a aucune valeur intrinsèque de référence depuis l’abandon généralisé de l’étalon-or, n’a qu’une valeur « légale » qui ne tient que sur la confiance que les gens mettent en elle. Mais cette confiance à une limite. Le tout est de savoir quand cette limite sera franchie.
Dans les temps jadis, on enseignait doctement que la création monétaire sans création de valeur économique entrainait une augmentation des prix. On l’expliquait par la simple « loi du marché »
Les besoins étant les mêmes d’un jour sur l’autre, l’augmentation de l’argent en circulation faisait qu’on pouvait acheter d’avantage, donc augmenter la demande. Comme l’offre restait la même dans un premier temps, il s’en suivait une raréfaction relative du produit dont le prix augmentait. Cela signifiait seulement que le pouvoir d’achat de l’unité monétaire diminuait.
Aujourd’hui, la création monétaire se fait par de la dette. En fait, la dette est un crédit. Tout dépend de savoir si on est prêteur ou emprunteur. Mais, comme toujours depuis la nuit des temps, on ne prête que si on a confiance dans la solvabilité de l’emprunteur.
Qui paye en dernier ressort ?
Le choix est réduit. Il n’y a que deux façons de sortir d’une dette. Soit on rembourse, soit on fait défaut, c’est à dire qu’on ne rembourse pas pour cause d’insolvabilité. Pour rembourser une dette, les États font appel à l’impôt et c’est donc en fait au contribuable de payer. C’est pour cela qu’il devient « payeur en dernier ressort ». Lorsque les impôts deviennent trop élevés par rapport au « potentiel fiscal » (en gros tout ce qu’on peut tondre avant la révolte), le pays ne peut plus emprunter . Ça, c’est la théorie. Dans la pratique actuelle, les banques centrales prêtent sans contrepartie, mais pas directement aux États. Dans la zone euro, ce sont des banques privées qui prêtent aux États (du moins pour le moment) Les créances de ces banques privées représentent nos dettes et beaucoup d’entre elles devraient déjà être en faillite. Mais la BCE intervient et leur rachète ces dettes. C’est le marché secondaire de la dette qui fait qu’in fine, les banques privées deviennent transparentes et que toutes ces dettes remontent dans le bilan de la BCE. Comme créer de l’argent ne lui coûte rien, elle peut en créer à l’infini, et c’est ce qui se passe. Du côté des banques privées, l’argent venant en échange de la BCE sert essentiellement à faire monter les actions (incluant celles de ces banques) et ne va pas dans l’économie réelle. Le prix des actions représente les fonds propres des banques et les règles de ratio « en cours de prêts sur fonds propres » sont respectées. (enfin on l’espère)
La boucle est donc bouclée et le système « ronronne » ainsi depuis des années.
Le problème : la rentabilité
Car les banques ne vivent que sur les intérêts perçus sur les prêts. Aujourd’hui, ces intérêts sont négatifs. Les banques ne gagnent plus d’argent. Cette situation ne peut donc perdurer et les taux d’intérêt doivent remonter. Le problème vient de ce qu’on peut créer de la monnaie à partir de rien, mais que les intérêts, eux, proviennent de l’économie réelle. Vous, vous n’avez pas le droit de photocopier les billets pour payer vos impôts. Et là, on ne rigole plus. Finies les histoires de bilan et de ratios, il faut casquer ! Car sinon tout le système s’écroule.
Au moment du projet de création de la Réserve Fédérale ( la banque centrale américaine) le sénateur Charles Lindbergh (le père de l’aviateur) s’était écrié devant le congrès :
« Notre système financier est une escroquerie et sera un fardeau énorme pour le peuple … J’affirme qu’il existe chez nous un Trust monétaire. Le plan Aldrich est une simple manipulation dans l’intérêt de ce Trust.[…] Le Plan Aldrich est le Plan de Wall Street. […] En 1907 la nature avait répondu le plus aimablement possible et avait donné à ce pays la récolte la plus abondante qu’il ait jamais eue. D’autres industries avaient parfaitement fonctionné et d’un point de vue naturel toutes les bonnes conditions étaient remplies pour que l’ année fût la plus prospère possible . Au lieu de cela, une panique a entraîné d’énormes pertes pour le pays. […] Aujourd’hui, partout des intérêts considérables sont mobilisés afin de pousser l’adoption du Plan Aldrich. Il se dit qu’une somme d’argent importante a été levée à cette fin. La spéculation de Wall Street apporta la Panique de 1907. Les fonds des déposants furent prêtés aux joueurs et à tous ceux que le Trust Monétaire voulait favoriser. Puis quand les déposants voulurent récupérer leur argent, les banques ne l’avaient plus . Cela a créé la panique. « (Charles A. Lindbergh, Sr., Banking, Currency and the Money Trust, 1913, p. 131)
Quand cela va-t-il se produire ?
Il est toujours difficile de prédire quand le séisme va se produire mais il y a, en général, des signes avant-coureurs. Or, la crise qui risque d’arriver diffère sensiblement de celles que nous avons connu car son effet risque d’être considérablement amplifié par le confinement qui a paralysé une grande partie des économies des pays. Il est à craindre que cette crise financière, latente depuis plusieurs mois, se double d’une crise économique d’une gravité exceptionnelle avec des répercussions sociales qu’il est difficile d’imaginer. La valse des dettes qui s’exprime maintenant en milliers de milliards d’euros ou de dollars permet de penser que le système peut échapper à tout contrôle.
Récemment publié, l’ordre du jour de la prochaine réunion, en janvier 2021, du forum mondial de Davos, mentionne une « réinitialisation » du capitalisme. Pour eux, il ne semble guère avoir le choix, il faut faire un « Reset » de toute l’économie et les banques centrales semblent d’accord.
Est-ce une façon de provoquer une « crise contrôlée » ou bien un aveu d’impuissance ?
L’avenir le dira…
Source: Lire l'article complet de Réseau International