La guerre de l’information vient d’entrer dans une nouvelle phase à l’approche de l’élection présidentielle aux Etats-Unis. Le réseau social Twitter – moyen de communication privilégié du président américain Donald Trump – a en effet décidé de publier un avertissement sous un message du chef d’Etat, mettant, de fait, en doute sa véracité.
Le message en question portait sur le vote par correspondance et les risques de fraude qu’il comporte, notamment dans l’Etat de Californie. Depuis des semaines, le camp démocrate pousse pour généraliser cette pratique lors de l’élection à venir, arguant qu’elle sera indispensable dans un contexte de crise sanitaire. Le gouverneur démocrate de Californie, Gavin Newsom, a ainsi signé un décret pour que chaque électeur reçoive des bulletins de vote par correspondance dans le cadre des élections générales de novembre 2020. Mais les républicains freinent des quatre fers, estimant pour leur part que cette pratique ouvre la porte à des fraudes massives. Le parti a d’ailleurs légalement contesté ce décret qui «viole le droit de vote des citoyens» et invite, selon lui, à la fraude.
C’est donc dans ce contexte très politisé que Donald Trump a fait valoir sans ambiguïté son opposition à la pratique : «Il n’y a AUCUNE CHANCE (ZÉRO) que le vote par correspondance soit autre chose que substantiellement frauduleux. Les boîtes aux lettres vont être volées, les bulletins vont être falsifiés et même frauduleusement imprimés et frauduleusement signés.»
There is NO WAY (ZERO!) that Mail-In Ballots will be anything less than substantially fraudulent. Mail boxes will be robbed, ballots will be forged & even illegally printed out & fraudulently signed. The Governor of California is sending Ballots to millions of people, anyone…..
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) May 26, 2020
Conformément à une règle controversée qu’il vient d’adopter, le réseau social a alors décidé d’ajouter à la fin de ce tweet un message d’«information» à destination des utilisateurs : «Obtenez les faits concernant le vote par correspondance.» L’hyperlien renvoi vers une analyse, qui assure que «ces allégations sont sans fondement selon CNN, le Washington Post et d’autres médias. «Trump a faussement prétendu que le vote par correspondance conduirait à « une élection truquée ». Cependant, les facts checkers disent qu’il n’y a aucune preuve d’un lien entre vote par correspondance et fraude électorale», affirme le réseau social, mettant en avant des articles de CNN, du Washington Post ou encore de The Hill sur le sujet.
«Interférence dans l’élection»
Cet avertissement à destination des utilisateurs a irrité au plus haut point le chef d’Etat, qui n’a pas manqué de le faire savoir : «Twitter interfère désormais dans l’élection présidentielle de 2020. Ils disent que mes déclarations sur le vote par correspondance – qui aboutira à une corruption massive et à de la fraude – est incorrecte, en se basant sur des facts checkers tels que Fake News CNN et le Washington Post d’Amazon. Twitter étouffe complètement la liberté d’expression. En tant que président, je ne ne permettrai pas que cela se produise !»
.@Twitter is now interfering in the 2020 Presidential Election. They are saying my statement on Mail-In Ballots, which will lead to massive corruption and fraud, is incorrect, based on fact-checking by Fake News CNN and the Amazon Washington Post….
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) May 26, 2020
Larvé jusqu’à présent, le conflit entre le président américain et les réseaux sociaux – qu’il accuse d’être contrôlés par la «gauche radicale» – fait donc désormais jour. Ce signalement de Twitter sur un sujet où les lignes partisanes sont clairement établies pose légitimement question sur l’impartialité de la plateforme. D’autant que le réseau social appuie son analyse sur un article de la chaîne d’information CNN, dont le biais en faveur du Parti démocrate n’est plus à démontrer. Autre élément troublant, le jour même, le New York Times publiait un article faisant état d’une plainte pour fraude électorale déposée contre une entreprise postale dans l’Etat de Virginie occidentale. En cause, les changements erronés d’affiliations de partis de huit électeurs, qui avaient fait une demande de vote par correspondance.
De quoi donner encore un peu d’eau au moulin du président républicain, qui soutient depuis des mois que les réseaux sociaux cherchent à affaiblir la portée des voix conservatrices sur leurs plateformes. Une accusation qu’il a d’ailleurs réitérée en réaction à la récente décision de Twitter, assurant que son parti «réglementerait fortemement, ou fermerait» les réseaux sociaux avant que ceux-ci ne réduisent totalement au silence les conservateurs.