par Karine Bechet-Golovko.
Bracelet électronique, application de traçage, de géolocalisation, de distanciation, c’est le nouveau monde du coronavirus, ce fameux « monde d’après », qui après avoir assigné à domicile plus de 4 milliards d’êtres humains se prépare à les mettre sous surveillance, « pour leur bien », « par civisme », « sans les contraindre ». Nous entrons avec joie et bonheur dans un univers carcéral quotidien. Tant que nous nous laissons faire, il n’y a plus aucune raison pour que ça s’arrête. En France, en Russie, en Italie, à Hong Kong, même dans le si petit Liechtenstein et ailleurs, un monde global s’installe. Inhumain, faute de ne pouvoir déjà être sans humains. La dernière liberté de l’homme, celle de renoncer à sa liberté.
Puisque l’on ne peut objectivement pas laisser indéfiniment les gens enfermés à domicile, surtout qu’ils ne sont alors plus suffisamment productifs (et donc finissent pas coûter chers), surtout que les virologues reconnaissent l’évidence – à savoir qu’il est tout à fait possible d’attraper le coronavirus en restant confiné à la maison, il faut bien organiser la sortie. Et passer à l’étape suivante.
Mais la sortie ne peut être brutale, sinon un sentiment de liberté trop fort emporterait tout le travail de conditionnement réalisé à ce jour. Autrement dit, il ne peut s’agir que d’une liberté surveillée, toujours conditionnée au chantage à la soumission – si vous ne respectez pas les mesures liberticides, les chiffres du Covid vont remonter (ce n’est pas compliquer à organiser) et retour à l’assignation à domicile.
Comme avec les détenus : si tu ne respectes pas les règles de la libération conditionnelle, retour au mitard.
Alors différentes solutions de traçage sont prévues. L’application Covid de traçage électronique discutée en France passe mal chez les Français, qui n’ont pas envie de voir leur smartphone préféré définitivement transformé en outil de surveillance. À Singapour d’ailleurs, l’application mobile de surveillance des distances, qui fonctionnait sur la base du volontariat n’a pas fait fureur, les gens étaient peu enclin à la télécharger et lorsqu’ils le faisaient, ils ne l’activaient pas forcément. Et ces applications n’ont de sens que si elles sont utilisées de manière collective.
C’est toute une structure qui se met en place, qui doit effectivement recréer une nouvelle réalité, directement sorties des films de science-fiction techno-totalitaires. Et les idées « novatrices » ne manquent pas. Mais le discours ne peut se permettre la coercition, l’illusion du volontariat et du civisme est mise en avant pour cacher une démarche banalement totalitaire.
Précision du cabinet du Secrétariat d’État au numérique :
« Nous avons pleinement conscience que tout le monde ne possède pas de smartphone, des solutions alternatives sont à l’étude pour que ceux qui n’ont pas cet équipement ou ceux qui ne savent pas bien s’en servir puissent avoir accès à cet outil s’il est déployé ».
Bref, ce n’est pas que les gens ne veulent pas de traçage, c’est qu’ils n’ont pas de smarphone ou ne savent pas s’en servir. Car les gens sont conscients de leur « devoir civique » dans la lutte pour le Covid :
« l’objectif du Gouvernement est que tout citoyen qui souhaite contribuer à casser les chaines de transmission et de propagation du virus puisse le faire, librement ».
La dernière liberté de l’homme, celle de renoncer à sa liberté.
Et la dernière idée est celle du bracelet électronique. La technique existe, puisqu’elle est utilisée en pénale pour les personnes placées en résidence surveillée. En Russie, à Mourmansk, les malades du Covid « relâchés » y sont soumis, pour être tracés (ce qui a provoqué de fortes critiques de la part de députés fédéraux). En Italie, les personnes âgées pourraient en être garnies – elles présentent vraiment un danger public … Hong Kong et la Corée du Sud l’utilisent déjà pour les voyageurs étrangers. Explication en France :
« L’idée est d’avoir un bracelet, ou un autre objet connecté, qui ne soit pas relié au smartphone et permettrait de connaître les personnes croisées par son porteur durant la journée et celles qui se sont rendues dans différents lieux »
Super, ce ne sera pas connecté à votre smartphone. Mais pour savoir qui tu croises, il faut 1) que tous portent ce bracelet électronique et 2) qu’il soit identifié, sinon ça ne peut pas marcher … Donc tous tracés. Et d’ailleurs, c’est un geste civique, pas de quoi s’inquiéter :
« Le but n’est pas de traquer une personne pour savoir si elle est allée à la Poste ou au supermarché mais d’aider les autorités à gérer la circulation du virus. C’est un acte de civisme, comme l’attestation de sortie ».
« Acte de civisme », non pas sanitaire, mais civisme, « comme l’attestation de sortie ». Donc acte de soumission. Nous avons accepté de nous plier à l’attestation de sortie, maintenant la pression monte d’un cran. Si nous acceptons ceci, il y aura encore un cran supplémentaire. Comme l’histoire de la grenouille : si on la jette dans l’eau bouillante, elle saute et se sauve ; si on la met dans l’eau tiède en augmentant progressivement le feu, elle se laisse cuire. La casserole est aujourd’hui sur le feu.
Les virus existeront toujours et les mesures liberticides ne sont jamais temporaires, elles formatent une nouvelle réalité en étant régulièrement intégrées à la législation normale, comme ce fut déjà le cas avec la normalisation des mesures « exceptionnelles » liées à la lutte contre le terrorisme en France. La dernière liberté de l’homme est de renoncer à sa liberté. Voulez-vous renoncer ?
source : http://russiepolitics.blogspot.com
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