par Mikhail Gamandiy-Egorov
Au moment où le communément appelé Gouvernement d’accord national (GAN) connait des difficultés de plus en plus importantes dans la guerre civile incessante en Libye, son Premier ministre Fayez el-Sarraj semble vouloir appeler à son secours l’Organisation du traité de l’Atlantique nord.
En effet, le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg, s’est entretenu au téléphone avec el-Sarraj, et a assuré «que l’alliance est prête à contribuer à la défense et à la reconstruction des établissements de sécurité en Libye». Stoltenberg a également ajouté que «l’Otan agirait en Libye en tenant compte de la situation de sécurité et de défense».
Evidemment, la situation est tout de même assez paradoxale, et ce pour plusieurs raisons. Le représentant otanesque parle de «défense et de reconstruction des établissements de sécurité libyens», en faisant mine d’oublier qui avait justement détruit les établissements de sécurité et la stabilité de façon générale de ce pays. Pour ceux qui l’auraient oublié, un rappel s’impose: cela s’est fait dans le cadre justement de l’intervention de l’Otan, en mars 2011, en violation de la résolution 1973 du Conseil de sécurité des Nations unies, que l’organisation atlantiste était pourtant censée faire appliquer.
Depuis, et cela est connu de tous, le pays qui fut longtemps l’un des plus prospères d’Afrique, et qui pouvait se permettre d’accueillir un large nombre de migrants – aussi bien d’autres pays africains, que d’Europe (Roumanie, Bulgarie, Ukraine, entre autres), est devenu depuis l’intervention otanesque synonyme de chaos, d’extrémisme, de terrorisme, de racisme et l’un des terrains les plus fertiles pour l’immigration clandestine – avec en prime le trafic d’êtres humains et l’esclavage pur et simple.
D’autre part, ce qui est anecdotique, c’est que justement le dirigeant du GAN, qui connait parfaitement l’état de son pays depuis ladite intervention, espère obtenir l’aide de cette même organisation ayant détruit son pays. Mais connaissant les intérêts qui le soutiennent, il serait probablement erroné de s’en étonner. Mais les paradoxes ne s’arrêtent pas là.
Enième question à se poser: le GAN possède-t-il encore une légitimité digne de ce nom dans le cadre libyen? Au moment où il contrôle moins de 20% du territoire national, alors que son adversaire en la qualité de l’Armée nationale libyenne (ANL), dirigée par le maréchal Khalifa Haftar, en contrôle justement plus de 80%. D’autant plus, qu’à la différence de la situation syrienne d’avant septembre 2015, en face du GAN ne se trouve pas des éléments de Daech, d’Al-Qaida ou d’autres nébuleuses extrémistes, mais au contraire un leadership militaire opposé aux divers groupes terroristes qui opèrent aujourd’hui sur le sol libyen, et ce depuis la chute de la Jamahiriya de Kadhafi.
Du côté du GAN au contraire, nombre de groupes combattant à ses côtés, sont justement d’obédience extrémiste, et même terroriste. A en croire que l’Otan aurait un faible pour les groupes extrémistes de diverses couleurs. Même si cela depuis la destruction de l’Etat libyen de Mouammar Kadhafi, en passant par la Syrie, n’est autre qu’un secret de polichinelle.
Mais concrètement parlant, l’Otan pourrait-il contribuer d’une quelconque façon positive à la résolution de l’interminable conflit libyen? Pour répondre à cette question, il serait probablement juste d’en répondre à une autre: un pyromane insoignable, pourrait-il sérieusement parlant devenir un pompier professionnel?
Mikhail Gamandiy-Egorov
source:http://www.observateurcontinental.fr/?module=articles&action=view&id=1596
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