Eco-populisme ou écologie des peuples

Eco-populisme ou écologie des peuples
Eco-populisme ou écologie des peuples

Article de Guillaume Le Carbonel paru dans notre numéro 87 et encore disponible ici

L’excellente revue Éléments, dans son numéro 177 d’avril-mai 2019, avait publié un dossier fort intéressant sur les 36 familles du populisme. Aucune ne faisait allusion à l’écologie. S’agissait-il d’un oubli ou bien d’une évidence ?

Définit par Alain de
Benoist comme une défiance des classes populaires envers les élites,
le populisme est aujourd’hui la tarte à la crème de l’analyse
politique. On le sort à tout bout de champs et dans toute sorte de
circonstance. Est-ce même une véritable stratégie politique ?
Une certitude est là : Mathéo Salvini a montré très
récemment les limites de ce jeu de dupes. Autre certitude, le
populisme à partie liée avec le combat électoral qui reste à nos
yeux bien insuffisant.

Il est une évidence
qu’on ne martèle guère suffisamment dans les rangs identitaires :
notre combat politique est une guerre à mort contre le capital et la
société marchande. C’est une chose dont il faut être intimement
convaincu. Ceux qui pensent qu’un réformisme de la logique
capitaliste est possible se trompent. On ne réforme pas un système
viscéralement mortifère.

Certains penseurs
radicaux ont très bien défini ces phénomènes. Notre société
postmoderne est minée de l’intérieur par une économie de
croissance qui ne tourne plus que sur elle même. Il y a longtemps
déjà que la valeur d’usage a laissé place à la valeur d’échange,
que le système génère l’accumulation de marchandises non utiles et
seulement destinées à être vendues. Ce système, fondé sur la
démesure, ne connaît plus aucune limite dans aucun domaine. Nous
sommes entrés dans l’ère de la croissance pour la croissance, de
l’accumulation illimitée du capital que le phénomène de
globalisation ne fait qu’accentuer.

Serge Latouche1 a montré que la société de croissance se base sur toute une série d’illimitations : dans la production (destruction des ressources), dans la consommation (créer artificiellement des besoins) ou encore la production de déchets.

Il en est une qui
pourrait passer pour secondaire et pourtant : l’illimitation
politique et culturelle revêt une importance capitale. C’est la
destruction méthodique de toutes les cultures, l’arasement des
frontières et des barrières qui forment les identités, au nom de
l’homogénéité planétaire.

Toutes les coutumes et
traditions, nous dit Hervé Juvin2,
toutes les frontières et structures sociales ne sont que des
« empêchements à commercer librement ». Le capital
allié au progressisme effréné nous entraîne vers un marché
mondial des hommes.

L’immigration de masse
n’est pas un hasard. La croissance repose sur une création
anthropologique : l’homo économicus, sorte de
consommateur illimité par addiction consumériste. Seuls ses
intérêts le portent, il est le fruit de ses seules volontés et
désirs. Notre époque est celle de l’avènement d’un homme nouveau,
sans racines, sans origines, sans liens communautaires, rappelle
Hervé Juvin. C’est tout l’intérêt du capital que de déplacer les
individus là où il y a du travail et là où ils seront utiles. Le
capital n’aime les êtres humains qu’en tant que marchandises
rentables.

Serge Latouche dénonce
ainsi ce qu’il nomme le piège de la mondialisation : sa
prétention à se présenter comme une culture de toutes les cultures
et à dissimuler ses véritables intentions. La culture universelle
n’existe pas. La culture n’existe que si elle est plurielle. De même,
l’identité n’existe que dans l’altérité. Comme le dit Alain de
Benoist, « l‘universel s’atteint à partir de la
singularité 
»3.
La culture mondiale est un leurre.

Latouche brocarde la
« fureur universaliste », phénomène ethnocidaire
qui détruit la réalité d’une société humaine plurielle.
Jean-Claude Michéa ne dit pas autre chose lorsqu’il évoque « la
métaphysique du progrès et du sens de l’histoire
 » à
l’origine de la gauche historique4 :
c’est le triomphe de l’idéologie de la pure liberté qui égalise
tout. C’est aussi tout le problème des nouvelles thèses
transhumanistes.

Qu’on ne s’y trompe pas !
L’immigration qui touche tous les pays européens est une immigration
de remplacement destinée à re-dynamiser économiquement les régions
vieillissantes et à accueillir le « trop plein » des
populations d’Afrique du nord et subsaharienne. Il s’agit bel et bien
d’une substitution de main d’œuvre. L’immigré coûte moins cher
et vient d’un continent de soumission, nous dit Francis Cousin. Hervé
Juvin cite à cet égard les mots de Peter Sutherland datant de 2012
et souhaitant « détruire l’unité interne des nations
européennes
 » afin de faciliter le commerce mondial. Mais
cette immigration n’est qu’un symptôme. Il est visible que ces
mouvements de réfugiés dont les médias ne cessent de parler ne
sont organisés que pour casser le coût du travail. MEDEF et France
Insoumise même combat.

Ce que tout militant
identitaire doit comprendre c’est que s’opposer à l’immigration
massive c’est combattre le système capitaliste et sa logique de
l’accumulation illimitée. Une opposition identitaire (éloge de la
diversité et maintien des identités) se doit de penser un
dépassement du capitalisme et de produire une éco-défense des
peuples.

Jean Mabire résumait fort bien cette idée fondamentale : « La véritable écologie, c’est de sauvegarder les baleines. Mais aussi les Touaregs et les Zoulous, les Basques et les Serbes, les Flamands et les Bretons, les Écossais et les Estoniens »1. Il faudra bien un jour qu’on s’intéresse d’un peu plus près à ces Nations sans État parsemées sur le vieux continent. L’Europe des peuples est loin d’être réalisée. Bretagne, Pays de Galles, Écosse, Cornouailles, Galice, Occitanie, Corse, Frioul, Ladins, Frise, Flandre, Tyrol du sud, la liste est longue des peuples en quête de reconnaissance.

La question du monde dans lequel nous souhaitons vivre reste posée. Le lien social et le principe communautaire ne pourront se retrouver qu’en dehors d’une logique d’exploitation des classes populaires par des minorités contrôlant la richesse, le pouvoir et l’information.

Nous savons depuis le
rapport du Club de Rome de 1972, que la poursuite indéfinie de la
croissance est incompatible avec les fondamentaux de la planète.2

Aujourd’hui, le clivage
n’est plus entre la gauche et la droite. Dans Les mystères de la
gauche,
Michéa a démonté cette mise en scène que les partis
du système ont tout intérêt à maintenir. Le clivage se situe
désormais entre, comme le dit Alain de Benoist, « entre
ceux d’en bas et ceux d’en haut 
». Est-ce là une forme de
populisme ?

Sortir
de la logique de l’accumulation illimitée du capital, destructrice
des identités, lutter contre « les drogués du
productivisme », c’est sortir de la société de croissance au
profit d’une société soutenable, plus humaine, créatrice de lien
social et respectueuse de la biosphère. Serge Latouche parle d’une
société de « sobriété volontaire ».

Le
capitalisme s’est mué en système global. C’est sur tous les fronts
que nous devons l’attaquer.

C’est à ce prix que nous
pourrons recouvrer la plénitude de notre identité que le capital
cherche à nous soustraire. L’éco-populisme nous semble à cet égard
bien fade face aux enjeux décisifs des années qui viennent.

Guillaume Le Carbonel

1L’âge
des limites, Mille et une nuits, 2012

2La
grande séparation, Gallimard 2013

3En
finir avec « le  racisme », Éléments N°149
octobre/décembre 2013

4Les
mystères de la gauche, Climats 2013

1La
Torche et le Glaive, éditions Libre Opinions, 1994.

2Serge
Latouche, Petit traité de la décroissance sereine, Mille et une
nuits, 2007

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Source: Lire l'article complet de Rébellion

À propos de l'auteur Rébellion

Rébellion est un bimestriel de diffusion d’idées politiques et métapolitiques d’orientation socialiste révolutionnaire.Fondée en 2002, la revue Rébellion est la voix d’une alternative au système. Essentiellement axée sur les sujets de fond, la revue est un espace de débats et d’échanges pour les véritables opposants et dissidents. Elle ouvre ses colonnes à des personnalités marquantes du monde des idées comme Alain de Benoist, David L’Epée, Charles Robin, Pierre de Brague, Thibault Isabel, Lucien Cerise … Rébellion se veut également un espace « contre-culturel » au sens large (arts, littérature, musique, graphisme).

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