par Karine Bechet-Golovko
Grâce à la loi Avia, les parlementaires viennent de remettre entre les mains des GAFA le contrôle du discours en France sur le net, qu’il s’agisse des réseaux sociaux ou des sites. Si la censure s’y portait déjà à merveille, les signalements et blocages intempestifs permettaient déjà, à la fois de limiter la parole et d’inciter à l’autocensure, maintenant elle est organisée pour défendre les piliers de la globalisation, toute critique étant susceptible d’être associée à un contenu haineux ou illicite pour les besoins de la cause – aucune définition objective n’étant ici possible. Le bon vieux temps de la délation reprend ses droits pour imposer par la haine la « tolérance orwellienne », celle qui n’autorise aucune pluralité. Il serait temps de revenir dans le monde réel, la « nouvelle réalité » n’existe pas, il n’y a que le monde dans lequel nous vivons et que nous construisons. Dire qu’il prend une allure assez pitoyable est encore trop faible. Mais, il n’est que le reflet de la tragique régression de la culture politique dans notre société « progressiste ».
Déposée le 20 mars 2019, la proposition de loi devant officiellement lutter contre la haine en ligne, vient d’être adoptée par le Parlement français, après de nombreuses joutes oratoires, qui finalement n’ont rien changé à la donne (vous trouverez ici et les débats et le texte adopté sur le site de l’Assemblée nationale). Le débat sur la personnalité de la député Laetitia Avia, à l’origine de cette perle liberticide globaliste, illustre parfaitement le niveau de la politique française. Si elle ne vous plaît pas (et elle ne me plaît pas), elle a été élue. Sa personnalité ne m’intéresse pas, car les textes qu’elle fait passer survivront à sa carrière politique et c’est ce qui devrait autrement inquiéter. D’autant plus, qu’il s’est trouvé suffisamment d’élus pour le voter. Et eux aussi furent élus. Ce texte devrait plutôt nous inciter à nous interroger sur le niveau de la culture politique dans notre pays – ou en tout cas sur ce qui reste, et de culture, et de politique.
Plus concrètement, 286 des 296 députés LaREM ont voté pour, 1 non votant, 1 contre, 7 abstentions; 98 des 104 députés LR ont voté contre, 4 se sont abstenus; 43 des 46 députés du Mouvement démocrate et apparenté ont voté pour, 1 contre; 27 des 30 députés socialistes se sont abstenus, 1 non votant, 1 pour, 1 contre; 23 des 27 députés UDI, Agir et indépendants ont voté pour, 1 contre, 3 abstentions; 18 des 20 députés du Groupe Libertés et Territoires ont voté contre, 1 pour; les 17 députés du groupe La France insoumise ont voté contre; pour la gauche et les non inscrits voici les chiffres :
Différentes dispositions doivent attirer notre attention. Tout d’abord en ce qui concerne les obligations de retrait. Elle concerne les textes, images ou vidéos constituant des incitations ou faisant l’apologie du terrorisme, de crimes contre l’humanité ou comportant une incitation à la haine, à la discrimination ou à la violence, la pornographie ou la pédophilie. Le danger ne concerne pas les grands classiques, comme le terrorisme ou la pornographie, mais l’interprétation qui peut être faite des autres catégories. Par exemple, publier une parodie sur les passages piétons LGBT à Paris est-ce du bon sens ou une incitation à la haine ou à la discrimination ? C’est une question de point de vue – et c’est bien là le problème de l’application de la sanction. D’autant plus que cela va également concerner les messages dits injurieux envers une personne ou un groupe en raison de sa race, religion, sexe, etc. Si l’on évite l’injure directe, la vulgarité, le reste va également ressortir de l’interprétation.
Or, quand le notifiant est une autorité administrative, quand la demande de retirer le contenu fait suite à une décision de justice ou encore à la décision d’une autorité administrative, l’on peut espérer qu’il y ait eu des recours, des appels, des moyens de défense. Mais quand le notifiant est une personne privée, toutes les dérives sont possibles. Car, la décision va reposer sur les GAFA eux-mêmes, qui, en un temps-record, vont devoir examiner la notification et son bien-fondé. Or, l’on voir déjà comment fonctionne Facebook, ses blocages et ses pseudo-examens. Il s’agit d’une parodie d’objectivité, sans aucune garantie réelle pour l’auteur de la publication. Les exigences posées par la loi sont totalement décalées de la réalité et ne servent qu’à construire une illusion confortable. En fait, ce sont les géants américains du net et les opérateurs privés qui vont pouvoir réguler le discours en France.
Ensuite, les contenus manifestement illicites doivent être retirés par l’opérateur dans les 24h, « après notification par une ou plusieurs personnes« . Les coups bas vont pleuvoir! Mais, les contenus retirés doivent être conservés un certain temps, car ils peuvent servir pour une action en justice contre l’auteur. Lorsqu’il s’agit d’infraction grave classique (terrorisme, pédophilie, crime contre l’humanité, etc), c’est on ne peut plus normal. Il est toutefois inquiétant d’imaginer les dérives potentielles. L’on a déjà vu que des publications remettant en cause le culte des migrants a provoqué des suspensions de comptes dans les réseaux sociaux, qu’un véritable discours de haine se déverse contre ceux qui s’interrogent sur l’hystérie organisée autour du Covid. Jusqu’où le discours pourra-t-il être policé sous couvert de « lutte contre la haine »? Car dans tous ces combats idéologiques, l’important est de trouver une « bonne cause » officielle. Ce qui est significatif est qu’aucune sanction n’est prévue pour abus de signalisation, quand une amende est prévue pour toute personne présentant sciemment un texte illicite en vue de son retrait.
Enfin, quand les plateformes et opérateurs doivent mettre en place un mécanisme simplifié de notification, l’on attend le réveil trop facile de la culture de la délation. Un texte ne vous plaît pas, un auteur vous dérange ? Rien de plus simple, vous « signalez », autrement dit vous dénoncez, et la machine s’emballe toute seule. Elle vous débarrasse de l’intrus. La dictature de l’agressivité, le fanatisme. Car, dans ce combat, ce n’est pas la tolérance qui va gagner, puisque la tolérance implique de laisser l’autre s’exprimer. Donc cette loi contre la haine, utilise la haine, le fanatisme et l’acculturation des masses pour niveler le discours vers le bas et le garder dans des rails.
Selon Mr. O., le juste milieu entre liberté et efficacité a été trouvé, alors n’oubliez pas que toute répression de masse ne fonctionne qu’avec la collaboration d’une part de la population. A vos boutons, prêt, feu, partez!
source:http://russiepolitics.blogspot.com/2020/05/avec-la-loi-avia-la-regulation-globale.html
Source: Lire l'article complet de Réseau International