« Le Front populaire, aujourd’hui comme hier, c’est la dernière tentative du Système pour échapper à la Révolution nationale ! » (Alain Soral)
En politique, une erreur dans la stratégie peut mener à l’errance. On l’a vu avec le Parti socialiste depuis que François Hollande a montré toute l’étendue de son incapacité de 2012 à 2017. Le premier secrétaire du PS, roi des courants, des congrès, des motions et des synthèses, était de manière évidente et douloureuse en surclassement au poste de président de la République. Pour qu’un parti rafle la mise, il faut qu’il ait une ligne claire, cohérente, en adéquation à la fois avec les militants et une majorité de Français, ou alors d’électeurs de son camp élargi.
Nouvelles frontières
Depuis l’explosion du jeu politique en mai 2017 due à la victoire du candidat néolibéral Macron, à cheval entre la gauche et la droite de gouvernement, les partis se sont reformés sur des frontières plus nettes. Le rapprochement de la motion Royal-Colomb en 2007 avec le Modem de Bayrou a fait sortir Mélenchon et Dolez du PS, et le sénateur socialiste du Grand Orient est allé créer un parti de gauche. Trois ans plus tard, la reconstruction des nouvelles forces politiques est presque achevée : la droite de gouvernement est faible, le PS inexistant, le PC agonisant ; seules tiennent trois formations, qui se partagent 70 % du gâteau électoral : le parti du Président, le parti de la finaliste malheureuse de 2017, et le parti du dernier sur le podium, toujours en 2017. Macron, Marine et Mélenchon polarisent les votes et l’attention, que ce soit du public ou des journalistes.
Cependant, en politique, il n’y a pas que les partis. Si les partis qui constituent le paysage du même nom ne recouvrent pas correctement ou pleinement les aspirations des Français, c’est-à-dire les tendances ou les besoins des gens, alors ils vont prêcher dans le vide. C’est le cas du PS qui continue à jouer sur la corde antiraciste des années 80, alors que l’immense majorité des Français en a marre de la préférence antinationale. Cette simple erreur de positionnement explique l’effondrement électoral de celui qui a été longtemps le premier parti de France en matière d’élus.
Trio principal et trio secondaire
Les partis ne peuvent pas recouvrir toutes les tendances existantes, c’est pour cela qu’il y a les mouvements. Un mouvement est un pré-parti, un positionnement politique qui n’est pas encore structuré au point de prendre pied dans le grand jeu et d’envoyer des candidats aux élections, qu’elles soient régionales ou nationales. Et aujourd’hui, malgré la refondation des partis et l’émergence des trois grandes forces pré-citées, il faut admettre qu’il y a en France une incroyable créativité en matière idéologique. C’est l’effet Macron, l’homme qui a brisé les lignes (à la Chevènement), mais certains mouvements idéologiques n’ont pas attendu Macron pour exister. Quels sont-ils ?
Là encore, seuls trois mouvements principaux se détachent : d’abord une gauche de la gauche qui se rallie plus ou moins à La France insoumise et incarnée par la mouvance Le Média-Branco-QG (d’Aude Lancelin). Ce courant n’est pas nouveau en soi ,mais il est né de la mort du PS et des ruines du PC. On y retrouve une gauche non libérale, voire antilibérale, mais pas encore nationale (le nationaliste de gauche Kuzmanovic a été éjecté de LFI). En face, on trouve une gauche à la fois sociale et nationale, c’est le mouvement Égalité & Réconciliation d’Alain Soral. Nous en connaissons tous la ligne et les valeurs, elles sont extrêmement claires. Et le troisième mouvement est celui qu’on pourrait appeler le national-sionisme, incarné par les Zemmour, Bercoff et autres Goldnadel.
Alors que les trois principales forces politiques structurées LFI, RN et LREM sont adossées aux médias mainstream, qui les relayent abondamment, en éliminant de fait tout ce qui peut apparaître à leurs marges, les trois mouvements secondaires sont eux adossés à l’Internet. Et le basculement de l’audience des médias mainstream à l’Internet augure un affaiblissement des trois forces principales au profit des trois forces secondaires, qui ont le vent en poupe : c’est là que se forgent les idées nouvelles et surtout là où a lieu le débat d’idées.
On remarque en passant que les trois grands partis s’appuient et se nourrissent du débat foisonnant entre les trois forces secondaires, chaque parti s’inspirant d’une des tendances nouvelles : le RN du national-sionisme, LFI du socialisme antinational. Seule LREM n’a pas d’ancrage sur le Net, ce qui signifie que ce parti n’a pas d’avenir, tout simplement, ou qu’il a été créé d’en haut et non par le bas, ce qui est équivalent. Autrement dit, tout ce qui est mal défini ou mal positionné sera bousculé, déchiqueté par les autres forces plus structurées ou mieux appuyées sur un socle populaire.
Que vient faire Onfray et son Front populaire dans cette histoire ?
C’est là où intervient l’ingénierie sociale Onfray. Pourquoi ingénierie Onfray ? Parce que la raison d’être de son mouvement, qui vient s’ajouter aux trois mouvements secondaires précédemment définis (socialisme antinational, socialisme national et national-sionisme) est de remplacer E&R, ou d’affaiblir son assise populaire. Malheureusement, l’idée de l’ingénierie Onfray, comme toutes les ingénieries, ne vient pas d’en bas, même si Onfray a une vraie base de lecteurs, ce qui ne veut pas dire d’électeurs.
« La pensée dominante ne respecte pas ce qui n’est pas elle et traite toute opposition sur le mode du mépris, de la caricature ou de l’invective. La “reductio ad Hitlerum” fait la loi. On insulte, on caricature, on déforme, on méprise, on censure, on falsifie, on présente comme intox des infos et comme infos des intox… Nous souhaitons faire entendre une voix alternative » (Onfray dans Le Monde)
De plus, en relançant de manière artificielle le grand rêve de l’axe rouge-brun, lancé par l’alliance provisoire entre un PCF en recherche de renouvellement et une nouvelle droite qui découvrait le social en 1990, Onfray oublie une chose : c’est que et le PCF et la Nouvelle Droite se définissaient comme non sionistes, sinon anti-impérialistes, surtout au moment de la première guerre du Golfe. Une première résistance française à l’Empire, qui a profité de la chute de l’URSS pour bousculer et refonder l’ordre mondial pendant 15 ans, avant de s’essouffler. Et de s’arrêter, voyant alors les puissances chinoise et russe reprendre du poil de la bête.
« Près de vingt ans après avoir lancé l’Université populaire de Caen pour contrer les idées de Jean-Marie Le Pen, Michel Onfray se voit … adoubé par son héritière, Marine Le Pen ». La trajectoire du mec… https://t.co/5637BKFofw
— Tristan Mendès France (@tristanmf) May 19, 2020
Si l’union des populismes est une option intéressante d’un point de vue électoral (voir le coup d’éclat Salvini-Di Maio en 2018 en Italie), en France, l’axe rouge-brun est la bête noire des sionistes. Si les Russes et les Chinois n’ont pas cette résistance profonde, c’est aussi parce que le sionisme y est moins implanté que chez nous. Car l’alliance du national et du social, c’est l’assurance d’éjecter le sionisme de nos organes de décision, qu’ils soient démocratiques ou occultes.
Alors, pourquoi ne pas applaudir la motion « Onfray » ?
Tout simplement parce qu’Onfray n’est pas antisioniste, il le dit de manière indirecte mais très claire dans ses récentes déclarations sur Causeur :
« Moins une religion impose et plus elle laisse de place à la raison, plus je la place au sommet du classement que vous me proposez… Là encore ce que je reproche à la religion c’est quand elle se fait coercitive et qu’elle enseigne des fariboles ! Le judaïsme ne cherche pas à convertir, il me va donc très bien ; le christianisme cherchait à convertir mais il n’en a plus les moyens, donc il me convient ; en revanche l’islam revendique clairement l’universalisation de sa doctrine et, comme je suis concerné et que je ne suis pas antisémite, homophobe, misogyne, phallocrate, belliciste – des “valeurs” selon nombre de sourates du Coran, il est en effet plus à craindre. »
Nous avons donc affaire à un national-sioniste de gauche qui se déguise en rassembleur des populismes prudents, ce qui est plus de l’ordre de l’erreur idéologique que de l’imposture politique. Le vrai nationalisme, on le sait, doit aller jusqu’à l’antisionisme. De la même façon, le vrai socialisme est antisioniste, et Proudhon est là pour le démontrer.
Et c’est peu de dire que M. Onfray aime jouer avec les ambiguïtés. « Populiste » et « anarchiste proudhonien », selon ses propres termes, il aime provoquer sur des thèmes ultrasensibles comme la race ou les religions. Quitte à écrire des lignes très loin de la gauche libertaire dont il se réclame. Ainsi, en 2015, dans Le Point, il consacre un petit texte à son éditeur, Jean-Paul Enthoven.
Il y décrit l’amitié et l’estime qui lient deux hommes aux antipodes. « Il est urbain et parisien, je suis campagnard et provincial ; il est à l’aise dans le monde des gens de lettres, j’y suis comme un sanglier ; il est un juif libéral cosmopolite, je suis un descendant de Viking enraciné. » Une opposition autour de l’enracinement qu’il reprend dans sa préface au livre Pierre-Joseph Proudhon. L’anarchie sans le désordre, de Thibault Isabel (autrement, 2017), pour différencier l’anarchiste français « issu d’une lignée de laboureurs francs » de Karl Marx « issu d’une lignée de rabbins ashkénazes ». Thibault Isabel qui n’est d’ailleurs autre que l’ancien rédacteur en chef de Krisis, la revue théorique de la Nouvelle Droite. Et l’un des principaux auteurs de Front populaire. (Le Monde)
La référence d’Onfray à Proudhon étonne d’autant plus ! Mais l’intellectuel zappe intelligemment l’antijudaïsme de Proudhon. On récupère ce qu’on peut pour faire son marché. Si Onfray table sur l’inculture des internautes pour réaliser son coup, avec l’aide intéressée des nationaux-sionistes qui ont besoin de ratisser à gauche (ils n’ont pas de troupes), il va falloir contrer l’influence culturelle d’E&R, ce qui n’est pas simple : les gens prennent goût à la vérité, ou, disons, à la justesse.
Conclusion
L’opération Onfray est, sous couvert de réactivation de l’axe rouge-brun ou de l’esprit du CNR, une percée du national-sionisme dans l’espace politico-culturel de gauche pour s’offrir une assise populaire, une respectabilité et éventuellement un candidat pour 2022.
Le Monde, journal socialo-sioniste, ne s’y est pas trompé puisqu’il a réactivé son logiciel anti-rouge-brun :
Autre historien engagé à gauche, Thomas Branthôme est lui aussi « très en colère » contre le philosophe. « Avec sa surface médiatique, il va salir l’idée de souveraineté. L’idée de réunir les deux rives est un mythe des années 1990. Une telle alliance annihile l’idée d’une gauche républicaine antiraciste », assure l’enseignant à l’université Paris-Descartes.
L’historien spécialiste de l’extrême droite Nicolas Lebourg va même plus loin. Pour lui, à chaque fois que la question des « nouvelles convergences » s’est posée depuis la seconde guerre mondiale, elle s’est conclue par une alliance à l’intérieur de l’extrême droite. « C’est finalement assez habituel, dit-il, ces gens-là [comme Michel Onfray] refusent de voir qu’ils ne font pas des convergences, mais qu’ils se rallient. »
Vous aimez les articles d’E&R ?
Participez au combat journalier de la Rédaction
avec le financement participatif :
Source: Lire l'article complet de Égalité et Réconciliation