Nous publions ici un document que nous a soumis l’Alliance Démocratique Peuplarchique (A.D.P.), un comité de citoyens qui s’est formé à la suite du mouvement de révolte des « gilets jaunes ». Ce comité produit une série de réflexions sur les moyens qui permettraient à la population de renouer avec des institutions réellement citoyennes dans le cadre d’une souveraineté politique retrouvée. Il s’agit ici d’un document qui traite de « la pertinence du rétablissement d’un service militaire de conscription » et qui a été produit par la commission « Défense et sécurité » de l’ADP. Ce texte fait suite au texte récemment publié sur Strategika issu du Centre de Réflexion Interarmées, texte qui nous a été proposé et présenté par le Général Dominique Delawarde. Il s’agit ici d’une réflexion plus « populaire » et civique sur les moyens de réconcilier la mission des forces armées avec le corps national. Une entente mise à mal par la crise des gilets jaunes durant laquelle les forces de l’ordre furent perçues par la population comme des forces de répression du peuple et de protection d’une oligarchie corrompue.
Ces deux textes nourrissent la réflexion globale que Strategika entend mener sur les questions politiques et militaires à l’aune d’une convergence des forces vives de la France face à l’émergence du globalisme politique comme acteur géostratégique majeur qui cherche à dissoudre les États-nations afin de soumettre les populations à son mode de gouvernance post-étatique planétaire.
Ces deux réflexions lues ensemble illustrent selon nous une possible stratégie politique face à la déréliction du système politique français que la gestion chaotique de la crise du covid-19 est encore venue illustrer. A savoir la coopération entre des personnes issues de ce peuple qui s’est soulevé durant l’insurrection des gilets jaunes avec des représentants de ce que nous appelons l’« État stable ». Officiers généraux, diplomates, hauts fonctionnaires, universitaires, chercheurs etc qui assurent, chacun dans leur domaine, la continuité de la forme stato-nationale française face aux assauts constants et croissants d’un « État profond » parasitaire acquis à des intérêts exogènes à ceux du peuple et de l’État français depuis plusieurs décennies.
Pierre-Antoine Plaquevent – directeur de publication de Strategika
Alliance Démocratique Peuplarchique (A.D.P.)
Commission : Défense et sécurité
Objet : Rapport sur la pertinence du rétablissement d’un service militaire de Conscription
Préambule
Dans ses propositions en matière de programme politique, l’A.D.P. défend celle du rétablissement d’un service national Citoyen, soit civil (durée de 12 mois), soit militaire (durée de 9 mois), laissant ainsi le choix aux conscrites et conscrits, en vertu du principe de responsabilité Citoyenne, responsabilité incluant « la défense de la Nation ».
Sur quels arguments, et à partir de quels faits survenus, tant au niveau national qu’international, doit-on considérer qu’il est nécessaire, voire urgent d’en revenir au principe d’une armée de Conscription, basé sur un service militaire national optionnel, alors que depuis 1997, l’obligation d’un service militaire a été suspendu en France ?
Pour traiter de cet important sujet, qui dans notre esprit est une condition requise, pour exercer pleinement sa citoyenneté et qui renvoie à un faisceau de considérations multiples, faisant appel non seulement à des valeurs morales, culturelles, éthiques, mais aussi à des aspects politiques, sociaux, historiques, et présentement géopolitiques, avant que d’être proprement militaires.
Rappel de la doctrine-modèle du Citoyen-soldat, dans le cadre de son contexte historique et politique :
La doctrine-modèle du Citoyen-soldat renvoie aux principes de responsabilité Citoyenne, incluant la défense de la Nation.
Cette doctrine se fonde sur des notions d’égalité et de devoir civique, donc des notions de nature d’abord morale, avant que d’être militaires.
Les valeurs martiales d’abnégation, de courage, de fraternité, de patriotisme, et de vertu civique, celle de placer le bien commun au-dessus de l’intérêt personnel, y compris la sauvegarde de sa propre vie, sont ainsi intégrées à une moralité exigeante, mais partagée par l’ensemble de la Nation, laquelle est ainsi appelée à faire corps avec son armée.
Cette doctrine a ses racines dans le patriotisme et les idéaux révolutionnaires.
Pourtant le principe d’une armée de conscription rencontra de fortes oppositions dès le début de la révolution de 1789, les députés constituants d’alors avaient à cœur les questions des libertés individuelles, et le recours à toute forme de coercition leur semblait un déni de cette liberté promise par la révolution.
Ce n’est qu’en 1798 qu’en France, sous la pression des nécessités extérieures, qu’un système de conscription fut mis en place.
Avec la montée des nationalismes en Europe, puis dans le monde, et l’augmentation significative de conflits entre nations, suivi de l’embrasement de l’Europe en 1914, les armées de conscription devinrent la règle générale.
La guerre était devenue et pensée comme un fait social et culturel total, car elle ne concernait pas seulement les militaires, les chefs d’Etat et les diplomates, mais toutes les forces de la société civile, et au-delà tous les individus, dans le cadre d’une économie nationale restructurée globalement comme économie de guerre.
Cette internationalisation des conflits, de même que l’implication totale des sociétés des pays belligérants, bousculèrent entre autres, les rapports entre les sexes, les femmes devinrent auxiliaires des armées, chef d’entreprise, chef d’exploitation agricole …
Les transformations sociales s’accélérèrent, et firent naître de nouveaux rapports entre combattant et « ceux de l’arrière », confortèrent les rituels patriotiques et ultérieurement mémoriels. Chaque Peuple se devait d’être en phase avec son armée.
Cette guerre conventionnelle fût également idéologique avec une internationalisation des masses porteuses de significations patriotiques.
Les deux guerres mondiales eurent pour effet d’impulser des avancées technologiques, dont les conséquences transformèrent profondément le paradigme de la guerre, de même que sa signification. La puissance de feu, la technicité des hommes, se substituèrent dès lors aux gros bataillons d’infanterie. A l’issue de la seconde guerre mondiale, nombre de pays, parmi les plus développés (Angleterre, Etats-Unis, …), renoncèrent au service militaire universel au profit d’une armée de métier, moins gourmande en hommes, plus sophistiquée en moyens matériels et en capacité de destruction.
En France, la tradition du Citoyen-soldat résista plus longtemps du fait des « évènements d’Algérie », et de l’engagement des conscrits dans le conflit, suivi de leur opposition passive face au coup d’Etat militaire fomenté à Alger en 1961. Cette armée de conscription se dressa face à des unités d’engagés (légion, parachutistes, …) et de sous-officiers et officiers de carrière préfigurant l’armée de métier du futur. Cet épisode eut pour conséquence, qu’à droite comme à gauche, on soutint le principe d’une armée de conscription jusqu’à sa suspension de 1997.
Dès les années 90, les bénéfices moraux, sociaux et politiques, à conserver le service national, furent balayés face aux arguments de nature économico-comptable, type coût/efficacité, prônant la mise en place d’une armée de métier. La première guerre du Golfe (1990-1991) fut déterminante de ce point de vue, notamment en termes de capacité opérationnelle :
- L’armée Britannique, forte de 150.000 hommes, envoya sur place un corps expéditionnaire de 35.000 hommes, tandis que l’armée Française de conscription forte de 280.000 hommes, ne put engager que 12.500 hommes sur le théâtre d’opération.
- Flexibilité, opérationnalité, capacité de projection, économies sur les charges fixes et variables, le concept d’une armée de métier s’est finalement imposé dans l’esprit d’une technocratie politico-militaire « otanisée ». A cette vision technocratique, se greffait le constat d’un monde unipolaire. Les politiques, comme les militaires, pensaient comme définitivement acquise l’idée d’une fin de l’histoire que parachevait la puissance désormais sans rivale des Etats-Unis.
Le temps des armées de projection au service de l’impérialisme américain :
Ces armées projetées furent conçues dans un premier temps, en tant que force d’intervention extérieure au service d’une politique impériale, celle de la « Pax Americana », dont la doctrine suivit la chute de l’empire soviétique. Cette politique impérialiste reposait sur deux volontés antagonistes, l’une moralisatrice, cherchant à imposer au monde son « modèle de démocratie », l’autre prédatrice, s’emparant le cas échéant, des richesses pétrolières et gazières du pays envahi (ce qui fut le cas pour l’Irak qui dû subir le double service d’une démocratie douteuse et d’une prédation exorbitante).
Une telle politique présupposait, moyennant quelques soubresauts, une paix durable sous l’aile protectrice de l’aigle américain.
Cette doctrine impériale est aujourd’hui d’autant plus à reconsidérer que la situation géopolitique du monde s’est considérablement transformée en devenant politiquement comme militairement multipolaire, et économiquement comme financièrement globalisée.
Des guerres symétriques et conventionnelles aux guerres asymétriques protéiformes en termes d’engagement :
A une guerre commencée de manière conventionnelle en 2003, en Irak, succéda très vite un conflit asymétrique dans lequel l’armée U.S. dut faire face à deux types d’adversaires, les actions terroristes islamistes d’Al Qaida, et à s’interposer dans une guerre civile d’intensité variable, entre Sunnites, Chiites et Kurdes.
Avec le retour de la Russie sur la scène internationale, ainsi que la montée en puissance de la Chine accédant progressivement au rang de superpuissance, enfin avec la percée de puissances régionales (Iran, Turquie, Pakistan, Inde), la multipolarisation du monde devenait une nouvelle réalité géopolitique. Ceci eut pour conséquences, qu’entre guerre et paix, la différence de situation fut de moins en moins nette et de plus en plus poreuse. On put distinguer alors une grande variété de modèles de guerres, comme des opérations de maintien de la paix, de nouvelles formes fluctuantes, voire ponctuelles de coalitions internationales, des opérations de contre-insurrections (par exemple en Afrique subsaharienne), enfin des opérations anti-terroristes, partout dans le monde.
Une typologie à triple composantes (guerre civile / guérilla / actions terroristes), est apparue, générant en pratique des périodes floues entre guerre et paix, psychologiquement et socialement destructrices, au sein des pays atteints par ces formes nouvelles de violence, quelle qu’en soit l’origine.
Le type de triple conflit interne existe aux portes de chez nous, suite à l’éclatement de la fédération Yougoslave, et à la création de l’Etat du Kosovo, création soutenue par l’union européenne et par les Etats-Unis. Cet Etat-voyou est à ce jour impliqué dans un grand nombre d’actions criminelles et terroristes en Allemagne, en Italie, et en France.
L’asymétrie est devenue le mode dominant des violences tant formelles qu’informelles. La France quant à elle est aussi concernée, depuis son engagement au Liban en 1978, sur son propre sol par la menace directe d’actions terroristes, et de situations nouvelles de violences.
La fin d’un modèle de citoyenneté partagée et le nécessaire retour à la défense d’une patrie menacée :
Cette situation géopolitique influe sur la sécurité de la France comme pour celle des autres pays d’Europe, d’autant que les actions terroristes ne sont pas les seules formes de violence formelles.
Les frontières extérieures de l’Europe de Schengen, tant au sud qu’à l’est, sont perméables et soumises à des pressions migratoires multiples. Ces phénomènes migratoires permettent à un flux de mouvements organisés de transiter dans toute l’union européenne, prenant ainsi des formes de submersion informelles, instrumentalisées ensuite comme formes actives de subversion en vue d’actions terroristes.
Le groupe terroriste Daesh a structuré ainsi des réseaux actifs et dormants dans toute l’Europe, recrutant des volontaires, dont la majorité provient des banlieues Françaises.
A ces groupes terroristes, il convient d’ajouter, ce qui est à considérer comme un type nouveau de conflits internes, qui se définissent en tant qu’action criminelle organisée de violation de droits humains s’appuyant sur une économie criminalisée.
A ces pressions aux frontières de l’Europe, dont les démographes nous disent qu’elles ne font que commencer, s’ajoutent les pressions communautaires, de la part de populations d’origine étrangère disposant d’assises territoriales de plus en plus importantes au sein des pays européens, et dont le contrôle échappe toujours plus à l’autorité comme aux administrations publiques.
Dans le cas de la France, selon l’expression bien connue ce sont « les territoires perdus de la république ». Ces communautés ont fourni une véritable armée à Daesh. C’est en leur sein qu’ont été recrutés les commandos qui sont passé à l’action en France et notamment à Paris.
Ces actions nouvelles ont nécessité l’intervention des forces armées, montrant par ailleurs que les forces gendarmiques, ajoutées à celles du ministère de l’intérieur, seraient à terme un rempart insuffisant contre les types nouveaux de conflits intérieurs, à portée sociétale et civilisationnelle redoutables qui s’annoncent.
L’engagement sans faille de la Nation devient face à ces circonstances un impératif, si l’on se place dans la perspective d’une politique de restauration nationale et patriotique, ainsi que d’un réarmement moral du Citoyen.
Les « forces professionnelles », qui constituent présentement une garde nationale républicaine de défense et de sécurité intérieure incluant la gendarmerie et les forces du ministère de l’intérieur, se heurtent dans le cadre de leur mission habituelle à une double hostilité latente et bien réelle, ainsi que l’a montré la révolte des « Gilets Jaunes », non seulement de la part des publics allogènes, mais aussi de la part des classes populaires Françaises (le Peuple de France). Les uns comme les autres, ne voient que les forces de répression d’un régime, au lieu d’y voir des forces de défense et de protection des Citoyens et du Peuple.
Le problème de la sécurité intérieure est devenu plus que jamais un problème politique.
L’idée qu’il faille deux entités distinctes, l’une consacrée à la défense de la souveraineté de l’espace national contre des agresseurs : l’armée, tandis que l’autre aurait pour mission de protéger les institutions, les Citoyens, et de garantir la paix intérieure, ne tient que lorsque le Peuple reconnaît, comme découlant de sa volonté, les institutions et le pouvoir politique en place.
Dès lors que les institutions sont verrouillées par un pouvoir politique qui, pour sa survie n’espère plus que dans la violence de l’Etat, sans que le Peuple Citoyen ne puisse trouver aucune issue démocratique à cette situation, délégitimise un pouvoir transformant les forces de sécurité intérieures en tant que forces de répression et d’oppression.
Le concept de forces de l’intérieur, constituées de soldats-Citoyens, reprend donc tout son sens devant ces nouvelles formes de menaces visant l’intégrité, de même que l’inviolabilité du territoire national.
La conscription d’une classe d’âge, en regard du réarmement moral et patriotique nécessaire pour toute une génération, redevient dès lors une question sociale et politique de premier plan. L’objectif est ainsi d’assurer un minimum de cohésion sociale et nationale, que viendra renforcer un rite de passage et de mixage sous l’uniforme. Une garde nationale Citoyenne, relevant exclusivement du ministère des armées, dont l’encadrement serait confié à des militaires de carrière, viendrait s’ajouter aux forces déjà constituées d’une armée de métier. Cette armée de l’intérieur, dont les missions pourraient être élargies par rapport aux missions actuelles relevant de la défense civile, serait alimentée par le dynamisme autant que par les motivations implicites ou explicites des conscrits, qui rappelons-le feront le choix des armes pour défendre la communauté nationale. Ces conscrits et conscrites associeraient ainsi à leur service militaire les valeurs Citoyennes qui feraient d’eux réellement des fils et des filles au service de la Nation. Cette garde Nationale refondée, dont la popularité bien gérée et décomplexée, offrirait au Peuple Français un gage de réconciliation, de considération, et aussi d’unité, auxquelles les forces actuelles de police, comme de gendarmerie ne peuvent prétendre.
Un Peuple, pour être en phase avec son armée, doit en être le géniteur et le rester.
On ne peut en aucune manière traiter le Peuple en tant qu’ennemi de la Nation, car
« La Nation, c’est le Peuple ».
Source: Lire l'article complet de Strategika