Emmanuel Macron a menacé la Hongrie pour avoir instauré un état d’urgence face à la pandémie, alors même que les pouvoirs exceptionnels confiés au gouvernement français sont toujours en vigueur, pointe Pierre Lévy, du mensuel Ruptures.
Si l’arrogance était punie par le code pénal, le président français croupirait présentement derrière les barreaux. Nul n’a oublié le judicieux conseil qu’il lança à la figure d’un jeune chômeur : se secouer et traverser la rue pour trouver un boulot. Le début de son quinquennat a été émaillé de ces spirituelles saillies, avant que le mouvement des Gilets jaunes ne vienne tempérer ses ardeurs post-modernes.
Mais Emmanuel Macron n’hésite pas à se rattraper dès lors qu’il évoque le champ européen, ou mondial. A l’occasion de la conférence de presse conjointe qu’il tint le 18 mai avec la chancelière allemande, il eut ces fortes paroles à l’encontre de ceux des États membres de l’Union européenne qu’il soupçonne de « réduire l’État de droit » : « là-dessus, nous n’aurons aucune complaisance et aucune mollesse ».
Le nom n’est pas cité, mais chacun a compris que ce ton de surveillant général visait le premier ministre hongrois. On n’est pas obligé d’être un inconditionnel de Viktor Orban, mais un tel sermon venant de la part du chef de l’État français dépasse la désinvolture ordinaire. Et montre en passant qu’au sein de l’UE, les pays sont égaux mais que certains « sont plus égaux que d’autres ». Imagine-t-on par exemple le chef du gouvernement maltais s’adresser en ces termes – quel que soit le sujet – à la chancelière allemande ?
Pour comprendre la punition dont Emmanuel Macron menace son « collègue » de Budapest, il faut savoir que ce dernier avait fait voter par son Parlement des dispositions d’urgence face aux conséquences sanitaires et économiques de la pandémie. La loi adoptée par les députés hongrois accorde de larges pouvoirs au gouvernement et à son chef, même si ceux-ci peuvent lui être retirés par un nouveau vote.
Cet état d’exception, quel qu’en soit le nom, fut du reste mis en place dans un grand nombre de pays européens. Mais, martelaient les contempteurs de la Hongrie, le problème est que l’état d’urgence instauré dans ce pays n’a pas d’échéance explicitement définie. De là à soupçonner une dictature infinie…
Ainsi, la vice-présidente de la Commission, Vera Jourova, avait souhaité que « la communauté internationale (mette) la pression sur la Hongrie pour qu’elle revienne dans le club des pays incontestablement démocratiques ». On notera au passage que l’ONG américaine Freedom House avait « rétrogradé » ce pays dans la catégorie « régime hybride dans une zone grise entre les démocraties et les autocraties complètes ». On savait déjà que les agences de notations financières évaluaient les États, ces derniers sont donc désormais aussi surveillés sur le plan de la « démocratie » ; on devrait un jour ou l’autre supprimer les électeurs, devenus ainsi superflus…
Le 15 mai cependant, soit trois jours avant les menaces macroniennes, M. Orban a estimé que l’état d’urgence pourrait être levé début juin. Si tel est le cas, la Hongrie sera alors un des premiers pays à revenir à la légalité antérieure. Quoiqu’il en soit, le dirigeant hongrois a dit s’attendre à des excuses de la part de ceux qui l’avaient accusé de vouloir le pouvoir absolu pour l’éternité.
Las, trois jours plus tard, le maître de l’Élysée tenait les propos martiaux évoqués. Et martelait pour les justifier : « l’idée démocratique et le rêve européen sont des piliers de nos identités ».
Hasard du calendrier, c’est justement le 15 mai que l’exécutif français lançait des dispositions d’exception autorisant en particulier une extension des CDD et de l’intérim jusqu’à fin 2020 (au moins).
Mais là c’est différent, puisque ce type de mesures est pleinement conforme à 3l’idée démocratique et au rêve européen »…
source : https://francais.rt.com
Source: Lire l'article complet de Réseau International