Campagne de dons – Juin 2020
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par Guillaume Berlat.
« Les évènements font plus de traitres que les opinions » (François-René de Chateaubriand). On n’est jamais mieux trahi que par les siens. L’actualité quotidienne fourmille d’exemples d’hommes et de femmes qui, après avoir été les plus serviles et vils courtisans du Prince, décident de l’accabler de tous les maux de la terre. Un classique de la traitrise dans l’Histoire de Judas à John Bolton. La cohorte de ces renégats est impressionnante. Souvent mus par un souci de vengeance mêlé d’une volonté de rédemption, ils n’hésitent pas à toutes les bassesses, les lâchetés pour faire oublier leurs turpitudes passées en mettant l’accent sur celles de leur ex-mentor. Le registre de la victimisation tourne à plein régime. C’est au tour de l’ex-conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump, l’homme à la moustache de cracher tout son venin contre l’homme à la mèche blonde dans un brûlot intitulé « The Room Where it Happened » (non encore traduit, « La pièce où ça s’est passé », Simon & Schuster).
Une charge à charge contre les travers du président des États-Unis qu’il a servi à partir de mars 2018 et a quitté en septembre 2019. En vain, la Maison Blanche a déployé tous ses efforts pour empêcher la parution de l’ouvrage prévue le 23 juin 2020, le New York Times et le Washington Post en publient quelques extraits.
Le conseil de John Bolton souligne que le livre a été expurgé de toute information pouvant porter atteinte aux intérêts américains afin de prémunir son client contre tout risque de censure ab initio[1]. À ce stade, et compte tenu du caractère parcellaires des informations dont nous disposons – nous n’avons pas lu le livre de John Bolton -, il n’est pas inutile de s’interroger sur l’homme et ses méthodes, sur ses principales critiques formulées contre Donald Trump et sur les objectifs avouables et non avouables de cette opération de représailles, donc sur ses effets.
L’homme et ses méthodes
Que sait-on de la personnalité de John Bolton ? L’avocat recyclé dans la diplomatie par le fait des Princes républicains est loin d’être un enfant de chœur. Faucon sur le plan international, partisan de la méthode forte sur tous les théâtres d’opération, l’homme est bien connu des diplomates qui l’ont fréquenté aux Nations unies.
Dans le style grossier personnage et mufle, peu connu pour son indulgence envers autrui, il n’a pas son pareil.
Il avait l’habitude de traiter ses interlocuteurs étrangers comme de vulgaires vassaux aux ordres des États-Unis. Il fut un artisan acharné de la destruction du système multilatéral onusien, du désengagement du machin et d’autres institutions en dépendant, du détricotage systématique de l’arms control, de la pratique de la diplomatie de l’anathème et de la menace à l’endroit de tous ceux qui osaient émettre la moindre critique contre les États-Unis…
Pour mémoire, souvenons-nous que c’est John Bolton qui a mené, tambours battants, l’opération d’éviction du directeur général de l’OIAC (Organisation pour l’interdiction des armes chimiques basée à La Haye[2]), le brésilien francophone et francophile, José Bustani dans des conditions peu diplomatiques.
Il est vrai que ce dernier tentait de résoudre la question de la présence d’éventuelles armes chimiques en Irak par la voie diplomatique au moment où Washington fourbissait ses armes contre Saddam Hussein ! Pour être complet, rappelons également que John Bolton avait personnellement menacé José Bustani de représailles contre les membres de sa famille vivant aux États-Unis.
La liste de ses forfaits est longue et mériterait de sérieuses investigations de tous les défenseurs des droits de l’homme. Cet honnête homme fut un fervent défenseur de la guerre en Irak de 2003. Il ne s’est jamais élevé contre les scandales des vols secrets de la CIA, de la prison de Guantanamo dans le contexte de la guerre en Afghanistan. Il était partisan de la méthode forte contre la Corée du Nord…
C’est peu dire que le sieur Bolton n’a rien d’une oie blanche et qu’il n’a rien à envier à Donald Trump et à ses méthodes guerrières.
Ses principaux reproches
Que sait-on des principales critiques formulées par John Bolton ?[3] Elle sont multiples[4]. Notre clergé médiatique nous explique que le fil conducteur de cet opus magnum boltonien se résumerait en une seule phrase : « J’ai du mal à identifier toute décision importante de Trump pendant mon passage à la Maison Blanche qui n’a pas été motivé par des calculs de réélection ». Est-ce un scoop d’apprendre qu’un chef d’État travaille à sa réélection ? Cela ne se passe jamais en France… vraisemblablement. John Bolton accuse, purement et simplement, Donald Trump de collusion avec des États étrangers à des fins électorales (Cf. les descriptions surréalistes des entretiens Trump-Xi Jinping en marge du sommet du G20 d’Osaka de juin 2019).
Par ailleurs, il soulignerait la méconnaissance abyssale des dossiers internationaux, ne sachant pas, par exemple, que le Royaume-Uni était une puissance nucléaire. John Bolton évoque la volonté de Donald Trump de quitter l’OTAN[5]. D’un point de vue strictement européen, serait-ce un mal ou un bien ? Il confirme les accusations portées contre Donald Trump dans l’affaire de « l’Ukrainegate » qui avait conduit à la procédure de destitution contre lui. Il affirme avoir tenté à maintes reprises de tenter de persuader le président de ne pas suspendre l’aide militaire dont Kiev avait besoin dans sa lutte contre les séparatistes prorusses.
Encore une volonté d’ingérence. Une de plus. Donald Trump aurait mélangé le personnel et le national sur les questions commerciales et la sécurité nationale. In fine, John Bolton oublie qu’un conseiller conseille et il ne dispose d’aucune légitimité démocratique pour décider en lieu et place du président élu.
Ses effets escomptés
Une dizaine d’ouvrages sur Donald Trump ont déjà été publiés mettant en avant quelques grands traits de caractère de l’homme : faible capacité d’attention, narcissisme quasi-pathologique, désorganisation, fascination pour les régimes autoritaires… Un de plus sauf qu’il constitue un témoignage de première main. À l’évidence, nous sommes dans une opération de vengeance, de règlement de comptes entre anciens amis. Mais, que penser de cette opération de démolition du président américain alors que sa campagne électorale pour la présidentielle de novembre 2020 ne parvient pas à décoller selon les informations que l’on nous distille ?
L’opération Bolton peut être à double tranchant. Soit, elle peut réussir et mettre définitivement à terre Donald Trump en novembre prochain. Soit elle peut parvenir à l’effet inverse en mobilisant son électorat et en mettant à jour quelques casseroles de son adversaire déjà sous le coup d’une enquête pour harcèlement sexuel à l’encontre de l’une de ses anciennes collaboratrices. De plus, sur certains dossiers, le président pourrait apparaître comme modéré face à un conseiller extrémiste, jusqu’au-boutiste poussant en permanence à la guerre.
En politique, l’avenir n’est jamais écrit avec certitude surtout dans cette période de grande volatilité de l’opinion publique qu’un rien peut faire basculer dans un sens ou dans un autre. L’effet boomerang peut agir alors que l’on ne s’y attend pas. Souvenons que les mêmes qui donnent la victoire à Joe Biden donnaient Hillary Clinton à la Maison Blanche. Méfions-nous comme de la peste des experts idéologues !
Dans ce contexte, en dépit de l’intérêt non négligeable qu’elles présentent pour une meilleure connaissance du fonctionnement de la Maison Blanche durant le mandat de Donald Trump, ces allégations de John Bolton doivent être relativisées. Elles respirent la vengeance d’un homme qui s’est senti trahi par son mentor. Mais, il oublie qu’il l’a servi loyalement sans présenter sa démission aux premières manifestations d’immoralité de Donald Trump. L’’homme à la moustache n’est pas très courageux. Il sort du bois sans panache. En a-t-il jamais eu une once ?
N’est-ce pas l’hôpital qui se moque de la charité ? N’est-ce pas Franck Nitti qui règle ses comptes avec Al Capone ? Dans ces conditions, quel crédit peut-on accorder à un homme qui crache ainsi dans la soupe ?
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[1] Gilles Paris, John Bolton règle ses comptes avec Donald Trump. Le président américain cherche à empêcher la sortie des Mémoires de son ex-conseiller, qui critique ses décisions « motivées par des calculs de réélection », Le Monde, 19 juin 2020, p. 5.
[2] https://www.opcw.org/sites/default/files/documents/Fact_Sheets/French/Fact_Sheet_3_-_OPCW_Structure.pdf
[3] Adrien Jaulmes, John Bolton déstabilise Donald Trump, Le Figaro, 19 juin 2020, p. 8.
[4] Sylvie Kauffmann, Le chaos trumpien vu de l’intérieur, Le Monde, 25 juin 2020, p. 32.
[5] Isabelle Lasserre, Face au président américain, les Européens ont perdu toute illusion, Le Figaro, 19 juin 2020, p. 8.
source : http://prochetmoyen-orient.ch
Source: Lire l'article complet de Réseau International