Nous assistons à une prolifération croissante de théories écofascistes et eugénistes, qui bénéficient de tout le soutien des grands médias, car elles sont une arme importante dans la guerre contre la capacité de compréhension de la réalité, que ne cesse d’avancer la classe dominante contre la classe exploitée. La guerre d’aliénation, de colonisation des esprits, est un élément fondamental pour le maintien de la situation de profonde injustice sociale et de déprédation contre l’humanité et la planète. C’est la raison pour laquelle est répétée à l’infini l’hypothèse anti-scientifique selon laquelle « l’humain est mauvais par nature », le mantra constant médiatisé dans tous les formats est : « les humains sont la peste, ils méritent le pire ». Cette rengaine est répétée même en pleine pandémie de Covid-19, face aux milliers de morts causées para la combinaison entre Coronavirus et Capitalisme. Des milliers de morts qui auraient pu être évitées, mais se sont produites et se produisent à cause de systèmes de santé précarisés et privatisés (manque d’hôpitaux, de personnel de santé, d’équipements de protection anti-contagion, manque de machines de respiration assistée, etc.). L’ obligation imposée aux travailleurs de secteurs non indispensables d’aller travailler pour préserver les gains du patronat (au détriment de la population), contribue également à l’expansion de la contagion.
Au lieu de dénoncer la responsabilité du système socio-économique capitaliste dans la déprédation et la dévastation de la nature, l’écofascisme promu par la bourgeoisie sème la confusion pour que ne soient pas identifiées les responsabilités concrètes de tant de barbarie. Les théories malthusiennes selon lesquelles c’est en éliminant autant d’humains que possible, que la planète sera « sauvée », ont été abondamment promues, et sont aujourd’hui liées à l’impérialisme le plus raciste, néocolonial et prédateur, liées avec des multinationales minières et énergétiques et même avec le complexe militaro-industriel, qui s’embusquent souvent derrière leurs fondations avec étiquetage « écologique » (dans le comble du cynisme). Les théories eugénistes et autres venins prétendent supplanter la prise de conscience sur la réalité qui nous afflige.
La « peste » pour la planète ce ne sont pas les millions de petits paysans et d’indigènes dépouillés par les multinationales minières et agro-industrielles, ce ne sont pas non plus les travailleurs, la classe exploitée dans un modèle productif aberrant qui dévore nos vies et empoisonne même la nourriture. La peste, c’est la classe exploiteuse et son système criminel dans lequel une poignée accumule des fortunes sur l’exploitation de la classe ouvrière et sur le pillage de la planète. La peste, c’est le capitalisme, système dans lequel même la santé est conçue comme une simple « marchandise », avec les catastrophiques conséquences que nous pouvons ressentir dans notre propre chair.
La peste c’est un système qui promeut (à travers les mass media, propriété de grands capitalistes) la consommation parasitaire ; un système qui permet le crime de l’obsolescence programmée (vieillissement prématuré des choses programmé depuis leur production, pour forcer à en acheter d’autres). La dictature du capital impose toute aberration qui lui soit nécessaire pour accumuler des fortunes, transformant ainsi la planète en dépotoir.
La peste c’est un système dans lequel les moyens de production sont entre des mains privées et non entre des mains collectives. Si les moyens de production étaient entre des mains collectives, nous serions, en tant que travailleurs, ceux qui déciderions ce qu’il faut fabriquer et comment le faire, et le bien de la collectivité prévaudrait et non le profit de quelques-uns. Nous travaillerions dans de meilleures conditions et pendant moins de temps, et il nous resterait du temps pour vivre pleinement, pour étudier et grandir émotionnellement et intellectuellement, personne ne serait privé de conditions de vie dignes. La technologie serait mise au service de notre émancipation et non de notre soumission. La recherche scientifique serait axée sur la recherche de remèdes contre les maladies, et non sur le mensonge criminel de l’obsolescence programmée ou sur le développement des armes. La recherche scientifique ne serait pas subordonnée à la volonté des multinationales, qui empêchent la mise en production de certains médicaments qu’elles n’estiment pas « rentables », car leur objectif est de faire du profit sur la souffrance de millions de personnes.
Si les moyens de production étaient entre les mains de la collectivité, la santé, l’éducation, le logement, la culture, l’harmonie métabolique avec notre mère Nature, seraient des droits universels effectifs, et non des sources de profit pour une poignée, et non des privilèges comme ils le sont, dans les faits, dans le capitalisme. Nous construirions (par exemple) des respirateurs artificiels en suffisance et non des armes. Mais dans le capitalisme, les armes sont indispensables aux États bourgeois pour équiper les forces de répression et réprimer ainsi la contestation sociale contre tant d’injustice ; elles sont également nécessaires à la bourgeoisie pour déclencher ses guerres impérialistes par cupidité. Dans le capitalisme, les hôpitaux, les médecins, le personnel, les moyens, les tests, les équipements de protection contre la contagion sont insuffisants, tandis que les forces de répression sont abondantes et hyper équipées pour réprimer et soumettre. Si la classe ouvrière possédait les moyens de production, aucune épidémie n’emporterait autant de vies, parce que nous déciderions que la santé est la priorité… Mais nous subissons un système capitaliste qu’il nous faut encore abolir.
Le capitalisme pille la nature et l’être humain, dégrade les relations, normalise l’exploitation, érodant la capacité d’empathie au point de tout concevoir comme « jetable ». La peste c’est ce système qui promeut le racisme, le machisme, la xénophobie, l’individualisme, l’hédonisme et tout paradigme d’oppression et de soumission qui soit utile à la bourgeoisie pour diviser la classe exploitée et ainsi perpétuer son oppression. La peste c’est un système basé sur l’exploitation, qui banalise jusqu’à la torture pour que les pratiques qui le soutiennent soient perçues comme « normales ».
La peste c’est un système qui déclenche des guerres impérialistes pour que le capitalisme transnational pille les ressources des pays envahis, provoquant la destruction, des millions de morts, l’exode dantesque des populations… tout en fonction de remplir les poches d’une poignée de criminels capitalistes. « Le capital vient au monde dégoulinant de sang et de boue par tous les pores »[1], écrivait un Monsieur barbu que jusqu’à ce jour les bourgeoisies cherchent à proscrire, en raison de son intelligence lucide mise au service de l’émancipation des peuples. « La découverte des gisements d’or et d’argent d’Amérique, la réduction en esclavage, l’extermination et l’ensevelissement dans les mines de la population indigène, le début de la conquête et du pillage des Indes orientales, la transformation du continent africain en terrain de chasse d’êtres humains noirs afin de les rendre esclaves : tels sont les faits qui marquent l’aube de l’ère de production capitaliste. » écrivait Marx, au sujet de l’accumulation primitive du capital [Ibid.]. Sur le génocide et la spoliation, sur la barbarie de la colonisation, des fortunes colossales ont été accumulées par l’élite aristocratique et bourgeoise européenne, tandis que la bourgeoisie esclavagiste s’est consolidée dans les colonies de peuplement comme les États-Unis. Actuellement, parmi les plus grandes fortunes de la planète, se trouvent encore les descendants des vautours majuscules de l’Histoire coloniale, qui se joignent à des vautours aux racines plus récentes pour poursuivre le pillage.
Le capitalisme transnational poursuit aujourd’hui le pillage de l’Afrique, de l’Asie et de l’Amérique latine, causant génocides et écocides, appauvrissant des millions de personnes… Puis il crée des forteresses autour du butin pillé par les métropoles capitalistes (comme l’Union européenne ou les États-Unis) : l’impérialisme veut extorquer les richesses, mais rejette les personnes dépossédées par sa rapine, les forçant à des trajets migratoires de cauchemar et à subir l’esclavage moderne si elles parviennent à arriver. Des millions de femmes et hommes originaires de la périphérie capitaliste sont acculés, à cause de lois d’immigration qui violent les droits humains, à subir les pires exploitations dans les pays du centre capitaliste, comme travailler aux pièces dans l’industrie agroalimentaire dans des conditions de travail et de logement inhumaines, ou se voir contraintes (dans le cas des femmes) à subir l’exploitation monstrueuse qu’est la prostitution. C’est le pillage des corps humains, consubstantiel au pillage capitaliste des territoires. C’est le fonctionnement d’un système criminel héritier d’une Histoire coloniale, et dont le présent est la continuité sanglante d’un système de classes, où une poignée de milliardaires amassent leurs fortunes sur la base de l’exploitation de la classe ouvrière et sur le pillage de la nature.
La peste ce sont les banques et les organismes usuriers qui font payer des dettes éternelles, illégitimes et odieuses à des dizaines de pays ; tout aussi odieuses que sont les aberrantes « dettes » envers les colonisateurs pour « compenser » la « perte » de leurs colonies [2].
La peste, ce sont les multinationales qui empoisonnent les rivières et détruisent les écosystèmes, qui s’approprient les sources d’eau et commettent des génocides contre les peuples (comme les multinationales BHP Billiton, Glencore et Anglo American qui sont en train d’exterminer le peuple Wayu en Colombie… Pour donner un exemple entre mille). La peste, ce sont les multinationales qui détruisent les forêts et font exploser des montagnes entières, transformant en zones mortes les vertes vallées de dizaines de pays.
Il est superficiel et peu analytique de déclarer « la peste c’est nous : tous les humains », sans faire de distinction de classes sociales, sans mettre en évidence la responsabilité systémique de la déprédation de la nature, sans identifier comme responsables majuscules les multinationales qui ordonnent l’extermination de populations entières par des massacres atroces dans le but de piller leurs ressources (massacres perpétrés par les outils militaires et paramilitaires d’États inféodés au pillage capitaliste) ; il est peu analytique de ne pas pondérer le caractère induit (par la propagande constante) du délirant comportement sur-consumériste. C’est être aveugle, ou mal intentionné, de ne pas discerner les questions géopolitiques… Et pourtant les chiffres parlent : si tous les habitants de la planète consommaient comme un étatsunien moyen, il faudrait 5 planètes Terre [3]. Les États-Unis et l’Union européenne, consomment à eux deux 50 % des ressources de la planète, alors qu’ils ne représentent que 12 % de la population mondiale [4]. On constate clairement que la surconsommation des ressources par une minorité, affecte l’ensemble de la planète. Les États-Unis, l’Europe, l’Australie et le Japon sont à la tête des régions dont l’empreinte écologique par habitant pèse le plus lourd sur la planète, et ce en raison de la consommation frénétique vers laquelle est télé dirigée leur population. La consommation compulsive prétend inutilement être une « compensation » du vide et des frustrations que ce même système génère. Andrew Collier exprime : « Regarder les gens dans une société capitaliste et conclure que la nature humaine est égoïste, c’est comme regarder les gens dans une usine où la pollution est en train de détruire leurs poumons et conclure que la nature humaine est de tousser ». Nous voyons que les niveaux d’aliénation et de dégradation de l’être humain, inhérents au système socio-économique déprédateur sous lequel il vit, deviennent chaque jour plus brutaux. De même, la déprédation des écosystèmes est chaque jour plus brutale (et ce malgré les mièvres pansements de ceux qui prétendent l’éviter sans remettre en cause le système). La déprédation de la nature, la disparition d’écosystèmes et d’espèces, et même la prolifération à un niveau pandémique de maladies zoonotiques, sont inhérentes à la logique et au modèle productif du capitalisme. « La production capitaliste dénature l’interaction métabolique entre l’être humain et la terre »[5]. La « rupture métabolique » provoquée par ce système, entre Mère Nature et ses enfants humains, est profondément aberrante : « Le fait que la vie physique et spirituelle de l’être humain dépende de la nature, signifie que la nature est en relation avec elle-même, car l’humain en fait partie. » écrivait Marx. Et il soulignait : « Le capitalisme tend à détruire ses deux sources de richesse : la nature et l’être humain »[6].
Non, la « peste » ce n’est pas nous « les humains », ainsi de façon abstraite, et sans analyser les rapports de production, la géopolitique et l’existence des classes sociales dans ce système. Ce genre d’approche qui met dans le même sac les oppresseurs et les opprimés, ne cherche qu’à perpétuer cette barbarie. Face à l’écofascisme promu par la bourgeoisie, avec ses théories eugénistes, sa ligne de « tous-les-êtres-humains-sont-mauvais » qui prétend effacer les responsabilités concrètes de la classe exploiteuse, avec ses personnages hyper-médiatisés financés par de grandes multinationales prédatrices, nous, les peuples, nous élevons l’écologie que nous avons toujours pratiquée (souvent même sans l’étiqueter comme telle) : l’écologie avec une conscience de classe, celle de Berta Cáceres et Chico Méndes, celle de tant de militants pour la nature et la justice sociale, toujours en lutte contre la déprédation capitaliste… celle des milliers de personnes qui ont été assassinées par les hommes de main des multinationales, et des milliers et milliers qui continuent de lutter en première ligne.
Depuis la classe exploitée, élevant la conscience de classe et notre amour pour la Terre, nous sommes la nature en lutte pour abolir ce criminel système de classes, basé sur l’exploitation et le saccage.
Cecilia Zamudio
Notes
[1] Marx, El Capital, Capítulo XXIV, Acumulación Originaria
[2] www.reporterre.net/Le-cadeau-empoisonne-de-la-dette-coloniale
“La Banque mondiale est directement impliquée dans certaines dettes coloniales, puisqu’au cours des années 1950 et 60, elle a octroyé des prêts aux puissances coloniales pour des projets permettant aux métropoles de maximiser leur exploitation de leurs colonies. Les dettes contractées auprès de la Banque par les autorités belges, anglaises et françaises pour leurs colonies ont ensuite été transférées aux pays qui accédaient à leur indépendance sans leur consentement”.
www.cadtm.org/Droits-Devants-Plaidoyer-contre-les-dettes-illegitimes
[3] Estados Unidos consumen el 30 % de los recursos mundiales, a pesar de que representan solo el 5 % de la población mundial. www.chicagotribune.com/hoyla-diadelatierra-los-10-paises-que-generan-mas-basura-en-el-mundo-20190422-story.html
5 % de la población mundial, los estadounidenses, producen tres veces más desechos que los chinos y siete más que los etíopes.www.lavozdegalicia.es/noticia/mercados/2019/09/29/humanidad-devora-tierra/0003_201909SM29P2991.htm
[4] La huella ecológica de la UE es equivalente a 2,8 planetas Tierra. La Unión Europea utiliza el 20% de los recursos naturales mundiales, pese a que demográficamente sólo representa el 7% de la población global. WWF y Global Footprint Network, informe “Vivir por encima de los límites de la naturaleza en el mundo” www.awsassets.wwf.es/downloads/wwf_overshoot_europa_esp_.pdf
[5] Concepto de la “fractura metabólica” de Marx, central para una crítica integral al capitalismo: “(La producción capitalista) distorsiona la interacción metabólica entre el ser humano y la tierra. (…) La propiedad de la tierra a gran escala reduce la población agrícola a un mínimo constantemente decreciente, confrontado con un constante crecimiento de la población industrial conglomerada; de esta manera, produce las condiciones que provocan una fractura en el proceso interdependiente entre el metabolismo social y el natural.”. Para Marx: “El hecho de que la vida física y espiritual del ser humano dependa de la naturaleza no significa otra cosa sino que la naturaleza se relaciona consigo misma, ya que el humano es una parte de ella.” (Marx, Manuscritos Económico-filosóficos, 1844): https://n9.cl/6s8d
[6] “La industria a gran escala y la agricultura industrial van de la mano. Si ellas están originariamente distinguidas por el hecho de que la primera deja residuos y arruina a la fuerza de trabajo, y así la potencia natural del ser humano; mientras que la segunda hace lo mismo a la fuerza natural del suelo, ellas terminan vinculándose dado que el sistema industrial aplicado a la agricultura acaba por debilitar a los trabajadores, mientras que la industria provee a la agricultura con los medios para el agotamiento del suelo” (Marx). “Todo progreso de la agricultura capitalista no es solo un progreso en el arte de esquilmar al obrero, sino a la vez en el arte de esquilmar el suelo; todo avance en el acrecentamiento de la fertilidad de un periodo dado, es un avance en el agotamiento de las fuentes duraderas de esa fertilidad […] La producción capitalista sólo sabe desarrollar la técnica y la combinación del proceso social de producción socavando al mismo tiempo las dos fuentes originales de toda riqueza: la tierra y el humano” (Marx, primer tomo de “El Capital”)
www.revistas.flacsoandes.edu.ec/letrasverdes/article/view/2867/2206
www.rebelion.org/por-que-necesitamos-a-marx-ahora-mas-que-nunca/
www.marxismoyrevolucion.org/?p=752
www.herramienta.com.ar/articulo.php?id=1488
www.marxismocritico.com/2017/09/08/marx-naturaleza-y-ambientalismo-fractura-del-metabolismo-social/
www.marxismocritico.com/2014/12/23/marx-y-la-fractura-en-el-metabolismo-universal-de-la-naturaleza/
Source: Lire l'article complet de Mondialisation.ca