Par Dmitry Orlov – Le 14 juin 2020 – Source Club Orlov
Le monde entier observe avec consternation la génuflexion des Blancs aux États-Unis devant les descendants présumés d’esclaves africains, qui acceptent leur culpabilité et leur punition collectives.
Tout au long de l’histoire, le tribut a été considéré comme une alternative plus civilisée, moins violente et plus fiable et efficace à l’occupation, au rapine et au pillage. Les races vaincues étaient souvent très heureuses de payer à leurs conquérants une part annuelle de leurs richesses afin d’être laissées inviolées et peut-être même protégées des autres envahisseurs, et de pouvoir conserver un semblant de leur ancienne dignité. Les relations fondées sur le tribut se sont parfois améliorées avec le temps.
Un exemple célèbre est celui de la Horde d’or, qui a régné sur la Russie pendant quelques siècles. Elle a commencé par le rapine et le pillage, puis a évolué vers des relations basées sur le tribut et a finalement abouti à un arrangement relativement satisfaisant basé sur la reconnaissance et le respect mutuels, où les descendants de Gengis Khan, qui régnaient depuis la capitale de la Horde d’or sur la Volga près de la mer Caspienne, délivraient des écrits (appelés « yaklyk ») qui légitimaient la domination des princes russes sur leurs différents domaines, y compris le Grand Prince, qui avec Ivan le Terrible est devenu le tsar et avec Pierre le Grand l’empereur. La domination mongole a protégé la Russie des prédateurs catholiques et, par conséquent, lui a épargné les affres de la Réforme, lui permettant de se développer en une civilisation chrétienne orthodoxe distincte qui perdure jusqu’à nos jours.
Le tribut joue toujours un rôle majeur dans le monde d’aujourd’hui, mais on ne sait pas pour combien de temps encore. Les pays qui utilisent le dollar américain dans le commerce international et parfois aussi dans le commerce intérieur acquiescent implicitement à l’autorité des États-Unis. Ils savent très bien que s’ils transgressent contre leurs maîtres à Washington, leur accès au dollar américain sera coupé et leurs économies languiront. Le dollar américain reste pour l’instant un vestige de l’ancienne époque néocoloniale (alors que tout le monde ou presque est prêt à conclure que l’empire américain est dans un état de délabrement avancé et qu’il approche rapidement de sa fin). Entre-temps, un phénomène connexe mais diamétralement opposé a pris de l’ampleur : la demande de paiement de réparations basées sur l’admission d’une culpabilité collective selon un système que j’appellerai Repentez-vous&Payez™.
Posons des questions purement rhétoriques et complètement ridicules. Où sont les Mongols coupables de l’invasion de la Russie et, si oui, la Mongolie doit-elle admettre sa culpabilité historique et doit-elle se résoudre à un Repentez-vous&Payez™ pour les centaines d’années d’oppression de ses ancêtres sur la Russie ? Mais attendez, ils n’ont pas été les seuls à avoir envahi la Russie. La Pologne doit se repentir et payer pour son invasion de Moscou qui s’est terminée en 1612. Et les Français sont coupables d’avoir envahi la Russie juste 200 ans plus tard, en 1812. Il y a eu d’autres interventionnistes étrangers, dont les États-Unis, pendant la guerre civile russe qui a suivi la révolution de 1917. Enfin, il y a eu l’invasion allemande de 1941-1945 ; les Allemands (et leurs collaborateurs dans d’autres nations) ne devraient-ils pas aussi subir un Repentez-vous&Payez™ ? Mais attendez, nous ne faisons que commencer…
Les militants noirs aux États-Unis demandent 14 000 milliards de dollars de réparations pour les 10 millions d’esclaves noirs supposés avoir été perdus pendant 300 ans d’esclavage. Peut-être que le dossier est fondé, peut-être pas ; ce n’est pas à nous de décider. Mais examinons une autre perte : au cours des trois décennies qui ont suivi l’effondrement de l’URSS, la population d’origine russe sur le territoire de l’ancienne Union soviétique a diminué de 50 millions de personnes. C’est le résultat d’un ethnocide. Ce dossier est facile à défendre : les gouvernements des anciennes républiques socialistes soviétiques nouvellement indépendantes ont mis en place des politiques discriminatoires à l’encontre des Russes de souche, ce qui a entraîné une dynamique de croissance démographique extrêmement déséquilibrée entre les Russes de souche et leur population ethnique. En raisonnant par analogie, si 10 millions de Noirs méritent 14 000 milliards de dollars, alors 50 millions de Russes méritent 70 000 milliards de dollars de réparations de la part des anciennes républiques soviétiques. Et s’il s’avère que ces républiques manquent de telles ressources, les pays occidentaux qui leur ont accordé une reconnaissance diplomatique et ont toléré leurs politiques génocidaires vont-ils s’engager à verser rapidement les sommes manquantes ?
Bien sûr, je dis cela pour plaisanter, car les Russes n’attribuent ni n’acceptent de culpabilité collective et n’imposent pas de punition collective. Pour eux, la responsabilité, la culpabilité, le repentir et le sens de la justice sont tous des aspects de la conscience individuelle, à traiter individuellement. Ainsi, si vous demandez aux Russes de s’agenouiller pour la supposée occupation de tel ou tel endroit pendant l’ère soviétique, vous vous trouverez invité à faire un voyage solitaire et autoérotique vers une destination de votre choix. Et si vous demandez aux Russes de se repentir de l’esclavage des Noirs du fait qu’ils se trouvent être blancs, ils vous riront au nez et vous traiteront de raciste. Par souci d’exhaustivité, je dirai un mot sur les demandes de l’Europe de l’Est concernant les réparations russes contre « l’occupation soviétique ». Certains drôles dans les pays baltes, par exemple, pensent que Hitler et Staline étaient tous deux de méchantes occupants, mais que l’occupation par Hitler était plus civilisée. Les Russes, qui ont perdu des centaines de milliers d’hommes en libérant ces pays des nazis, pensent que c’est vraiment mignon.
Tout le système Repentez-vous&Payez™ a pris forme après la fin de la Seconde Guerre mondiale, merci aux Juifs, qui ont pu obtenir des réparations allemandes pour l’Holocauste. Notamment, alors que les victimes qui ont reçu ces réparations étaient des survivants individuels, la culpabilité et les taxes qui ont servi à payer les réparations ont été imposées collectivement, à l’ensemble du peuple allemand, créant ainsi un très mauvais précédent. L’idée que quelqu’un soit coupable de quelque chose du fait qu’il est allemand ou, dans le cas des noirs américains, plus généralement, blanc, est automatiquement une parodie. Les propriétaires de plantations et d’esclaves dans le sud américain formaient une petite classe supérieure isolée qui commerçait principalement avec les représentants de l’Empire britannique (épargnant à ces derniers la nécessité de posséder des esclaves). La plupart des blancs aux États-Unis ne descendent pas de membres de cette classe et la plupart de ceux qui en sont issus n’ont pas hérité de richesses substantielles qui pourraient être expropriées et redistribuées aux descendants des victimes sur une base individuelle. Si la culpabilité pour l’esclavage ne peut être attribuée, il reste la culpabilité pour la discrimination. Mais la liste des griefs mutuels devient alors interminable ; les Irlandais, les Chinois, les Juifs, les Latinos ou les Amérindiens n’ont-ils pas eux aussi fait l’objet de discriminations – y compris entre eux ? Si l’on peut constater que chacun a discriminé les autres à un moment donné dans un passé historique peu reluisant, alors tout le monde devrait simplement verser un dollar symbolique de réparation à quelqu’un d’autre et en finir avec cela.
La raison pour laquelle l’effort juif pour imposer le Repentez-vous&Payez™ aux Allemands pour l’Holocauste a réussi est due à une certaine bizarrerie de la morale publique en Occident qui a probablement été introduite par les formes légalistes présentes dans le catholicisme et qui n’ont ensuite été amplifiées que dans les sectes protestantes après la Réforme : l’idée que la justice est quelque chose de formel et imposée d’en haut. En revanche, la conception russe de la justice est l’expression d’un sens inné de la justice qui fait partie de la conscience individuelle, et aucune autorité autre que Dieu n’est en mesure de rendre un jugement sur elle. « Dieu décidera » est un argument definitif et la « conscience collective » n’est même pas un concept. Cette faille dans l’armure morale occidentale a permis d’imposer le Repentez-vous&Payez™ et de faire avancer les gens de leur plein gré, peut-être même en se sentant moralement supérieurs pour avoir fait ce qui est juste, après avoir été informés de ce qui est juste par leurs supérieurs dans la hiérarchie sociale, à qui ils ont remis les clés de leur moralité en même temps que celle de leur sens de la responsabilité personnelle.
Dans ce contexte, l’effort des Noirs américains et de leurs alliés dans les médias, les universités et au sein du gouvernement pour imposer le Repentez-vous&Payez™ aux Blancs d’Amérique (une démarche purement raciste) est une atrocité. La violence des blancs sur des noirs est utilisée comme excuse, en ignorant le fait qu’elle est éclipsée par la violence des noirs sur les blancs, qui est à son tour éclipsée par la violence entre noirs. Ce qui semble s’imposer, c’est une série de mesures de santé publique qui empêcheraient les Noirs de commettre des actes de violence ; je laisse les détails à votre imagination.
De tous les groupes qui choisissent de s’identifier au sein des anciens États-Unis en décomposition rapide, les libéraux et les progressistes blancs agenouillés présentent le tableau le plus triste de tous. Il y a un autre groupe devant lequel ils devraient peut-être s’agenouiller, si tant est qu’ils le fassent, c’est celui des rednecks lourdement armés. Après tout, c’est derrière ces rednecks qu’ils seront obligés de se réfugier pendant que les noirs et les Latinos s’affronteront (une bataille que les Latinos gagneront probablement). Il est difficile de prédire combien de temps les Blancs d’Amérique devront rester en retrait.
Qui aurait cru que les États-Unis prendraient le chemin de mes cinq étapes de l’effondrement et feraient la séquence à l’envers, en commençant par l’effondrement culturel (bienvenue dans le ghetto noir, tout le monde !), puis l’effondrement social et politique (où les Antifas se déchaînent et les flics s’absentent pendant que les politiciens font la génuflexion), suivi de l’effondrement commercial (car qui voudrait expédier des produits dans un pays comme celui-là ?), le pays des merveilles de la FED, du Trésor américain et de Wall Street restant suspendus dans l’incrédulité (pour le moment) ? C’est choquant, vraiment !
Dmitry Orlov
Le livre de Dmitry Orlov est l’un des ouvrages fondateurs de cette nouvelle « discipline » que l’on nomme aujourd’hui : « collapsologie » c’est à-dire l’étude de l’effondrement des sociétés ou des civilisations.
Traduit par Hervé, relu par Wayan pour le Saker Francophone
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