La colère monte parmi le personnel soignant après les révélations de l’ex ministre de la santé Agnès Buzyn sur l’absence de préparation du gouvernement face au Covid-19. Durant des semaines le gouvernement a minimisé la menace que représente le Covid-19 afin de tromper les personnels soignants et la population et de justifier sa propre inaction. A présent, un collectif de centaines de médecins porte plainte devant la commission des requêtes de la Cour de justice de la République contre Buzyn et le premier ministre Edouard Philippe pour « mensonge d’État ».
La pandémie a mis en évidence qu’après des décennies de mesures d’austérités menées par les gouvernements successifs, le système de santé a été laissé dans une situation catastrophique. A présent les hôpitaux sont surchargés et dans certaines régions saturés, comme dans le Grand Est. Ceci aurait pu être évité si le gouvernement Macron n’avait pas fait passer les considérations économiques avant les considérations sanitaires.
Courageusement, les personnels soignants s’organisent comme ils le peuvent face à l’afflux de personnes contaminées, en grande détresse sans avoir les moyens nécessaires pour les soigner. De nombreux cas de contamination à l’hôpital sont à déplorer chez le personnel soignant par manque de masque de protection. Le 22 mars, un médecin de l’Oise à la retraite mais volontaire pour aider ses collègues est décédé parce qu’il n’avait pas d’équipement de protection.
Le personnel soignant se sent trahi, et avec raison, par le gouvernement Macron. Comme le souligne l’avocat du collectif de médecin qui a porté plainte, Fabrice Di Vizio au Parisien : «Les masques arrivent, leur a dit le gouvernement fin février, et ils y ont cru. Début mars, quand ils ont compris qu’ils n’auraient pas les masques, on s’est mis à leur raconter qu’ils n’en avaient pas besoin… C’est en réalité un aveu d’impuissance et un mensonge, car la vérité, c’est que nous n’avions pas de stocks!»
Le collectif saisit alors le tribunal administratif le 4 mars. Le gouvernement promet cette fois la fourniture effective des masques. Mais ceux ci n’arrivent qu’au compte-gouttes. L’avocat ajoute que «La colère des soignants était d’autant plus grande qu’ils ont découvert qu’une entreprise française produit des masques… mais pour le compte du ministère de la Santé britannique, qui a passé commande avant la France !»
Les aveux de Buzyn, qui a avoué au Monde avoir informé Philippe de l’urgence sanitaire que représentait le coronavirus dès janvier, et avoir joué une «mascarade» pour tenter de cacher sa crainte de tomber malade dès lors, ont encouragé le collectif à agir.
Pour l’avocat du collectif, «une enquête pénale est désormais indispensable pour connaître l’étendue de l’information que l’on a cachée aux Français et déterminer les responsabilités de chacun dans ce fiasco sanitaire.» L’avocat demande notamment que «les serveurs du ministère soient perquisitionnés».
La plainte vise l’article 223-7 du code pénal, selon lequel « quiconque s’abstient volontairement de prendre ou de provoquer les mesures permettant, sans risque pour lui ou pour les tiers, de combattre un sinistre de nature à créer un danger pour la sécurité des personnes est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende ».
En effet il aura fallu attendre le 23 février pour que le remplaçant d’Agnès Buzyn, Olivier Véran lance la commande d’une dizaine de millions de masques FFP2 qui ne seront disponibles que 3 à 4 semaines plus tard. Nicolas Brillat, directeur de l’un des plus gros fabricants français de masque qui a vu les autorités britanniques passer commande avant la France a assuré que «Ça fait six semaines qu’on dit aux autorités qu’il va y avoir un problème».
Ces derniers jours, il a été révélé dans la presse que la pénurie de masques FFP2 s’explique par le fait qu’ils ne font plus partie du stock stratégique du ministère de la Santé depuis dix ans. En 2009, le nombre total de masques FFP2 atteignait, selon un rapport du Sénat quelque 579.691.625 unités. Parmi ceux-ci, 463 millions relevaient du stock stratégique et 116 millions du stock des établissements de santé. Le décompte émanait de l’EPRUS, l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, dissous en 2016.
En 2005 cinq entreprises avaient été retenu pour produire les masques FFP2, mais en 2011 le ministre de la Santé Xavier Bertrand sous Sarkozy décide d’arrêter le stockage de masque FFP2, obligeant dans certains cas l’arrêt complet des machines alors que le budget de l’EPRUS ne représentait qu’une goutte d’eau dans le budget de la santé.
Ce scandale sanitaire souligne la responsabilité politique et pénale de l’ensemble des partis politiques établis, pour mise en danger de la population. Les centaines de milliards d’euros donnés aux banques pour sauver le système financier en 2008 ont facilité l’accélération des coupes budgétaires initié par tous les gouvernements européens. En France comme ailleurs, le système hospitalier a été durement touché, ce qui explique la saturation des hôpitaux alors que l’on en est encore au début de l’épidémie.
Comme le soulignait la chancelière allemande Merkel, elle suppose que 60 à 70 pour cent de la population allemande sera touchée, mais il ne «faut pas surcharger» les hôpitaux. La politique d’inaction menée aussi en France menace des dizaines de millions de personnes d’une contamination au Covid-19, avec éventuellement des centaines de milliers de morts.
Les travailleurs ne peuvent toutefois se fier au recours à la cour de justice de la République. Il est utile de rappeler la dernière fois que cette cours a été appelée, lors du scandale du sang contaminé dans les années 1980 et 1990. Le Centre national de transfusion sanguine (CNTS) a sciemment distribué à des hémophiles, de 1984 à la fin de l’année 1985, des produits sanguins dont certains étaient contaminés par le virus du sida.
L’Inspection Générale de l’Administration du Santé sollicité a conclu dans un rapport que les considérations de protection sanitaire avaient été subordonnées aux considérations économiques. L’ancien Premier ministre socialiste PS Laurent Fabius et les anciens ministres PS Georgina Dufoix et Edmond Hervé ont comparu devant la Cour de justice de la République pour «homicide involontaire». Finalement, grâce à une ré-écriture des lois, Georgina Dufoix et Laurent Fabius furent innocentés.
Aujourd’hui, la politique de la bourgeoisie est même plus criminelle. Il revient à la classe ouvrière européenne et internationale de lutter pour se protéger contre cette épidémie et ôter le pouvoir à une classe dirigeante qui a démontré de manière irréfutable sa criminalité politique.
Anthony Torres
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